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Full text of "Bulletin de la Société nivernaise des lettres, sciences et arts. Table des volumes XI à XX"

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BULLETIN 


DE  LA 


r     . .     r 


SOCIETE  NIVERNAISE 


DBS 


LETTRES,  SCIENCES  ET  ARTS 


NEVERS, 


G.     YALLIERE,      IMPRIMEUR 

Avenue  de  la  Gare^  24. 


BULLETIN 


SOCIÉTÉ  NIVERNAISE 


LETTRES,  SCIENCES  ET  ARTS 


TROISIEME  SEEIE.  -  TOME  IX'.  -  XIX'  VOLUME  DE  U  COUECllO» 


A  NEVERS 
Chkz  U.  MAZBBOK,  uBaAiBE  ds  la  SociAté,  hvk  dd  Commuct 


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SOCIÉTÉ  NIVERNAISE 


DES    LETTRES,    SCIENCES   ET   ARTS 


COMPOSITION  DU  BUREAU 

MM.  René  de  Lespinasse,  président. 
Henri  de  Flamare,  vice-président. 
Paul  Meunier,  secrétaire. 
Gaston  Gauthier,  pro-secrétaire. 
Edmond  Duminy,  bibliothécaire-archiviste, 
de  Saint- Venant,  conservateur  du  musée  de  ïa  Torte^du-Croux. 
G.  Vallière,  trésorier, 

MEMBRES  D'HONNEUR 

Mgr     l'EVÊaUE  DE  NeVERS. 

MM.  le  Préfet  de  la  Nièvre. 

le  Président  du  Tribunal  civil. 

USTE  DES  MEMBRES  TITULAIRES 
MM. 

Alxard  (l'abbé^,  curé-doyen  de  Pougues-les-Eaux.  —  29  mai  1890. 
Akchald  (comte  d') ,  château  de  Sauvages ,  par  Beaumont-la-Ferrière. 

—  3i  juillet  1890. 
Andrieu  (Joseph),  rue  de  TOratoîre,  à  Nevers.  —  27  juin  1901. 
Armaillé  (vicomte  René  d*),  château  du  Tremblay,  à  Vandenesse.  — 

2^  novembre  1900. 
AssiGNY  (Henry  d';  iji^,  à  Nevers.  —  7  juillet  1868. 

Barrau  (Léon  d'Abbadie  de) ,  château  du  Chazeau ,  par  Imphy.  •— 

24  juin  1886. 

Barreau  (Joseph),  à  Pont-Saint-Ours,  commune  de  Coulanges.  — 

25  novembre  1897. 

Baudot,  à  Lanty,  par  Rémilly,  —  29  novembre  i888. 


VIII    — 

MM. 

Bayle,  notaire  à  Ncvers.  —  29  novembre  1900. 

Benoist  d'Azy  (vicomte  Paul),  château  de  Paye,  commune  de  Verntuil. 

—  17  juin  1897 

Benoist  d'Azy  (baron  Denys),  château  du  Vieil- Azy.  —  29  dé- 
cembre 1898. 

Bexoist  d'Azy  (baronne  Denys),  château  du  Vieil-Azy.  —  29  no- 
vembre 1900. 

Benoist  d'Azy  (comte  René),  à  Saint-Benin-d'Azy. —  29  novembre  1900. 

Benoist  d'Azy  (comtesse  René),  —  — 

Bert  de  La  Bussière  (Antonin),  â  Pougues-les-Eaux.—  26  juillet  1894. 

Berthier-Bizy  (baron  Charles  de),  à  Nevers.  —  $  mars  1874. 

Berthier-Bizy  (comte  de),  château  de  Bizy,  par  Pougues-les-Eaux.  — 
31  octobre  1889. 

Bide  (docteur),  professeur  à  l'école  de  médecine,  à  Clermont-Ferrand. 

—  30  octobre  1890. 

Blandin  (Frédéric),  propriétaire  à  Nevers.  —  4  février  1869. 

B01GUES  (Joseph),  à  Brain,  par  Decize.  —  27  octobre  1898. 

BorriAT,  curé-archiprêtre  de  la  cathédrale,  à  Nevers.  —  27  avril  1882. 

BoNNEAU  DU  Martray  ^,  inspecteur  général  honoraire  des  ponts  et 
chaussées,  3$,  rue  de  Béthune,  à  Versailles.  —  7  octobre  187$. 

BoNNEAU  (Paul),  avocat  à  Clamecy.  —  27  novembre  1890. 

BoucoMONT  (Antoine),  propriétaire  à  Asnières  (Seine).  —  25  no- 
vembre 1897. 

BouTROUX  (Paul),  propriétaire  â  Nevers.  —  31  juillet  1884. 

Boyer,  à  Saint- Amand-en-Puisaye.  —  27  juin  1901. 

Breuil  (comte  Jean  de),  château  de  Réconfort,  commune  de  Saizy. 

—  28  octobre  1897. 

Bruneau  (l'abbé),  curé  d'AUigny-en-Morvan.  ^  26  juin  1884. 
BusauET,  directeur  des  mines,  â  La  Machine.  —  6  novembre  1873. 

Cachet  (l'abbé),  curédeSaint-Jean-aux-Amognes.  —  29  novembre  1894. 
Cassan  (l'abbé),  curé  de  Beaumont-Sardolles.  —  3o  octobre  1902. 
Chabannes  (comte  Henri  de),  au  château  de  la  Tourette,  par  l'Arbresle 

(Rhône).  —  26  janvier  1888. 
Chabot  (Abel),  château  de  Sauvigny,  par  Nevers'.  — 27  juillet  1893. 
Mn»e  Chabot  (Abel),  château  de  Sauvigny,  par  Nevers.  —  27  juillet  1893. 
Chapoy  (l'abbé),  ancien  curé  d'Aunay.  —  30  août  1872. 
Charant  (colonel  de),  O.  *,  à  Montargis  (Loiret).  —  27  juillet  1882. 
Charrier  (l'abbé  Jules) ,  aumônier  de  la  Sainte-Famille,  â  Nevers. 
Chastellux  (comte  de),  château  de  Chastellux-sur-Cure  (Yonne).  — 

Février  1885. 


—    IX   — 

MiM. 

Chatelaim  (l'abbé),  licencié  es  lettres,  professeur  à  Tinstitution  Saint- 
Cyr,  à  Nevers.  —  Décembre  1891. 

Cheminade  (Emmanuel),  licencié  en  droit,  à  Nevers.  —  26  no- 
vembre 1885. 

Col  (Charles) ,  licencié  en  droit,  rue  de  la  Banque,  à  Nevers.  — 
25  janvier  1883. 

CouRSON  DE  La  Villeneuve  (le  colonel  de),  O.  #,  commandant  le 
i3«  d'infanterie,  à  Nevers.  —  29  décembre  1898. 

Dameron,  architecte  à  Nevers.  —  190t. 

Darnay  (baron),  château  de  Montas,  par  Saint-Saulge. —  3i  juillet  1890. 

Dasse  (l'abbc),  curé  d'Ourouêr.  —  3o  mai  1897. 

Dauphin,  notaire  à  Nevers.  —  2$  juillet  1889. 

Debourges  (G.),  avocat  à  Nevers.  —  22  février  i883. 

Delamalle  (Jacques),  104,  boulevard  Haussmann,  Paris.  —  28  novem- 
bre 1889. 

Delost  (Fabbé),  chanoine  honoraire,  curé -doyen  de  Château- 
Chinon.  —  4  mars  1869. 

Désveaux,  O.  *,  colonel  d'artillerie,  à  Autun  (Saône-et-I-oire). 

D0MGERMAIN  (comte  René  de),  à  Veninges,  près  Nevers,  et  à  Phlin, 
par  Nomény  (Meurthe-et-Moselle).  —  25  avril  1889. 

DuBOST,  avoué  à  Nevers.  —  29  novembre  1900. 

DuMiNY  (Edmond) ,  conservateur  de  la  Bibliothèque ,  à  Nevers.  — 
2  juin  1881. 

Espeublles-Vicence  (comte  Albéric  d')  îRf,  conseiller  général,  au  chAteau 
d'Espeuilles,  commune  de  Montapas.  —  27  juin  1889. 

Estampes  (comte  Jean  d'),  château  de  Mouchy,  par  La  Charité.  — 
3i  octobre  1889. 

Faulquier  (Adrien),  à  Clamecy.  —  i3  mai  1875. 

Ferrier  (Henri),  artiste  peintre,  à  Prémery.  —  20  avril  1871. 

FiCHOT  fils,  84,  rue  de  Mouësse,  à  Nevers.  —  25  avril  1901. 

FiOT,  ancien  négociant,  â  Nevers.  —  22  février  1893. 

Flamare  (Henri  de),  <l  L,  archiviste  du  département,  à  Nevers.  — 

23  février  1882. 
François,  ancien  architecte ,  rue  de  l'Oratoire,   11,  à  Nevers,  et  à 

Anthien.  —  2$  novembre  1897. 

Gaillon  (l'abbé),  curé  de  Tamnay-en-Bazois.  —  3i  janvier  1902. 
Garillakd,  jugede  paix  â  Pouguës-les-Eaux.—  24  novembre  1892. 


\ 


—  X   — 

MM. 
Gaulmyn  (vicomte  Joseph  de) ,  château  de  Rimazoir,  par  Souvigny 

(Allier).  —  29  novembre  1888. 
Gauthier  (Gaston),  instituteur  à  Murlin.  —  26  juin  1890. 
Gauthier  (docteur),  à  Saint-Benin-d'Azy.  —  3o  octobre  1902. 
Geoffroy,  conducteur  des  ponts  et  chaussées,  à  Nevers.  —  29  mai  1902. 
Girard  (Paulin),  chef  de  division  de  préfecture  retraité,  à  Nevers.  — 

25  avril  1901. 
Girerd  (Frédéric),  avocat  à.  Nevers.  —  19  niars  1891. 
GoNAT  (Albéric),  à  Saint-Pierre-le-Moûtier.  —  17  août  1874. 
Grincour  (André),  château  de  Fontallier,  par  Samt-Pierre-le-Moûtier. 

—  27  juin  1889. 

Gueneau  (Lucien),  notaire  à  Brinon.  —  29  octobre  1896. 

M™«   GuÉNY,   château   de   Dumphlun,    par   Saint-Benin-d'Azy.    — 

31  octobre  1889. 
Guillerand,   à  Roussy,   commune  de  Saint -Parize- le -Châtel.  — 

24  février  1887. 

HuGOK  (Edmond),  ancien  magistrat,  â  la  Coquillerie,  commune  d'Urzy. 

—  5  juillet  1873. 

HuGON  (Charles),  à  Nevers.  —  27  juin  1901. 

Imbart  de  La  Tour  (comte  Joseph),  à  Chevret,  par  Imphy.  — 
3i  juillet  1890. 

JouRDAN  (docteur),  rue  Mirangron,  à  Nevers.  —  27  juillet  1882. 

Jullien  (l'abbé),  curé  de  Poiseux. 

JULUEN,  commis  des  ponts  et  chaussées,  à  Nevers.  —  26  janvier  1882. 

La  Chesnaye  (comte  de),  à  Pouilly-sur-Loire.  —  24  février  1887. 
Langle  de  Cary  (Charles  de),  ancien  magistrat,  â  Corvol-d'Embernard. 

—  13  mai  1875. 

'Languimier  (Edmond),  château  de  Machigny,  commune  de  Saint- 

Sulpice.  —  22  février  1893. 
Laugardière  (vicomte  de),  ancien  conseiller  â  la  cour  d'appel,  i3,  rue 

Hôtel-Lallemant,  Bourges.  —  23  avril  1857. 
Lavesvre  (Henri  de),  â  Clamour,  conwnune  de  Germigny-sur-Loire. 

—  22  avril  1893. 

Le  Blanc  Bellevaux  (Auguste),  11,  rue  Gambetta,  Nevers.  —  1899. 
Lebceuf,  adjoint  au  maire,  â  La  Charité-sur-Loire.  —  1899. 


—  XI  — 

MM. 

Lespinasse  (René  de)  >{<,  tt  I.,  à  Luanges,  commune  dIJrzy.    — 

8  juin  1867. 
M™e  DE  Lespimasse,  à  Luanges,  commune  d*Urzy.  —  3i  octobre  1889. 
Le  Vasseur,  château  de  la  Pointe,  par  La  Charité.  —  27  janvier  1898. 
Lhuissier  (l'abbé),  curé  de  Champvert .  —  28  juillet  1898. 

Magnard,  industriel  à  Fourchambault.  —  31  juillet  1890. 

Manuel  (Georges),  à  Marzy,  et  31,  rue  François-Ic,  à  Paris.  — 
25  avril  1895. 

M  AR  AND  AT  (Henri),  à  Oliveau,  commune  de  Mars.  —  30  mars  1893. 

Marcy  (Raoul),  ingénieur  civil  à  Nevers.  —  27  mai  1886. 

Marcy  QA^j  Jean  de),  chanoine  de  Lorette,  à  Lorette  (Italie).  —  1891. 

Marochetti  (le  commandant)  #,  conseiller  général,  château  de 
Chevannes,  par  Nevers.  —  25  novembre  1897. 

Maron  (Albert),  à  Nevers.  — •  2  juin  1881. 

Masse  (François),  précepteur,  à  Corcelles,  par  Decize.  —  1899. 

Massillon  Rouvet  %,  Q  A.,  architecte  à  Nevers.  —  25  no- 
vembre 1897. 

Maumigny  (comte  de)  ^,  rue  Creuse,  à  Nevers.  —  28  juin  i883. 

Mazeron  (Achille),  libraire  à  Nevers.  —  25  juin  1885. 

Mazoyer  i^y  ingénieur  en  chef  des  ponts  et  chaussées,  à  Nevers.  — 
27  janvier  1898. 

Métairie  (Abel),  à  Fonfaye,  par  Châteauneuf-val-de-Bargîs.  ^  9  juillet 

1874. 
Meunier  (Paul),  avocat,  23,  rue  du  Rempart,  Nevers.  —  28  novembre 

1889. 
Meunier  (l'abbé),  professeur  à  l'institution  Saint-Cyr,  à  Nevers.  — 

27  juin  1895. 
MiLLiEN  (Achille)  4^,  ©  A.,  à  Beaumont-la-Ferrière.  -—  14  juin  1860. 
Mirault,  régisseur  à  Cours-les-Barres  fCher).  —  10  janvier  1866. 
MiROT-CoGNAT  (Léon),  archiviste  aux  Archives  nationales,  Paris,  23, 

rue  Denfert-Rochereau,  et  à  Clamecy.  —  22  avril  1893. 
MONÔT  (docteur)  *,  à  Montsauche.  —  6  mars  1873. 
MoHLER  (Paul),  juge  à  Issoudun.  —  27  juin  1901. 
MoNTAGNON  >¥c,  à  Nevers.  —  13  février  1879.. 
MoNTAGNON  ((jabriel),  industriel,  à  Nevers.  —  2$  avril  1901. 
MoNTHGNiER,  à  Dompierre-sur-Nièvre.  —  29  août  1872. 
Montjoye  (vicomte  de),  à  Châtel-Censoir  (Yonne).  —  1899. 
MoNTRiCHARD  (comte  de]  ^,  château  de  la  Chasseigne,  par  Saint- 

Parize-le-Châtel.  —  27  octobre  1881. 


—  XII   — 

MM. 

MoREAU  (Victor),  ancien  notaire,  à  Moulins-Engilbert.  —  25  no- 
vembre 1897. 

MoRET  DE  Nyon  (capitaine),  à  Nevers.  —  27  janvier  1898. 

MoRLON,  conseiller  à  la  cour  d'appel,  à  Bourges.  —  5  dé- 
cembre 1867. 

MouTiLLON  (l'abbé),  curé  de  Saint-Martin-d'HeuilIe.  —  26  décembre 
1901. 

Pannetier  (l'abbé),  curé  de  Varennes-les-Nevers.  -—  29  août  1872. 
Pénavaire  Q,  compositeur   de    musique,  21,   rue    Notre-Dame-de- 

Lorette,  à  Paris.  —  5  avril  1894. 
Perrier  (docteur),  médecin  à  La  Charité.  —  13  novembre  1879. 
Philippe  (André),  archiviste  de  la  Lozère,  àMende. —  3i  octobre  1901. 
Poussereau  (Louis),  à  La  Machine.  —  30  juin  1892. 
Prégermain  (Lambert),  château  de  Tintury.  —  4  octobre  1877. 

(2JJILLIER,  notaire  à  Decize.  —  30  décembre  1897. 

Rameau  (l'abbé  J.-B.),  professeur  à  l'institution  Saint-Cyr,  Nevers. 

—  29  mars  1890. 
Rasblly  (marquis  de) ,  château  de  Beaumont ,  par  Saint-Pierre-le- 

Moûiier.  —  2$  juillet  1889. 
Renault  (Théodore),  3,  rue  Gerbilon,  Paris.  —  1899. 
RoBELiN  (Albert),  à  Nevers.  —  24  novembre  1881. 
RoBLiN,  à  Champvert.  —  25  mars  1897. 
RosEMONT  (Pierre  de),  château  de  Vernoil  (Loire),  et  à  Nevers.  — 

2  juin  1892. 

Saint-Cyr  (docteur  Victor),  à  Léré  (Cher).  —  30  novembre  1882. 
Saint- Venant  (de)  ^,  inspecteur  des  forêts,  à  Nevers.  —  25  avril 

1895. 
Saint-Sauveur  (vicomte  de),  à  Saint-Firmin,  et  au  château  d'Autry, 

par  Vierzon  (Cher).  —  26  avril  1894. 
Sarriau,  rue  Treilhard,  4,  Paris.  —  7  octobre  1880. 
Savigny  de  Moncorps  (comte  Charles  de)  ^,  château  de  Fertot,  par 

Nevers.  —  3  août  1854. 
Savigny  de  Moncorps  (vicomte  René  de)  #,  à  Sdllans  (Var).  — 

3  août  1854. 

Savigny  de  Moncorps  (la  vicomtesse  Henri  de),  château  de  Poiseux^ 
par  Guérigny.  —  26  juin  1890. 


—   XIIÎ   — 

MM. 

Saulieu  (comte  Charles  de),  à  Lurcy-le-Bourg,  par  Prémery.—  24  fé- 
vrier 1887. 

Sery  (l'abbé),  chanoine,  à  Nevers.  —  27  octobre  1881. 

SouLTRAiT  (vicomte  Roger  de),  château  de  Dornes  et  à  Nevers.  — 
23  février  1888. 

SoTER  (l'abbé),  curé  de  Sermoise.  —  9  janvier  1873. 

SuBERT  (docteur),  9  L,  à  Nevers.  —  12  janvier  1865. 

Teste,  château  de  Vésigneux,  par  Saint-Martin-du^Puy.  —  Février 

1885. 
Teste  (Alexandre),  à  Lormes.  —  27  octobre  1887. 
Thonier  (Roger),  à  Saint-Léger,  commune  de  Mars.  —  30  mars  1893. 
Tiersonnier  (Gabriel),  au  château  du  Colombier,  par  Nevers.  — 

27  juin  1889. 
Tiersonnier  (Ludovic),  château  dé  la  Grâce,  commune  de  Gimouille. 
Tiersonnier  (Ch.),  â  Nevers.  —  25  avril  1901. 
TorroT  (Ernest  de) ,  â  Nevers.  —  6  février  1862. 
Trameçon  (l'abbé),  curé  de  Montigny-sur-Canne.  —  31  janvier  1895. 
Tricot,  avocat  â  Nevers.  —  27  février  1902. 

UsQjJiN  (Paul),  ancien  juge  de  paix,  à  Pougues-Ies-Eaux.  —  6  avril 
1876. 

Vallière  (Gilbert),  imprimeur-éditeur  â  Nevers.  —  23  mai  1889. 

Verne  (Charles  du),  à  Nevers.  —  3  mars  1870. 

Verne  (Victor  du),  à  Nevers.  —  9  janvier  1873. 

Verne  (Auguste  du),  â  Nevers.  —  4  novembre  1880. 

Verne  (Charles  du),  château  de  Poiseux,  par  Guérigny.  —  25  avril 

1889. 
Vbllenaut  (Octave  de),  â  Nevers.  —  27  janvier  1887. 


—  XIV  — 


SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 

1  Afinistèfe  de  l'Instruction  publique  et  des  Beaux-Arts^  Paris.  S  exem- 

plaires. 

2  Commission  du  répertoire  de  bibliographie  scientifique,  5«  bureau 

de  l'Enseignement  supérieur. —  Minbtèrede  Flnstniction  publique. 

3  Bibliothèque  de  la  direction  des  Beaux- Arts,  Palais-Royal,  à  Paris. 

4  Société  philotechnique,  à  Paris. 

5  Polybiblion,  5,  rue  Saint-Simon,  à  Paris. 

6  Société  littéraire  de  Clamecy  (Nièvre). 

7  Société  d'émulation  de  l'Allier,  à  Moulins. 

8  Société  historique  du  Cher,  à  Bourges. 

9  Société  des  Antiquaires  du  Centre,  à  Bourges, 
xo  Société  archéologique  et  historique,  à  Orléans. 

1 1  Société  d'agriculture ,  belles-lettres ,  sciences  et  arts  d'Orléans. 

12  Société  historique  du  Gâtinais,  à  Paris,  38,  rue  Gay-Lussac. 

13  Académie  de  Mâcon. 

14  Société  éduenne,  à  Autun. 

15  Société  des  sciences  naturelles  et  historiques  de  l'Yonne,  à  Auxerre. 

16  Société  d'études,  à  Avallon  (Yonne^. 

17  Société  archéologique  de  Sens. 

18  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  d'Angers. 

19  Société  académique  d'archéologie,  sciences  et  arts  de  l'Oise,   à 

Beauvais. 

20  Société  d'études  des  sciences  naturelles  de  Béziers. 

21  Société  académique  de  Boulogne-sur-Mer. 

22  Société  d'agriculture ,  de  commerce,  etc.,  du  département  de  la 

Marne,  à  Châlons-sur-Mame. 

23  Société  académique  de  Cherbourg. 

24  Académie  des  sciences  de  Clermont-Ferrand. 

25  Société  d'agriculture,  de  commerce  et  d'industrie  du  département 

du  Var,  à  Draguignan. 

26  Société  d'études  des  Hautes-Alpes,  à  Gap. 

27  Société  des  sciences  naturelles  et  archéologiques   de  la    Creuse,   à 

Guéret. 

28  Société  des  sciences  et  arts  du  Havre. 

29  Société  havraise  d'études  diverses,  au  Havre. 

30  Société  historique  et  archéologique  de  Langres. 

31  Société  des  archives  historiques  de  la  Saintonge  et  de  l'Aunis,  â 

Saintes. 


—  XV   — 

52  Société  littéraire  de  Lyon. 

33  Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Marseille. 

34  Société  des  travaux  de  statistique  de  Marseille. 

35  Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Tam-et-Garonne,  à 

Montauban. 

36  Société  archéologique  de  Tarn-et-Garonne,  à  Montauban. 

37  Société  d'émulation  de  Montbéliard. 
3jB  Société  centrale  d'agriculture,  à  Nice. 

39  Académie  de  la  Val-d'Isère,  à  Moutiers  (Savoie). 

40  Société  des  sciences  naturelles  de  l'Ouest ,  au  muséum  de  Nantes. 

41  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  des  Alpes-Maritimes,  à  Nice. 

42  Académie  du  Gard,  à  Nimes. 

43  Société  historique  et  archéologique  du  Périgord,  à  Périgueux. 

44  Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest,  à  Poitiers. 

45  Société  archéologique  de  Rambouillet. 

46  Académie  de  Reims. 

47  Société  historique  et  archéologique  de  Soissons  (Aisne). 

48  Comité  archéolc^que  de  Senlis,  à  Senlis. 

49  Société  académique  du  Var,  à  Toulon. 

50  Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse. 

5 1  Société  archéologique  du  midi  de  la  France,  à  Toulouse. 

52  Société  des  sciences  et  arts  de  Vitry-le-Français. 

53  Société  archéologique  de  Touraine,  rue  du  Mvedëre,   16  bis,  i 

Tours. 

54  Société  scientifique  de  Beaune. 

5  5  Société  des  BoUandistes,  à  Bruxelles. 

56  Société  de  l'histoire  naturelle ,  à  Colmar. 

57  Société  pour  la  conservation  des  monuments  historiques  d'Alsace, 

ii  Strasbourg;. 


—    XVI   — 


l'*' 


REGLEMENT 


DU 

PRÊT  DES  LIVRES  DE  LA  BIBLIOTHÈQJJE  DE  LA  SOCIÉTÉ 


i^  Tous  les  livres  appartenant  à  la  Société  pourront  être 
prêtés  aux  membres  titulaires  et  plus  spécialement  ceux  qui 
forment  le  fonds  de  Soultrait. 

2^  Un  registre  sera  créé  à  cet  effet  et  divisé  en  plusieurs 
colonnes,  contenant  le  titre  et  le  format  de  Touvrage,  la  date 
du  prêt,  le  nom  de  l'emprunteur  ainsi  que  sa  signature  et 
l'évaluation  du  volume. 

S''  Les  livres  ne  seront  prêtés  que  pour  un  délai  maximum 
d'un  mois,  et  devront  être  remis  à  la  Porte-du-Groux.  , 

4^  Le  bibliothécaire  aura  seul  qualité  pour  donner  et  recevoir 
les  volumes. 

5^  Au  cas  où  la  lettre  de  rappel  du  bibliothécaire  serait 
restée  sans  réponse,  tout  nouveau  prêt  serait  refusé  au  retar- 
dataire. 

6**  Le  plus  grand  soin  est  recommandé  pour  les  livres.  H  y 
aurait  lieu  à  indemnité  dans  le  cas  où  un  livre  serait  détérioré. 


BULLETIN 


DB  LA 


SOCIÉTÉ  NIVÉRNAISÉ 

DES 

LETTRES,  SCIENCES  ET  ARTS 


DESCRIPTION 

DU 

CLOCHER  a  DE  L'ÉGLISE  DE  MARZY 

PAR 

RENÉ    DE    LESPINASSE 


r 

Parmi  les  petites  églises  paroissiales  qui  subsistent 

encore,  pour  l'époque  romane,  dans  les  environs  de 
Nevers,  celle  de  Marzy  est  peut-être  la  plus  intéres- 
sante et,  malgré  certains  remaniements  regrettables, 
une  des  mieux  conservées  jusqu'à  ce  jour. 

Elle  mérite  d'être  décrite  dans  tous  ses  détails. 

Le  village  de  Marzy,  situé  sur  la  pointe  de  terre 
formée  par  la  jonction  de  la  Loire  et  de  TAllier,  se 
trouve  en  dehors  de  tout  passage  et  assez  rarement  visité 
à  cause  de  cet  isolement  ;  mais  Tarchéologue  qui  se 
détournera  de  son  chemin  sera  amplement  récompensé 
par  la  vue  de  ce  petit  monument  exécuté  avec  le  soin 
et  Télégance  les  plus  recherchés. 

Cette  première  étude,  qui  sera  complétée  plus  tard 
par  la  partie  historique,  montrera  l'intérêt  local  de  ce 
petit  coin  oublié  des  environs  de  Nevers. 

X  n,  9"  série.  1 


—  2  — 

A  Textérieur,  la  construction^  aux  proportions  bien 
combinées,  présente  un  ensemble  très  gracieux  ;  nef 
et  porche  terminé  en  pignon  ;  au  transept  un  beau 
clocher  carré  dominant  les  toitures  de  deux  étages  ; 
chapelles  plus  récentes  de  chaque  côté,  au  nord  et  au 
midi;  abside  ronde  au  fond  de  Tédifice. 

Extérieurement,  la  nef  a  26  mètres  de  long  sur 
10  de  large,  le  clocher  7  mètres,  l'abside  4  m.  50; 
longueur  totale  en  dehors,  37  m.  50. 

L'édifice  est  donc  de  petite  dimension,  construit  par 
le  trésorier  du  chapitre  de  Saint-Cyr  pour  les  besoins 
d'une  paroisse  peu  importante,  mais  d'un  ensemble 
assez  harmonieux  pour  constituer  un  ravissant  mor- 
ceau d'architecture . 

Nous  ignorons  encore  la  date  exacte  de  la  construc- 
tion qui  doit  remonter,  d'après  ses  apparences,  à  la 
renaissance  romane  du  xn®  siècle.  On  y  trouve  l'arc 
aigu  mélangé  au  plein  cintre,  comme  à  la  grande 
église  monastique  de  La  Charité,  ainsi  que  les  déco- 
rations de  sculpture  qui,  malgré  leur  sobriété,  indiquent 
une  époque  postérieure  à  notre  autre  église  monastique 
de  Saint-Etienne  de  Nevers. 

Examinons  d'abord  le  dehors.  La  nef  ne  mérite  pas 
l'attention  ;  deux  contreforts  à  faible  saillie  soutien- 
nent les  murs  sur  toute  la  longueur  ;  leur  faiblesse 
comme  le  peu  d'épaisseur  des  murs  ne  laissent  pas 
supposer  l'existence  d'une  voûte  à  une  époque  quel- 
conque. L'entrée  est  formée  d'un  simple  pignon  pointu, 
sans  aucun  ornement  ;  le  tympan  de  la  porte  en  plein 
cintre,  en  claveaux  bruts,  est  refait.  De  chaque  côté 
deux  petits  corbeaux  anciens,  reposant  sur  chaque 
montant,  ont  dû  supporter  la  légère  charpente  d'un 
porche.  Une  petite  baie  à  plein  cintre,  située  au  milieu 
de  la  hauteur,  en  place  de  rosace,  semble  ancienne.  A 
gauche  de  l'entrée  de  Téglise,  une  belle  pierre  tombale. 


—  3  — 

dressée  sur  quatre  pieds,  sert  pour  déposer  les  cercueils 
des  défunts.  Les  murs  latéraux  sont  terminés  par  un 
entablement  en  doucine  orné  de  modillons  également 
en  doucine  et  d'un  joli  efEet.  Ces  pièces  doivent  être 
anciennes  tandis  que  la  pointe  du  pignon  et  la  cou- 
verture actuelle  en  tuiles  ont  été  certainement  refaites* 
La  charpente  primitive  devait  être  plus  plate.  A  la 
suite  d'une  destruction  par  incendie  ou  autrement  on  a 
donné  plus  de  hauteur  et  de  pente  à  la  toiture  et  l'on 
a  engagé  la  moitié  de  l'étage  de  la  tour  ce  qui  produit 
le  plus  fâcheux  effet  à  l'œil  quand  du  dehors  et  du  côté 
de  la  nef  on  regarde  le  clocher.  Cette  disposition  défec- 
tueuse nous  paraît  inadmissible  pour  l'état  primitif. 

La  surélévation  de  la  toiture  semble  s'accorder  avec 
une  réfection  de  la  base  des  murs  qui  indique  une 
reprise  de  tout  l'ensemble,  aussi  bien  de  la  nef  que  du 
clocher,  les  entablements  et  autres  ornements  exté- 
rieurs restant  anciens. 

Passons  maintenant  à  la  tour  carrée  ou  clocher,  qui 
est  le  plus  beau  morceau  de  l'édifice.  Il  se  compose  d'un 
rez-de-chaussée  formant  contrefort  et  de  trois  étages, 
l'un  plein  et  les  deux  autres  à  jour,  le  tout  d'une 
hauteur  d'environ  20  mètres. 

L'évidement  des  contreforts  au-dessus  du  rez-de- 
chaussée  et  l'ornementation  des  étages  donnent  une 
grâce  réelle  à  ces  petites  proportions .  La  toiture  en 
tuiles,  de  forme  pyramidale,  n'est  pas  de  l'époque, 
cependant  nous  ne  croyons  pas  à  1  existence  primitive 
d'une  flèche  en  pierre.  La  couverture  actuelle  n'est  pas 
trop  écrasée  et  ne  doit  pas  s'éloigner  sensiblement  de 
la  forme  ancienne. 

On  y  a  mis  deux  mauvaises  lucarnes  en  bois  néo- 
gothiques qui  déparent  absolument  la  toiture  et  une 
affreuse  horloge  qui  ne  marche  plus  depuis  longtemps. 
S'il  s'agissait  d'une  réparation  il  faudrait  tout  enlever* 


—  4  — 

La  base  et  les  contreforts  ont  8  mètres  de  haut,  une 
petite  baie  à  plein  cintre  est  située  au  milieu. 

Le  premier  étage,  de  4  mètres  de  haut,  est  entière- 
ment plein,  en  bel  appareil  régulier  et  lisse,  sans  aucun 
bandeau  ni  saillie;  puis,  viennent  deux  étages  de 
4  mètres  chacun,  ornés  de  fenêtres  et  d'arcatures  d'une 
gr&ce  charmante  ;  ces  trois  étages,  par  leur  contraste, 
faisant  les  uns  au-dessus  des  autres  le  plus  heureux 
effet. 

Voici  les  détails  de  cette  ornementation  assez  com- 
pliquée : 

Chaque  encognure  est  bien  marquée  et  saillante, 
elle  est  accompagnée  d'une  colonne  ronde  qui  saillit 
d'une  demi-sphère  ;  une  autre  colonne,  en  tout  sem- 
blable, placée  au  milieu,  entre  les  deux  fenêtres,  com- 
plète l'encadrement.  La  base  des  colonnes  repose  sur 
un  cordon  orné  de  petits  modillons  et  sur  des  car- 
touches en  encorbellement  représentant  des  besans. 

Entre  ces  colonnes  plaquées  sont  de  petites  fenêtres 
géminées  en  plein  ceintre  formées  de  trois  colonnettes 
avec  bases  et  chapiteaux  à  feuilles,  encadrées  elles- 
mêmes  dans  de  plus  grands  arcs. 

Au  deuxième  étage,  ces  arcs  sont  agrémentés  de 
perles  et  contournent  tout  le  tour  du  clocher  ;  le  der- 
nier étage  a  les  mêmes  lignes  sans  l'ornementation  de 
perles  entourant  les  cintres  des  fenêtres.  L'architecte 
a  voulu  réunir  la  masse  de  ses  décorations  sur  l'endroit 
où  l'œil  se  porte  instinctivement. 

D'ailleurs,  l'ensemble  est  d'ime  grande  richesse, 
chaque  façade  possédant  8  fenêtres,  12  colonnettes, 
trois  grandes  colonnes  garnissant  les  deux  étages,  trois 
cordons  courant  tout  autour,  enfin  les  arcs,  encadre- 
ments et  corbeaux  divers. 

Le  tout  est,  hélas  I  dans  un  délabrement  complet. 


r 

[ 


—  5  — 

beaucoup  de  pierres  sont  encore  bonnes  mais  disjointes 
et  disloquées.  Le  côté  nord  et  son  rampant  en  pierre 
du  rez-de-chaussée  est  assez  en  état,  mais  le  midi  est 
presque  méconnaissable,  la  plupart  des  pierres  sont 
gelées,  le  rampant  en  pierres  est  remplacé  par  un  pan 
de  toiture  en  tuiles  ;  de  plus,  une  profonde  lézarde  à 
J'encognure  sud-ouest  semble  faire  redouter  une  chute 
de  la  construction,  néanmoins  l'aplomb  ne  parait  pas 
menacé.  Pour  éviter  la  pluie  et  Tébranlement  du  vent, 
on  a  bouché  en  maçonnerie  toutes  les  fenêtres  du  pre- 
mier étage,  travail  fait  grossièrement  et  dans  lequel 
plusieurs  colonnettes  sont  engagées. 

L'abside  accolée  à  la  façade  Est  de  la  tour  a  trois 
baies  en  plein  cintre^  refaites  en  bon  style  ;  elles 
reposent  sur  un  cordon  ou  bandeau  taillé  en  doucine  ; 
un  cordon  supérieur  exactement  semblable  contourne 
les  cintres  des  fenêtres  et  tout  le  pourtour  de  l'abside. 
Entre  les  fenêtres,  deux  colonnes  demi  saillantes,  la 
base  carrée  partant  du  sol  et  les  chapiteaux  ornés 
l'un  de  besans  et  de  feuilles  d'eau,  comme  ceux  de 
l'intérieur  ;  Tautre  de  deux  palmes  posées  en  croix  et 
pointillées.  L'entablement  est  soutenu  par  17  cor- 
beaux assez  saillants,  très  rapprochés,  tous  ornés  avec 
grande  variété,  besans,  tête  de  licorne,  serpentin,  tête 
de  chèvre,  carrés  superposés,  tête  de  mouton,  roue, 
chat-huant,  prismes,  carrés,  t^te  d'ours,  besans,  tête 
de  lièvre  et  trois  sortes  d'enroulements.  Ces  corbeaux 
assez  convenablement  conservés,  sauf  deux  ou  trois 
forment  un  joli  ensemble  de  sculptures  romanes  dont 
Tart  est  si  original. 

La  toiture  en  tuiles,  par  opposition  à  celle  de  la  nef, 
a  été  légèrement  surbaissée. 

Passons  maintenant  aux  détails  de  l'intérieur  et, 
pour  revenir  plus  tard  à  la  nef,  allons  directement 
au  chœur  formé  par  la  coupole  du  clocher.  Une  petite 


-  6  - 

marche  le  sépare  de  la  nef,  les  deux  contreforts  de 
chaque  angle  avancent  dans  l'église  avec  môme  saillie 
qu'à  l'extérieur . 

L'arc  doubleau  aigu  ouvrant  sur  la  nef  est  d'une 
belle  hauteur  et  marque  par  sa  forme  la  renaissance 
romane  du  xn®  siècle  ;  il  est  appuyé  sur  deux  colonnes 
et  a  été  armé  d'une  poutre  surmontée  d'un  crucifix, 
par  mesure  de  précaution  ou  par  ornementation  mal 
comprise. 

En  face  s'ouvre  l'arc  de  l'abside  également  aigu  et 
plus  bas,  faisant^  lorsqu'on  regarde  l'enfilade  de 
l'église,  la  déclivité  si  gracieuse  des  petits  édifices 
romans. 

La  base  de  la  colonne  de  gauche  est  carrée.  A  plat, 
sur  les  angles,  est  sculpté  un  serpent  à  tête  fantastique 
et  à  double  queue  s  enroulant  de  chaque  côté.  Le  fût 
repose  sur  un  gros  tore  très  aplati,  il  a  3  mètres  de 
haut  et  semble  sous  la  peinture  être  monolythe  ou  de 
deux  morceaux  au  plus.  Le  chapiteau  à  corbeille  ronde 
est  formé  de  feuilles  plates  à  pointe  recourbée,  celle 
du  milieu  dentelée  ;  à  chaque  angle  est  une  face 
humaine  grimaçante,  ayant  la  bouche  démesurément 
grande. 

La  colonne  de  droite  a  une  base  carrée  sans  sculp- 
ture ;  le  fût  semblable  à  l'autre,  avec  chapiteau  orné  de 
feuilles  plates  délignées  et  dentelées  et  d'un  macaron  à 
stries  au  milieu. 

Nous  nous  trouvons  dans  le  chœur,  sous  le  clocher, 
formant  petite  coupole,  de  5  mètres  carrés  d'intérieur 
et  d'environ  8  mètres  de  hauteur  ;  le  plafond  en  demi- 
sphère  ou  calotte  appuyée  sur  des  trompes  qui  retom- 
bent gracieusement  à  chaque  angle,  accusant  nettement 
la  forme  de  coupole  ;  les  deux  côtés,  à  gauche  et  à 
droite,  sont  garnis  d'un  archivolte  à  arc  aigu  reposant 
sur  deux  colonnes  et  éclairé  au  milieu  par  une  petite 


r 


—  7  ~ 

baie  &  plein  centre  ;  les  colonnes  sont  à  base  carrée  ;  le 
fût  terminé  à  la  base  par  un  tore  aplati  et  en  haut  par 
un  chapiteau  de  feuilles  mélangées  d'enroulements  et 
de  besans. 

Uarc  ouvrant  sur  Tabside,  également  aigu  et  plus 
bas,  reproduit  exactement  celui  de  la  nef  en  sa  dis- 
position de  colonnes  :  celle  de  gauche  avec  le  chapi- 
teau orné  de  feuilles  et  de  deux  faces  humaines  grima- 
çantes ;  celle  de  droite  avec  chapiteau  de  feuilles  plates 
et  rameaux  surmontés  de  besans. 

Les  besans  ou  petits  carrés  se  retrouvent  un  peu 
partout  au  dedans  et  au  dehors,  soit  par  fantaisie  de 
Tartiste  sculpteur  soit  comme  emblème  préféré  des 
bienfaiteurs  de  Téglise  ;  sur  trois  chapiteaux  de  la 
coupole,  ils  affectent  la  forme  d'un  blason  placé  au  milieu 
du  sommet. 

La  petite  abside,  de  3  mètres  de  profondeur, 
élevée  de  deux  marches,  donne  place  au  maltre-autel. 
Trois  jolies  fenêtres  à  plein  cintre,  reposant  sur  des 
colonnettes  à  fût  entièrement  dégagé  dans  les  redans, 
la  base  et  le  chapiteau  finement  sculptés  de  feuilles, 
i  éclairent  Tautei  et  ornent  les  murs  ;  enfin  la  voûte  en 
^  berceau,  formant  quart  de  sphère,  donnent  à  cet 
'  ensemble  les  meilleures  et  les  plus  pures  conditions 
du  style  roman. 

Le  maitre-autel,  sans  caractère  ni  mérite  sculptural, 
doit  cependant  attirer  l'attention  ;  c'est  un  gros  bloc 
^  plein,  en  marbre  gris  ou  pierre  très  dure  à  grain  très 
'  fin,  ayant  la  forme  d'un  sarcophage  et  reposant  sur 
: .  deux  pieds  ;  il  est  recouvert  de  peinture  et  engagé  de 
i  panneaux  et  rayons  en  bois  peint  derrière  et  au-dessus. 
i  L'église  de  Gimouille  possède  im  autel  de  même  carac- 
["        tère. 

I  Là  s'arrêtent,  à  l'intérieur,  les  parties  restées  romanes 

I        et  réellement  bien  conservées.  Le  tout  a  été,  sous 


1 


-  8  — 

Tadministration  de  M.  le  curé  Crosnier  décoré  de 
peintures  assez  sobres,  mais  où  il  se  trouve  encore  trop 
de  dorures  et  de  tons  criards  pour  ne  pas  faire  contraste 
avec  Télégance  sévère  du  monument.  Néanmoins,  le 
chœur  formant  coupole,  avec  ses  deux  arcs  évidôs,  et 
les  deux  arcs  pleins  de  chaque  côté,  l'abside  avec  sa 
voûte  en  berceau  et  ses  trois  fenêtres,  Tornementa- 
tion  de  colonnes  et  de  colonnettes,  le  mélange  des 
grands  arcs  aigus  et  des  petits  arcs  en  plein  cintre 
des  fenêtres,  constituent  un  motif  d'architecture  de 
proportions  très  réduites  mais  d'une  extrême  pureté 
de  lignes  et  d'une  beauté  remarquable. 

La  nef  à  l'intérieur  n'a  gardé  aucun  caractère  roman  : 
les  murs  sont  nus,  sans  aucune  trace  de  colonnes  ou  de 
piliers,  ce  qui  nous  confirme,  comme  le  dehors,  dans  la 
supposition  qu'il  n'y  a  jamais  eu  de  voûtes. 

La  nef  mesure  intérieurement  24  mètres  de  long  sur 
7  m.  50  de  large.  L'écartement  des  murs  est  main- 
tenu par  de  petites  poutres  élégamment  chanf rénées 
et  munies  d'un  tyran,  placées  à  9  mètres  de  hauteur 
du  sol  et  au-dessus  de  la  pointe  de  Tare  doubleau,  de 
façon  à  ne  pas  nuire  au  coup  d'œil.  De  chaque  côté, 
deux  petites  fenêtres  cintrées  avec  ébrasement,  pro- 
bablement plus  récentes  et  sans  le  moindre  détail  de 
sculpture,  sont  placées  très  haut  éclairant  imparfaite- 
ment l'espace.  Des  verrières  modernes  médiocres  et 
toutes  différentes  garantissent  des  intempéries. 

La  tribune,  moderne,  est  supportée  par  deux  colonnes 
en  bois  avec  simples  balustres  de  bois  tourné  ;  deux 
petits  bénitiers,  imités  du  roman  :  l'un  en  bois,  l'autre 
en  pierre  ;  fonts  baptismaux  en  plâtre  représentant 
une  porte  de  style  roman  ornementé  ;  contre  la  porte 
d'entrée,  une  statue  en  pierre  de  saint  Christophe 
portant  Notre-Seigneur,  d'assez  grossière  exécution, 
du  xvp  siècle  ;  enfin,  au  milieu  de  la  nef,  sur  le  nu  des 


-  9  - 

murs,  deux  niches  en  plâtre,  de  style  roman,  contenant 
des  statues  de  saints. 

A  la  suite  de  ces  objets  médiocres  se  voit  une  chaire 
en  bois,  style  xv«  siècle,  hexagone  à  pans  coupés, 
offrant  huit  panneaux  carrés  garnis  chacun  d'un  car- 
touche rond  présentant  une  tôte  de  saint  assez  fine- 
ment sculptée. 

Le  banc  d'oeuvre  placé  en  face  est  une  fine  sculp- 
ture sur  bois  du  xvi«  siècle  ;  le  dossier,  à  deux  étages 
de  six  panneaux,  se  compose  de  colonnettes  et  arca- 
tures  flamboyantes  :  les  trois  de  dessous  en  plein  et 
ceux  de  dessus  élégamment  ajourés  formant  une  den- 
telle de  sculpture.  Par-dessus  se  trouve  un  dôme  ou 
dais  gracieusement  orné  de  six  clochetons  et  d'une 
galerie  gothique. 

Deux  chapelles  latérales  ont  été  ouvertes  en  avant 
du  clocher  au  xvi»  siècle,  pour  donner  des  places 
réservées  ou  pour  augmenter  le  jour  de  la  nef  trop  fai- 
blement éclairée.  Les  arcs  à  nervures  gothiques  et  la 
croisée  d'ogive  formant  la  voûte  reposent  sur  quatre 
chapiteaux  en  pendentifs  terminant  un  fût  de  colonne 
tronqué. 

Deux  chapiteaux  représentent  des  feuillages,  un 
cheval  ailé  et  une  série  d'enroulements,  sujets  favoris 
du  XVI*  siècle. 

La  chapelle  du  nord,  dédiée  à  la  sainte  Vierge, 
porte  une  inscription  relative  à  un  membre  de  la 
famille  Bouzitat,  et  l'autre  à  M.  le  curé  Crosnier  et 
autres  bienfaiteurs  ;  les  murs  sont  recouverts  de  pein- 
tures bleu  et  or,  qui  déparent  les  motifs  d'architec- 
ture; la  grande  baie  géminée  avec  arcatures  flam- 
boyantes possède  de  beaux  vitraux  modernes. 

La  chapelle  du  sud,  dédiée  au  Sacré-Cœur,  offre 
des  détails  de  môme  style  remis  à  neuf  avec  plus  de 
goût  dans  le  ton  pierre.  On  y  voit  un  assez  joli  groupe 


—  10- 

en  pierre  peinte^  représentant  un  pèlerin,  un  enfant  et 
un  chien.  Le  vitrail  moderne  est  mauvais. 

A  la  suite,  une  autre  chapelle  engageant  une  partie 
du  clocher  sert  de  sacristie  où  Ton  remarque  de  beaux 
meubles . 

Le  Répertoire  archéologique  (p.  151)  décrit  trop  som- 
mairement, selon  nous,  ce  ravissant  édifice,  si  complet 
dans  ses  modestes  proportions. 

U Album  du  Nivernais  (planche  63,  p.  189)  donne 
un  dessin  un  peu  fantaisiste  de  la  tour  dans  l'état  où 
elle  devrait  être  après  réparation  complète.  Une  des- 
cription assez  détaillée  (t.  I,  p.  186)  laisse  à  désirer 
sur  beaucoup  de  points  en  ne  faisant  point  valoir  les 
rares  qualités  de  la  construction.  Il  existait  alors  à 
l'entrée  de  l'église  «  une  espèce  de  porche  »  où  se 
trouvait  la  boiserie  du  xvi®  siècle  dont  on  a  fait  le 
banc  d'œuvre,  et  la  st»fue  de  saint  Christophe  apportée 
de  la  cathédrale  d^  Ne  vers.  Ce  porche  a  totalement 
disparu. 

Ce  délicieux  petit  monument  de  l'époque  romane 
avait  sa  place  d'honneur  parmi  nos  souvenirs  archéo- 
logiques. Notre  confrère,  le  vénérable  abbé  Bogros, 
curé  de  Marzy ,  espère  toujours  aboutir  à  la  réparation 
si  utile  et  si  urgente  de  sa  belle  tour  carrée  ;  il  aura, 
en  agissant  ainsi,  bien  mérité  des  archéologues  et 
accompli  une  œuvre  digne  de  sa  longue  et  sainte  vie. 

Dans  une  autre  étude,  nous  réunirons  tous  les  actes 
relatifs  à  la  partie  historique  de  l'église  de  Marzy. 


fin 


»  »  »  ■» 
»  «  »  » 
*    «  *   * 


^-^ 


- 11  - 


LE  PÈRE  PLACIDE  GALLEMANT 


ET 


LE  COUVENT  DES  RÉCOLLETS 


DE    NEVERS 


Je  m'étais  d'abord  proposé,  en  vue  de  préparer  les 
membres  de  la  Société  nivernaise  à  la  visite  de  ce  qui 
reste  de  cet  ancien  couvent,  un  travail  très  court  — 
le  cadre  tracé  se  renfermait  dans  une  explication  som- 
maire du  couvent  —  et  je  n'ai  pas  su  m'y  borner... 

Les  notes  et  observations  se  sont  accumulées.  Des 
parties  du  couvent  que  je  jugeais  de  prime  abord  sans 
intérêt  —  par  exemple  les  jardins  —  se  sont  révélées 
sous  un  aspect  inattendu  ;  en  chemin,  j'ai  aussi  ren- 
contré des  détails  ou  faits  nouveaux,  des  erreurs  et 
inexactitudes  qui  étaient  à  signaler  et  à  redresser. 
Dans  tout  cela,  que  me  déciderai-je  à  retrancher  ?  — 
Rien,  pas  un  pouce,  pas  une  ligne  :  je  me  fais  l'illusion 
d'avoir  écarté  les  inutilités. 

Cette  appréciation  personnelle,  qui  peut  paraître  de 
la  présomption,  fait  sourire  et  trouve  en  même  temps 
son  excuse  dans  l'attachement  à  la  case,  de  la  part 
d'un  habitant  de  la  cour  des  Récollets,  qui  écrit  pro 
domo. 

La  présente  étude  se  divise  en  deux  parties  : 


I 


La  première  comprend  la  visite  de  l'église,  de  la 
maison  conventuelle  et  des  dépendances. 

La  seconde  donnera  un  aperçu  de  la  vie  et  des 
événements  du  couvent. 


—  12  - 

Comme  il  n'entre  pas  dans  mon  cadre  de  faire  l'his- 
torique du  premier  couvent  des  Cordeliers,  établi  au 
faubourg  de  la  Chaussée,  je  me  borne  à  rappeler  sa 
fondation  par  la  comtesse  Yolande  de  Bourgogne,  entre 
1270-1280,  et  son  transfert  au  château  de  Gloriette 
après  moins  d'un  siècle,  en  1363. 

Ceux  qui  désirent  plus  de  détails  sur  les  origines 
de  la  fondation  des  Cordeliers  ou  Frères  Mineurs  de 
Nevers,  peuvent  consulter  Mff'  Crosriier  {Congréga- 
tions religieuses  d* hommes  du  Diocèse  de  Nevers),  et 
Parmentier  (Archives  de  Nevers,  tome  II). 

La  règle  de  saint  François  est  fondée  sur  la  pau- 
vreté :  «  Le  Franciscain  doit  vivre  au  jour  le  jour  du 
pain  de  l'aumône  et  ne  rien  posséder  sous  le  soleil  ». 
Combien  elle  fut  florissante  à  l'époque  de  foi  qui  la  vit 
naître  I  Dans  la  suite,  des  mitigations  furent  apportées 
pour  assurer  la  subsistance  des  Frères,  tandis  que, 
parmi  les  disciples  du  saint  fondateur,  les  fervents, 
épris  des  charmes  d'un  renoncement  et  d'un  dépouille- 
ment  absolus,  continuèrent  de  pratiquer  l'observance 
primitive;  toutefois,  môme  dans  cette  branche,  la 
difficulté  des  temps  introduisit,  sinon  un  relâchement, 
du  moins  des  modifications  dues  à  la  force  des  choses. 
Une  réforme  de  l'Observance  môme  s'imposait;  aussi, 
entre  les  années  1500  et  1538,  de  petits  groupes  isolés 
surgirent  de  tous  les  côtés,  en  Italie,  en  Espagne,  et 
en  France;  les  religieux  demandaient  simplement  â 
s'associer  pour  mener  une  vie  plus  pauvre  et  plus  recueil- 
lie, RECOLLECTi.  Dovenus  de  plus  en  plus  nombreux,  ils 
réclamaient  des  gardiens  et  des  ministres  provinciaux 
pris  dans  leurs  rangs.  Ainsi  s'opéra  la  réforme  des 
Franciscains  Récollets,  qui  fut  unifiée  et  approuvée 
par  les  Souverains  Pontifes. 


-  43  - 

Le  couvent  de  Nevers  fut  le  premier  de  la  province 
de  France  qui  reçut  ces  religieux.  Ils  y  entrèrent  le 
7  septembre,  au  nombre  de  7,  et  le  17  du  môme  mois, 
la  communauté  commença  à  chanter  solennellement 
l'office  divin.  —  L'installation  était  bien  appropriée, 
vaste,  pourvue  des  dépendances  nécessaires  et  surtout 
d'une  magnifique  église. 

L'accueil  de  la  ville  fut  très  bienveillant. 

La  faveur  du  duc  de  Nevers,  Louis  de  Gonzague, 
était  acquise  à  l'avance  aux  bons  Pères  (1)  ;  un  mem- 
bre de  sa  famille,  François  de  Gonzague,  avait  été 
ministre  de  leur  ordre  ;  il  était  alors  évoque  de  Mantoue 
et  vint  ensuite  en  qualité  de  légat  auprès  du  roi  de 
France. 

Après  ce  préambule  nécessaire,  arrivons  à  la  visite 
du  couvent.  Nous  commencerons  par  l'église. 


§  P'.  —  L'église. 

L'église  remontait  à  la  fin  du  xiv*  siècle  ;  elle  était 
belle  et  vaste  (2). 

M.  Morellet  dit  qu'il  n'en  reste  plus  qu'un  mur 
masqué  par  des  constructions  nouvelles  (3). 

M.  de  Soûl  trait  mentionne  un  vieux  pignon  encore 
debout,  et  une  petite  porte  à  colonnettes  et  à  chapi- 
teaux ornés  de  feuillages,  et  il  cite,  d'après  le  Recueil 

(1)  Dans  la  suite,  les  ducs  de  Nevers  témoignèrent  aux  Récollets  une 
égale  bienveillance  pour  les  fondations  des  couvents  de  Glaniecy  et  de  La 
Charité,  et  même  en  dehors  de  la  province  du  Nivernais;  le  couvent  de 
Ghàlons  (sur  Marne)  fut  1  objet  des  faveurs  du  dnc  Charles  de  Gonzague» 
«  favente  cum  primis  Carolo  Gonzaga,  Nivemensium  et  Retellensium 
duce  lothis  tune  Campanim  Gtibematore  >.  (P.  Gajxehant,  page  148, 
Provincia  Saneti-Dionysii). 

(2)  Sainte-Marie,  Recherches  historiques  sur  Nevers. 

(3)  Album  du  Nivernais,  tome  H,  page  127. 


-14  - 

d'inscriptions     de    Gaignières,    les    épitaphes     du 
caveau  (1). 
Mff'  Crosnier  donne  le  vocable  des  huit  chapelles. 

Et  voilà  tout  ce  que  les  auteurs  nivernais  disent  de 
l'église  en  tant  qu'édifice. 

Comme  matériaux  de  reconstitution,  les  docun^ents 
des  auteurs  nivernais  sont  donc  maigres,  de  même 
que  les  restes  de  construction  subsistants.  J'ai  pu  faire 
des  observations  personnelles  assez  importantes  et 
d'autre  part,  un  ouvrage  d'un  père  Récollet  m'a  été 
d'un  précieux  secours;  il  est  intitulé  :  «  Provincia 
S**  Dionysii,  F.  M.  Recollectorum  in  Galliâ,  Cata- 
launi  (Châlons)  1649.  Auctore  Pâtre  Placido  Galle- 
mant  ejusdem  provincise  diffinitore  ».  C'est  un  recueil 
abrégé,  250  pages,  in-12,  de  tout  ce  qui  se  rapporte  à 
la  fondation,  à  l'état  actuel  (pour  son  temps)  et  aux 
titres  de  gloire  des  couvents  de  cette  province. 

Quel  guide   plus  autorisé  pouvions-nous  désirer? 

Une  affection  privilégiée  a  dicté  les  pages  consa- 
crées au  couvent  de  Nevers,  pour  deux  motifs  :  qu'il 
a  été  le  berceau  de  l'ordre  en  France  et  que  l'auteur 
ne  peut  oublier  la  dette  de  reconnaissance  de  son 
Ordre  à  l'égard  des  princes  de  Nevers. 

Je  vous  montrerai  d'abord  un  fragment  notable  du 
chevet  de  l'église,  et  vous  vous  demanderez  comment 
il  avait  passé  inaperçu. 

A  gauche,  en  entrant  dans  la  cour  des  Récollets, 
vous  avez  devant  vous  un  mur  en  pierre  de  taille 
avec  socle  en  saillie,  entre  deux  contreforts  engagés 
dans  des  constructions  modernes  ;  c  est  le  chevet  de 
l'église  qui  était  à  pans  coupés  ;  il  ne  reste  pas  de 
façade  de  la  fenêtre  de  l'abside,  car  la  maçonnerie  du 

(1)  Guide  archéologigxie  dans  Nevers^  page  59. 


-  15  - 

mur  a  été  percée  ponr  l'ouverture  de  fenêtres  d'appisr- 
tement. 

Du  même  endroit  où  nous  sommes,  dans  la  cour, 
à  droite  du  chevet  nous  voyons  se  dresser  le  pigùon 
mentionné  par  M.  de  Soultrait. 

Dès  lors,prenant  le  milieu  du  mur  du  chevet  jusqu'au 
prolongement  de  la  ligne  du  pignon  (qui  est  un  côté  de 
I!église),  nous  avons  la  moitié  de  la  largeur  exacte  de 
la  nef,  soit  :  pour  la  largeur  totale  a  6  toises  3  pieds  », 
épaisseur  du  mur  comprise  et  6  mv  30  en  œuvre. 

On  remarque  aussi  un  fragment  de  nervure  prisma- 
tique de  la  voûte  de  l'abside  qui  part  de  l'angle,  pour 
former  la  croisée  d'ogive  de  l'abside. 

Curieux  d'avoir  sous  le  regard  toute  la  partie  du  bas 
du  pignon,  je  pus  arriver  d'une  chambre  haute  du 
voisinage  à  pouvoir  l'examiner  convenablement.  Dans 
la  muraille,  tout  en  pierre  d'appareil,  à  4  ou  5  mètres 
du  sol  il  y  a  deux  belles  fenêtres,  actuellement  murées, 
à  l'effleurement  des  formes  et  meneaux  qui  en  garnis- 
saient l'intérieur  ;  meneaux  et  dentelles  de  la  pointe 
gênaient  le  maçon  qui  les  fit  disparaître  d'un  coup 
de  marteau. 

Ces  deux  fenêtres  sont  espacées  également  avec 
l'autre  fenêtre,  dont  on  voit  un  montant,  comme  il  en 
sera  parlé  bientôt.  Je  pensais  voir  des  traces  de 
colonnes  sur  les  murs  ;  il  n'en  est  rien.  La  travée  du 
pignon  est  d'une  largeur  double  des  travées  ordinaires . 

Intérieurement  et  extérieurement,  les  murs  sont  en 
pierre  d'appareil. 

Traversant  le  logement  du  rez-de-chaussée  de  la 
maison  Hainaut,  nous  arrivons  dans  un  jardinet  d'où 
nous  verrons  une  partie  de  la  face  extérieure  du 
pignon.  Ici  encore  des  observations  nouvelles  : 

1**  Un  contrefort  qui  monte  jusqu'au-dessous  des 
modiUons  ; 


-  16  - 

2*  Une  suite  de  modillons  qui  formait  une  cou- 
ronne au  moins  tout  autour  du  chœur  ; 

3°  Un  fragment  de  fenêtre,  à  distance  et  hauteur 
égale  percées  dans  le  pignon. 

L'église  a  été  commencée,  non  en  1381,  comme  le 
dit  M.  de  Sainte-Marie  dans  ses  Recherches  histo- 
riques, mais  en  mars  1371,  date  où  l'on  commença  de 
creuser  les  fondations  de  Télégante  église  que  nous 
voyons  maintenant  (1).  En  effet,  comment  expliquer 
cette  donation  de,  100  florins  ad  scutum  par  Philippe 
d'Arbois,  évoque  de  Tournay,  mort  en  1378,  qui 
donna  cette  somme  au  commencement  de  la  construc- 
tion et  qui  dans  la  suite  fit  une  nouvelle  largesse?...  (2) 

La  donation  du  terrain  pour  bâtir  l'église  est  datée 
de  Bourges  3  septembre  1362  (3). 

Par  la  sacristie,  à  laquelle  nous  reviendrons,  sans 
plus  tarder,  entrons  dans  l'église. 

Pour  commencer  nous  sommes  quelque  peu  surpris  ; 
la  disposition  intérieure  n'est  pas  celle  des  églises  ordi- 
naires :  l'autel  est  à  une  assez  grande  distance  de 
l'abside;  entre  cet  espace  et  les  deux  rangées  de 
stalles  des  religieux  s'élève  le  magnifique  tombeau  de 
la  comtesse  Yolande.  Nous  sommes  dans  le  chœur 
réservé  aux  Pères. 

Les  Frères  Mineurs  y  avaient  transporté  de  leur 
ancien  couvent  les  restes  de  leur  fondatrice  et  son 
épitaphe  gravée  sur  une  grande  table  de  marbre  noir 

(1)  p.  Gallemant,  p.  86. 

(2)  md.,  p.  87. 

(3)  1362,  3  septembre  :  à  Bourges,  Louis,  comte  de  Flandre,  duc  de 
Brabant,  comte  de  Nevers,  «  en  suivant  la  piété  de  ses  ancestres  et  voyant 
»  les  Frères  mineurs  de  la  ville  de  Nevers  n'avoir  aucune  église,  leur 
B  octroyé  place  en  T'hostel  de  son  chastel  de  Nevers  et  es  circonstances 
»  et  appartenances  d'iceluy,  pour  y  fonder  et  édifier  leur  église  ».  {Inven- 
taire de  MaroUeSf  page  500.) 


-  47  - 

qu'on  voit  encore,  dit  Parmentier,  derrière  le  maître- 
autel.  Le  P.  Gallemant  nous  décrit  ainsi  «  le  magni- 
fique tombeau  »  de  la  comtesse  Yolande  : 

«  Le  monument,  placé  au  milieu  du  chœur,  derrière 
le  maître-autel,  s'élève  de  deux  coudées  au-dessus  du 
sol;  il  est  en  beau  marbre  artistement  ciselé,  avec 
TeflBgie  couchée  de  la  comtesse.  L'épitaphe,  qui  a  subi 
en  certains  endroits  Tusure  du  temps,  se  compose  de 
treize  vers  qu'il  reproduit  : 


ÉPITAPHE  DE  LA  COMTESSE  YOLANDE 


HIC  JACET,  UT  CEHNIS,  LAPIDIS  SUB  PONDERE  GRANDIS, 

QUONDAM  NIVERNIS  COMITISSA  POTENS  YOLANDIS  : 

JUSTA  FDIT,  STABILIS,  CONSULTAQUE,  MmS,  HONESTA, 

COMPATIENS,  HUMILIS,  SAPIENS,  DEVOTA,  MODESTA  : 

EJUS  NEC  METRA  COMPENSANT  LAUDES,  NEQUE  PETRA. 

SIT  PROCUL  A  TETRA  CALIGINE,  REGNET  IN  iETHRA  '. 

MOESTIS  SOLAMEN  ERAT  HMC  MISERISQUE  JUVAMEN. 

SIT  SIBI  SOLAMEN  TRINUS   ET  UNUS,  AMEN. 

BIS  CENTUM,   MILLE,  SEPTEM  DECIES,  NOTAT  ILLE, 

ATQUE  DECEM,  CLARE  QUI  VULT  SUA   FATA  NOTARE, 

FERIA  2,  JUNIO,  TOLLITUR  E  MEDIO. 

HXC  QUOQUE  QUI  VIDET,  ORANDO  JUVAMEN  El   DET, 

VISU,  GHRISTE,  TUO  POSSIT  UT  IPSA  FRUI. 

AMEN.  (1) 


(1)  P.  Gallemant,  p.  90. 


T.  iz^  9*  série.  Ht 


—  18- 

Voici  la  traduction  de  cette  épitaphe  : 

Ici  gît,  comme  tu  le  vois,  sous  le  poids  de  cette  haute  pierre, 

Yolande,  autrefois  puissante  comtesse  de  Nevers, 

Elle  fut  juste,  ferme  et  de  bon  conseil,  douce,  honnête, 

Compatissante,  humble,  sage,  dévouée,  modeste  : 

Ni  ces  vers  ni  cette  pierre  ne  pourraient  justement 

redire  ses  louanges. 
Loin  d'elle  soient  les  ténèbres  profondes,  qu'elle  règne 

au  plus  haut  des  cieux  ! 
Elle  était  la  consolation  des  affligés,  le  secours 

des  malheureux. 

Que  la  Trinité  sainte  soit  sa  consolation.  Amen. 

Qui  veut  clairement  compter  les  jours  de  sa  destinée 

Devra  noter  deux  fois  cent,  mille,  dix  fois  sept 

en  y  ajoutant  dix. 
C'est  en  la  deuxième  férié  de  juin  qu'elle  fut  enlevée 

du  milieu  de  ce  monde. 
Que  celui  qui  lit  ces  lignes  lui  accorde  le  secours 

de  sa  prière. 
Et  qu'il  puisse  comme  elle,  6  Christ,  jouir  de  ta  vision 

éternelle  I 

Guy-Coquille,  dans  son  Histoire  de  Neoers,  avait 
reproduit  l'inscription,  mais  avec  une  faute  au 
cinquième  vers  :  caperent  au  lieu  de  compensant.  Ce 
passage  était  sans  doute  presque  effacé  par  l'usure  ;  la 
plaque  de  marbre  au  couvent  de  la  Chaussée,  incrustée 
dans  le  sol,  s'altérait  insensiblement. 

On  peut  voir  au  musée  de  la  Porte-du-Croux  la 
sculpture  de  l'effigie  couchée  de  la  comtesse  Yolande. 

Il  est  intéressant  de  raconter  sa  découverte. 

Au  mois  d'août  1879,  en  faisant  des  travaux  de 
réparation  d'une  maison,  située  sur  l'emplacement  de 
l'église  des  Récollets,  on  découvrit  de  magnifiques 
débris  de  sculpture  ;  ces  fragments  qui  se  retrouvèrent 
presque  tous  avaient  servi,  en  guise  de  moellons^  à 


—  19  — 

maçonner  une  baie  dans  le  mur  latéral.  Le  propriétaire, 
M.  Ligeron,  a  consenti  à  les  offrir  gracieusement  au 
musée  de  la  Porte-du-Croux.  Ils  correspondent  bien  à 
la  description,  par  le  P.  Gallemant,  du  tombeau  élevé 
au  milieu  du  chœur,  «  en  très  beau  marbre  noir,  avec 
Teffigie  couchée  de  la  comtesse  Yolande  » . 

Ceux  qui  ne  seraient  pas  à  même  de  visiter  cette 
belle  sculpture  qui  couronnait  le  tombeau,  seront  au 
moins  im  peu  dédommagés  par  la  description  qu'en  a 
faite  M.  Bouveault,  architecte  :  «  La  statue  couchée, 
en  marbre  noir,  est  de  grandeur  naturelle.  La  comtesse 
est  vêtue  d'une  longue  robe  dont  l'un  des  plis  retombe 
sur  le  bras  gauche.  Les  deux  mains  jointes  et  posées 
en  avant  de  la  poitrine  lui  donnent  l'attitude  *  de  la 
prière.  La  tête,  parfaitement  sculptée,  intacte,  n'a  pas 
de  couronne  ;  des  bandelettes  et  un  voile  entourent  le 
visage  et  viennent  se  réunir  sous  le  menton.  Les  yeux 
ouverts  donnent  à  la  figure  un  aspect  doux  et  vivant. 
La  tête  était  abritée  par  un  dais  richement  sculpté  ». 
Assurément,  ce  monument  ne  date  pas  du  temps 
qui  a  suivi  immédiatement  la  mort  de  la  fondatrice  du 
couvent  de  la  Chaussée,  1281.  Il  faut  donc  admettre 
que  les  restes  de  la  comtesse  Yolande  ont  été  transpor- 
tés dans  le  nouveau  couvent,  et  non  le  tombeau  entier, 
qui  pouvait  avoir  subi  des  mutilations  par  suite  des 
guerres  avec  les  Anglais.  En  tout  cas,  ce  qui  reste 
du  monument  funèbre  indique  bien  dans  ses  détails 
au  moins  le  milieu  du  quatorzième  siècle. 

Le  chœur  d'assez  vastes  dimensions,  avec  l'autel  en 
avant,  n'est  pas  un  fait  insolite;  au  contraire,  cette 
disposition  est  ordinaire  dans  les  églises  de  religieux 
où  les  fidèles  sont  admis  et  peuvent,  de  la  nef  qui  leur 
est  réservée,  entendre  la  psalmodie,  jouir  des  cérémo- 
nies et  s'édifier  de  la  parole  divine. 
M.  de  Sainte-Marie  énonce  une  chose  inexacte  en 


disant  que  les  connaisseurs  admiraient  le  tableau  du 
maître-autel.  Il  donne  à  entendre  que  l'autel  était 
rapproché  du  fond  du  chevet,  et  que  ce  tableau  de 
valeur  le  surmontait.  Or,  d'après  le  texte  très  clair  du 
P.  Gallemant,  qui  décrit  ce  qu'il  a  vu,  l'autel  était 
bien  plus  rapproché  du  milieu  de  l'église,  en  avant  du 
chœur  des  religieux  ;  car  le  beau  sépulcre  de  la  com- 
tesse Yolande  s'élève  au  milieu  du  chœur,  derrière  le 
maltre-autel  :  «  Extat  in  medio  chori,  pone  altare 
majus..,  nobile  sepulcrum  Yolandis  comitissœ  (1). 
Sans  nier  l'existence  de  ce  remarquable  tableau,  il 
faut  lui  assigner  une  autre  place,  que  je  ne  me  charge 
pas  de  déterminer. 

Le  maître-autel  est  dédié,  de  même  que  l'église,  à 
Tous  les  Saints  ;  il  a  été  élevé  aux  frais  de  la  confrérie 
de  ce  nom,  qui  contribua  à  la  construction  de  ce  bel 
édifice  (2). 

Pour  la  question  de  patronage  de  l'église,  nous  nous 
en  rapportons  de  préférence  à  notre  auteur  qu'à  Par- 
mentier,  qui  pourtant  affirme  qu'elle  fut  dédiée  aux 
apôtres  saint  Pierre  et  saint  Paul,  dont  on  voit  des 
images  partout,  et  non  pas,  comme  on  le  croit,  à  Tous 
les  Saints  ;  car  aux  semi-doubles  on  en  ferait  mémoire, 
et  on  ne  le  fait  pas.  —  Parmentier,  au  lieu  de  s'engager 
bien  à  l'aventure  dans  ce  cas  de  liturgie,  aurait  bien 
mieux  fait  de  questionner  un  père  Récollet,  qui  l'aurait 
renseigné  sûrement  et  dans  le  sens  du  P.  Gallemant, 

L'autel,  éloigné  de  l'abside  et  rapproché  de  la  nef, 
atténue  la  longueur  de  l'église,  et  met  en  équilibre  les 
proportions  de  l'édifice  en  lui  imprimant  un  caractère 
particulier  de  grandeur,  de  piété  et  de  recueillement. 

C'est  ainsi  que  le  plan  primitif  a  été  conçu. 

(1)  p.  Gallemant,  p.  9i, 

(2)  nnd.,  p.  88. 


—  2i  - 

Continuons  la  visite  de  l'église. 
Les  chapelles  que  nous  aurons  à  examiner,  ont  été 
ajoutées  à  plus  de  deux  siècles  d'intervalle. 

c  Dans  le  pourtour  de  l'église,  on  compte  huit  cha- 
pelles, cinq  du  côté  du  cloître  et  trois  de  l'autre  côté, 
dont  deux,  celle  du  Saint-Sépulcre  et  celle  de  Saint- 
Jérôme,  furent  construites  grâce  aux  aumônes  des  fidè- 
les, et  surtout  aux  largesses  de  la  très  excellente  princesse 
Charlotte  de  Bourbon.  Dans  la  suite,  elles  furent 
ornées  d'élégantes  peintures  et  de  statues  ou  sculptures 
{picturis  et  imaginibus),  par  la  pieuse  duchesse  Marie 
d'Albret  »  (1). 

L'Album  du  Nivernais  dit  que  la  belle  sculpture  de 
la  Chasse  de  Saint-Hubert,  dans  l'ancienne  maison  du 
docteur  Le  Blanc  Bellevaux,  n^  26,  rue  Saint-Martin, 
provient  de  la  chapelle  du  Saint-Sépulcre.  Aurait-elle 
été  donnée  par  Marie  d'Albret  ?  C'est  xme  représenta- 
tion qui  répond  bien  au  mot  imaginibus. 

Tandis  que  saint  Hubert  se  livre  à  son  plaisir  favori, 
tout  à  coup,  se  tourne  vers  lui  le  cerf  qu'il  poursuivait. 
L'animal  est  tranquille  comme  s'il  ne  courait  aucun 
danger  ;  il  s'avance  gravement,  la  tôte  haute,  le  front 
calme,  portant  entre  ses  cornes  un  crucifix  resplendis- 
sant. A  cet  aspect,  les  chiens  haletants  s'arrêtent, 
saint  Hubert  tombe  à  genoux  et  son  piqueur  le  regarde 
étonné. 

La  troisième  chapelle,  dédiée  à  Notre-Dame  de 
Lorette,  fut  b&tie  aux  dépens  de  Léonard  du  Pontot, 
bailli  de  Nevers. 

La  première  chapelle  du  côté  du  cloître,  sous  le 
vocable  de  saint  Bonaventure  et  des  deux  saint  Jean, 
fut  élevée  par  le  même  Léonard  du  Pontot. 

(1)  P.  Gallemant,  p.  88. 


-  22  — 

La  deuxième,  par  une  dame  de  La  Chôze,  en  l'hon- 
neur de  saint  Alexis. 

La  troisième,  de  Tlmmaculée-Conception,  a  pour 
fondatrice  Tillustrissime  princesse  Marie  d'Albret. 

La  quatrième  a  été  bâtie  par  le  seigneur  de  Bussière, 
en  ex-voto  à  Notre-Dame  de  Pitié. 

La  cinquième,  par  la  dame  de  Nanvigne,  veuve  de 
feu  Guillaume  Zenon,  à  la  gloire  de  sainte  Marie- 
Madeleine  et  de  saint  Christophe  (1). 

Revenons  à  la  chapelle  du  Saint-Sépulcre,  où  il  nous 
reste  : 

1«  A  voir,  —  toujours  d'après  le  P.  Gallemant,  — 
«  le  grand  mausolée  en  marbre  blanc,  incrusté  de  por- 
phyre, qui  ne  redira  jamais  assez  la  gloire  des  ducs  de 
Nevers  et  leur  bienveillant  intérêt  pour  notre  église  ». 

29  A  nous  demander  :  pourquoi  ce  monument  dans 
cette  chapelle  plutôt  que  dans  une  autre  ?  Or,  le  P.  Gal- 
lemant nous  en  indique  ailleurs  la  raison  :  c'est  que, 
sous  cette  chapelle  du  Saint-Sépulcre,  est  creusé  un 
caveau  destiné  à  la  sépulture  des  ducs  de  Nevers.  Les 
restes  de  plusieurs  membres  de  leur  famille  y  repo- 
sent, dont  les  épitaphes  nous  font  connaître  les  noms  : 
je  ne  reproduis  pas  les  inscriptions  pompeuses  ;  je  me 
bornerai  à  indiquer  les  personnages  avec  les  dates  de 
décès  : 

Prince  Engilbert  de  Clèves,  comte  de  Nevers,  d'Eu, 
d'Auxerre,  mort  le  21  novembre  1506. 

Prince  Charles  de  Clèves,  fils  d'Engilbert  et  de 
Charlotte  de  Bourbon. 

Prince  Louis  de  Clèves,  mort  à  Amiens,  le  24  sep- 
tembre 1545. 

Princesse  Marie  d'Albret,  morte  à  Paris,  en  son 
palais,  le  17  octobre  1549. 

(1)  P.  GiaLEMANT,  p.  89. 


—  23  — 

Marie  de  Clèves,  fille  de  François  de  Clèves,  épouse 
du  très  excellent  prince  de  Condé,  morte  à  Paris,  au 
mois  d'octobre  1574. 

A  la  suite  de  ces  épitaphes,  Gaignières  ajoute  que 
dans  le  fond  de  la  cave,  du  côté  des  pieds  des  sépul- 
tures (c'est-à-dire  au  levant),  est  l'image  de  Notre- 
Dame  des  Vertus,  et  ces  inscriptions  étaient  accom- 
pagnées d'un  plan  du  caveau  qui  nous  aurait  été  très 
précieux  (1). 

n  est  certain  que  l'église  n'a  pas  été  agrandie  à 
partir  des  chapelles,  y  compris  la  continuation  de  la 
nef  ;  s'il  en  eût  été  ainsi,  l'addition  devenait,  par  là 
môme,  plus  considérable  que  la  partie  primitive,  et  dès 
lors  une  nouvelle  consécration  devenait  nécessaire, 
comme  nous  l'avons  vu  pour  l'église  des  Jacobins  — 
en  vertu  de  cet  axiome  :  major  pars  trahit  ad  se  minjCH 
rem  ;  —  or  il  n'y  eut  pas  lieu  à  une  nouvelle  consécra- 
tion, ce  qui  est  la  preuve  de  la  simple  addition  des 
chapelles. 

Une  récente  découverte  vient  corroborer  ce  plan 
d'église  si  allongée  :  le  32  mars  1900,  des  ouvriers 
pratiquaient,  pour  la  conduite  des  eaux,  une  fouille 
dans  le  parterre  d'entrée  du  Crédit  Lyonnais  qui 
occupe  l'emplacement  de  la  nef  et  des  chapelles  ;  ils 
avaient  fait  une  excavation  d'environ  un  mètre  de  pro- 
fondeur, sur  un  mètre  carré.  En  passant  devant  la 
porte  d'entrée,  je  vois  les  ouvriers,  je  remarque  sur  le 
bord  de  la  fouille  des  pierres  en  forme  de  dalles,  et  à 
l'intérieur  de  la  fouille,  par  côté  encore,  quelques 
dalles  à  environ  0  m.  50  de  profondeur,  elles  étaient 
posées  sur  leur  lit  de  mortier,  c'est-à-dire  non  dépla- 
cées ;  par-dessus  il  y  avait  des  pierres  pôle-mèle  comme 
dans  un  éboulement  :  croyant  voir,  dans  Tune  d'entre 


(1)  Grnde  Arch,  dans  Neven. 


—  24  — 

elles,  l'œuvre  du  ciseau,  je  la  fais  dégager.  C'était  un 

fût  de  colonne  de  la  nef Il  porte  les  caractères  du 

XIV*  siècle. 

L'église  est  donc  de  dimensions  considérables,  sur- 
tout en  longueur.  Comme  il  a  été  dit  plus  haut^  elle  a 
été  commencée  en  1371. 

Les  chapelles  sont  du  commencement  du  xvi«  siè- 
cle. Alors  fut  conçu  un  plan  d'agrandissement,  que 
contribuèrent  à  réaliser,  la  magnificence  des  princesses 
de  Nevers,  la  générosité  des  seigneurs  et  les  quêtes 
des  fidèles. 

Pour  fixer  l'époque  approximative  des  nouvelles 
constructions,  je  placerai  en  regard  des  noms  des  fon- 
dateurs les  dates  connues  de  leur  mort  ou  de  leurs 
fonctions  : 

Charlotte  de  Bourbon,  veuve  en  1506,  d'Engilbert 
de  Clèves,  se  retira  en  15...  au  couvent  de  Fontevrault 
où  elle  fut  inhumée . 

Léonard  du  Pontot>  fut  bailli  de  Nevers  de  1533  & 
1525.  (Parmentier). 

Dame  de  La  Chèze... 

Marie  d'Albret,  en  1506,  épouse  de  Charles  de  Clè- 
ves, meurt  en  1549. 

Dame  de  Nanvigne,  veuve  de  Guillaume  Tenon. 
Jeanne  de  la  Tillaye,  veuve  de  Guillaume  Tenon, 
seigneur  de  Nanvigne,  rend  hommage,  en  1526,  au 
comte  de  Nevers  pour  divers  biens  (1). 

L'addition  des  chapelles  remonte  donc  au  commen- 
cement du  xvv  siècle,  mais  successivement,  à  quel- 
ques années  d'intervalle.  Plus  tard,  dit  le  P.  Gallemant, 
c'est-à-dire  pas  aussitôt  après  leur  construction,  Marie 
d'Albret,  qui  mourut  en  1549,  orna  d'élégantes  pein- 

(1)  Inventaire  de»  titre»  de  Nevers,  de  Tabbé  dç  MaroUes,  p.  223. 


—  35  - 

tares  et  de  sculptures  les  chapelles  du  Saint-Sépulcre 
et  de  Saint-  Jérôme.  ' 

En  1515  elle  était  déjà  construite.  Par  son  testament, 
Charlotte  de  Bourbon  donne  1,200  livres  pour  l'édifice 
et  façon  d'une  sépultiure,  sur  le  lieu  où  est  inhumé 
Engilbert  de  Clèves. 

«  1515,  27  mai,  à  Fonte vrault.  Testament  de  Char- 
lotte de  Bourbon,  fait  à  l'abbaye  de  Fontevrault,  où 
cette  princesse  dit  vouloir  demeurer  pour  vivre  reli- 
gieusement le  reste  de  ses  jours.  Elle  laisse  à  ses  fils, 
par  égale  portion,  tout  le  bien  qu'elle  peut  avoir  au 
comté  d'Auxerre  et  les  arrérages  à  elle  dus,  à  cause  des 
2,000  livres  de  rente  données  par  le  roi  Charles  VII. 
Elle  donne...  ;  item,  1,200  livres  pour  employer  à 
l'édifice  et  façon  d'une  sépulture  sur  le  lieu  où  est 
inhumé  Engilbert  de  Clèves,  comte  de  Nevers,  en 
l'église  des  Cordeliers,  de  Nevers  (1)  ». 

Pendant  que  nous  sommes  dans  l'intérieur  de  Téglise, 
toujours  guidés  par  le  P.  Gallemant,  nous  entrerons 
dans  la  sacristie,  du  côté  du  cloître,  pour  y  vénérer 
de  précieuses  reliques  dont  les  principales  sont  : 

«  l*»Dans  une  croix  d'argent,  une  parcelle  considéra- 
ble de  la  vraie  Croix  ; 

»  2*»  Une  épine  de  la  couronne  qui  ceignit  le  front  de 
Notre-Seigneur  dans  sa  Passion,  renfermée  dans  im 
reliquaire  couvert  de  soie  rehaussée  d'or  ; 

»  3®  Dans  un  bras  d'argent,  \m  os  presque  entier  du 
bras  de  saint  Alexis. 

»  n  y  a  aussi  d'autres  reliques  moins  insignes  (2)  ». 

M.  de  Flamare,  archiviste  de  la  Nièvre,  a  trouvé 
dans  les  minutes  de  maître  Minard,  notaire  à  Moulins- 
Engilbert,  l'acte  de  donation  de  ces  reliques  aux  Pères 

(1)  IfwefUcdre  de$  titres  de  Nevers,  de  Tabbé  de  MaroUes,  p.  21. 
(3)  P.  GAixEMAirr,  p.  89. 


-26  — 

Récollets.  Il  en  a  pris  la  copie,  que  je  reproduis  en 
son  entier  : 

«  Par  devant  et  en  la  présence  de  Claude  Prévost, 
notaire  royal  au  bailliage  de  Sainct-Pierre-le-Moustier 
et  tesmoings  ci-apprès  nommés  :  Révérend  Père  Au- 
gustin Andrie,  gardien  du  couvent  des  Révérendz 
Pères  Récoletz  de  Nevers,  Révérendz  Père  Denis 
Le  Telier,  François  Triquet  et  Ambroize  Catuz,  reli- 
gieux dudict  couvent  ont  recogneu  et  ad  voué  avoir  receu 
de  la  pure  grâce  et  bienveillance  de  Pierre  de  Ber- 
thelon,  escuier,  seigneur  de  La  Forest  et  La  Cave  en 
partie,  et  de  feu  Gilbert  de  Berthelon,  vivant  escuier, 
sieur  de  ladicte  Cave,  dévotz  de  sainct  François,  ledict 
Pierre  de  Berthelon  demeurant  audict  lieu  de  La 
Foretz,  parroisse  de  Savigny-sur-Canne,  présent  et 
acceptant  les  reliques  suivantes  :  premièrement,  une 
particule  de  la  Vraye  Croix  de  Nostre-Seigneur  ;  plus 
une  espine  entière  de  sa  vénérable  couronne  ;  plus  une 
pièce  assez  notable  du  sacré  chef  de  sainct  Jehan- 
Baptiste  ;  plus  une  partie  de  coste  de  sainct  Maurice, 
martir  de  la  Légion  Thébaine,  pour  estre,  s'il  se 
pouvoit  faire,  honorés  et  respecter,  audict  couvent, 
comme  elles  méritent.  Et  par  ce  mesme  moien,  ledict 
sieur  Pierre  de  Berthelon  et  damoiselle  Marie  du 
Plesseys,  vefve  dudict  deflfimct  sieur  de  La  Cave, 
aussi  présente,  assistée  de  Jacques  de  Veilhan,  escuier, 
seigneur  d'Avrigny,  à  présent  son  mari,  ont  dit,  juré 
et  affirmé  ausdictz  Révérendz  Pères,  es  mains  dudict 
notaire,  tenir  lesdictes  reliques  de  feu  damoiselle  Marie 
Petit,  belle-mère  desd.  de  Berthelons  qui  les  avaient 
reçeuz  en  présent  d'ung  sien  oncle  jadis  doyen  de  la 
Saincte-Chapelle  de  Paris.  En  recognoissance  de 
laquelle  délivrance  lesdictz  Pères  religieux  ont  vouUu 
et  veulent  par  ces  présentes  que  lesd.  de  Berthelons 
et  les  leurs  ensemble,  ladicte  du  Plesseys  soient  randuz 


ÉeUSE    DES     R^COLLETS,  A    NEVERS 
_  Lavis  de  Martel  lange,  vers  1615. 

(Sesîin  de  MC^WAiitr  tfFituttrJ 


y 


-  27  — 

participans  comme  associez  à  TOrdre,  de  tous  les  sacri- 
fices, comunions,  suffrages  et  prières  qui  se  feront 
audict  couvent,  dont  moy  notaire  susdict  ay,  ce  requé- 
rant les  susdictz,  dressé  le  présent  acte  pour  servir  à  * 
Tadvenir,  de  ce  que  de  raison,  audict  couvent  de 
Nevers.  Après  midi,  le  sixième  jour  de  novembre  Tan 
mil  six  cens  trante-trois,  es  présence  de  François  de 
Lanty,  escuier,  seigneur  de  Maulpertuis,  demeurant 
au  Meuble,  paroisse  de  Boulon,  païs  de  Bourbonois,  et 
Louys  Cartin,  couvreur  d'ardoize,  et  Anthoine  Bar- 
bault,  aussy  couvreur  d'ardoize,  demeurantz  audict 
Nevers,  tesmoings  à  ce  requis  et  appelez  et  qui  ce  sont 
soubsignez  avec  les  parties. 

9  P.  de  Berthelon,     »  F.  Augustin,  gardien  indigne  du 
»  F.  de  Lanty ,  couvent  des  Récolletz  de  Nevers 

»  MarieduPlesseys,  »  Frère  Denis  Le  Tellier,  récollet. 
»  Jehan  de  Veilhan,    »  F.  François  Tricquet,  récollet, 
))  C.  Prévost,  ))  F.  Ambroise  Catheu, 

»  Anthoine  Barbault, 

»  Loy  Cartuin. 

»  Scellé  led.  jour  ». 


D'anciens  ornements  étaient  aussi  conservés  à  la 
sacristie  en  souvenir  de  Marie  d'Albret,  insigne  bien- 
faitrice du  couvent. 

«  1534,  9  juin,  au  châtel  de  Nevers.  Testament  de 
Marie  d'Albret,  comtesse  de  Nevers,  laquelle  élit  sa 
sépulture  en  l'église  des  Frères  mineurs  de  Nevers, 
dans  la  chapelle  et  au  lieu  où  est  son  époux.  Elle  veut 
que  son  cœur  soit  inhumé  à  Saint-Cyr...  ;  elle  fonde 
un  anniversaire  en  lad.  église  des  Frères  mineiurs,  pour 


—  28  — 

le  jour  d6  saint  Jérôme  et  lui  donne  100  écus  d'or  et 
tous  les  ornements  de  sa  chapelle...  (1)  » 

Dans  notre  visite  de  l'église,  outre  le  tombeau  de  la 
comtesse  Yolande  avec  sa  longue  inscription  sur  plaque 
de  marbre  noir  et  les  épitaphes  du  caveau  des  ducs  des 
Nevers,  nous  avons  foulé  de  nombreuses  dalles  avec 
des  croix  gravées  et  inscriptions  en  bordure  ;  nous 
avons  remarqué  une  grande  pierre  tombale  provenant 
de  l'église,  au  millésime  de  1597  et  fragments  de  lettres 
illisibles  (servant  de  pierre  à  évier  chez  Mlle  Hainaut)  ; 
une  autre  sur  laquelle  on  déchiffre  avec  peine  le  nom 
de  Marguerite  de  Fontenay  (dont  nous  trouverons  le 
nom  ailleurs)  ;  l'inscription  qui  recouvre  le  cœur  de 
Biaise  de  Lamoignon  ;  deux  grandes  plaques  de  pierre 
encastrées  dans  le  mur,  aux  armes  de  Chastellux  entou- 
rées de  feuillage  et  surmontées  d'un  heaume  de  cheva- 
lier. Les  beaux  caractères  gothiques  dont  elles  sont 
chargées,  étant  à  l'abri  du  pied  qui  efface  à  la  longue 
tant  de  souvenirs  confiés  à  la  dalle,  relatent  les  détails 
d'une  fondation  du  chevalier  Claude  de  Chastellux 
qui  demande  «  à  toujours  et  perpétuellement  la  célé- 
bration toutes  les  semaines  de  l'an  de  deux  messes  à 
voix  basse  ;  item  à  toujours  mais  perpétuellement  ime 
procession  avant  la  grand'messe  cothidiaine. . .  avec 
letanie  a  chant  et  a  haute  voix  et  à  la  fin  d'icelle 
letanie,  les  colectes  pertinens  et  accoustumiée3...(2))). 

Comme  l'élargissement  de  l'église,  d'après  le  plan 
de  1759,  offre  à  droite  et  à  gauche  les  mômes  dimen- 
sions à  partir  des  chapelles,  on  se  demande  comment 
il  n'y  en  a  que  trois  d'un  côté  et  cinq  de  l'autre. 

Du  côté  où  il  n'y  en  a  que  trois  correspondant  aux 
cinq  de  l'autre  côté,  il  faut  admettre  que  deux  des 

(1)  Inventaire  des  titres  de  Nevers,  p.  23. 

(2)  Aaz  faits  historiques,  voir  la  charte  analysée,  à  Tannée  14S7* 


-  29- 

trois  chapelles  sont  d'une  largeur  double.  Cela  se 
conçoit,  d'ailleurs,  que  la  chapelle  du  Saint-Sépulcre, 
la  plus  rapprochée  du  chœur,  ne  peut  être  de  la  dimen- 
sion des  chapelles  ordinaires  ;  car,  elle  reproduit  la 
grandeur  du  caveau  des  sépultures  des  princes  niver- 
nais,  placé  directement  au-dessous,  et  elle  contenait 
im  monument  qui  était  loin  d'être  mesquin,  «  le  grand 
mausolée  en  marbre  blanc  »  élevé  à  la  gloire  des  ducs 
de  Nevers.  Une  des  chapelles  du  môme  côté  sera  éga- 
lement double.  C'est  la  seconde,  d'après  un  dessin  de 
Martellange,  de  la  Bibliothèque  Nationale. 

Des  cinq  chapelles  correspondant  à  trois  seulement, 
j'avais  conclu,  à  bon  droit,  que  deux  étaient  doubles 
en  grandeur  et  que  le  bas  de  l'église  se  composait  de 
cinq  travées. 

lia  grande  vue  du  Palais  ducal,  par  Martellange, 
en  1615,' nous  représente  l'église  des  Récollets;  cet 
édifice  religieux,  à  l'angle  du  dessin  général,  pour  être 
traité  moins  en  détail,  est  fidèlement  représenté.  Cette 
copie  est  extrôment  intéressante,  avec  le  mur  de 
clôture  à  créneaux  arrondis . 

Dans  le  cadre  formé  par  le  fronton,  au-dessus  de 
la  petite  porte,  apparaît  une  partie  saillante  qui,  à  mon 
avis,  représente  en  relief  les  deux  mains  stigmatisées, 
armoiries  de  l'Ordre  Franciscain. 

La  petite  porte  conduit  au  portail  de  l'église  ;  la 
façade  du  portail  est  ajourée  d'une  splendide  fenêtre 
à  trois  meneaux  ;  les  contreforts  à  clochetons  indi- 
quent la  largeur  de  la  nef  ;  deux  fenêtres  d'égale 
grandeur,  à  deux  meneaux,  correspondent  aux  deux 
grandes  chapelles,  et  la  troisième,  plus  près  du  portail, 
moitié  moins  large  et  simple,  c'est-à-dire  sans 
meneaux,  éclaire  la  petite  chapelle. 

Qu'il  me  soit  permis  d'offrir  ici  mes  humbles  remer- 
ciements à  M.  G.  Rohault  de  Fleury,  qui  m'a  proposé 


-so- 
ie plus  aimablement  possible  de  reproduire  la  partie 
du  dessin  de  Martellange  représentant  l'église  des 
Récollets  ;  c'est  la  copie  à  la  plume  du  distingué 
archéologue  que  j'ai  l'honneur  de  mettre  sous  vos 
yeux. 

Le  détail  d'un  accident  arrivé  aux  vitraux  donne 
à  supposer  qu'ils  étaient  de  verre  blanc  avec  peut- 
être  une  simple  bordure  de  verre  de  couleur  : 

«  1629,  ordonnance  de  paiement  aux  Pères  Récollets, 
pour  raccommoder  les  vitres  de  leur  église,  cassées  par 
les  canons  tirés  dans  la  grande  cour  du  château,  le  jour 
du  feu  de  joie  de  la  prise  de  La  Rochelle  (1)  ». 

La  sacristie  commimiquait  directement  avec  l'église 
par  une  porte  intérieure  percée  dans  un  mur  très 
épais,  1  m.  40  ;  c'est  celui  surmonté  du  pignon.  Dans 
cette  ouverture,  condamnée  plus  tard,  on  a  trouvé  les 
fragments  du  tombeau  de  la  comtesse  Yolande. 

La  porte  extérieure,  occidentale,  de  la  sacristie  est 
la  porte  avec  colonnettes  sculptées  mentionnée  par 
M.  de  Soultrait.  Elle  est  du  xiv®  siècle.  Son  ornemen- 
tation, qui  n'est  pas  celle  d'une  porte  ordinaire,  et  son 
voisinage  de  l'église  indiquent  la  destination  de 
sacristie  dans  la  pièce  à  laquelle  elle  donne  accès,  — 
«  ci-devant  sacristie  »  (2). 

En  sortant  par  cette  porte  de  sacristie,  nous  retrou- 
vons encore  un  pan  de  mur  assez  considérable  de 
l'église,  avec  deux  contreforts,  distants  de  4  m.  50  et 
qui  tracent  nettement  trois  travées  après  la  travée 
double  correspondant  au  pignon.  La  face  extérieure  du 


(1)  Archives  municipales  de  la  ville  de  Nevers,  GC,  293. 

(2)  «  Acte  de  partage  de  tout  Tendos  et  maison  ci-devant  conventuelle  des 
Récolets  de  cette  cité,  à  Texception  de  la  ci-devant  église  et  sacristie 
y  joignante,  19  frimaire  an  U  de  la  République  ».  (Minutes  Pannecet.) 


-34  - 

mur  est  en  appareil  de  taille  avec  socle  saillant  de 
0  m.  10  et  de  1  mètre  de  hauteur  à  partir  du  sol. 

Dans  ce  mur  nous  avons  à  signaler  la  présence  de 
pierres  saillantes  dont  nous  indiquerons  plus  loin  la 
destination  en  parlant  de  o  l'ancien  cloître  ». 

Nous  rentrons  dans  l'église  et  y  donnons  un  dernier 
coup  d'œil.  —  Elle  est  exactement  orientée.  —  Elle 
est  vaste  et  paraît  plus  grande  en  raison  de  sa  longueur 
et  de  son  étroitesse.  Elle  est  riche  avec  ses  beaux  mau- 
solées de  marbre,  ses  peintures  et  ses  bas-reliefs,  svelte 
et  élégante  dans  son  ensemble. 

Nous  sortons  par  la  grande  porte  du  côté  du  Château 
et  nous  avons  à  droite  le  clocher  faisant  suite  à  la 
façade  comme  l'indique  le  plan  de  1759  et  aussi  cette 
mention  des  comptes  de  la  ville  : 

«  1618,  36  livt'es  pour  aider  les  Pères  à  bâtir  leur 
clocher  au  bout  de  leur  église  (1)  ». 

Je  ne  m'explique  pas  son  omission  sur  le  plan 
d'Israël  Silvestre  de  1650;  une  ancienne  vue  de 
Nevers  aura  été  rééditée  sans  tenir  compte  du  nou- 
veau clocher  ;  mais  le  toit  de  l'église  est  représenté 
sm^monté  de  deux  clochetons  :  l'un,  â  la  pointe  du 
chevet,  en  forme  de  tourelle  avec  dôme  renflé  comme 
on  en  voit  aux  minarets  ;  l'autre,  avec  campanile  et 
flèche  très  aiguô  correspondant  à  la  troisième  travée  de 
la  nef. 

En  1622,  peu  de  temps  par  conséquent  après  l'érec- 
tion du  nouveau  clocher,  dans  les  comptes  de  Jean 
Thonnelier  nous  voyons  figurer  «  une  somme  de 
18  livres  pour  aider  les  Pères  Récollets  à  refondre  \^ 
cloche  de  leur  couvent  (2)  ». 


(1)  Archives  communales  de  Nevers,  GC,  283. 

(2)  Ârch.  comm.  CC,  291. 


-  32  - 

Il  existe  devant  le  portail  de  l'église  une  bande  de 
terrain  libre  de  5  ou  6  mètres  de  large  pour  l'entrée. 

Le  long  de  la  rue  des  Récollets,  une  construction  est 
adossée  à  l'église,  à  l'angle  de  la  chapelle  du  Sépulcre 
jusqu'à  Tangle  du  pan  coupé  de  l'abside.  Etait-ce  la 
conciergerie  ?  Etait-ce  une  échoppe  ? 

Quel  sort  fut  réservé  à  la  belle  église  des  Récollets, 
comme  à  tant  d'autres  ? 

Aux  registres  des  délibérations,  du  6  septembre  1792, 
un  membre  observe  que  «  les  jours  où  le  courrier  arrive, 
un  nombre  assez  considérable  de  citoyens  s'assemble 
le  soir  à  la  société  séant  en  l'église  des  ci-devant 
Récollets  et  que  les  assemblées  qui,  durant  le  jour,  sont 
utiles  pour  propager  le  feu  du  patriotisme,  peuvent 
devenir  dangereuses  pendant  l'obscurité,  sur  quoi  le 
conseil,  considérant  qu'à  la  réception  de  nouvelles  ras- 
surantes l'allégresse  des  citoyens  pourrait  se  manifester 
avec  trop  d'éclat,  comme  à  la  réception  de  nouvelles 
attristantes,  leurs  alarmes  pourraient  troubler  la  tran- 
quillité publique,  arrête  que  la  société  ne  s'assemblera 
plus  après  neuf  heures  du  soir  ». 

((  12  décembre  1792.  Délibération  tendant  à  faire 
l'acquisition  de  l'église  des  Récollets  absolument 
nécessaire  pour  y  établir  une  halle  à  blé  ;  le  commis- 
saire des  guerres,  autorisé  par  le  district,  y  a  déjà 
établi  un  magasin  de  fourrages  ». 

«  14  brumaire  an  IL  Demande  par  le  citoyen  Chau- 
veau  (1),  serrurier,  d'im  réverbère  pour  éclairer  l'atelier 
que  lui  et  ses  confrères  occupent  à  la  ci-devant  église 
des  Récollets  où  ils  travaillent  à  des  ouvrages  pour  le 
compte  de  la  République.  —  Accordé,  sauf  à  rendre  le 
tout  en  bon  état  » . 


(1)  Plus  tard  an  des  acquéreurs  de  l'endos  et  de  la  maison  ci-devant 
conventuelle  des  Récollets. 


—  88  - 

a  Le  3  messidor  an  IV,  Gilbert  Frappât,  entrepre- 
neur de  bâtiments  à  Ne  vers,  se  rend  acquéreur  pour  la 
somme  de  8,604  livres  : 

»  De  la  ci-devant  église  des  Récollets  ; 

»  De  la  construction  qui  y  est  adossée,  au  chevet,  du 
côté  de  la  rue; 

»  Et  d'une  boutique  et  un  caveau,  attenant  au  chevet, 
du  côté  du  ci-devant  couvent  ». 

La  désignation  des  objets  est  ainsi  détaillée  : 

«  La  ci-devant  église  consiste  en  une  entrée  ayant 
de  longueur  10  toises  sur  2  de  largeur  hors  œuvre  et 
dont  le  tout  se  trouve  inférieur  à  celui  de  l'église  (plus 
près  du  Palais  ducal)  ; 

))  En  un  corps  de  bâtiments  servant  de  nef,  de  la  lon- 
gueur de  14  toises  sur  10  de  largeur  hors  œuvre,  et 
successivement  en  un  corps  de  bâtiments  formant  le 
chœur,  de  la  longueur  de  7  toises  sur  6  toises  3  pieds  de 
largeur  ; 

))  En  im  petit  bâtiment  faisant  partie  intégralle  avec 
ladite  église,  composé  d'une  chambre  et  d'un  caveau 
placé  le  tout  dans  l'entrevaux  de  deux  piliers,  le  tout 
couvert  en  thuiles  et  en  état  de  réparation  ; 

D  En  une  chambre  et  une  boutique  adossées  â  l'arrière 
chœur  ». 

Si  les  mesures  en  largeur  pour  l'église  sont  exactes , 
je  ferai  observer  qu'il  n'en  est  pas  de  môme  pour  la 
longueur.  Certainement,  dans  ce  sens,  on  a  toisé  â  vue 
de  nez  (comme  c'est  reconnu  pour  plusieurs  autres 
Ventes  nationales)  ;  attendu  que  l'abside  existe  encore 
et  la  maison  bâtie  sur  l'emplacement  de  là  bande, 
devant  l'entrée  de  l'église  ;  or,  j'ai  mesuré  60  mètres 
dont  il  faut,  à  la  vérité,  déduire  l'épaisseur  des  murs 
et  la  partie  de  l'abside  qui  va  en  rétrécissant.  Cette 
longueur  concorde  avec  le  plan  de  1759.  Il  est  certain^ 

T.  XL,  3*  série.  3 


—  34  — 

d'ailleurs,  que  cette  église  est  souvent  mentionnée 
comme  vaste;  il  fallait,  en  effet,  que  ses  dimensions 
fussent  respectables  pour  contenir  une  assemblée, 
dont  je  parle  plus  loin,  composée  de  1,100  notables  des 
trois  ordres  élus  pour  les  Etats-Généraux  de  1789. 


§  2.  —  Couvent  des  Récollets. 

On  entrait  dans  le  couvent  des  Récollets  par  un 
vaste  portail  du  dix-septième  siècle,  qui  existe  encore, 
situé  rue  actuelle  des  Récollets,  auparavant  rue  du 
Château  ou  montée  du  Château. 

Du  seuil  môme,  nous  voyons,  au  fond  de  la  cour  et 
à  gauche,  d'anciens  bâtiments  avec  arcades  bordées 
dans  leur  pourtour  d'une  bande  de  pierres  détaille, 
avec  claveau  saillant  au  milieu  du  cintre  et  cordon  de 
taille  plat  à  environ  1  m.  50  au-dessus  des  arcades  de 
la  galerie. 

Dans  le  côté  du  cloître,  à  gauche,  qui  a  été  recons- 
truit en  entier  à  partir  du  sol,  au  dix-septième  siècle, 
la  rangée  de  fenêtres  du  premier  étage  est  de  plus 
grandes  dimensions  que  celles  du  côté  du  cloître  au 
fond  de  la  cour. 

Le  bâtiment  du  fond  de  la  cour,  ou  côté  nord,  est 
plus  ancien  ;  a-t-il  été  construit  primitivement  avec 
une  galerie  ?  En  tout  cas,  elle  était  beaucoup  moins 
élevée  et  surmontée  de  deux  étages  d'appartements. 
Mais  pour  faire  suite  à  la  nouvelle  construction,  ouest, 
on  a  prolongé  le  pourtour  des  arcades  et  la  ligne  du 
cordon  qui  les  surmonte  ;  de  la  sorte,  un  étage  a  été 
supprimé,  seulement  sur  la  face  du  cloître,  et  il  en 
résulte  que  la  hauteur  sous  la  galerie  aurait  été  exces- 
3ive  :  on  y  a  remédié  par  un  faux  plafond  qui  laisse 


—  35  — 

un  grand  vide,  de  plus  de  1  mètre,  sous  le  plafond  de 
l'étage  supérieur. 

Ces  deux  côtés  du  cloître,  à  gauche  et  au  fond,  ne 
représentent  que  la  moitié  du  couvent. — A  droite,  des 
constructions,  dont  il  reste  juste  la  largeur  d'un  arceau, 
se  prolongeaient  pour  revenir  en  équerre  sur  le  côté  du 
cloître  à  gauche  :  ainsi  la  galerie  régnait  tout  à  Ten- 
tour  d'un  vaste  espace  un  peu  plus  long  que  large,  ou 
cloître  proprement  dit,  avec  cimetière.  A  plusieurs 
reprises,  les  fouilles  pour  la  conduite  des  eaux  ou  du 
gaz  n'ont  laissé  aucun  doute  à  cet  égard  ;  les  habitants 
de  la  com*  témoignent  tous  qu'à  chaque  fois  de  nom- 
breux ossements  humains  étaient  tirés  du  sein  de  la 
terre, 

La  partie' Est,  ou  de  droite,  du  parallélogramme  des 
bâtiments  est  donc  indiquée  par  une  première  arcade. 

Il  reste  aussi  une  bonne  amorce  de  construction  du 
côté  Sud,  ou  de  l'entrée,  et  dans  l'angle  à  gauche,  à 
la  largeur  de  la  galerie  du  cloître,  on  voit  engagé  dans 
le  mur  le  pilastre  et  le  commencement  d'arceau  de  la 
galerie  sud.  —  D'ailleurs,  le  plan  de  1759,  aussi  bien 
que  l'acte  de  partage  des  bâtiments  et  clos  du  ci-devant 
couvent  des  RôcoUets  (dont  nous  aurons  à  parler), 
concordent  avec  cette  description  sommaire. 

Entre  le  portail  et  les  bâtiments  du  cloître  propre- 
ment dit  existait  une  petite  cour  de  la  largeur  de  la 
façade. 

La  largeur  du  parallélogramme  intérieur  est  de 
13  m.  50,  et  la  longueur  de  18  mètres. 

La  largeur  du  cloître  est  de  3  mètres  ;  la  largeur  des 
appartements,  derrière  le  cloître,  est  de  7  mètres. 

Commençons  maintenant  un  rapide  parcours   de 
détails. 
Nous  sommes  â   l'angle  nord-ouest  du  cloître.  A 


-36- 

droite  et  &  gauche  des  deux  premières  arcades,  la 
galerie  est  murée;  en  face,  ime  porte  à  deux  bat- 
tants s'ouvre  et  donne  accès  à  \xQ,e  pièce  où  est  le  puits, 
de  vastes  proportions.  La  profondeur  est  en  rapport. 
On  tirait  Teau  au  moyen  d'une  a  roue,  qui  a  été  par- 
tagée entre  les  six  portionnaires  »,  qui  avaient  acheté, 
l'an  II>  Tenclos  et  la  ci-devant  maison  conventuelle,  à 
l'exception  de  l'église  et  de  la  sacristie  y  joignant  ;  la 
roue  fut  remplacée  par  une  poulie  qui  n'existe  plus  (1). 

En  dehors  de  la  cage  du  puits,  un  escalier  récent 
conduit  aux  appartements  du  haut. 

La  continuation  du  cloître,  à  droite,  est  occupée  par  un 
atelier  de  balancier,  M .  Millien-Bernard.  De  l'atelier  une 
porte  communique  avec  l'ancienne  cuisine  ;  on  y  descend 
par  six  marches.  En  entrant,  on  a  devant  soi  une 
grande  cheminée  dont  les  montants,  de  1  m.  96  de 
haut  et  de  2  m.  35  d'écartement,  sont  dépourvus  de 
leur  manteau.  La  pièce  est  éclairée  de  chaque  côté  de 
la  cheminée  par  une  fenêtre  donnant  sur  la  rue  des 
Ouches.  Le  plafond,  de  3  m.  30  de  hauteur,  est  en 
solives  et  mauvaises  planches  reposant  sur  deux  pou- 
tres. Cet  appartement  est  bien  misérable  et  ne  fait  pas 
venir  l'eau  à  la  bouche  en  pensant  à  la  nature  ou  à  la 
préparation  des  mets  qui  en  sortaient. 

Venant  de  la  direction  du  puits,  une  rigole  de  0  m.  20 
sur  0  m.  10  est  pratiquée  dans  le  dallage  et  se  pour- 
suit dans  le  sens  du  levant,  où  se  trouvaient  les  jardins  ; 
de  cette  manière,  l'arrosage  et  l'irrigation  se  prati- 
quaient avec  ime  économie  considérable  de  temps  et 
de  fatigue. 

J'ai  dit  que  dans  cette  partie  plus  ancienne  des 
constructions,  un  étage  avait  été  supprimé  du  côté  de 

(1)  Acte  de  partage  de  rendos  et  de  la  maison  ci-devant  oonventaelle, 
da  19  frimaire  an  II  de  la  République,  de  l'étude  Pannacet  ;  communiqué 
par  M.  AUroy,  de  la  rue  des  RécoUets,  petit-fils  d'un  des  six  acquéreurs. 


-37- 

la  face  du  cloître  ;  au-dessus  de  la  cuisine  et  du  côté  des 
appartements  opposés  au  cloître,  il  y  a  deux  étages, 
dont  un  au  moins  était  occupé  par  le  dortoir  ;  les  reli- 
gieux s'y  rendaient  par  un  escalier  de  pierre  encore 
existant.  Nous  sommes  certains  de  la  position  du  dor- 
toir, par  un  compte  de  maçon,  de  1456  :  (1)  «  pavé 
depuis  le  coing  du  vergier  des  Cordeliers  en  la  rue  des 
Hosches,  au  droit  de  la  porte  maistre  Dreux  Le  Tort, 
jusques  au  coing  du  pignon  du  dortouer  des  Cordeliers  » . 

Près  de  l'escalier  qui  monte  au  dortoir,  il  en  est  im 
qui  descend  du  côté  de  la  rue  des  Ouches,  au  guichet 
qui  donnait  sur  cette  porte  et  à  des  substructions, 
dépendances  du  couvent.  Ce  guichet  était  ime  porte  de 
service  pour  entrer  des  provisions  de  bois,  de  vin  ou 
de  légumes  et  non  une  porte  de  concierge . 

Le  môme  compte  de  maçon  signale  le  guichet  qui 
existe  encore  :  «  Pavé  en  la  rue  des  Osches,  depuis  le 
coing  de  ladite  rue,  derrière  chez  maistre  Jehan 
Leclerc,  jusques  au  guichet  de  chez  les  Corde- 
liers (2)  »• 

A  côté  du  guichet  il  y  a  de  petites  constructions 
souterraines.  A  l'extrémité  d'une  cour  assez  étroite,  on 
voit  ime  porte  à  deux  battants  ajoiu'és  d'une  petite 
ouverture  en  carré,  garnie  d'un  grillage  de  fer  ;  c'est 
tout  le  système  d'aération  et  d'éclairage  de  la  pièce  à 
laquelle  cette  porte  donne  accès.  —  Ce  vaste  souter- 
rain, de  20  mètres  de  long  et  6  de  large,  est  voûté  à 
plein  cintre,  et  quatre  arcs  doubleaux,  distancés  égale- 
ment, lui  donnent  un  air  grandiose  et  un  certain  cachet  ; 
on  y  descend  par  neuf  marches  et  le  fond  est  exhaussé 
par  un  dallage  assez  récent.  —  Plusieurs  cherchaient 
vainement  la   destination  de  cette  pièce  :  chapelle 

(i)  ce.  59,  Arch.  com. 
(2)  ce,  5^  Ârch.  com. 


-  38  - 

pour  les  pauvres,  lieu  de  distribution  des  aumônes,  à 
côté  du  ft  guichet  » .  L'acte  de  partage  de  la  maison  ci- 
devant  conventuelle,  dénomme  le  local...  ornée;  mais 
ce  n'est  pas  une  vulgaire  vinée. 

Dans  l'acte  de  partage,  entre  les  acquéreurs  en 
commun  des  bâtiments  et  de  l'enclos  du  ci-devant 
couvent,  je  pense  trouver  l'application  de  l'exhausse- 
ment du  sol  au  fond  de  la  cave,  de  môme  que  le  motif 
de  l'ouverture  de  la  trappe  pratiquée  dans  le  haut  de 
la  voûte.  La  cave  est  partagée  en  deux  lots,  qui 
furent  séparés  par  un  petit  mur  en  pied  et  par-dessus, 
une  cloison  de  planches. 

Le  fond  de  la  cave  est  attribué  au  possesseur  du 
cinquième  lot  de  partage  des  bâtiments  conventuels, 
â  la  charge  par  «  lui  de  pratiquer  une  ouverture  et  un 
escalier  dans  sa  cour  ci-dessus,  pour  l'encavage  de  son 
vin  ».  Or  il  pratiqua  l'ouverture  que  nous  remarquons 
dans  la  voûte,  exhaussa  le  sol  et  fit  placer  un  escalier 
en  bois  pour  l'usage  de  sa  portion  de  cave. 

Pendant  que  nous  sommes  â  proximité  de  la  rue  des 
Ouches,  franchissons  le  «  guichet  »  pour  donner  un 
Coup  d'œil  aux  constructions  du  couvent  qui  regardent 
la  rue.  Par  suite  de  la  différence  de  niveau  avec  le 
plateau,  plus  élevé  d'une  dizaine  de  mètres,  le  pignon 
est  d'une  belle  hauteur  et  d'un  effet  pittoresque  avec 
ses  grandes  fenêtres  des  xv^  et  xvi®  siècles  ;  d'autres 
fenêtres  plus  petites  éclairent  le  bâtiment  «  du  dor- 
touer  »,  qui  est  d'une  grande  simplicité  et  même  qui 
respire  la  pauvreté. 

Nous  remontons  au  couvent.  La  reconstruction  de 
la  partie  du  cloître,  à  gauche  en  entrant,  date  du 
XVII®  siècle  et  a  été  reprise  en  pied  ;  ses  arcades  lui 
donnent  grand  air,  et  le  bienveillant  intérêt  des  ducs 
de  Nevers  ne  doit  pas  être  étranger  ni  au  plan  dressé, 
ni  surtout  au  règlement  des  comptes. 


—  39  — 

Cette  réédification  n'était--elle  pas  nécessitée  par  les 
incendies  dont  à  plusieurs  fois  la  maison  a  eu  grande- 
ment à  souffrir  ? 

Nous  trouvons  dans  les  Comptes  de  la  ville  un  pre- 
mier incendie  en  1483  : 

(c  A  vénérable  et  discrète  personne  Gillaume  Gentil, 
prêtre,  curé  de  Vandenesse,  demeurant  à  Nevers, 
7  livres  tournois  pour  les  dommages  qu'il  a  soufferts,  à 
cause  des  huit  demi-tonneaux  de  vin  tant  vermeil, 
blanc,  que  clairet,  pris  en  sa  cave,  devant  les  Corde- 
liers,  le  lundi  veille  de  saint  Barthélémy,  pour  le 
gecter  au  feu  qui  était  prins  à  l'hôtel  de  Jean  Bour- 
bonnat  et  autres  lieux,  les  puits  et  fontaines  de  la 
ville  étant  taris  (1)  ». 

Le  couvent  des  Cordeliers  ne  fut  pas  indemne  ;  nous 
en  avons  la  preuve  dans  un  autre  détail  du  Compte  : 

«  Procession  le  jomr  de  Monsieur  sainct  Bartholomier, 
où  furent  portées  deux  torches  par  les  échevins,  en 
remerciant  Dieu,  notre  Créateur,  de  la  gr&ce  qu'il  nous 
a  faite  le  lundi,  veille  de  ladite  fête,  du  feu  qui  s'était 
prins  aux  Cordeliers  et  plusieurs  autres  lieux  de  la 
ville  »  (2),  c'est-à-dire,  d'avoir  préservé  la  ville  et  le 
couvent  de  plus  grands  malheurs  et  d  avoir  permis 
d'enrayer  le  feu  malgré  les  conditions  désavantageuses 
de  sécheresse  et  de  disette  d'eau.  —  Vu  la  situation  du 
couvent  attenant  à  Gloriette  et  s'étendant  jusqu'au  bas 
de  la  rue  par  les  jardins,  \\%  maison  Bourbonnat  occupait 
l'autre  côté  de  la  rue,  en  face  ou  un  peu  au-dessous  du 
portail  des  Cordeliers.  C'est  le  chœur  de  l'église,  le 
plus  à  proximité  du  lieu  de  l'incendie,  qui  eut  particu- 
lièrement à  souffrir  ;  les  caractères  d'architecture  de 
cette  époque  trouvent  leur  explication  dans  la  restau- 

(1)  ce.  78.  Arch.  comm. 

(2)  1483,  ce,  72,  Archiv.  corn. 


—  40  — 

ration  nécessitée  par  les  dég&ts  du  désastre  ;  en  effet, 
les  restes  de  nervures  prismatiques  du  chevet  et  les 
deux  fenêtres  murées  du  pignon  subsistant  accusent 
nettement  le  xv®  siècle.  ] 

Par  les  comptes  encore  nous  avons  connaissance  , 

d'un  nouvel  incendie  en  1543  : 

((  Aux  personnes  commises  à  la  garde  du  feu  prins  { 

de  nuit  aux  Cordeliers,  S6  sols  6  deniers  tournois  »  (1).  1 

i 

Nous  allons  continuer  la  visite  rapide  de  différents 
appartements  du  couvent,  tenant  à  la  main  l'acte  de 
partage  de  la  maison  ci-devant  conventuelle  des  Récol- 
lets. 

Après  l'ancienne  cuisine,  décrite  plus  haut,  vient  le 
puits  dont  il  a  été  aussi  parlé. 

«  Ensuite  un  lavoir  et  un  oflQce  se  joignant  ensem- 
ble, ledit  lavoir  ayant  ses  jours  sur  ladite  rue  des 
Ouches,  et  l'oflSce  sur  l'ancien  cloître,  aujourd'hui  en 
nature  de  jardin  » . 

«  A  la  suite  des  pièces  ci-dessus,  une  grande  salle 
qui  servait  ci-devant  de  réfectoire,  éclairée  par  trois 
croisées  donnant  sur  le  jardin  ».  La  porte  du  grand 
corridor  (nouveau  style),  communiquant  avec  cette 
salle,  est  celle-là  môme  par  laquelle,  jadis,  les  reli- 
gieux entraient  pour  prendre  en  commun  leur  chétive 
nourriture. 

Après,  deux  chambres  éclairées  chacune  par  une 
fenêtre  donnant  sur  le  jardin  vient  «  une  grande  cham- 
bre au  rez-de-chaussée,  connue  sous  la  dénomination 
de  bibliothèque  ». 

Puis  nous  arrivons  à  a  la  cage  du  grand  escalier  qui 
est  près  de  la  ci-devant  sacristie  » . 

(1)  ce.  114,  Archiv.  com. 


—  41  - 

«  Un  caveau  (petite  cave)  est  adossé  à  ladite  sacris- 
tie 1». 

Le  grand  escalier  conduit  à  une  pièce  au-dessus  de 
la  sacristie  et  qui  était  «  la  tribune  éclairée  par  une 
croisée  donnant  sur  un  arrière- jardin  qui  était  l'ancien 
cloître,  et  une  autre  croisée  donnant  sur  la  ci-devant 
église  ». 

Cette  pièce  a,  dans  sa  plus  grande  étendue,  la  largeur 
du  pignon  contre  lequel  s'appuie  l'église  et  environ  6 
mètres  dans  l'autre  sens  ;  elle  est  actuellement  divi- 
sée par  des  cloisons  de  briques  sur  champ  ;  ce  qui 
indique  l'absence  antérieure  de  murs  qui  auraient  été 
utilisés  au  moins  en  partie  ou  remplacés  par  une  cloi- 
son pouvant  tenir  lieu  de  support  sérieux. 

Il  nous  reste  à  déterminer  l'ouverture  de  communi- 
cation de  la  tribune  avec  l'église.  Elle  devait  être  au- 
dessous  et  entre  les  deux  fenêtres  du  pignon  ;  à  cet 
endroit  il  existe  une  cheminée  dont  l'enfoncement  du 
foyer  semble  pris  dans  la  baie  qui  donnait  jour  au- 
dessus  du  chœur  des  religieux. 

Dans  le  mur  occidental  de  la  tribune  a  été  percée, 
par  suite  de  nouveaux  aménagements,  une  porte  qui 
donne  accès  à  une  petite  galerie  suspendue  et  comprise 
entre  deux  contreforts  de  l'église.  Ici,  j'ai  remarqué 
deux  choses  : 

V  A  une  certaine  hauteur  régnait  un  cordon  tout 
autour  du  mur  extérieur  de  l'église.  A  cause  de  l'étroi- 
tesse  du  couloir,  il  a  été  supprimé  ;  mais  il  existait 
certainement,  et  les  coups  de  marteau  l'ont  grossière- 
ment mis  au  niveau  du  mur  ;  —  nous  en  retrouvons  le 
dessin  à  un  des  contreforts  du  chevet. 

2»A0m.30ou0m.40  au-dessus  du  plancher,  des 
pierres  en  claveaux  dessinent  un  fragment  de  partie 
cintrée  qui  dénote  le  commencement  d'une  porte  :  en 


—  4e  - 

effet  on  conçoit  bien  l'opportunité  et  la  convenance  de 
cette  porte  latérale,  surtout  quand  le  cloître,  avant 
d'être  entre  le  carré  de  bâtiments  du  couvent  plus 
récent,  se  trouvait  adossé  au  mur  nord  de  l'église  et 
au  mur  de  séparation  entre  le  petit  château  et  le  cou- 
vent. Un  peu  plus  loin  il  faudra  bien  que  je  parle  un 
peu  plus  en  détail  de  l'ancien  cloître,  duquel  plusieurs 
fois  a  fait  mention  l'acte  de  partage  de  la  ci-devant 
maison  conventuelle  des  ci-devant  Récollets. 

De  la  visite  sommaire  de  ces  constructions,  il  est 
facile  de  constater,  par  la  diiïérence  de  niveau  des  éta- 
ges, qu'elles  ne  sont  pas  de  la  môme  époque,  et  que  par 
la  suite  le  plan  a  été  modifié.  Nous  avons  déjà  signalé, 
comme  plus  récente,  la  façade  occidentale  de  l'inté- 
rieur du  cloître. 


§  3.  —  Dépendances. 

Le  premier  jardin  est  dénommé  :  «  verger  »,  dans  un 
extrait  des  Comptes  de  la  ville,  et  dans  l'acte  de  partage 
de  la  maison  conventuelle  en  1793  :  «  arrière  jardin 
ou  jardin  sur  l'emplacement  de  l'ancien  cloître  »  ;  —  il 
est  délimité  par  :  l'église  au  midi,  le  mur  de  la  maison 
Mancini  (le  petit  château)  au  couchant,  la  rue  des 
Ouches  au  nord,  et  au  levant  les  constructions  du 
couvent. 

Les  arbres  du  «  verger  »,  surtout  le  long  du 
mur  qui  séparait  le  couvent  d'avec  «  la  propriété 
Mancini  »,  plongeaient  leurs  racines  au  milieu  des 
ossements  des  premiers  religieux.  On  pouvait  supposer 
qu'à  l'origine  le  noyau  du  couvent  était  bien  plus  rap- 
proché de  Gloriette  qui  a  donné  asile  aux  religieux  un 
certain  temps;  l'acte  de  partage,  à  la  Révolution, 
donne  toute  certitude  à  cet  égard  ;  plus  de  dix  fois,  il 


—  43  — 

désigne  ce  jardin  sous  le  nom  d'ancien  cloître,  ce  qui 
explique  la  présence  des  pierres  et  corbeaux  engagés 
dans  le  mur. 

Le  second  jardin,  sur  le  grand  plan  de  Nevers  de 
1759,  est  divisé  par  milieu,  à  peu  près,  par  une  ligne 
parallèle  entre  les  deux  rues  des  Ouches  et  de  la  Montée 
du  Château  (actuellement  des  Récollets)  ;  la  partie  qui 
longe  cette  dernière  rue  s'appelle  jardins  du  haut; 
l'autre  portion,  en  contre-bas,  s'appelle  jardins  du  bas. 

Les  anciens  habitants  de  la  rue  disent,  d'après  la 
tradition,  que  le  jardin  du  couvent  était  séparé  de  la 
Montée  du  Château  par  un  mur,  c'est  conforme  à  l'acte 
de  partage  de  1793. 

La  ci-devant  maison  conventuelle  fut  partagée  peu 
de  temps  après  l'acquisition  entre  les  six  acquéreurs 
en  commun,  lors  de  l'adjudication^de  la  vente  natio- 
nale. En  conséquence,  six  lots  furent  composés  par 
des  experts  : 

Le  possesseur  du  premier  lot,  ayant  été  reconnu  de 
beaucoup  plus  avantagé,  fut  exclu  du  partage  du  jar- 
din au  levant  qui  restait  indivis. 

«  Les  cinq  autres  portionnaires  ayant  manifesté  aux 
citoyens  experts  l'intention  de  bâtir  une  maison  pour 
chacun  d'eux  sur  le  jardin  haut  qui  borne  la  rue,  la 
division  du  terrain  s'est  faite  en  cinq  bandes,  de  la  rue 
des  Ouches  à  celle  des  Récollets,  ayant  sur  cette  der- 
nière rue  chacune  trois  toises,  trois  pieds,  deux  pouces 
de  large,  à  partir  de  la  maison  Chaillot-Lugny  jusqu'à 
la  porte  cochère  des  ci-devant  Récollets  ». 

En  effet,  on  peut  constater  cette  égalité  mathé- 
matique de  façade  dans  les  maisons  numéros  30,  22, 
14,  26,  28. 


—  44  — 


II 


Après  la  visite  du  local  et  des  constructions  du 
couvent,  je  m'étais  proposé  d'y  jeter  un  peu  de  vie 
et  d'animation,  en  pariant  des  religieux  qui  l'ont 
habité,  des  personnages  qui  lui  ont  témoigné,  par  des 
largesses,  leur  bienveillant  intérêt,  et  des  faits  qui  se 
rapportent  à  son  histoire.  Mais  le  champ  était  bien 
vaste. ..  et  je  me  borne  à  de  courts  paragraphes  : 

Le  1®'  relatif  au  motif  spécial  de  bienveillance  de  la 
princesse  et  du  jeune  prince  de  Nevers  qui  accueil- 
lirent les  Cordeliers  dans  leur  château,  après  l'incendie 
du  couvent  de  la  Chaussée  ; 

Le  2«  donnant  un  aperçu  de  la  vie  des  Récollets  ; 

Le  3*  rappelant  les  principaux  bienfaiteurs  ; 

Le  4"^  groupant  les  faits  ou  événements  qui  se  rap- 
portent au  couvent,  en  dehors  de  ceux  mentionnés 
dans  le  récit. 


§ler 


Contrairement  à  l'assertion  de  Parmentier  qui  dit 
que  c(  les  Pères  demeurèrent  cinq  ans  sans  asile  après 
la  destruction  de  leur  couvent  do  la  Chaussée  »,  le 
P.  Gallemant  écrit  :  ((  Nos  Pères  pourtant  ne  restèrent 
pas  sans  abri,  en  1358.  Dès  aussitôt,  Marguerite,  fille 
du  roi  de  France  Philippe  le  Long,  et  alors  veuve  de 
Louis  II,  comte  de  Flandre  et  de  Nevers,  leur  offrit 
l'hospitalité  dans  son  propre  palais  de  Nevers,  leur 
concédant  la  partie  qui  s'appelle  Gloriette,  pour  y  éta- 
blir leur  église  et  couvent  (provisoires).  Le  16  avril,  le 
second  dimanche  après  P&ques,  ils  reçurent  l'acte  de 


—  45  — 

donation  en  bonne  et  due  forme,  avec  approbation 
d'Urbain  VI,  en  1363.  La  maison  fut  bénite  pour 
Tusage  des  Pères,  le  18  mai  1358,  par  notre  révéren- 
dissime  P.  Jean,  episcopo  Custodiensi  (1)  ». 

Nous  trouvons  aux  archives  du  Nord  (2),  la  «  permis- 
sion par  Louis  de  Maie,  aux  Frères  Mineurs  de  Nevers, 
dont  Téglise  et  le  monastère,  situés  hors  des  murs, 
avaient  été  incendiés,  de  venir  demeurer  provisoire- 
ment dans  l'enceinte  de  la  ville  et  d'y  célébrer  le  ser- 
vice divin  en  une  maison  particulière  ». 

Le  texte  précis  du  P.  Gallemant  nous  indique  la 
maison  particulière  dont  il  s'agit  :  c'est  «  G/o- 
riette  (3)  ». 

Une  délégation  de  commissaires  est  établie  pour 
faire  mesurer  une  place  en  la  ville  de  Nevers,  située 
près  le  Château,  place  que  les  Frères  Mineurs  de  cette 
ville  avaient  demandée  au  comte  afin  d'y  établir  leur 
couvent  :  les  commissaires  devront  s'assurer  si  l'éta- 
blissement dudit  couvent  ne  gênera  pas  l'entrée  ou  la 
sortie  du  Ch&teau  (4). 

Avec  l'aide  du  P.  Gallemant  nous  voyons  parfaite- 
ment comment  les  négociations  se  sont  engagées  et 
résolues  d'une  façon  satisfaisante  pour  les  Pères. 

La  princesse  Marguerite,  par  un  double  motif  de 
piété  et  de  reconnaissance  (nous  expliquerons  ce  mot 
un  peu  plus  loin),  recueille  dans  son  château  de  Glo- 
riette,  les  religieux  délogés  par  l'incendie.  Comme  elle 
ne  pouvait  disposer  des  propriétés  du  château  sans 
l'assentiment  de  son  fils  Louis  de  Maie,  elle  lui  écrivit, 
dit  le  P.  Gallemant,  en  lui  rappelant  «  qu'il  descen- 

(\)V.  Gallemant,  p.  84-85. 
(2)  B.  1596, 1141-1393. 

(^  P.  GaLLEH ANT,  p.  85. 

(4)  Archives  du  Nord,  B.  1596. 


r 

r 


dait  (1)  d'Yolande,  fondatrice  du  couvent  des  Frères 
Mineurs  à  la  Chaussée  et  que  le  vœu  de  son  cœur 
devait  ôtre  que  les  ossements  de  sa  bisaïeule  fussent 
déposés  dans  leur  nouvelle  église  ;  qu'il  avait  sucé  les 
principes  de  la  religion  et  ses  connaissances  dans  les 
lettres  chez  les  bons  Pères,  dans  leur  couvent  actuel- 
lement détruit  )) . 

De  ce  qui  précède,  nous  voyons  que  l'éducation  du 
jeune  prince  Louis  fut  confiée  aux  Frères  mineurs  dans 
leur  couvent.  De  plus,  «  l'effigie  couchée  de  la  com- 
tesse Yolande  »,  correspond  pour  ses  détails  d'archi- 
tecture à  la  fin  du  xiv<*  siècle.  Il  est  à  croire  que  les 
ossements  furent  relevés  et  qu'un  mausolée  nouveau 
le  recouvrit. 

A  la  prière  de  sa  mère,  Louis  s'acquitta  princière- 
ment des  devoirs  de  la  piété  filiale  envers  sa  bisaïeule 
et  de  la  reconnaissance  envers  ses  anciens  maîtres. 
Dès  lors  les  commissaires  délégués,  munis  de  pleins 
pouvoirs,  taillèrent  dans  les  dépendances  du  Château, 
pour  la  construction  du  nouveau  couvent,  en  ayant 
soin  que  «  l'établissement  dudit  couvent  ne  généra  pas 
l'entrée  ou  la  sortie  du  Ghâteau  ».  Il  n'y  a  pas  de  doute 
qu'ils  tracèrent  pour  ligne  de  séparation,  celle  formée 
par  le  mur  contre  lequel  était  adossé  <(  l'auvent  de 
l'ancien  cloître  t>. 

ft  Amortissement  par  Louis  de  Maie  est  accordé,  en 
considération  de  la  dame  sa  mère,  pour  certains  héri- 
tages acquis  par  les  Frères  Mineurs  de  Ne  vers  (2). 

(1)  Yolande  de  Boargogn«,  fille  de  Hagues  de  Bourgogne  et  de  Mahaut 
de  Bourbon,  épousa  en  premières  noces  Tristan,  quatrième  fils  de  saint 
Louis  et  en  deuxièmes  noces  Robert  lU  de  Flandre,  dont  elle  eut  : 

Louis  I"'  de  Flandre,  qui  épousa  Jeanne  de  Rethel. 
De  ce  mariage  naquit  Louis  II  de  Flandre,  qui  épousa  Marguerite  de 
France,  fille  de  Philippe-le-Long. 
Louis  ni  de  Flandre  est  leur  fils  et  Yolande  est  sa  bisaïeule, 

(2)  Archives  du  Nord,  B.  1566. 


-47- 

Le  P.  Gallemant  dit  qu'  «  existaient  encore  aux 
archives  du  couvent,  les  lettres  datées  du  4  septem- 
bre 1365,  par  lesquelles  le  prince  Louis,  leur  fondateur, 
déclare  donner  aux  Pères  à  perpétuité  tout  ce  lieu 
absolument  exempt  de  charges  ».  Les  religieux  durent 
acheter  ou  reçurent  en  pur  don  «  certains  héritages  » 
contigus. 

«  L'étroitesse  de  l'emplacement,  ajoute  le  P.  Galle- 
mant, s'élargit  par  l'acquisition  d'une  maison  et  d'une 
parcelle  de  jardin  données  par  les  héritiers  de  Réginald 
Lopper  (1),  et  d'une  autre  maison  occupée  accuelle- 
ment  par  le  chœur  de  l'église  :  «  presbylerium  eccle- 
siœ  ».  Pour  l'acquisition  de  cette  dernière  maison, 
Adhelma  d'Aubigny  donna  vdlontairement,  par  piété 
pour  Notre-Seigneur,  sa  propre  maison  ». 

Le  comte  Louis  de  Maie  concède  donc  aux  Corde- 
liers  une  partie  de  Gloriette,  de  manière  toutefois  que 
l'établissement  du  couvent  ne  gênera  pas  l'entrée  ou 
la  sortie  du  château.  Les  autres  annexions  qui  se  font 
du  côté  du  levant  montrent  que  le  plan  est  déjà 
arrêté  de  constructions  communiquant  directement 
avec  le  chœur  de  l'église,  du  cloître  adossé  au  mur 
nord  de  l'église  et  se  prolongeant  en  équerre  au  mur 
de  séparation  avec  le  château  de  Gloriette. 

Mais  un  si  grand  travail  ne  s'accomplit  pas  tout  à 
la  fois  et  sans  interruption.  Nous  lisons  :  ((  A  la  date 
du  2  novembre  1431,  que  le  couvent  de  l'ordre  des 
Frères-Mineurs,  le  dortoir,  le  cloître  et  le  réfectoire 
autrefois  fondés  et  bâtis  en  dehors  des  murs  de  Ne  ver  s, 
par  suite  des  guerres  et  autres  fléaux  qui  dévastèrent 
ces  quartiers,  sont  dans  un  tel  état  de  destruction  et 


(i)  Dans  Vlfwentaire  de  Tabbé  de  MaroUes,  page  235,  à  l'année  1367, 
on  voit  que  feu  Kegnauld  Loppier,  bourgeois  de  Saint-Pierre-le-Moûtier, 
9vait  marié  sa  fille  Margot  avec  Pierre  de  Champrobert,  damoiseau, 


—  48  - 

de  ruine  qu'ils  sont  devenus  absolument  inhabitables. 
Le  gardien  et  le  couvent  ont  commencé  une  nouvelle 
construction  dans  Tenceinte  de  la  ville  et  adressent 
une  supplique  poiu»  demander  des  indulgences  (1)  ». 

Le  30  septembre  1612,  Charles  de  Gonzague,  duc 
de  Nevers,  et  Catherine  de  Lorraine,  sa  femme,  don- 
nèrent une  maison  qui  leur  appartenait  pour  agrandir 
le  jardin  des  Récollets  (2).  Le  jardin  dont  il  s'agit  est 
celui  situé  au-dessous  du  couvent,  à  l'est. 

Les  Récollets  s'établirent  à  Nevers  le  27  janvier  1592, 
d'un  commun  accord  entre  le  duc  Engilbert  de  Clèves 
et  Monseigneur  Arnauld  Sorbin. 

A  ce  propos,  sans  aucune  base  sérieuse,  M.  de 
Sainte-Marie  raconte  que  l'Evèque  de  Nevers  les  avait 
fait  venir  en  secret  et  les  aurait  substitués  d'une 
manière  singulière  aux  Observantins.  —  L'Evoque 
ordonna  une  procession  générale  à  laquelle  devaient 
prendre  part  tous  les  Ordres  religieux  de  la  ville  ; 
pendant  la  procession,  les  Récollets  entrèrent  de  force 
au  couvent,  et  les  Observantins,  au  retour,  trouvant 
les  portes  fermées,  durent  se  résigner  et  prendre  le 
parti  de  se  retirer  à  Issoudun. 

§2. 

Le  P.  Gallemant  décrit  ainsi  la  vie  des  premiers 
religieux  de  cette  Réforme  : 

«  Leur  but  principal  fut  de  servir  le  Seigneur  dans 
les  travaux  et  les  épreuves,  dans  les  veilles,  la  soif,  la 
faim  et  les  jeûnes  multipliés,  dans  le  froid  et  la  nudité, 
dans  la  prière  perpétuelle,  la  pauvreté  la  plus  absolue 

(i)  Denâfle,  Désolation  des  églises,  monastères  et  hôpitaux  de  France^ 
1,53. 
(2;  Parmentibr  :  Archives  de  Nevers^  tome  I,  p.  354* 


—  49  -• 

et  le  zèle  des  âmes...;  leur  dénuement  dans  ces  premiers 
temps  fut  presque  incroyable  et  cependant  leur 
constance  joyeuse  dans  le  bien  ne  se  démentit  pas  un 
seul  instant  i>. 

A  une  époque  de  foi  vive,  une  pareille  austérité 
n'était  pas  un  épouvantail  et  un  repoussoir.  —  En  1649, 
à  cinquante  ans  du  berceau  de  la  réforme  franciscaine 
implantée  à  Nevers,  le  couvent  comptait  25  frères  : 
«  12  prêtres  dont  8  pour  la  prédication,  8  étudiants  en 
philosophie  et  5  frères  lais  ». 

Les  ressources  de  ces  pauvres  volontaires  consis- 
taient (1)  :  dans  l'aumône  qu'ils  quêtaient  ou  qu'on 
leur  apportait  et  dans  la  rétribution  qu'ils  recevaient 
pour  le  service  de  la  prison  et  de  l'hôtel-Dieu  (2),  pour 
leurs  prédications  (3),  pour  Ica:  .s  assistances  aux  enter- 
rements de  personnages  notables  (4). 

(i)  Le  P.  Gallemant  dit  que  si  les  temps  n'étaient  mauvais,  trente  reli- 
gieux pourraient  vivre  de  la  quête  de  chaque  jour  :  ■  ex  mendicatione 
quotidiana  *. 

(2)  La  ville  leur  faisait  une  aumône  annuelle  de  20  livres  ;  ils  avaient 
une  rétribution  pour  le  service  de  la  prison  ;  plus  tard,  en  vertu  de  la 
fondation  Charles  Roy.  ils  recevaient  640  livres  annuelles  pour  leur 
ministère  à  Thôtel-Dieu. 

(3)  L'aumône  donnée  en  retour  d'un  grand  sermon  était  bien  modique  : 
•  1397,  ce,  5.  A  religieuse  et  honnête  personne  le  lecteur  des  Frères 
mineurs  de  Nevers,  10  sols  tournois  pour  cause  d  un  sarmon  par  lui  fait  en 
l'église  Saint-Cyr,  le  jour  de  saint  Mathe  >. 

«  1740,  ce,  201.  Au  R.  P.  Théophile,  religieux  du  couvent  des  Récollets, 
80  livres  pour  avoir  prêche  V Avant  ■. 

(4)  À  l'occasion  des  sépultures  solennelles,  Tassistimce  des  Pères  était 
demandée  moyennant  une  aumône  ;  entre  plusieurs  actes,  le  testament  du 
chanoine  Henri  de  Saxoine  exprime  la  volonté  du  testateur  que,  «  pour  son 
convoi  de  sépulture,  les  Frères  Mineurs  accompagnent,  en  procession,  son 
corps  depuis  la  maison  jusqu'à  l'église...  »  et  le  testateur  donne  à  cet  effet 
10  sols  tournois  aux  Frères  Mineurs. 

De  plus,  pour  l'anniversaire  de  son  décès,  le  testateur  demande  au  cou* 
vent  des  Frères  mineurs  que,  la  veille,  on  dise  les  vigiles  des  morts  et,  le 
tour,  qu'on  célèbre  une  messe  des  défunts  et  que  les  Frôrrs  dudit  couvent 
se  rendent  en  proccession  avec  la  croix  sur  sa  tombe  et  chantent  le  Libéra 
avec  les  versets  et  oraisons  accoulumé.s,  et  à  ceteflet  il  lègue  30  sols  tournois 
aa  couvent  des  Frères  Mineurs. 

T.  iz,  3*  série.  4 


I 


-  50- 

Jusque-là  le  couvent  des  Franciscains  avait  été  soumis 
aux  supérieurs  de  la  province  de  Tours.  Mais  Sixte  V, 
rilluste  pape  franciscain,  par  un  bref  adressé  à  Arnaud, 
évêque  de  Nevers,  soustrait  le  couvent  de  cette  ville  à 
la  province  de  Tours  et  le  place  sous  Y  obédience  du 
provincial  de  la  France  parisienne,  qui  leur  avait 
promis  aide  et  protection. 

Ces  nouveaux  religieux,  tous  Italiens,  peu  initiés  à 
nos  usages  et  à  notre  langue,  constatèrent  bientôt  leur 
impuissance  à  remplir  les  difficiles  fonctions  de  prédi- 
cateurs et  de  directeurs  des  âmes.  Aussi,  après  cinq 
années,  ils  furent  rappelés  dans  leur  pays  natal,  où 
leur  absence  était  d'ailleurs  vivement  regrettée  ;  mais 
ils  ne  laissaient  pas  le  couvent  vide  ;  ils  avaient  par  la 
sainte  contagion  du  bon  exemple  attiré  près  d'eux  sept 
Français  qui  demeurèrent  fidèles  au  poste  que  la 
Providence  leur  avait  montré  et  continuèrent  l'œuvre 
commencée.  C'étaient  les  PP.  Marc  de  Saint-Denys, 
Antoine  Banneville,  Bernardin  Damineïs.  Denis  Le 
Tellier,  Thomas  Marc,  Nicolas  Haoùet  et  Nicolas  du 
Bret  ;  ce  dernier  n'était  pas  encore  prêtre. 

Le  Révérendissime  Père  général  désigna  le  P.  Marc 
de  Saint-Denys  comme  supérieur  du  couvent  de 
Nevers  et  Père  de  toute  la  Réforme  de  France  ;  le 
vicaire  fut  le  P.  Antoine  Banneville  et  le  premier 
maître  des  novices  le  P.  Nicolas  Haoùet. 

Au  moment  où  le  P.  Gallemant  écrivait  son  résumé 
d'histoire  (1649),  les  religieux  de  Nevers,  comme  il  a 
été  dit  plus  haut,  étaient  au  nombre  de  vingt-cinq. 

En  1790,  «  l'état  des  religieux,  prêtres  désignés  sous 
le  nom  de  Récollets  de  la  province  de  Saint-Denis,  qui 
occupent  le  couvent  de  Nevers,  est  ainsi  composé  : 
Frères  Denis  Heudebert,  Albert  Millard,  Agathange 
Dujardin,  Léonard  Renaut,  tous  clercs  ;  frère  Antoine 


-  51  - 

Thorel  et  frère  Protais  Legrand,  laïcs,  et  frère  Hubert, 
Autelet,  tierçaire  (1)  ». 

Le  petit  sceau  de  1730  porte  en  exergue  :  <r  Parvum 
sigillum provinciœ  Sancti-Dionysii  in  Francia  »  ;  saint 
Denis,  en  costume  d'évôque,  porte  sa  tête  entre  ses 
deux  mains  devant  la  poitrine,  au  milieu  de  deux  anges 
aux  ailes  éployées. 

Le  P.  Gallemant  cite  quelques  noms  de  religieux  de 
Nevers  ou  qui  ont  habité  le  couvent  et  se  sont  fait  un 
nom  : 

Le  P.  Rapine,  de  Nevers,  1629. 

Le  P.  Moret,  aussi  de  Nevers,  1632. 

Le  P.  Ignace  le  «Gault,  gardien  du  couvent  de 
Nevers,  en  1618,  qui,  à  la  prière  du  roi  très  chrétien 
Louis  le  Juste,  fut  nommé  vicaire  général  et  commis- 
saire apostolique  de  l'Ordre  en  France,  et  devint  défi- 
niteur  général  au  chapitre  général  de  Rome  en  1639. 

Le  P.  de  Banneville,  de  Paris,  le  premier  vicaire  du 
couvent  réformé,  qui,  dans  cette  charge,  vécut  digne 
de  tous  éloges  et  mourut  saintement  en  1599. 

Le  P.  Gallemant  donne,  depuis  l'origine,  la  liste  des 
gardiens  du  couvent  de  Nevers;  il  y  en  a  25  jusqu'à 
l'année  1648.  Ils  restaient  en  charge  trois  ans  quand  ils 
ne  venaient  pas  à  mourir  ou  à  être  appelés  par  leurs 
supérieurs  à  d'autres  fonctions. 


§3. 


Plusieurs  bienfaiteurs  insignes  ont  été  cités,  notam- 
ment en  parlant  de  l'église  et  des  chapelles.  Mais,  dit 
le  P.  Gallemant,  «  beaucoup  d'autres  personnes  firent 
de  pieuses  largesses  :  Charles,  roi  de  France  ;  le  comte 

(1)  Archives  de  la  ville,  GG,  144. 


-  52  — 

et  la  comtesse  de  Flandre  ;  le  duc  Charles  de  Bourbon, 
que  Ton  dit  avoir  donné  100  livres  et  avoir  posé  la 
première  pierre  des  fondations  de  l'église  ;  Jeanne  de 
Chantemerle  ;  Marguerite  de  Fontenay,  qui  exprima 
le  désir  d'être  inhumée  dans  l'église  et  donna  250  flo- 
rins ;  Marotta  de  Mézières  ;  Jean  de  Bonnelli  ;  Perrot 
le  normand  ;  Guillaume  Barbier  et  Jeanne,  sa  femme. 
—  Parmi  les  PP.  Récollets  :  le  P.  Jean  Pinauldi,  le 
P.  André  de  Magny,  le  P.  Guillaume  de  La  Chapelle, 
le  P.  Jean  Mutonis  et  le  P.  Poux  ». 

1365.  —  Le  jeudi  après  la  fête  de  saint  Martin-d'Été, 
Renaud  II,  abbé  de  Saint-Martin,  donne  une  maison 
aux  Frères  Mineurs  pour  agrandir  leur  église  (1). 


§4. 


Le  couvent  fut  en  état  de  recevoir,  en  l'année  1398, 
l'assemblée  du  chapitre  général  pour  la  dépense  duquel 
la  ville  donna  aux  Frères  20  écus,  valant  22  livres 
10  sols  (2). 

Confirmation,  par  Eugène  IV,  de  la  Confrérie  de 
Tous  les  Saints,  érigée  dans  l'église  des  Frères-Mineurs 
de  Ne  vers  (3). 

Après  l'incendie  de  1483,  il  y  eut  des  ruines  à  rele- 
ver. Un  courant  de  sympathie  se  porta  du  côté  du 
couvent  si  éprouvé  ;  de  là  datent  en  effet,  sous  l'impul- 
sion d  une  pieuse  émulation,  la  restauration  du  chevet 
de  l'église  et  bientôt  son  agrandissement,  par  l'addi- 
dition  des  huit  chapelles  latérales.  Dans  ce  même  temps, 
Claude  de  Chastellux  entre  dans  ce  mouvement  de 


(1)  GcUliâ  Christiana,  t.  XII,  liste  des  abbés  de  Saint-Martin. 

(2)  Parmentier,  Archives  de  Nevers,  t.,  I.  p.  352. 

(3)  P.  Galleuant,  p.  90. 


—  53  — 

pieuses  largesses  en  faisant,  par  testament,  un  legs 
considérable  aux  Frères  Mineurs  (1). 

1570,  10  mars.  —  Assemblée  dans  le  chapiteau  du 
couvent  des  Cordeliers  par  les  habitants  du  quartier 
de  Loire,  pour  l'élection  d'un  capitaine  au  lieu  de 
défunt  M«  Jehan  Jourdain. 

Election  des  conseillers,  le  dimanche,  jour  de  saint 
Michel,  29  septembre,  et  élection  des  échevins  le 
môme  jour  : 

En  l'église  Saint- Victor,  pour  le  quartier  de  Nièvre. 

Au  chapiteau  de  Saint-Etienne,  pour  le  quartier  des 
Ardilliers. 

Au  chapiteau  de  l'abbaye  Saint-Martin,  pour  le 
quartier  du  Croux. 

Au  grand  chapiteau  du  couvent  des  Cordeliers,  pour 
le  quartier  de  Loire. 

1639.  —  Election  des  conseillers  et  des  échevins  (2)  : 

1®  Assemblée  en  l'église  Saint- Victor . .  40  votants. 

2»  —  —      Saint-Etienne.  90      — 

30         —       aucloître  des  P.  Récollets  59      — 

4®         —  —      Saint-Martin . .  55      — 

Nous  ajoutons  immédiatement  à  la  suite,  Télection 
de  1639,  pour  expliquer  que  chapiteau  et  cloître  ont  la 
même  signification. 

En  1518,  les  Cordeliers  réformés,  connus  sous  le 
nom  d'Observantins,  remplacent  les  Cordeliers  conven- 
tuels. 

1518.  Diverses  pièces  concernant  l'acquisition  faite 
par  Charlotte  de  Bourbon,  comtesse  douairière  de 
Nevers ,  de  90  livres  tournois  de  rente  à  prendre  sur 
les  terres  de  la  Vallée,  de  la  Chaussée  et  la  dlme  de 

(1)  Le  texte  de  cette  charte  est  publié  au  Bulletin,  t.  X.,  p.  199. 
(2;  Registre  des  délibérations  de  la  ville  de  Nevers. 


—  54  - 

Baratoû.  • .  au  profit  des  Frères  Mineurs  de  Nevers , 
pour  partie  de  fondation,  dotation  et  augmentation 
du  service  divin  que  madite  dame  avoit  ordonné 
être  faites  perpétuellement  en  l'église  desdits  Frères 
Mineurs  (1). 

1521,  30  juillet,  au  Louvre.  Testament  de  Charles  de 
Cièves,  qui,  gisant  au  lit,  malade,  élit  sa  sépulture  au 
couvent  des  Cordeliers  de  Nevers,  au  lieu  où  son  père 
a  été  aussi  inhumé;  il  donne  auxdits  Cordeliers 
200  livres  (2). 

1525.  Le  Chapitre  général  des  Cordeliers  se  tient 
au  couvent  et  Ton  donne  10  livres  au  gardien  pour 
aider  à  la  dépense  (3). 

1534.  Dans  la  salle  capitulaire  se  réunirent  les 
commissaires  députés  pour  la  rédaction  ou  reformation 
de  la  Coutume  de  Nevers.  —  Je  ne  puis  désigner  cette 
salle  d'une  manière  précise  ;  toutefois,  comme  elle  doit 
réunir  certaines  conditions  de  grandeur  et  de  proxi- 
mité de  l'église,  je  la  placerai  dans  le  bâtiment  neuf, 
au  premier  étage,  au-dessus  de  la  bibliothèque  ;  on  y 
arrivait  par  le  «  grand  escalier  »  et  elle  communiquait 
avec  l'église  par  «  la  tribune  »  (4). 

1582,  15  septembre.  Louis  de  Flandre  et  de  Nevers 
donne  aux  Cordeliers  la  petite  cour  qui  se  trouve 
devant  leur  église  (5). 

1607-1617.  Cinq  des  enfants  de  Charles  de  Gonzague 
et  de  Catherine  de  Lorraine,  d  après  les  registres  de 
la  paroisse  Saint-Jean,  dans  la  cathédrale,  ont  été 
baptisés  dans  l'église  des  Récollets.  Il  avait  fait  vœu 
de  consacrer  à  saint  François  de  Paule  son  premier 


(1)  Titres  de  Nevers,  p.  435. 

(2)  W.,  p.  22. 

(3)  CO,  98,  Arch.  com.  de  Nevers. 

(4)  Parmentier,  t.  I,  p.  355. 
(^  Titres  de  Nevêrs,  p.  500. 


-  55  — 

enfant  mâle.  Cet  enfant,  baptisé  le  1®'  'août  1607,  fut 
tenu  sur  les  fonts  du  baptême  par  le  P.  Claude  Duvi- 
vier^  provincial  des  Minimes  et  nommé  François  de 
Paule. 

Charles  fut  baptisé  le  11  décembre  1609  ;  Anne,  le 
17  avril  1616;  Ferdinand,  le  2  septembre  1616; 
Benoite,  le  19  avril  1617. 

Le  R.  P.  Jean-Baptiste  fit  ériger  une  croix  devant 
l'église  le  25  mars  1764  ;  elle  fut  renouvelée  le 
28  mai  1776. 

Le  14  août  1768,  le  P.  Louis  prêcha  à  la  cathédrale 
l'oraison  funèbre  du  Dauphin. 

En  1770,  le  6  août,  une  messe  avec  Te  Deum  de 
reconnaissance  était  chantée  dans  l'église  des  Récollets 
pour  remercier  Dieu  de  la  grâce  accordée  à  un  soldat 
du  régiment  de  la  reine,  en  garnison  à  Nevers,  qui 
devait  être  passé  par  les  armes.  ' 

A  la  cérémonie  assistèrent  le  colonel,  M.  de  Tom^ny, 
et  un  certain  nombre  d'officiers. 

En  1788,  le  16  août,  dans  la  bibliothèque  du  couvent, 
se  réunit  l'assemblée  provinciale  du  Nivernais.  Elle  se 
composait  de  Pierre  de  Séguiran,  évoque  de  Nevers, 
et  de  onze  membres  :  deux  parmi  les  ecclésiastiques, 
trois  parmi  les  seigneurs  et  six  dans  le  tiers-état  (1). 

1789.  Les  mandataires  du  tiers-ordre  tinrent  leur 
séance  d'ouverture,  le  14  mars  1789,  dans  l'église  des 
Récollets  ;  elle  fut  présidée  par  Leroy  de  Prunevaux, 
bailli  d'épée  du  bailliage,  ayant  à  sa  gauche  le  lieute- 
nant-général civil  et  criminel,  noble  Guillier  de  Monts, 
et,  un  peu  au-dessous  de  l'estrade,  noble  Chaillot  de 
La  Chasseigne,  procureur  général.  La  droite  était 
occupée  par  les  députés  du  clergé,  au  nombre  de  301  ; 

(1)  Paul  Meunier,  la  Nièvre  pendant  la  CanvenHonj  !•'  vol.,  p.  xi. 


—  56  ^ 

la  gauche,  par  ceux  de  la  noblesse,  au  nombre  de  252  ; 
en  face,  était  le  tiers-état  en  nombre  égal  aux  deux 
ordres  privilégiés,  soit  553  (1).  Il  fallait  un  beau  local 
pour  contenir  à  l'aise  une  assemblée  de  plus  de 
1,100  personnes.  On  était  tenté  de  croire  à  l'exagéra- 
tion au  premier  énoncé  de  la  grandeur  (longueur  sur- 
tout) de  l'église  des  Récollets . 

Dans  son  Avis  au  lecteur  bienveillant ,  l'auteur  de  la 
Provincia  Sancti  Dionysii  Fratrum  Minorum  Recol- 
lectorum  nous  apprend  que  Jean  de  Naples,  ministre 
général  d'alors  de  tout  l'Ordre  Franciscain,  se  propo- 
sait de  revoir  et  de  contrôler  les  importants  écrits  de 
François  de  Gonzague,  maintenant  éyêque  de  Mantoue, 
concernant  l'histoire  de  l'Ordre;  dans  ce  but  il  char- 
geait tous  les  ministres  des  Provinces  de  l'Ordre,  de 
l'aider  dans  son  travail  par  des  recherches  sérieuses  et 
approfondies,  qui  lui  seraient  envoyées,  sur  la  fonda- 
tion, l'état  et  les  titres  de  gloire  des  Provinces  et  des 
Couvents. 

Au  P.  Gallemant  échut  cette  tâche  pour  la  Pro- 
vince des  Récollets  de  Saint-Denys  en  France.  Les 
notices  qu'il  composa,  il  se  décida,  le  P.  Ministre 
général  étant  mort,  à  les  faire  imprimer  pour  sauver 
de  l'oubli  quelques  feuillets  d'histoire. 

Il  prend  soin  d'avertir  son  lecteur  qu'il  n'a  rien  écrit 
que  sur  des  témoignages  fidèles  et  conformes  à  la 
vérité  (2). 

Non  content  de  cette  déclaration,  il  affirme  dans  sa 
notice  sur  le  couvent  de  Nevers  de  Tous  les  Saints  — 
qui  comprend  13  pages,  de  83  à  96  —  que  tout  ce  qui 
se  rapporte  à  sa  fondation  et  à  sa  translation  peut  être 

(i)  Album  du  Nivernais,  t.  I,  p.  86. 
(2)  Ad  lectorem  benevolum  admonitio. 


K^ 


—  57  — 

vérifié  sur  les  documents  conservés  aux  archives  de  ce 
môme  couvent  (1). 

Remercions  donc  l'historien  en  abrégé  du  couvent 
des  Récollets  de  Nevers. 

Sans  son  appui,  il  ne  fallait  pas  songer  à  un  essai  de 
reconstitution  sérieuse.  Je  me  suis  efforcé  de  tirer  le 
meilleur  parti  de  son  ouvrage,  mais  je  crains  de 
n'avoir  réussi  que  bien  imparfaitement. 

Abbé  A.  SERY, 

Chanoine. 


(1)  P.  Gallehant,  page  94. 


—  58  — 


FRANCIS  D'ALLARDE 


Par     PAUL     MEUNIER 


M.  le  colonel  de  Courson  a  fait  don  à  la  Société 
d'une  brochure  intitulée  :  «  Les  Chevilles  de  maître 
Adam,  menuisier  de  Nevers,  ou  les  Poètes  artisans, 
comédie  en  un  acte,  mêlée  de  vaudeville,  par 
MM.  Francis  et  Moreau,  représentée  pour  la  première 
fois,  à  Paris,  sur  le  théâtre  Montansier,  nivôse  an  IL 
—  Chez  M°»û  Masson,  libraire,  éditeur  de  pièces  de 
théâtre,  rue  de  TEchelle,  n®  10,  au  coin  de  celle  de 
Saint-Honoré.  1806  ». 

Deux  exemplaires  de  cette  brochure,  mais  d'une 
autre  édition,  existent  à  la  Bibliothèque  de  Nevers. 

Le  prétendu  portrait  d'Adam  Billaut  qu'on  remar- 
que en  tête  représente  un  menuisier  quelconque  en 
costume  du  xvi®  siècle,  et  a,  comme  facture  et 
comme  dessin,  tous  les  caractères  des  gravures  du 
commencement  de  ce  siècle. 

Les  C/iccilles  eurent  trois  éditions. 

Elles  furent  jouées  pour  la  première  fois,  le 
28  décembre  1805,  sur  le  théâtre  de  la  Montansier, 
appelé  alors  théâtre  Montansier  {palais  du  Tribunal). 

Si  l'on  consulte  les  affiches  des  théâtres  à  cette 
époque,  on  se  rend  facilement  compte  du  genre  cultivé 
dans  ce  théâtre  : 

Le  28  :  Théâtre  Montansier  :  la  première  représen- 
tation des  Chevilles  de  maître  A rfa/n,  vaudeville  en  un 
acte;  —  L'Ivrogne,  le    diable    couleur   rose;    — 


-59  — 

VHéloïse    de    l'isle    Saint-Louis    et   V Anguille   de 
Melun. 

Le  29  :  /e  Turc  de  la  rue  Saint-Denis  ;  —  le  Che- 
valier errant;  -^  V Intrigue  sous  les  toits  ;  —  le  Pont 
des  Arts. 

Le  30  :  Avis  à  Jocrisse;  —  Roquelaure ;  —  le 
Niais  de  Sologne;  —  Cadet  à  Chaillot, 

Le  31  :  M,  Largillière  ;  —  le  Timide  ;  —  Deux  et 
deux  font  quatre;  —  M,  Vautour, 

Les  Chevilles  tiennent  l'affiche  jusqu'au  17  mars 
sans  interruption. 

Ad.  Billaut  était  un  sujet  à  la  mode^  dans  le  goût 
de  l'époque. 

Le  29  prairial  an  III,  on  avait  représenté  Maître 
Adam,  menuisier  de  Nevers,  comédie  en  un  acte,  en 
prose,  mêlée  de  vaudeville,  par  les  C.  C.  Christian 
Le  Prevot  et  Philippon.  —  Théâtre  du  Vaudeville. 

Au  siècle  où  vécut  Adam  Billaut,  on  s'émerveilla  de 
voir  un  ouvrier  faire  des  vers  ;  mais  ce  fut  une  curio- 
sité avant  tout  dans  le  monde  des  Grands  et  des  lettrés. 
Sous  le  Directoire,  Adam  Billaut  eut  un  regain  de 
célébrité  grâce  à  un  autre  sentiment.  C'était  l'époque 
où  Bonaparte  nommait  maréchaux  de  France  des  gens 
qui  sortaient  du  petit  peuple.  N'importe  qui  pouvait 
arriver  â  tout.  Le  peuple  eût  applaudi  si  Adam  Billaut 
eût  vécu  alors  et  que  Napoléon  eût  fait  un  dignitaire 
de  ce  poète-artisan . 

Ce  n'est  pas  qu'Adam  Billaut  fut  un  poète  populaire 
dans  le  sens  où  nous  l'entendrions  aujourd'hui.  Un 
poète  ayant  l'inspiration,  le  ton  d'un  révolté,  poétisant 
les  revendications  populaires,  n'eût  pas  été  accepté  sur 
l'ancien  théâtre  de  la  réaction  thermidorienne  et 
royaliste  de  la  Montansier. 

En  effet,  môme  en  pleine  Révolution,  on  n'eut  pas 
l'idée  de  ce  que  pouvait  être  un  barde  populaire. 


—  60  — 

Toute  expression  de  la  pensée  était  malgré  tout 
solennelle,  en  style  convenu  et  classique. 

Quinet  fait  remarquer  que  le  faux  régnait  absolu- 
ment en  littérature. 

A  part  des  expressions  ordurières,  le  père  Duchône 
«  n'a  pu  saisir  le  vrai  langage  populaire  ». 

Saint-Just  était  un  classique. 

Noël  Pointe,  ouvrier  armurier,  récitait  à  Nevers, 
dans  les  cérémonies,  des  vers  inspirés  de  Tibulle,  de 
Properce,  d'Horace,  dont  les  incorrections  seulement 
dénotaient  la  main  inhabile  qui  les  avait  tracés.  (Revue 
du  Nivernais). 

Marie-François-Denis  Leroi  d'Allarde,  plus  connu 
sous  le  pseudonyme  de  Francis,  auteur  dramatique,  né  à 
Besançon,  le  12  mars  1778,  mort  vers  1840,  était  fils  du 
baron  d'Allarde.  Ce  vaudevilliste  très  fécond  a  débuté, 
en  1798,  au  théâtre  des  Troubadours,  par  Arlequin 
aux  petites  maisons.  Depuis  il  a  donné,  soit  seul,  soit 
en  collaboration  avec  Chazet,  Lafortelle,  Moreau, 
Desaugiers,  Ourry,  Scribe,  Dartois,  Dupaty  et  autres, 
une  infinité  de  pièces,  dont  la  plupart  ont  obtenu  des 
succès  considérables.  Nous  citerons  :  les  Chevilles  de 
maître  Adam  (1803)  ;  Boileau  à  Auteuil  (1806)  ;  les 
Femmes  colères  (1804)  ;  le  Soldat  laboureur,  les 
Ouvriers  (1824)  ;  Clara  Wendel  (1827)  ;  la  Famille 
du  Porteur  d'eau  (1824)  ;  la  Fille  mal  gardée  (1822)  ; 
l'Homme  de  paille  (1827).  Francis  était  encore  un 
chansonnier  aimable.  Le  recueil  de  ses  chansons  a  été 
publié  (Paris,  1824).  On  trouvera  la  liste  de  ses  œuvres 
dans  Querard,  France  littéraire,  1. 1®',  p.  33,  et  dans 
Bourquelot,  Littérature  française,  t.  I®','p.  20. 

Comme  au  marquis  de  Rochefort,  père  du  pam- 
phlétaire, il  ne  lui  était  resté  que  son  nom  et  son  titre 
à  travers  les  péripéties  de  la  fin  du  xvm«  siècle.  * 


-  61  — 

Il  se  fit  vaudevilliste,  chansonnier  fut  membre  du 
Caveau,  l'émule  de  Désaugiers  et  de  Scribe,  Duvert  et 
Lausanne,  pléiade  de  gais  auteurs  qui  cultivaient  le 
flon-flon,  le  couplet  final,  le  dialogue  sentimental  pour 
s'en  faire  quelques  rentes, 

Il  pensa  sans  doute  que  son  nom  et  son  titre  ne 
répondaient  pas  à  son  métier  de  vaudevilliste  et  signait 
ses  œuvres  de  son  prénom  Francis;  un  nom  quelconque. 

Cela  amène  à  faire  une  sorte  de  parallèle  entre  la 
situation  d'Adam  Billaut  et  celle  de  Francis  au  point 
de  vue  social,  suivant  les  époques  où  ils  vécurent. 

Adam  Billault,  un  artisan,  est  sur  le  Parnasse ^ 
d'après  le  langage  du  temps  ;  la  culture  des  lettres  est 
pour  lui  l'exercice  d'un  don  supérieur.  On  le  compare 
aux  plus  grands  poètes,  bien  qu'en  définitive  il  ne  fit 
que  des  chansons  et  ne  mît  parfois  en  vers  que  des 
polissonneries. 

On  s'étonnait  qu'un  homme  pût  faire  en  mémo  temps 
des  coffres  et  des  vers,  tant  le  don  de  la  poésie  avait, 
alors  de  lustre,  et  il  faut  dire  qu'il  exploitait  avant 
tout  cet  étonnement  pour  s'en  faire  des  rentes. 

Les  plus  grands  seigneurs  le  recherchaient  ;  mais  en 
réalité  lui  faisaient  des  farces  comme  à  un  bouffon  et 
lui  promettaient  plus  qu'ils  ne  lui  donnaient. 

Cent  cinquante  ans  après,  le  baron  d'Allarde  pour 
vivre  fait  des  chansons  et  des  vaudevilles  ;  c'est  une 
clientèle  bourgeoise  qui  l'appelle  Francis  tout  court, 
qui  lui  fait  des  rentes  et  l'applaudit.  Il  a  la  dignité 
d'un  homme  qui  ne  mendie  pas,  plus  de  talent  sans 
doute  que  Adam  Billaut,  mais  il  est  bien  vite  oublié 
et  aujourd'hui  il  faut  qu'il  ait  touché  à  Adam  Billaut 
pour  que  je  le  rappelle  à  votre  mémoire. 

Francis  nous  amène  à  parler  de  son  père  qui  joua  un 
rôle   au  commencement  de    la   Révolution  dans  la 


Nièvre  et  à  rappeler  une  famille  importante  du  Niver- 
nais complètement  éteinte  aujourd'hui  dans  le  pays. 

Le  père  de  Francis,  ainsi  que  le  marquis  de  Bonnay, 
et  le  comte  de  Sérent  ont  marqué  non  seulement 
dans  la  députation  du  Nivernais  aux  États-Généraux, 
mais  aussi  à  la  Constituante. 

Le  Dictionnaire  biographique  de  M.  V.  Gueneau 
relate  que  Leroy  (Pierre-Gilbert),  baron  d'Allarde, 
est  né  à  Montluçon  le  9  août  1852  de  J.-B.  Le  Roy, 
chevalier,  baron  d'AUarde,  seigneur  de  Guy  et  d'Anne 
de  Rolland. 

C'est  la  date  de  1852  qu'on  trouve  dans  le  Diction- 
naire des  parlementaires  et  dans  la  Nièvre  pendant 
la  Convention. 

La  Grande  Encyclopédie  le  fait  naître  en  1749. 

Son  père  était  non  pas  J.-B.  Leroy  qu'on  trouve, 
étudiant  à  Bourges  en  1716,  époux  d'Anna  Rolland, 
mais  le  fils  de  ce  dernier,  Charles  Leroy,  baron  d'Al- 
larde,  seigneur  de  Lomoy,  le  Puits  de  Varennes,  mort 
avant  1775,  époux  de  Marie- Angélique-Catherine 
Coiu-tois  de  Lomoy. 

Il  eut  à  Besançon  pour  fils,  Francis  qu'on  dénomme 
Marie-François-Denis  Teresa  Leroy  d'AUarde,  l'auteur 
des  Chevilles.  A  cette  époque,  il  était  capitaine  dans 
les  chasseurs  de  Franche-Comté. 

AUarde  est  située  dans  la  commune  de  Givardon, 
canton  de  Sancoins.  L'histoire  et  statistique  monu" 
mentale  du  Cher,  de  M.  Buhot  de  Kersers,  porte 
«  Alarde,  qui  appartint  au  xvni«  siècle  à  Charles 
Leroy,  aujourd'hui  à  M.  le  comte  de  Massiac  ». 

Le  baron  d'AUarde  avait  des  possessions  en  Morvan. 

Au  xvui®  siècle,  le  Bruys  fief  et  justice,  paroisse 
de  Montigny-en-Morvan,  châtellenie  de  Montreuillon, 
relevant  de  Château-Chinon  pour  partie,  appartenait 
au  baron  d'AUarde. 


-  63- 

Quant  aux  Grand  et  Petit  Guy,  anciennement  Nault 
ouNiault,  paroisse  de  Chougny,  terre  et  justice,  sei- 
gneurie et  château  relevant  de  Château-Chinon  (alié- 
nation ecclésiastique),  mais  revendiqués  aussi  comme 
faisant  partie  de  la  chàtellenie  de  Montreuillon,  ces 
possessions  appartinrent  à  Nicolas  Le  Roy  (descen- 
dant comme  son  parent  J.-B.  Leroy,  grand-père  du 
député,  de  Jean-Pierre  Leroy,  écuyer,  seigneur  de 
Guy,  Frétoy,  Marcilly  et  autres  lieux,  inhumé  à 
Gervon,  le  12  juillet  1697,  époux  de  :  1®  Madelaine  le 
Gastellier  ;  2^  d'Edmée  de  Marcellange). 

Francis  avait  une  tante  Anne  Gilbert,  qui  épousa, 
le  28  septembre  1790,  Antoine-Marie  le  chevalier  de 
Brecon  de  Ried,  ancien  major  d'artillerie,  chambellan 
du  roi  de  Bavière. 

Dans  la  branche  de  Guy,  on  trouve  au  commence- 
ment du  XIX®  siècle,  Jean-François-Sosthène  Leroy 
de  Guy,  mort  en  1804  (il  était  né  en  1801),  lequel  avait 
eu  pour  tantes  Marie-Françoise,  née  en  1760,  Reine- 
Geneviève,  née  en  1767,  à  Ghougny,  épouse  de  Jacques- 
Annet  Bardet  de  Bure,  chevalier  de  Saint-Louis  et  de 
la  Légion  d'honneur,  chef  d'escadron  en  retraite;  morte 
à  Nevers,  le  11  juin  1824,  Gharlotte  Leroy  de  Guy, 
épouse  de  Pierre  Deremy,  propriétaire,  conseiller  mu- 
nicipal de  Nevers  ;  morte  dans  cette  ville,  le  18  août 
1816,  Marie-Jeanne,  née  en  1765,  épouse  de  François- 
Ghristophe  Millereau  de  Vauban,  paroisse  de  Bazolles 
(Ghougny,  21  décembre  1789). 

Si  Francis  n^a  pas  eu  de  fils,  le  nom  de  Leroy  ne 
serait  donc  plus  porté  par  personne  de  cette  famille . 

Lors  de  la  convocation  des  électeurs  pour  les  Etats- 
Généraux,  le  baron  d'Allarde  comparut  comme  pos- 
sessionné  à  Givardon  ainsi  qu'au  Bruys,  et  fut  appelé 
comme  électeur  à  ces  deux  titres,  à  Saint-Pierre-le- 
Moûtier. 


-  64- 

Anne-Josèphe  de  La  Duz,  veuve  de  Pierre-François 
Leroy,  de  la  branche  de  Guy,  représentant  ses  enfants 
mineurs,  fut  appelée  pour  Guy  à  Nevers  et  représentée 
par  Etienne  de  Borne  de  Grandpré. 

Le  baron  d'Allarde  avait  été  page  de  la  Dauphine. 

Il  prit  une  part  active  aux  élections  mouvementées 
de  Saint-Pierre.  G'est  lui  qui  inspira  toute  la  partie 
relative  aux  finances  des  a  observations  de  l'ordre  de  la 
noblesse  sur  le  cahier  du  Tiers-Etat  »,  car  Tordre  de 
la  noblesse  ne  fit  pas  de  cahier  à  proprement  parler. 

Je  citerai  les  articles  18  et  19  des  observations  conte- 
nant un  vœu  qui  n'est  pas  encore  réalisé  :  «  Le  droit 
de  contrôle  diminue  en  raison  de  ce  que  le  prix  d'ac- 
quisition augmente  ;  il  serait  à  désirer  qu'on  lui 
donnât  une  proportion  inverse,  d'où  il  résulterait  que 
cet  impôt  porterait  sur  la  classe  la  plus  riche,  ce  qui 
serait  juste  ». 

Député  suppléant,  il  alla  siéger  à  Versailles  à  la 
place  de  M.  de  Bar,  qui  refusa  pour  cause  de  santé. 

Il  se  trouvait  à  Versailles  avec  le  comte  de  Lange- 
ron,  qui  semble  lui  avoir  servi  de  secrétaire.  Il  y  a, 
aux  archives  de  Nevers,  une  correspondance  relatant, 
séance  par  séance,  les  votes  de  l'Assemblée  et  tous 
les  incidents  parlementaires,  sous  forme  de  compte 
rendu  aux  électeurs  de  l'assemblée  de  Saint-Pierre. 

Il  faut  y  relever  cette  phrase  :  «  Ne  douté  plus  que 
la  démocratie,  le  despotisme  du  peuple  peut  s'établir 
sur  les  ruines  de  la  monarchie  » . 

L'impression  générale  peut  se  résumer  ainsi  :  nous, 
membres  de  la  Noblesse,  nous  sommes  prêts  à  aban- 
donner tous  privilèges,  à  établir  un  régime  d'égalité 
et  de  liberté;  nous  prenons  l'initiative  de  toutes  les 
réformes  ;  que  veut-on  donc  de  plus?  » 

Langeron  quitta  bientôt  Versailles. 


—  65  — 

Quant  à  d'Allarde,  il  semble  s'être  confiné  dans 
l'étude  des  questions  fiscales. 

Se<5  plans  pour  rétablissement  des  patentes  furent 
adoptés  sur  son  rapport  ;  mais  il  échoua  dans  ses 
plans  pour  la  création  d'une  dette  amortissable. 

Il  fit  adopter  la  loi  pour  Tabolition  et  le  rembourse- 
ment des  jurandes  et  des  maîtrises. 

Pendant  la  Convention,  il  resta  à  Paris  et  s'occupa 
d'opérations  commerciales.  En  1803,  il  afferma  l'octroi 
de  Paris,  mais  fit  faillite. 

Il  s'était  retiré  en  Franche-Comté  pour  s'occuper  de 
l'exploitation  de  forges,  et  était  sur  le  point  de  réussir  ; 
il  s'était  même  fait  réhabiliter,  en  1807,  quand  il 
mourut  à  Besançon,  le  9  septembre  1809. 

Le  baron  d'AUarde  ne  s'était  pas  joint  aux  qua- 
rante-sept gentilshommes  qui,  le  27  juin  1789,  firent 
bande  à  part  et  se  joignirent  au  Tiers-Etat. 

M.  le  comte  de  Sérent  avait  cru  devoir  en  référer  à 
ses  électeurs. 

M.  d'AUarde  écrit  à  ce  propos  :  «  Depuis  que  les 
lettres  sont  écrites,  M.  de  Sérent  est  de  retour  de 
Nevers,  où  il  a  reçu  les  mandats  qui  lui  permettent 
de  délibérer  en  commun  ;  je  puis  donc  penser  que 
cette  conduite  est  conforme  au  désir  de  la  noblesse  du 
Nivernais.  En  conséquence,  je  vais  m'y  soumettre, 
étant  d'ailleurs  particulièrement  persuadé  que  le  bon- 
heur public  l'exige  ». 

Je  crois  qu'on  peut  classer  d'AUarde  dans  la  caté- 
gorie des  gentilshommes  démocrates  de  la  Consti- 
tuante, A  ce  point  de  vue,  sa  physionomie  est  origi- 
nale. 

Il  fut  comme  eux  travailleur,  réformateur  de  bonne 
foi  et,  finalement,  victime  et  ruiné,  nous  pouvons 
ajouter,  injustement  oublié. 

T.  IX,  3*  série.  *  5 


-  66  - 


LES    C0NR4DE 


LEURS  FAÏENCES  D'ART 


La  Manufacture  de  Sèvres  a  dit  des  faïenciers  de 
Nevers  :  «  Ce  sont  des  artistes  d'ordre  inférieur  ! . . .  » 

Vous  devinez  la  conséquence  :  les  faïences  en  sont 
peu  intéressantes,  presque  nulles  1... 

Ceci  me  rappelle  un  grand  financier  du  siècle  de 
l^ouis  XIV,  qui  se  plaignait,  avec  raison  sans  doute, 
de  ne  recevoir  que  des  visites  intéressées  : 

«  Il  n'y  a,  disait-il,  que  ma  nièce  Pauline  qui  sache 
m'approcher  sans  regarder  dans  mes  poches  ».  Ceux 
qui  discréditent  nos  faïences  sont,  comme  la  nièce 
Pauline,  les  plus  adroits.  Ce  discrédit  doit  leur  rap- 
porter profit. 

J'ai  l'espoir,  après  cette  lecture,  de  mettre  en 
mesure  de  répondre  : 

I.  —  Les  faïences  de  Nevers  du  xvi"  siècle  comptent 
parmi  les  plus  belles  de  Tépoque,  sans  excepter  celles 
d'Italie. 

IL  —  La  première  faïence  en  France  a  été  fabriquée 
à  Nevers. 

III.  —  De  Nevers  l'industrie  a  rayonné  en  France. 

IV.  —  Nous  espérons  aussi  démontrer  que  les 
faïences  de  Nevers,  avec  leurs  caractères  propres, 
remontent  à  une  époque  antérieure  à  1602,  et  que  c'est 


-  67  - 

grâce  aux  artistes  nivernais  que  Rouen  a  pu  devenir  à 
son  tour  un  centre  actif  pour  sa  faïence  et  faire  éclater, 
après  1647,  son  originalité. 

Notre  étude  porte  sur  un  groupe  de  faïences  connues, 
il  est  vrai,  mais  non  encore  étudiées  quanta  leur  date, 
leur  origine  ou  leur  signification  historique  (1). 


I 


Les  faïence?  cont  de  Nevers 

De  Thou,  historien  contemporain  des  Conrades  (2), 
au  XVI''  siècle,  a  écrit  ; 

«  On  raconte  qu'un  Italien,  qui  avait  accompagné 
en  France  un  duc  du  Nivernais,  aperçut,  en  se  pro- 
menant aux  environs  de  Nevers,  la  terre  de  l'espèce 
dont  se  faisaient  les  faïences  en  Italie. 

»  Il  la  prépara  et  fit  construire  un  petit  four  où  fut 
fabriquée  la  première  faïence  en  France  (3)  ». 

On  se  demandera,  non  sans  raison,  si  nous  n'avons 
pas  été  impressionné  par  cette  citation. 

Aussi  nous  allons  démontrer  que  nos  faïences  sont 
de  Nevers. 

(1)  M.  du  Broc  de  Scgange  a  connu  ces  faïences,  mais  persuadé  que 
rintroduction  ne  datait  que  de  1602,  il  ne  pouvait  admettre  une  œuvre 
qui  lui  fût  antérieure,  comme  Test  celle  qui  nous  occupe.  Oe  parti  pris,  il 
les  a  classées  d'Italie  (p.  170-171).  Il  a  essayé  par  là  de  remonter  l'opinion 
publique.  «  Les  classant  italiennes,  dit-il,  c^est  une  supposition  très 
acceptable  »  (p.  171). 

(2)  Les  premiers  volumes  paraissaient  en  1602  ;  ils  ne  pouvaient  que 
signaler  des  faits  antérieurs. 

(3)  Encyclopédie  méthodique  t.  II,  p.  .".OG,  P;u'is,  chez  Panckouko,  1783, 


-  68  — 

Elles  étaient  scellées  à  demeure   dans  une  vieille 

piaison,    rue  de  la  Tartre  (1),  à  côté  des  prepaiers 
fours. 

Mais  comme  on  pourrait  les  récuser,  même  aves  un 
état  civil  de  la  maison,  nous  les  avons  étudiées  par 
leur  fabrication. 

Nous  n'avons  pas  hésité  à  avoir  recours  à  l'expé- 
rience de  nos  faïenciers,  entre  autres  de  M.  Montagnon. 

Cet  examen  nous  a  démontré  que  la  terre  est  chimi- 
quement la  même  que  celle  des  faïences  de  Nevers 
jusqu'au  xvn®  siècle  inclus.  Elle  est  de  la  même 
finesse,  de  la  même  ténuité,  de  la  même  cuisson,  de 
la  même  couleur,  de  la  même  dureté. 

Si,  à  Nevers,  les  faïences  sont  jaunes,  rougies  par 
l'oxyde  de  fer,  à  Savone,  elles  sont  blanches.  Pour 
obtenir  le  résultat  de  nos  faïences,  M.  Montagnon  dit 
mettre  de  huit  à  dix  ans  de  manipulation  ainsi  répar- 
tie : 

Pour  extraction  et  laisser  geler  les  terres,  deux 
ans  au  moins  ;  pour  délayer,  pourrir  les  terres  dans 
des  fosses  pleines  d'eau,  de  trois  à  quatre  ans  ;  pour 
laisser  fuser  la  terre  à  l'air,  deux  ans  ;  puis  le  temps 
nécessaire  pour  malaxer,  battre ,  tourner  la  poterie  ; 
la  sécher,  la  cuire,  l'émailler,  la  décorer  et  enfin  la 
cuire  une  dernière  fois. 

La  terre  de  nos  faïences  a  subi  toutes  ces  opéra- 
tions ;  elle  indique  qu  elles  sortaient  d'une  fabrique 
ayant  de  bons  exécutants ,  une  bonne  installation, 
étant  maîtresse  de  ses  productions,  fabrique  où 
l'époque  des  essais  était  passée  depuis  longtemps  en 
fabrication  courante. 


(1)  Maison  remise  à  TaUgnement,  mais  dont  les  murs  intérieurs  sont 
antérieurs  au  xiv<!  siècle. 


—  69  - 

Les  carreaux  ont  0  m.  018  d'épaisseur  et  sont  des- 
tinés à  la  décoration  du  bâtiment. 

Par  la  terre,  nous  sommes  donc  bien  de  Nevers. 

L'émail  de  nos  faïences  a  une  belle  glaçure  sans 
gerce ,  mais  avec  quelques  bouillons ,  qui  indiquent 
une  cuisson  à  haute  température  pour  le  biscuit  et 
pour  l'émail  ;  c'est  le  caractère  des  fours  de  Nevers  ; 
la  cuisson  italienne  est  moins  élevée . 

Sur  nos  faïences  se  retrouvent  à  la  fois  la  palette  de 
Nevers,  par  le  jaune,  le  bleu  et  le  manganèse,  et  celle 
de  Savone  par  la  transparence  et  la  chaleur  du  jaune 
foncé  ou  du  jaune  paille  ;  celui-ci  est  plus  verdâtre  à 
Nevers. 

L'Italie  a  une  palette  combinée  et  toutes  les  cou- 
leurs qui  ne  sont  pas  le  bleu,  le  jaune  et  le  manganèse 
s'évaporent  dans  les  fours  de  Nevers,  si  on  les  y 
expose. 

En  Italie,  les  couleurs  sont  heurtées  et  crues  ;  à 
Nevers,  elles  sont  harmonieuses  à  cause  du  prisme 
décomposé  des  trois  couleurs  ;  à  Nevers,  le  blanc  est 
laiteux  et  très  différent  de  ceux  d'Italie  ;  or,  ce  blanc, 
nous  l'avons  sur  nos  compositions. 

Nos  échantillons  tiennent  de  Savone  par  la  trans- 
parence des  couleurs  employées,  et  par  l'émail  sont 
de  Nevers. 

Les  faïences  d'Italie  sont  constamment  marquées 
pour  reconnaître  la  fabrique  ou  le  maître. 

Les  plus  anciennes  faïences  de  Nevers  ne  le  sont 
pas. 
Là,  il  y  avait  concurrence  ;  ici,  monopole. 

Les  marques  nivernaises  n'apparaissent  qu'après 
1636  avec  les  fils  Conrade,  les  Guillereau,  les  Custode, 
les  Borne,  les  Lefebvre,  les  Viodé,  les  Rodrigue,  les 
Seigne,  etc.,  etc. 


-  70  - 

La  déchéance  du  monopole  les  oblige  à  les  signer 
ou  à  les  marquer. 

Les  faïences  qui  nous  occupent  sont  représentées  au 
musée  de  Nevers  depuis  1830  environ  ;  ce  groupe 
provient  de  la  même  maison,  il  est  de  la  même  compo- 
sition, de  la  môme  main. 

Au  musée,  elles  y  sont  classées  les  premières  en 
date  ;  si  on  ignore  la  date  et  Tauteur  (1),  on  les  a.  par 
tradition,  toujours  cataloguées  de  Nevers,  même  aux 
expositions  spéciales.  C'est  sous  ce  titre  qu'elles 
viennent  de  figurer  à  l'Exposition  de  1900. 

Jamais  personne  n'a  contesté  sérieusement  leur  ori- 
gine. De  notoriété ,  les  faïences  sont  donc  encore  de 
Nevers. 


Il 


Les  faïences  sont  du  XVI®  siècle 

Ces  faïences  remontent  au  xvi®  siècle  (1584)  (2)  et  non 
au  commencement  du  xvii®  siècle  (1602),  comme  on  le 
croyait  généralement  ;  nos  preuves  seront  tirées  des 
pièces  ayant  figuré  à  l'Exposition  de  1900. 

Pour  nous  pénétrer  de  ces  compositions,  nous  les 
avons  dessinées  ;  c  est  en  les  copiant  que  la  hardiesse 
du  dessin,  la  sûreté  de  main,  les  traits  vifs  et  lancés, 
mais  fermes,  nous  ont  surpris. 

Nous  avons  senti  l'artiste  maître  de  lui,  composant 
librement,  dessinant  avec  rapidité,  avec  entrain. 

A-t-il  seulement  fait  des  poûcifs?  Nous  ne  le  pen- 

(1)  M.  du  Broc  de  Segange,  page  173,  dit:  «  On  pourra  peut-être  éle- 
ver d'autres  objections  à  rencontre  des  interprétations  que  nous  venons 
de  donner  au  sujet  des  céramiques  trouvées  à  Nevers;  mais  en  persistant 
absolument  à  les  attribuer  à  Nevers,  etc.,  etc.  -. 

(2)  C'est,  pour  nous,  la  date  la  plus  rapprochée. 


-  71  - 

sons  pas  ;  tout  indique  qu'il  a  esquissé  ses  études  sur 
l'émail  cuit  ;  l'exécution  particulière  nous  le  démontre. 

L'émail  blanc  laiteux  semble  avoir  reçu  la  pensée  et 
le  premier  jet  de  l'artiste. 

Le  pinceau  est  venu  ensuite  fixer  ses  contours, 
modeler  les  personnages  avec  une  science  profonde  du 
dessin  et  surtout  du  nu. 

Nous  avons  voulu,  avant  tout,  chercher  le  style  de 
ces  compositions  et  nous  y  avons  reconnu  tous  les 
caractères  du  xvi«^  siècle. 

D'abord,  par  l'ensemble  du  dessin  et  du  paysage 
rappelant  les  compositions  de  Jean  Cousin  (1500- 
1590). 

A  cette  date,  on  ne  laisse  presque  pas  de  ciel  ;  la 
perspective  est  profonde  comme  dans  les  compositions 
des  Raphaël ,  des  Jules  Romain ,  des  Léonard  de 
Vinci. 

Tout  le  monde  se  rappelle  le  paysage  formant  le 
fond  du  beau  portrait  de  la  Joconde. 

Ici,  le  premier  plan  de  feuillages,  avec  des  plantes 
de  convention,  donne  cette  facture,  bien  connue,  des 
tapisseries  flamandes  du  xvi®  siècle,  notamment  de 
celle  publiée  dans  le  Compte  rendu  des  Beaux-Arts  de 
1893  {/a  Naissance  d'Œdipe),  et  des  belles  tapisseries 
de  Charles-Quint  du  Pavillon  espagnol,  à  l'Exposition 
de  1900,  que  tous  les  visiteurs  ont  admirées. 

Il  existe  même  double  ressemblance,  par  la  perspec- 
tive et  les  plantes  du  premier  plan,  entre  les  tapisse- 
ries et  nos  faïences. 

Ce  double  caractère  se  retrouve  encore  dans  la  scène 
du  Duc  de  Guise  blessé  (1563),  qu'il  est  facile  de  voir 
page  68  du  tome  II  de  l'Histoire  de  France,  de  Char- 
ton.  Les  feuilles  des  arbres  y  sont  traitées  comme 
celles  de  nos  compositions. 

Au  musée  du  Louvre,  les  n®^  236  et  237,  Apollon  et 


—  72  - 

Narcisse  et  Enlèoement  de  Ganymède  ont  la  même 
ordonnance,  lem-  date  est  1525. 

La  coupe  d'Urbino  Fontana  :  VEnlècement  d'Europe 
qui  est  de  1531,  est  semblable. 

Mais  les  faïences  de  Savone,  dont  Nevers  tient  Tori- 
gine,  ont  le  même  procédé  d'exécution  pour  leurs 
troncs  d'arbres  en  tire-bouchon,  procédé  conservé  à 
Nevers  jusqu'au  xvii®  siècle. 

Voilà  qui  nous  fixe  déjà  la  date  du  xvi''  siècle. 

Nous  verrons  plus  loin  que  les  armes,  les  meubles, 
les  costumes  sont  précisément  du  même  siècle  ;  les 
draperies  sont  inspirées  de  Raphaël  ou  du  Pérugin  ;  et 
le  modelé  des  enfants  procède  de  Michel-Ange. 

Ces  compositions  pourraient  être  médiocres  ;  ^Ues 
sont,  au  contraire,  remarquables  de  style  ;  c'est  encore 
un  argument  en  notre  faveur,  car  Nevers  n'a  eu  son 
apogée  d'art  qu'au  moment  où  les  faïences  s'y  sont 
installées;  depuis,  il  y  a  eu  décroissance,  déchéance. 

M.  Garnier,  directeur  de  la  Manufacture  nationale 
de  Sèvres,  présente,  dans  son  beau  travail,  les  faïences 
de  Nevers  comme  des  œuvres  ayant  moins  de  style 
que  de  naïveté. 

Les  reproductions  sont  du  xviii'*  siècle  et  même  de 
la  Révolution!... 

Un  auteur  célèbre,  Voltaire,  a  dit  :  «  Il  faut  se 
défier  des  myopes,  ils  voient  les  choses  de  trop  près  )>. 

Elargissons  donc  nos  vues. 

Du  jour  où  l'art  s'est  trouvé  isolé  et  séparé  du  contact 
intellectuel  des  maîtres,  l'art  livré  à  lui-même  a  déchu. 

On  s'est  jeté  dans  des  pastiches,  car  cet  art  n'était 
pas  vivifié  par  la  pureté  du  dessin  ;  il  a  fini  par  ces 
grotesques  de  la  Révolution. 

Dix  minutes  de  promenade  au  musée  de  Nevers 
justifieraient  cette  allégation  bien  mieux  que  nous  ne 
saurions  le  décrire. 


-  73  - 

Nos  œuvres  sont  donc  des  productions  de  l'origine 
de  la  faïence  à  Nevers  ;  on  y  sent  une  main  habituée 
à  copier  des  maîtres  de  l'école  italienne  du  xvi-^  siècle. 

Chaque  coup  de  pinceau  est  une  tache  ;  mais  cette 
tache  indique  que  le  pinceau,  rapide  pour  les  clairs, 
s'arrête  et  décharge  pour  les  ombres,  donnant  de  beaux 
effets  de  clairs-obscurs. 

C'est  l'artiste  qui  modelait  si  bien  les  nus  qui  avait 
compris  Michel-Ange  répondant  à  François  de  Hol- 
lande : 

«  Quel  peintre  serait  assez  niais  pour  préférer  le 
soulier  d'un  homme  à  son  pied  I...  » 


III 


Description  des  siijets 

La  première  qualité  d'un  peintre  étant  d'exprimer 
sa  pensée,  nous  pouvons  dire  que  les  compositions 
présentées  brillent  par  ce  mérite.  D'ailleurs,  décri- 
vons-les en  trois  groupes  : 

Le  premier  est  composé  de  parties  de  frise  en 
hauteur  de  0  m.  17  de  large. 

C'est  une  théorie  d'amours  en  guirlandes  se  déta- 
chant chaudement  en  un  modelé  bleu,  alterné  de 
manganèse  clair  sur  un  fond  jaune  —  la  couleur  or  de 
ces  belles  mosaïques  romaines,  —  couleur  dont  l'oppo- 
sition, douce  et  vive  tout  à  la  fois,  est  si  riche. 

Ce  fond  jaune  est  orné,  de  chaque  côté,  d'un  étroit 
filet  blanc,  puis  par  deux  autres  plus  larges  :  le  pre- 
mier est  bleu,  l'autre  violet  foncé  ;  après  se  retrouve 
un  large  galon  blanc  :  l'émail  de  la  faïence. 


~  74  - 

Sur  ce  fond  or,  si  brillant,  se  dessine  une  chute 
ininterrompue  d  amours  modelés  en  bleu  sous  tous  les 
aspects  ;  c'est  une  véritable  école  du  nu. 

Aucun  ne  se  répète  et  la  bordure  est  longue  ;  ils 
sont  par  couples,  par  grappes  et  se  relient  par  les 
mams  ou  par  des  banderolles  violettes  ;  les  uns  ont  des 
gerbes  de  fleurs,  d'autres  des  fruits  avec  la  note  verte 
des  feuillages,  et  d'autres  des  armes,  dont  les  similaires 
se  retrouvent  sculptées  aux  façades  du  bord  de  l'eau 
du...  Louvre. 

D'ailleurs,  banderolles,  fruits,  fleurs  et  armures  ont 
tous  ce  style  français  du  règne  de  Henri  III, 

Au  point  de  vue  de  la  composition,  nous  signalerons 
l'un  des  amours,  ayant  toutes  les  qualités,  tous  les 
mérites  qui  ont  fait  du  groupe  de  la  Danse,  de  Car- 
peaux,  à  la  façade  de  l'Opéra  de  Paris,  sa  juste 
renommée. 

La  vérité  du  mouvement  et  la  passion  se  trouvent 
ici  comme  dans  l'œuvre  du  célèbre  statuaire. 

Le  deuxième  groupe  se  compose  de  deux  allégories  ; 
Sapientia  et  Veritas.  Chacune  d'elles  est  représentée 
sur  deux  carreaux;  elles  ont  0  m.  22  sur  0  m.  15. 
Veritas  est  assise  sur  un  trône,  dont  la  forme  ne  laisse 
aucun  doute  sur  sa  date,  confirmée  par  le  style  du 
dessin,  qu'on  prendrait  pour  un  Jean  Cousin  :  Veritas 
est  abritée  sous  un  arbre  vert  et  drapée  couleur 
manganèse.  La  Vérité  est  avenante,  gracieuse,  aima- 
ble ;  et  cette  vérité  est  dans  le  livre  qu'elle  montre  : 
les  Saints  Evangiles,  sans  doute. 

Le  modelé  bleu  du  personnage,  donne  des  formes 
parfois  d'une  correction  exquise,  sur  le  fond  jaune 
foncé  ;  le  feuillage  est  vert  et  le  trône  est  bleu. 


—  75  — 

L'effet  est  fort  heureux  et  très  brillant. 

Sapientia  lui  fait  un  beau  pendant.  Elle  aie  casque 
de  Minerve,  en  tête,  et  s'appuie  d'une  main  sur  son 
bouclier,  à  tête  de  gorgone,  en  violet;  l'autre 
main  a  un  geste  fort  jaste  et  très  expressif;  son  cos- 
tume est  presque  identique  à  celui  de  Arion,  par 
Andrée  Riccio  (1)  (surnommé  Briosco)  ;  la  date  do 
celui-ci  est  de  1470-1532.  Il  endosse  la  cuirasse  des 
généraux  romains,  laquelle  semble  du  renouveau  à 
l'époque. 

La  figure  de  Sapientia  est  à  l'unisson  de  son  geste. 

Minerve  a  une  grande  allure. 

L'ensemble  se  fait  valoir  par  la  couleur  et  par  la 
valeur  des  tons,  ce  qui  fait  une  opposition  des  plus 
heureuses. 

*  * 

La  troisième  composition  est  Renaud  et  Arniide,  du 
Tasse  ;  elle  a  une  complète  analogie  avec  celles  que 
nous  venons  de  décrire  pour  le  dessin,  les  armures  et 
les  accessoires. 

Cette  scène,  créée  par  le  Tasse,  a  été  rendue  vivante 
par  un  tableau,  bien  connu  du  Dominiquin,  qui  est  au 
musée  du  Louvre. 

Nous  retrouvons  la  môme  scène  traitée  par  Le 
Poussin,  Van  Dyck,  Teniers  et  Boucher. 

Mais  un  artiste  du  xvi®  siècle,  encore  ignoré,  le  pre- 
mier en  date,  l'avait  déjà  composée  sur  faïence  de 
Ne  vers  (2). 

Nous  allons  rechercher  le  caractère  de  cette  compo- 
sition. 

(1)  La   Renaissance   HaUenne^  de   M.  Eug.   Muntz,  donne    p.  300  lu 
statue,  et  p.  'i^  celle  de  Gnutlanielatta,  par  Donalello.  presque  semblable. 

(2)  Cette  belle  fa'ien^'e  a   figuré  à  l'Exposition    univei^elle  de  1900,  au 
Petit-Palais,  sur  la  proposition  de  rauteur. 


-  76  - 

La  composition  est  un  médaillon  formé  par  une  cir- 
conférence, ayant  0  m.  63  de  diamètre  ;  quatre  car- 
reaux la  composent,  sa  palette  est  identique  à  celle 
des  autres  faïences  ;  jaune  foncé  pour  le  sol  modelant 
ses  vallées,  à  profondes  perspectives,  par  du  jaune 
clair  et  des  réserves  de  blanc. 

Le  ciel  est  bleu. 

Ce  paysage  improvisé  par  le  pinceau  rappelle  la 
transparence  des  vitraux  ou  mieux  de  nos  aquarelles. 

Les  tons  y  sont  frais  et  brillants  ;  sur  ce  fond,  s'étale 
un  groupe  en  bleu,  savant,  bien  modelé,  bien  musclé; 
puis  les  verts  sombres  des  arbres  ou  des  plantes 
font  repoussoir  et  donnent  à  cette  composition  un  effet 
saisissant  qui  vous  charme. 

Pour  traiter  le  sujet,  le  Dominiquin  a  pris  le  texte 
suivant  du  Tasse  : 

((  Armide  sourit,  mais  toujours  elle  s'admire  ;  elle 
rappelle  ses  cheveux  errants,  les  entrelace,  les  tresse, 
les  arrondit  en  boucles;  et  les  fleurs  qu'elle  y  môle 
brillent  comme  l'émail  enchâssé  dans  l'or...)). 

>)  Il  (Renaud)  y  voit  les  honteux  ornements  dont  il 
est  couvert  :  ces  cheveux  parfumés,  ces  boucles  volup- 
tueusement flottantes,  cette  épée. ..  devenue,  pour  lui, 
une  vaine  parure  » . 

L'artiste  nivernais  s'est  inspiré  du  poème  : 

(i  Renaud  est  couché  dans  ses  bras,  son  voile  ne 
couvre  plus  l'albâtre  de  son  sein  ;  ses  cheveux  épars 
sont  le  jouet  des  zéphirs... 

))  Dans  ses  prunelles  pétille  le  feu  de  l'amour...  » 

Puis  les  reproches  virils  : 

«  Quel  sommeil,  quelle  léthargie  a  donc  assoupi  ta 
valeur  ?  Quelle  faiblesse  a  flétri  ton  courage  ?  » 


—  77  — 

La  première  différence  des  deux  auteurs  est  donc 
dans  le  programme.  La  seconde  sera  dans  la  date. 

Nous  avons  dit  que  les  compositions  étaient  fran- 
çaises et  du  règne  de  Henri  III,  qu'elles  procédaient  de 
l'école  italienne. 

Si  la  profusion  des  nus  et  leurs  modelés  semblent 
s'inspirer  de  Michel-Ange,  nous  trouvons  aussi  des 
draperies  inspirées  de  la  fresque  du  Pérugin,  de  la 
Chapelle  Sixtine,  de  l'école  d'Athènes  et  de  la  Vierge 
de  François  I®'  de  Raphaël.  Ces  maîtres  inspiraient,  à 
l'époque,  tous  les  artistes. 

Renaud  avec  son  costume  similaire  à  Sapientia  a 
aussi  son  origine  avec  Riccio;  c'est-à-dire  que  tout 
marque  le  xvp  siècle,  tandis  que  le  Dominiquin,  né 
en  1581,  mort  en  1641,  ne  donne  plus  qu'une  œuvre  du 
xvn'^  siècle  ;  l'architecture  elle-même  donne  cette  date. 

L'arrivée  à  Nevers  d'Augustin  Conrade  en  1584, 
originaire  d'Albissola,  sur  la  rivière  de  Gênes,  situé 
à  trente-huit  kilomètres  de  Gênes,  sur  le  golfe  de  ce 
nom  ;  Conrade,  dont  la  donation  du  16  mai  1611 
contient  qu'il  demeure  à  Nevers  depuis  plus  de  vingt- 
sept  ans  (1)  ;  le  potier-peintre  qui,  en  1590,  d'après 
les  archives,  peint  quatre  buffets  de  vaisselles  pour 
Paris,  vient  nous  éclairer,  nous  préciser  une  date  pour 
ces  compositions. 

Disons  de  suite  que  personne  en  dehors  des  Conrade 
n'était  à  même  de  donner  les  qualités  que  nous  avons 
décrites. 

Nous  venons  de  vous  révéler  un  chef-d'œuvre  où, 
suivant  l'expression  pittoresque  de  Mme  do  Sévigné  : 
tt  jamais  carrosse  n'a  passé  ».  Ajoutons  que  les[faîences 

(1)  Augustin  ne  serait-il  pas  venu  rejoindre  ses  frères  et  traiter  'ce 
sujet  avant  1584  ?  Nous  ne  pouvons  Taftirmer  puisque  nous  ne  connaissons 
encore  que  la  pièce  du  16  mai  1611. 


-  78  - 

n'étaient  pas  commerciales  ;  qu'elles  étaient  scellées. 
fixées . 

Ne  pouvons-nous  penser  que  nous  sommes  en  pré- 
sence des  modèles  obligés  que  tout  industriel  doit  faire 
pour  indiquer  ses  productions,  son  talent?  Dans  ce  cas, 
son  atelier  était  à  l'angle  des  rues  du  Doyenné  et  de 
la  Tartre  (1). 

L'origine  nivernaise  et  la  date  trouvent  enfin  leurs 
preuves  indiscutables  dans  le  portrait  de  Renaud  qu'on 
représente  sous  les  traits  du.  duc  Ludovic  de  Gon^agiie 
à  l'âge  qu'il  avait  en  1584. 

Dans  un  instant  vous  allez  voir  la  preuve  de  ce  que 
nous  avançons  avec  le  portrait  du  duc  en  1565,  vous  le 
comparerezà  celui  de  Renaud  dix-neuf  ans  après  (1584). 

Pour  faciliter  la  critique  nous  signalerons  une 
chose  bien  connue  de  tous  :  la  profonde  modification 
de  la  physionomie  d'une  personne  avec  l'âge.  Victor 
Hugo  en  est  une  preuve  frappante  ;  on  dirait  autant 
d'individualités  que  de  portraits.  Le  Figdro  les  a 
publiés  à  vingt-cinq,  trente,  cinquante,  soixante-six, 
soixante-douze  et  quatre-vingt-un  ans  et  chacun  d'eux, 
vous  pouvez  vous  le  rappeler,  est  une  individualité. 


Nous  venons  d'établir  les  dates  au  premier  groupe 
par  les  motifs  rappelant  le  règne  de  Henri  III. 

Au  deuxième  groupe  par  le  dessin,  les  meubles,  les 
armes,  le  costume. 

Au  troisième  groupe  par  le  portrait  de  Ludovic  de 
Gonzague  en  1584.  Nous  allons  poursuivre  ces  preuves 
avec  d'autres  documents. 

(l)  Tartre  veut  dire  ômail. 


-  79  -^ 


IV 


Autres  preuves 

En  1590  (1),  un  Nivernais,  Gaston  de  Claves,  dédiait 
au  duc  de  Nevers  une  plaquette  où  nous  trouvons  les 
mots  caractéristiques  suivants,  d'un  témoin  oculaire  : 

((  Ces  artistes  inrjénicii-r  r/ui produisent  des  ouvra- 
ges ADMIRABLES  pour  les  étrangers  ». 

Vous  qui  connaissez  les  faïences,  ne  pensez- vous  pas 
sincèrement  comme  lui  ? 

C'est  en  1575  que  parut  la  Jérusalem  déliorée  ;  son 
apparition  fut  un  succès  prolongé  :  ce  poème  eut  un 
retentissement,  non  seulement  en  Italie  mais  en 
France. 

Comment  admettre  qu'un  prince,  que  des  artistes 
d'Italie  ne  se  soient  pas  engoués  pour  la  poésie  ? 

Il  faut  avoir  quitté  un  temps  sa  langue  maternelle 
pour  connaître  toute  Timpression  délicieuse  qu'on 
éprouve  à  la  lire  dans  un  milieu  étranger. 

On  peut  être  assuré  qu'il  en  fut  ainsi  de  nos  hôtes. 

Mais  lorsque  les  pensées ,  les  poésies  sont  aussi 
suggestives  pour  l'époque  que  celles  du  Tasse,  l'im- 
pression sur  l'esprit  d'un  artiste  est  considérable. 

Ajoutez  que  l'artiste  arrivait  d'Italie  et  un  autre 
fait  connu,  que  le  futur  cardinal  Scipion  de  Gon- 
zague  (2)  était  lié  d'amitié  avec  le  Tasse  (3)  ;  enfin, 

(t)  Cette  môme  année,  Augustin  Conrade  fabriquait  ses  faïences  pour 
Paris  (Archives  communales.) 

(2)  15i2-lo95,  cardinal  en  1587. 

(3)  1554-15^. 


-  80  ^ 

la  femme  du  duc,  Henriette,  elle-même,  a  fait  la  tra- 
duction de  VAminta  du  Tasse. 

Voilà  plus  d'une  raison  pour  que  Ludovic  et 
Conrade  aient  parlé  du  Tasse  et  pour  motiver  la  com- 
position d' Augustin  Conrade.  Et  ce  fut  certaine- 
ment la  première  interprétation  en  dessin  de  cette 
harmonieuse  poésie. 

Avec  le  Dominiquin,  Conrade  est  dissemblable  de 
cadre,  de  groupement,  de  personnages,  d'accessoires 
et  d'idée. 

Dans  l'œuvre  du  Dominiquin,  le  paysage  est  le 
principal  dans  lequel  se  noie  le  groupe. 

Dans  Conrade,  c'est  l'opposé.  Un  coin  dans  les  deux 
compositions  paraît  se  ressembler,  à  se  demander 
môme  si  le  Dominiquin  n'avait  pas  connu  celle  de 
Conrade  ;  c'est  celui  des  guerriers  cachés  derrière  un 
bouclier  dans  le  bocage. 

Dans  le  Dominiquin ,  ce  sont  les  camarades  de 
Renaud  :  c'est  Ulbade  et  le  Danois  ;  ils  sont  inquiets 
et  préoccupés  ;  car  quel  sera  le  résultat  de  leur  appa- 
rition, de  leur  démarche  ? 

Dans  Conrade  ce  sont  trois  enfants  :  des  génies . 

Ils  ne  sont  pas  inquiets. 

J'ajoute  que  le  poème  ne  les  explique  pas  avec  cette 
attitude  et  ce  ne  sont  pas  les  seuls  accessoires  qui 
soient  étranges  ;  les  amours  derrière  le  groupe  sont 
encore  plus  inexplicables  avec  le  Tasse.  Au  contraire, 
ce  dernier  ne  peut  prêter  à  équivoque  avec  le  Domi- 
niquin. Ces  raisons  nous  ont  engagé  à  chercher  une 
allégorie  parallèle  au  sujet  principal,  laquelle  vient 
encore  confirmer  nos  conclusions. 


LES  CONRADE  -  LEURS  FAÏENCES  D'ART 


e 


Exposition  de  Neverg  1887. 


^  81  - 


L'allégorie 

Cette  allégorie  est  nivernaise  par  le  portrait  du  duc 
Ludovic  de  Gonzague. 

Avant  de  la  chercher,  nous  croyons  utile  de  pré- 
ciser un  point  d'histoire  locale  :  Nevers  était  sorti 
d'un  grand  danger,  les  troubles  fomentés  par  le  duc 
Engilbert  de  Clèves,  d'une  part,  et  son  compétiteur 
le  seigneur  d'Orval,  en  se  disputant  le  duché,  avaient 
mis  Nevers  «  à  deux  doigts  de  sa  perte  ». 

Ces  compétitions  tranchées  ,  par  le  mariage  des 
enfants  des  adversaires,  par  ordre  du  roi,  redeve- 
naient terribles  par  les  guerres  de  religion. 

Pour  les  calmer,  le  roi  envoie  Lafayette  à  Nevers, 
et  le  rappelle,  sa  mission  n'ayant  pas  été  celle  d'un 
pacificateur. 

L'intolérant  seigneur  de  ChàtilIon~en-Bazois  aug- 
mente les  épreuves ,  et  Catherine  de  Médicis  elle- 
même  intervient.  Tout  cela  se  passait  la  veille  du 
mariage  de  Ludovic  de  Gonzague  avec  Henriette  de 
Clèves,  en  1565,  Henriette  de  Clèves  que  Ronsard  a 
chantée  : 

La  dochesse  de  Nevers, 
Aux  yeux  verts 
Qui  sous  leur  paupi^^e  blonde 
Lancent  sur  nous  plus  d'éclairs 
Que  font  vingt  jupiters, 
Dans  les  airs 
Lorsque  la  tempête  gronde. 

De  1565  à  d584  venait  de  s'écouler  dix-neuf  ans 
d'une  paix  fructueuse  :  vrai  privilège  pour  Nevers. 

7,  IX,  3>  série,  6 


-  82  ^ 

Une  reconnaissance,  au  moins  égale,  existait  de  la 
part  des  Conrade,  car  ils  avaient  un  monopole  et 
étaient  exempts  des  impôts. 

Ces  avantages ,  le  nouvel  arrivant ,  Augustin 
Conrade,  les  ressentait  encore  plus,  car  la  qualité  des 
produits  nous  a  révélé  une  industrie  établie  déjà  et 
en  bonne  production. 

Pourquoi  les  Conrade  n'auraient-ils  pas  donné  au 
héros  chrétien  la  figure  du  duc  ? 

Augustin  savait  bien  que  le  Tasse  avait  dédié  son 
poème  à  un  prince  italien  ;  ne  pouvait-il  dédier  sa 
composition  au  duc  ? 

De  cette  situation  particulière  devait  sortir  une 
création  digne  et  surtout  chaste. 

Celle  du  Dominiquin  sera  voluptueuse. 

Conrade  n'a  point  failli  à  ces  nécessités.  Renaud 
n'est  pas  l'enfant  terrible,  Armide  n'est  pas  l'écervelée 
adolescente  du  Dominiquin  ;  tous  les  deux  sont  dans 
la  force  de  Tâge,  car  Armide  peut  figurer  la  Ville  de 
Nevers,  qu'on  ne  doit  pas  présenter  sous  un  aspect 
jeune.  Cette  maturité  de  Renaud  lui  était  nécessaire 
d'abord  pour  la  ressemblance,  et  pour  qu'on  comprît 
cette  citation  : 

«  A  peine  l'éclat  de  lacier  a  frappé  ses  regards,  son 
feu  se  rallume,  l'ardeur  des  combats  rentre  dans  son 
âme  ;  sa  molle  langueur  se  dissipe,  il  sort  de  l'ivresse 
et  de  l'assoupissement  du  plaisir  ». 

Si  la  ville  était  en  danger,  n'est-ce  pas,  désormais, 
ce  prince  qui  lui  doit  sa  protection  ? 

Point  n'est  besoin  de  faire  effort  pour  lui  trouver 
cette  attitude,  car  le  guerrier  est  au  repos. 

Si  son  casque,  si  son  bouclier  sont  renversés  à  ses 
pieds,  ils  sont  encore  à  portée  de  sa  main. 

Si  des  amours  chevauchent  sur  le  glaive  et  si  l'un 


—  83  - 

d'eux  cache  les  lauriers  à  la  vue  du  héros,  celui-ci,  du 
moins,  n'est  pas  couché  dessus  et  le  glaive  est  toujours 
près  de  sa  main. 
Chez  le  guerrier,  c'est  de  la  longanimité. 
Mais  rassurez- vous,  l'un  des  génies  veille,  une  gaule 
à  la  main,  écartant  les  souvenirs  de  guerre,  de  combats, 
coupant  le  fil  que  des  génies  cachés  figurent. 

Ceux-ci,  nous  l'avons  dit,  ne  sont  pas  inquiets  ;  ils 
n'ont  pas  mission  de  réveiller,  de  rallumer  l'ardeur 
guerrière. 
Ils  veillent,  ils  attendent,  voilà  tout. 
Mais  cette  quiétude  du  héros  lui  ferait-elle  perdre 
le  souvenir  de  hauts  faits  ? 
Nullement. 

Un  autre  génie  dresse,  soutient  à  son  insu,  derrière 
lui,  un  cartouche  prêt  à  recevoir  l'inscription  de  son 
œuvre  de  civilisation  ;  et  la  Ville  de  Nevers ,  de  sa 
main  gauche,  saisit  ce  cartouche  pour  l'y  inscrire  elle- 
même. 

Aussi  les  autres  génies  peuvent-ils  répandre  à  terre 
les  vases,  sortir  les  ornements  de  la  cassette  ;  c'est 
l'art  qu'ils  étalent  dans  la  paix. 
Et  ils  sont,  ma  foi,  fort  occupés. 
Le  panache,  en  guise  de  marotte,  est  à  la  main  d'un 
amour,  à  côté  du  porte-queue  d'Armide. 
A  quoi  bon  le  panache!... 
En  temps  de  paix,  ce  n  est  qu'un  joujou. 
Un  amour  dirige  le  bras  droit  de  Renaud  ;  aucune 
autre  pensée  ne  sera  mise  en  jeu,  car  ce  génie  garde  et 
guide  le  bras. 

D'ailleurs,  ne  vous  y  trompez  pas  :  voyez  cet  amour 
perché,  accroché  à  une  branche  au-dessus  de...  Renaud 
et  Armide?...  non  !  du  Duc  et  de  sa  Ville. 

De  cet  arbre  stérile,  n'ayant  que  des  feuilles,  ce 
génie  a  détaché  un  fruit  :  Vart  du  faïencier  I.,. 


—  84  — 

Il  est  dans  sa  main  et  îe  tend  à  un  de  ses  congé- 
nères, tandis  qu'au  loin,  aux  pieds  du  duc,  un  autre 
encourage  le  mouvement. 

Et  celui-là,  d'un  élan  magnifique,  va  recevoir  le 
fruit  et,  soyez-en  sûr,  le  porter  au  duc  qui  repose  sur 
le  genou  de  sa  Ville-Armide. 

N'est-ce  pas  à  lui  qu'on  en  doit  Téclosion  ? 

C'est  d'elle  que  le  Tasse  dit  : 

«  Car  elle  a  vu  ce  front  calme  et  tranquille^  ces 
lèvres  où  repose  le  sourire,  ces  yeux  dont  le  sommeil 
môme  ne  peut  lui  dérober  l'éclat,  elle  sent  expirer  sa 
colère... 

»  Elle  admire  ses  grâces  et  demeure  penchée  sur 
son  front,  comme  Narcisse  sur  la  fontaine  qui  réfléchit 
son  image. . . 

»  Ce  cœur,  plus  dur  que  le  diamant,  plus  froid  que 
la  glace,  s'amollit  et  déjà  ne  connaît  plus  que  le  feu  de 
l'amour  ». 

Voilà  bien  ce  qui  est  commun  à  la  ville  de  Nevers 
et  à  Armide,  précisant  encore  la  date  des  faïences  (1). 

Pourquoi  cette  pensée  nWrait-elle  pas  hanté  des 
artistes  fixés  à  Nevers,  connaissant  les  vicissitudes 
antérieures  ? 

S'il  en  est  ainsi  (2),  louons  doublement  leur  compo- 
sition si  différente  de  celle  du  Dominiquin,  si  person- 

(1)  M.  du  Broc  de  Segange  désigne  ce  chef-d'œuvre  un  peu  trop  pro- 
saïquement «  un  dessus  de  poêle  !  •,  p.  171. 

(2)  Cette  allégorie  a  été  contestée.  On  veut  voir  simplement  des  amours 
s'ébattaut  autour  de  Renaud  et  Armide. 

Mais  toute  composition  a  une  pensée. 

Quel  besoin  Ârmide  aurait-elle  de  prendre  le  cartouche?  Quels  hauts 
faits  voudrait-elle  buriner  dessus? 

L'amour  sur  la  branche  figurerait-il  la  fragilité  de  cette  passion  ? 

Pourquoi  des  arbres  stériles  et  pourquoi,  dans  la  main  de  ce  petit  acro- 
bate sournois,  y  a-t  il  un  fruit  ? 

Serait-ce  lu  pomme  de  la  discorde?  Celle  d*Eve  ou  de  la  belle  Hélène? 


—  85  ^ 

nelle^  si  française  de  détail,  si  pleine  de  sentiments 
délicats. 

La  louange  discrète  de  leur  industrie  s'y  trouvait 
jointe  à  l'élévation  des  pensées  nivernaises  pour  leur 
duc. 


VI 


L'art  rayonne 

Au  point  où  nous  en  sommes,  nous  sentons  la  néces- 
sité de  prouver  que  l'art,  dont  nous  venons  de  vous 
entretenir,  n'est  pas  resté  stérile,  comme  les  arbres  de 
l'allégorie. 

Au  contraire,  il  a  produit  de  beaux  fruits  ;  dès  l'année 
1598  il  rayonne  et  va  exciter  par  ses  succès  et  sa 
renommée  le  zèle  d  autres  villes  en  France. 

Il  résulte  d'actes  authentiques  que  les  faïenciers 
vont  à  Cosne.  Les  registres  de  l'état  civil  de  1598  à 
1652  nous  donnent  cette  preuve  (1). 

Ces  registres  nous  révèlent  l'existence  d'une  ving- 
taine de  familles  de  faïenciers,  que,  de  nos  jours,  ses 
habitants  ignorent  encore. 

Bientôt  nous  pourrons  voir,  il  faut  l'espérer,  dans  le 
nouveau  musée  de  Cosne,  ces  faïences  groupées.  Nous 
comptons  sur  le  zèle  de  son  dévoué  conservateur. 

Les  ohefs  et  les  créateurs  de  cette  industrie,  existant 
en  1598,  sont  Bernardin  Conrade  et  son  gendre,  Michel 
Seton,  lequel  avait  épousé  Espérance  Conrade. 

Douze  fois,  le  nom  de  Conrade,  de  1598  à  1641,  se 
trouve  sur  les  actes  ;  et  vingt-une  fois,  de  1598  à  1624, 
se  trouve  le  nom  de  Michel  Seton. 

(1)  Voir  appendice  «  les  faïenciers  de  Cosne.  n 


-  86  — 

B.  Conrade  se  marie  deux  fois  :  sa  première  femme 
est  Agnès  Perle,  sa  seconde  Louise  Dely. 

Parmi  les  familles  des  autres  faïenciers,  nous  rete- 
nons les  noms  suivants  : 

Sylvain  Talbouthier  ;  il  se  marie  à  Cosne  en  1644  et 
meurt  à  Nevers  en  1688. 

Edme  Cardot,  qui  marque  sa  résidence  à  Cosne  de 
1646  à  1652  et  meurt  à  Nevers  en  1674. 

Barrât,  témoin  et  faïencier  à  Cosne  en  1647  ;  il  finit 
ses  jours  à  Nevers  en  1672. 

Ces  faits,  mis  à  côté  de  Baptiste  Conrade  de  Nevers, 
qui  est  parrain  d'un  enfant  Seton,  ne  démontrent-ils 
pas,  jusqu'à  l'évidence,  que  les  faïences  de  Cosne  sont 
créées  par  les  Conrade  de  Nevers  ? 

Si  les  états  civils  le  prouvent,  on  saura  que  les  pro- 
duits sont  encore  plus  proches  parents. 

Le  prochain  groupement  des  faïences  dans  leur  pays 
de  production  prouvera  victorieusement  ce  que  nous 
avançons . 

A  Roanne,  M.  le  docteur  Noélas  nous  apprend, 
page  23  de  son  ouvrage  sur  les  faïences  de  Roanne, 
que  dans  les  registres  des  états  civils  de  cette  ville, 
dès  1637,  «  les  noms  des  Conrade  apparaissent  ». 

A  Moulins-sur-AUier,  en  1666,  un  faïencier  a  pour 
femme  Françoise  Conrade. 

Augustin  Conrade,  premier  médecin  de  la  reine  de 
Pologne,  le  même  qui  assiste  et  signe  plus  tard  le 
procès-verbal  de  décès  de  Louis  XIIL  Augustin 
Conrade,  disons-nous,  de  1685  à  1689,  habite  la  ville 
de  Moulins. 

Nous  pourrions  déjà  englober  les  faïences  de  Cla- 
mecy  et  celles  près  d'Auxerre,  de  La  Charité-sur-Loire 


-  87  — 

et  de  Clermont,  comme  une  poussée  venant  de  Nevers, 
mais  nous  avons  mieux. 


« 


A  Rouen,  cette  belle  ville  de  Normandie,  si  célèbre 
par  ses  faïences,  nous  allons  préciser  le  contact  et  la 
présence  des  faïenciers  nivernais. 

Nous  nous  servirons  de  l'auteur  si  estimé,  André 
Potier,  historiographe  de  ces  faïences,  puis  des  états 
civils  de  Rouen  et  de  ceux  de  Nevers,  nous  mettant  du 
coup  au-dessus  de  toute  critique. 

Page  165  du  volume  cité,  nous  trouvons,  en  1631, 
Potier,  faïencier,  venant  mourir  à  Nevers  en  ir>68, 
âgé  de  soixante-quinze  ans  ; 

En  1636,  Lefebvre,  revenu  à  Nevers  en  1644  ; 

En  1641,  Leclerc,  qui,  en  1732,  est  décédé  à 
Nevers. 

Voilà  déjà  trois  noms  nivernais  cités  par  André 
Potier,  avant  1647^  date  du  plat  historique  de  Rouen. 

Mais  André  Potier  écrit,  à  la  page  9,  en  regard  de 
la  date  1640  : 

«  Epoque  où  florissait  à  Nevers  un  fabricant  dis- 
tingué. Custode,  à  qui  on  a  attribué  les  imitations  de 
majolica,   de  faïence  hollandaise  du  genre  chinois  ». 

Cette  désignation  est  à  retenir. 

Mais  ce  Custode  était  le  père  de  Jean  Custode,  l'in- 
culpé au  retentissant  procès  du  14  décembre  1646,  par 
Porterat  de  Saint-Etienne,  le  grand  faïencier  de 
Rouen,  un  an  encore  avant  le  plat  de  1647. 

Ce  procès,  donné  par  André  Potier,  nous  révèle  la 
présence,  à  ce  moment,  d'autres  faïenciers  nivernais  à 
Rouen  :  Petit,  puis  Anthoine  Dupas  ;  Girault  et  Petit- 
Jean,  lesquels,  dit  l'enquête,  «  sont  de  présent  à  Nevers  » . 


^  88   - 

Etaîent-ce  bien  tous  les  faïenciers  de  Nevers  habi- 
tant Rouen  ? 

On  nous  permettra  de  laisser  un  gros  point  d'inter- 
rogation. 

Plus  tard,  André  Potier  nous  en  donne  d'autres  à  la 
page  165  : 

En  1648,  Brochard;  en  1660,  Dumont;  en  1666, 
Bourgoin  ;  en  1671,  Henri  Borne. 

Celui-ci,  de  la  famille  nivernaise  des  potiers-sta- 
tuaires, fait  souche  à  Rouen  et  se  trouve  inhumé  à 
Nevers,  église  Saint-Genest,  le  15  mars  1716. 

Son  fils  Claude  a  deux  pièces  rouennaises  célèbres 
signées  de  lui  :  les  Quatre  Saisons  (1736),  et  Diane 
surprise  au  bain  par  Actéon  (1738). 

En  1679,  Guay  ;  en  1680,  Mazois  et  Soret  ;  en  1681 , 
Maugras  ;  en  1685,  Rodrigue  ;  en  1688,  Desporte  ;  en 
1697,  Marque;  en  1699,  Serrurier;  en  1711,  La- 
cuisse  ;  en  1717,  Baudoin . 

Pour  Nevers,  lui  était-il  possible  de  choisir  une 
plus  belle  ville  que  Rouen  pour  y  apporter  son  art  ? 

Nous  ne  le  pensons  pas. 

Et  cette  marque  indélébile  est  sur  le  plat  portant 
son  état  civil  :  «  Fait  à  Rouen  1647  ». 

Car  s'il  n'y  était  pas  cet  état  civil,  pour  les  érudits, 
môme  de  Rouen,  nous  serions  en  face  d'une  faïence 
((  hollandaise  du  genre  chinois  »,  d'après  André 
Potier  ; d'un  Custode  nivernais  ! 

Le  décor  qui  fait  la  caractéristique  de  Rouen  et  sa 
gloire,  est  un  ornement  avec  réserve  de  blanc. 

Nous  sommes  heureux  et  fier  que  cette  grande  et  belle 
ville  de  Rouen  ait  ensuite  porté  si  haut  l'art  du  faïencier. 

La  preuve  est  faite  et  le  faïencier  de  Nevers  a  réel- 
lemeût  porté  au  loin,  dans  une  zone  encore  indéter- 
minée, et  dès  1598,  son  tour  de  main  et  son  art. 


-  8d  - 

Il  semble  qu'on  pourrait  faire  le  dialogue  suivant  : 
Grimm  disait,  un  jour,  à  Diderot  : 

—  On  n'est  jamais  trahi  que  par  les  siens. 
Et  Diderot  de  répliquer  : 

—  Vous  oubliez  que  le  plus  souvent  on  se  trahit  soi- 
même. 

Mais  remplaçons  Diderot  par  Rouen. 

C'est  en  vain  qu'on  opposerait  le  carreau  d'Ecouen 
de  1542  et  son  auteur  Masseot  Abaquesne,  ce  car- 
reau n'a  pas  été  suivi  de  la  création  d'une  industrie. 

Cette  industrie,  d'après  André  Potier,  ne  vient  que 

cent  cinq  ans  après.  Le  plat  de  1647  est  une  époque  ; 

le  carreau  de  1542  est  un  incident  (1),  un  écho  ;  mais  si 

l'écho  fait  illusion,  il  est  toujours  circonscrit  dans  un 

petit  espace. 
La  célébrité,  qui  est  la  consécration  du  mérite,  n'a 

pas  manqué  à  la  faïence  de  Nevers,  car  on  a  noté  ses 

premiers  essais . 

De  nos  jours  aussi,  on  se  remémore  les  modestes 
débuts  des  ballons,  de  la  vapeur,  de  l'électricité  et  des 
vélocipèdes  ;  mais  de  Thou  a  célébré  \q  petit  four  où 
fut  cuite  la  première  faïence  en  France . 

Peut-il  exister  réellement  un  rayonnement  ou  la 
diffusion  d'un  art,  d'une  industrie,  s'il  n'y  a  déjà  succès 
notoire?  Si  l'établissement  n'est  pas  ancien  ? 

Personne  ne  saurait  soutenir  une  thèse  contraire  à 
cette  vérité,  à  cet  axiome. 

Le  succès  notoire  existe  ;  il  est  confirmé  par  la  cita- 
tion de  de  Thou  :  «  Nevers  a  fait  cuire  la  première 
faïence  en  France  ». 

(i)  Piccopalsi,  dans  son  manuscrit,  en  15i8,  p.  6,  dit  au  moment  où  il 
écrit,  «  un  certain  Guido  Savino  a  porté  Part  à  Anvers  et  ses  fils  le  main- 
tienaent  ». 


-  90  — 

Nous  pourrions  dire  de  Nevers  du  xvp  siècle  :  c'était 
un  champ  artistique,  champ  où  des  villes  françaises 
venaient  glaner  (1). 


VII 


Résumé 

Nous  avons  établi  les  caractères  de  la  faïence  de 
Nevers,  ainsi  que  la  date  du  xvi*  siècle. 

Cette  date  se  trouve  précisée  par  le  mariage  du  duc 
en  1565  ;  par  les  relations  amicales  du  cardinal  de 
Gonzague  avec  le  Tasse  ;  par  la  date  du  poème  de  1575  ; 
puis  par  la  présence  à  Nevers  d'Augustin  Conrade  en 
1584;  mais  nous  avons  retrouvé  dans  le  groupe  des 
faïences  du  musée  de  Nevers  (2)  des  costumes  de  natio- 
nalités qui  sont  pris  dans  «  Les  navigatiotis  et  voyages, 
de  Nicole  de  Nicolaî,  géographe  du  roi  de  France, 
volume  imprimé  à  Venise  en  i580,  par  Francesco 
Ziletto  »,  où  le  caractère  du  dessin  est  de  la  même 
famille  que  le  dessin  des  faïences. 

(1)  Que  les  vers  de  Victor  Hugo  exprimeraient  si  bien  dans  Booz  : 

Nevers  s'estait  couché  de  fatigue  accablé  ; 
11  avait  tout  le  jour  travaillé  dans  son  aire, 
Puis  avait  fait  son  lit  dans  sa  place  ordinaire  ; 
Nevers  dormait  auprès  de  boisseaux  pleins  de  blé. 

Ce  vieillard  possédait  des  champs  de  blés  et  d'orge  ; 
Il  était,  quoique  riche,  à  la  justice  enclin  ; 
Il  n'avait  pas  de  fange  a  leau  de  son  moulin  ; 
11  n'avait  pas  d'enfer  dans  le  feu  de  sa  forge. 

Sa  barbe  t  tait  d'argent  comme  un  ruisseau  d'avril, 
Sa  gerbe  n'était  point  avare  ni  haineuse  ; 
Quand  il  voyait  passer  quelques  pauvres  glaneuses  : 
n  Laissez  tomber  exprès  des  épis  »  disait-il. 

(2)  Ont  figuré  à  FExposition  de  1900. 


—  91  — 

Le  dessin  comme  la  littérature  a  une  famille  :  elle 
s'appelle  Homère  ou  Raphaël,  Voltaire  ou  Michel- 
Ange,  Victor  Hugo  ou  VioUet-le-Duc.  Mais  la  concor- 
dance de  Tàge  du  duc  de  Nevers,  en  1584,  représentée 
dans  Renaud,  est  la  signature  la  plus  authentique  qu'on 
puisse  exiger. 

Le  caractère  français  découle  du  lieu  de  production 
de  cette  industrie,  dont  les  preuves  d'antériorité  sont 
déduites  de  la  longue  manipulation  des  terrées  (huit  à 
dix  ans),  de  la  période  d'essai,  et  enfin  du  temps 
nécessaire  à  son  rayonnement  en  1598. 

Ces  résultats  font  accorder,  en  1578.  la  naturalisa- 
tion de  français  à  leurs  auteurs  ;  les  termes  mêmes  les 
confirment  :  «  Les  Conrade  combattent  dans  l'armée 
française,  disent-ils,  à  côté  du  duc  «  dès  leur  prime 
»  jeunesse  ». 

Ces  termes  confirment  qu'avant  1578  les  Conrade 
avaient  fait  leurs  preuves.  Ils  découvrent  une  date 
ignorée  et  me  ramènent  à  la  mémoire  la  réponse 
d'une  marquise  au  duc  de  Saint-Simon  : 

—  ((  Savez- vous  pourquoi,  lui  disait-elle,  nous 
faisons  peu  de  cas  des  dates  ?  C'est  que  nous  nous 
appliquons,  aux  approches  de  la  trentaine,  à  oublier  le 
millésime  de  notre  naissance  ». 

N'oublions  pas  notre  naissance  :  sous  François  I®', 
l'artiste  Le  Rosso ,  d'Italie ,  est  nommé  intendant 
général  des  Beaux- Arts,  qu'il  dirige  de  1532  à  1541. 

Le  Primatice,  italien  aussi,  garde  ces  hautes  fonc- 
tions de  1541  à  1570.  Et  si  Toussaint  Dubreuil,  qui  lui 
succède,  est  Français  :  c'est  un  élève  du  Primatice 
qui  doit  tout  aux  artistes  italiens. 

C'est  lui  qui  facilite  la  récompense  des  Conrade  ; 
n'en  doutons  pas. 


-  92  — 

Qui  douterait  que  Tlntendant  général  des  Beaux- 
Arts  n'était  en  relations  suivies  avec...  un  prince  de 
Gonzague  !.. .  devenu  français  par  son  mariage  ? 

La  date  vers  laquelle  il  faut  déjà  chercher  l'intro- 
duction des  faïences  d  art  à  Ne  vers  est  1565. 

Plus  tard,  les  Conrade  deviennent  de  vrais  Français 
et  les  vraies  étoiles  fixes  de  l'astronome  Kepler,  qui 
les  veut  groupées  et  non  isolées. 

En  1598,  on  trouve  des  faïenciers  à  Cosne. 

En  1637,  ils  sont  à  Roanne  ;  en  1666,  à  Moulins- 
sur-Allier, 

En  1631,  nos  faïenciers  sont  à  Rouen.  Cherchez  et 
vous  trouverez  leurs  noms  sur  les  registres  des  états 
civils. 

Nos  faïenciers  dépassent  même  le  but  en  allant  en 
Flandre  peindre  un  autel  portatif  (1)  ;  c'est  Stéphane 
Borne,  en  1716,  un  vrai  Nivernais  celui-là  1 

Mais  la  tradition  de  français  n'est-elle  pas  cimentée 
par  ce  fait  que  l'éminent  jurisconsulte  Guy  Coquille 
a  pu  aider  à  la  richesse  de  son  pays  natal  où  il  fut 
ensuite  inhumé  dans  l'église  disparue  des  Saints- 
Pères. 

Guy  Coquille,  de  1568  à  1570,  administra  la  ville  de 
Nevers  pour  le  duc  de  Gonzague,  dont  il  était  le 
conseil  et  l'ami. 

Lamennais,  dans  une  longue  phrase,  dit  cette  écla- 
tante vérité  :  «  Si  les  êtres  se  dégagent  et  s'indivi- 
dualisent, l'art  n'échappe  point  à  la  règle  ». 

Aussi  pouvons-nous  dire  des  faïences  de  Nevers  : 
C'est  de  l'art  français  ! 

(1)  Voir  Musée  de  b^èvres  : 

Fecit  Jacobus  Féburier 

In  Flatidria  anno  iliô 

Pinxit  MariorStephanus  Borne  iliô. 


-  93  - 

Nevers  peut  hautement  revendiquer  les  artistes  de 
grande  valeur  qu'étaient  les  Conrade. 

Si  des  Conrade  on  peut  dire  :  L'homme  n'a  guère 
conscience  de  son  berceau,  on  dira  de  Nevers  :  Tout 
cœur  bien  né  a  le  culte  de  son  foyer. 

Et  notre  foyer  ici  ce  sont  nos  œuvres  d'art,  œuvres 
nées  au  centre,  au  cœur  de  la  France  ! 

Massillon  Rouvet. 

Archxlecie, 

Membre  non  résidant  du  Comité  des  Sociétés  des 
Beaux- Arts  des  départements. 


^ 


APPENDICE 


LES  FAÏENCIERS  DE  COSNE 


Extrait  des  registres  de  Vétat  civil 
de  Cosne  :  (S.- A.)  Saint-Aignart ; 
(S.-J.)  Saint-Jacques. 


Bernardin  COURRADE,  époux  d'Agnès  Perle, 
puis  de  Louise-Anne  Dely. 


Catherine 

17  février  1(506, 

/ille  d'Agnès. 

(S.-A.) 


Marie 

Parrain  :  Bouchet. 

Marraine  :  Roussel. 

8se|)lenibre  1607. 

Fille  d'Agnès. 

(S.-A.) 


Anthoine 

Janvier  1613. 

(S.-J.) 

Fils  de  Bernardin 

et  de  Dely. 
Parrain  :  h.  h.  Fran- 
çois Saiigeot. 
Marraine  :  E.  Dt  svaux. 


Bernardin  a  été,  en  outre,  témoin  :  de  Michel  Minard,  fils 
de  Michel  et  de  Perrette  Laudrat,  avec  Pierrette  Tinant, 
30  juillet  1605  (S.-A.); 

De  Etiennette  Pcrly,  avec  Jehanne  Folonge,  le  28  juillet  1607 

(S.-A.); 

De  Jean  Ferrie,,  fils  do  Jean  et  de  Marguerite  Moy,  avec 
J.  Duplessis  et  Jacquette  Bouchet,  10  décembre  1607  (S.-J.); 
De  Jehan  Bouchet,  5  mars  1(300  (S.-J.). 


François  CORADE,  épouse  Françoise  de  Rabotin. 


Henry-Jacques 

1641. 
Parrain  :  Henry  Coul- 
tani,  sgr  de  Boi.sre- 
naiilt. 
Marraine:  n.  d.  Cathe- 
rine Perly. 

(S.-J  )  • 


MADfclLEINE 

23  novembre  1642. 

Parrain  :  h.  h.  Claude 

Nouranl ,    sgr    Du  - 

plessis. 

Marraine  :    Madeleine 

Barré. 

(S.-J.) 


-  95  - 
Michel  SETON,  époux  d'Espérance  Courrade. 


François 
11  juillet  tSOQ. 
Parrain  ;  Fran{ois 

Bouchot. 
Parrain  ;  Bernardin 

i     <s!j.r 

Michel  Selon  signe  comme  parrain,  31  mai  irjQS,  k  la  nais- 
sance de  Françoise  Corradt',  avec  Valenline  Gambin  (B"  Ver- 
riers, page  8|; 

De  Michel  Geoffroy,  sa  si^aliirc  :  'M.  B.  Conradus), 
15jiimellO(H(S.-.l.); 

De  ^licliol  Hinard  :  Bernardino  Courrade,  30  juillet  1G05 
(S.-A.); 

De  Ëdmée  Bebrier,  lille  de  Mathieu  et  de  Millet.  Marraine  : 
Madeleine  Chanioy,  7  décembre  1609  (S.-J.); 

De  Michel  Conrset,  mailie  potier,  lîls  do  Course!  et  de 
Marie  Danaud.  et  Anne  Deniitot,  5  mars  KilO  (S.-J.l  ; 

De  Michel  Lavigne,  maître  potier,  fils  de  Michel  et  de  Clau- 
dine Frossot.  Marraine:  Roussot; 

De  Edme  Maloyson.  fils  de  Pierre,  avec  Edmëe  Dcsvaits, 
t9  février  1611  (S.-.).); 

De  Michel  Charlcl,  flis  de  Jean  et  de  Philberle  Pillon,  avec 
Pierrette  Pillon  (S.  J.); 

Du  12  novembre  1613  (S.-J.). 

De  Jehan  de  Pouilly,  12  octobre  1615  S.-J,!  ; 

Du  1"  février  1617  ^S.-J.  ; 

Du  29  janvier  1618;  titre:  potier  en  (Ciivie  blanche  iS-J."; 

Du      mai  1618;  titre  :  potier  en  œuvre  binnclie  iS.-J.;; 

Du  mai  1619  (S.-J.);  potier  en  faïence;  d'un  acte  de  la 
paroisse  (S.-J.),  mai  1619. 

De  Pierrette  Tixîer,  14  février  1624;  titre:  maître  potier 
en  œuvre  blanche  (S.-J.); 

De  Marie  Guay;  titre:  maître  potier,  mars  lOSii  (S:-J.). 

CARDOT. 

Est  témoin  au  baplt^me  de  Jac:|ues  Cardot,  le  8  octobre  1606 

1S.-A.),  mais  semble  n'avoir  rien  de  cnuimini  avec  le  suivant. 


-  96  - 

Jacques  CARDOT,  époux  d'Étiennette  Piot, 
puis  de  Marguerite  Penot. 


Louis 

Fils  d*Etiennette  Piot. 

Parrain  :  Couirade. 

Mars  1605. 

(S.-A.) 


Madeleine 

FiUe  de  Cardot 

et  Marguerite  Penot. 

23  mars  1642. 

(S.-A.) 


Il  est  témoin  le  !«'  septembre  1636  (S.-A.) 


Marguerite  SETON. 

Au  mariage  de  Marguerite  Renaut,  4  septembre  1611  ^S.  J.). 
Marraine  :  février  1614  (S.-J.); 

—  20  mai  1615  (S.-J.); 

—  janvier  1623  (S.-J.); 

—  28  janvier  1626  (S.-J.). 


François  CHOPINE,  époux  d'Edmée  Rousseau. 

Parrain  :  Baptême  de  Jehan;  pariain  :  François  Perly. 

Août  1636  (S.-A.); 

Avril  1637  (S.-A.). 

De  François  Marchais,  marchand  potier  en  faïence  (ne  signe  pas). 

Marraine  :  h.  fille  Paule  Damoiseau,  20  octobre  1639  (S.-A.); 

De  Nicolas  en  1645  (S.-A.); 

11  août  1647  (S.-A.); 

Jour  Annonciation,  1648  (S.-A.). 


Barthélémy  COSTE. 
Est  parrain  de  Barthélémy  Mateît,  17  décembre  1637  (S.-A.). 

Jean  ODON,  potier-faïencier, 

lorrain  de  Madeleine  Castillier,  fille  de  François  et  Madeleine  Céâé, 
MaiTaine  :  Madeleine  Barré,  25  juin  1642  (S.-J.). 
De  Anthoine  Hubert,  4  septembre  1646  (S.-J.). 


-  97  — 

François  CASTILLIER,  potier  en  faïence, 
époux  de  Madeleine  Cédé. 


Madeleine 

Parrain  :  Jean  Odon, 

potier  en  faïence. 

Marraine  :    Madeleine 

Barré. 

25  juin  1642. 

(S.-J.) 


Noël 

Parrain  :  Noël  Bon. 

Marraine  :  Chopine. 

2  févri'?r  1644. 

(S.-J.) 


JoACHiM  BLONDET,  potier  en  faïence,  époux 

de  Madeleine  Barré. 


Jacques 

Parrain  :  Jacques 

Bailly. 

Marraine  :  Henriette 

Jars 

26  avril  1643. 

(S.-J.) 


Jehan 

Parrain  :  Julien 

Bidault. 

Marraine  :  Madeleine 

Chopine. 

20  juillet  1644. 

(S.-J.) 


Anne 

Parrain  :  Jacques  Jars. 
Marraine:  Anne 

Pi^'nault. 

29  janvier  1647. 

(S.-J.) 


Louis  ROBET,  potier- faïencier ,  époux 
de  Jehanne  Merlot. 


Etienne 

Parrain  :  Etienne 

Nauliat. 

Marraine  :  Marie 

Fariueau. 

(S.-J.) 


Sylvain  TALBOTHIER,  potier-faïencier. 

Se  marie  à  Cosne,  le  18  avril  1G44;  il  est  fils  de  Léonard 
et  de  Catherine  Picard,  et  épouse  Françoise  Sauzot,  fille  de 
défunt  Simon  Sauzot  et  de  Marie  Lhomrae. 

Témoins:  Jehan  Ferré  et  Pasquier  Soulier  (S.-J.)- 


T.  IX,  3*  série. 


7 


—  98  - 


Louis  ROBINET,  potier-faïencier,  époux 

de  Marie  Burloy. 


Louis 

Baptisé  âgé  de  4  jours. 
Parrain  :  h.  h.  Louis 
Bourhet ,    sieur    de 
Ville- Cor  don,  bailly 
de  Cosne. 
Marraine  :  Marie 
Burloy. 
(S.-J.) 


Barthélémy  COSTE,  marchand  potier. 
Parrain  de  Barthélémy  Maleit,  17  décembre  1637  (S.-A  ). 

Noël  BON,   potier  -  faïencier  ,    époux 
de  Françoise  Sauzot. 

Fille  de  François  Sauzot,  marchand,  et  de  défunte  Margue- 
rite Jars,  mariés  le  21  août  1644  (S.-J.)- 

Parrajn  de  Suzanne  Pinon,  fille  de  Âllain  et  de  Anne  Lodde,  15  jan- 
vier 1646.  Marraine  :  Suzanne  Balleron  (S.-J.); 

De  Noël  Bordot,  fils  de  Jean  et  Catherine  Thenier.  Marraine  :  Jeanne 
Robin,  9  février  164C  (S.-J.)  ; 

De  Anne  Thuriau,  Pille  de  Jean,  marchand  potier,  et  de  Jeanne  Langlois. 
Marraine:  Anne  ;Jailly,  6  mai  16i6vS.-J.); 

De  Anne  Naudin,  fille  de  Etienne,  marchand  potier,  et  de  Kdmée 
Pouriau,  12  mai  1616  S.-J.); 

De  François  Malbault.  Marraine  :  Marie  Cochet,  23  novembre  16tô  (S.-J.). 

René  BERGERY,   potier   en   faïence, 
époux  de  Marie  Thereau. 


Pierrette 

Parrain  :  h.  h.  Biaise 
Guray,  docteur-mé- 
decin. 
Marraine  :  Françoise 
Sauzot. 
4  août  1647. 
(S.-J.). 
Parrain  de  René  Biot, 
2  juin  16fô. 
(S.-J.) 


-  99  - 
Edme  CARDOT,  époux  de  Marguerite  Horta^ilt. 


Madeleine 

Parrain  :  Jacques 

Rapine. 

Marraine  :  Madeleine 

Damoiseau. 

24  mars  1646. 

(S.-A.) 

Parrain,  Hjan  vier  1648. 

(S.-A.) 


Pau  LE 

28  juillet  1651. 
(S.-A.) 


François 

3  décembre  1652. 
(S.-A.) 


Edme  BARAT,  époux  d'Anne  Paultre. 


Jacques 

8  juin  1647. 
(S.-J.) 


Claude  FRAPPIER,   marchand  potier, 
époux  d'Edmée  Chopine. 


Françoise 

14  janvier  1650. 
(S.-A.) 


Jean -Louis 

10  janvier  1652. 
(S.-A.) 


Il  est  parrain  de  Claude  Barat,  avec  Etiennetle  Barat  : 
l«f  janvier  1650  (S.-A.). 
De  février  1651  (S.-A.). 

M.  R. 


'  *  "  - 

4    ^ 


i 


—  100  — 


A    TRAVERS 


LES 


LETTRES  DE  RÉMISSION  NIVERNAISES 

AUX   XIV«   ET   XV    SIÈCLES 

PAR 

RENÉ    DE    LESPINASSE 


L'objet  des  lettres  royales  de  rémission  était  d'ar- 
rêter la  marche  régulière  des  juridictions  locales,  de 
supprimer  l'effet  des  jugements  déjà  rendus,  et  de 
réhabiliter  l'accusé. 

Le  suppliant  pouvait  toujours  s'adresser  au  Roi,  qu'il 
soit  incarcéré  dans  les  prisons  seigneuriales,  qu'il  ait 
déjà  comparu  en  justice,  jugé  ou  non  par  défaut,  ou  ^ 
en  fuite  dans  un  pays  quelconque,  l'important  pour 
lui  était  de  faire  parvenir  ses  lettres  au  Grand  Conseil 
du  Roi,  par  des  parents  ou  des  amis. 

Il  n'y  avait  pas  de  cas  réservés  dans  les  lettres  de 
rémission;  ordinairement  ce  sont  des  meurtres,  quel- 
quefois des  vols.  Elles  témoignent,  comme  on  le  verra, 
d'une  grande  mansuétude  dans  la  concession  de  grâce, 
en  opposition  à  la  rigueur  et  à  la  rapidité  d'exécution 
des  justices  locales.  Le  plus  souvent  l'effet  était  de 
supprimer  immédiatement  la  peine,  cependant  on 
impose  parfois  à  l'accusé  un  temps  de  prison  ou  un 
pèlerinage  de  pénitence. 


k 


-  101  - 

Cette  faveur  royale,  tout  à  fait  exceptionnelle,  était 
en  somme  très  fréquente  et  commune  à  tous,  quelle 
que  soit  la  situation  de  l'accusé  :  serfs,  laboureurs, 
ouvriers,  clercs,  aussi  bien  et  môme  plus  que  les 
nobles,  guerriers  et  autres  oflBciers.  Les  gens  pauvres 
sont  d'ailleurs  de  beaucoap  les  plus  nombreux  et 
figurent  avec  des  détails  locaux  et  des  traits  de 
mœurs. 

J'ai  déjà  exposé  quelques  cas  de  rémission  de  1487  à 
1492,  pour  montrer  l'intérêt  et  la  variété  de  ces  docu- 
ments (1).  Quelques  autres  ont  été  simplement  men- 
tionnés à  la  fin  deV  Inventaire  des  chartes  nwer  nuises, 
du  comte  de  Chastellux,  publié  Tannée  suivante  avec 
les  pièces  du  Trésor  des  chartes  (2).  La  série  des 
lettres  de  rémission  n'est  pas  encore  complète,  et  il  y 
aura  lieu  d'y  revenir  aux  mêmes  dates,  mais  actuelle- 
ment elle  présente  déjà  une  suite  suflBsante  pour  indi- 
quer la  physionomie  d'une  époque. 

La  plus  ancienne  lettre  de  rémission  que  nous  ayons 
jusqu'à  ce  jour  date  de  juillet  1330  et  concerne  la  fille 
d'un  tanneur  d'Entrains,  Isabeau  Huguet.  Elle  était 
soupçonnée  d'avoir  causé  la  mort  de  Savery,  fils  d'un 
certain  Simonet,  de  Clamecy,  et  pour  ce  fait  détenue 
dans  la  prison  de  Clamecy.  Huguet  demande  qu'elle 
soit  retirée  de  prison,  s'engageant  à  la  garder  chez  lui 
comme  otage. 

Jean  Buchart,  bailli  de  Nivernois,  donne  cette  auto- 
risation pendant  les  assises  de  Clamecy  et  charge 
Herbert  de  Roigemont,  lieutenant,  et  Jean  de  Mont- 
réparé,  prévôt  de  Clamecy,  de  régler  l'affaire.  On  s'en 
rapporta  à  la  décision  d'un  conseil  d'arbitres  ou  com- 
missaires   désignés  :    Guyot   de    Saint-Vrain,    sire 

(1)  Ci-dessus,  Bulletin  de  1895,  t.  XVI,  p.  242  à  2M. 

(2)  BuUetin,  t.  XVO,  p.  132  et  suiv. 


—  102  - 

d'Asnois,  Guillemin  de  Paisselières ,  GeofiEroi  de 
Voaigne,  Regnaut  Langlois,  Guillaume  Maugin, 
Huguenin  Le  Muet,  procureur  du  comte  de  Nevers, 
Chrétien  Pigneron,  procureur  de  la  comtesse,  et  plu- 
sieurs autres  qui  déclarèrent  ladite  Isabeau  innocente 
du  crime. 

Le  bailli  Buchart  ratifia  cette  décision  et  la  fit 
revêtir  de  l'approbation  royale  (1). 

Eudes  de  La  Roche,  seigneur  de  Millay,  chevalier, 
Jean  de  Vaudenay,  Guillaume  de  Fontaynes,  Jean 
Buchepot,  avaient  été  condamnés  à  des  indemnités  et 
au  bannissement  pour  des  prises  et  exactions  contre 
leur  seigneur,  Girart  de  Chatillon  et  Guillaume 
d'Alonnc,  et  encore  pour  d'autres  méfaits  et  même  la 
mort  de  Jean  Cornuaul,  homme  d'armes  de  Girart. 
Puis,  sur  la  demande  de  plusieurs  seigneurs,  le  Roi  les 
quitta  de  toutes  condamnations  et  les  remit  dans  leurs 
droits  et  situation,  à  la  condition  qu'ils  serviront  pen- 
dant un  an  à  l'armée  du  duc  d'Athènes  dans  son  expé- 
dition de  Roumanie.  Ce  prince  s'était  également 
adressé  au  Roi  et  c'est  à  son  intervention  que  les 
seigneurs  complices  durent  leur  acquittement  com- 
plet (2). 

Ces  deux  affaires  constituent  une  transaction  judi- 
ciaire ou  une  sorte  de  grâce  après  condamnation, 
tandis  que  les  lettres  de  rémission  proprement  dites 
avaient  pour  principal  effet  d'interrompre  le  cours  de 
la  justice. 

A  mesure  qu'elles  paraîtront,  nous  pourrons  en 
reconnaître  exactement  la  nature  et  l'objet. 

Les  premières  lettres,  avec  leur  caractère  bien  mar- 
qué, se  voient  pour  le  Nivernais  vers  la  fin  du 
XIV*  siècle. 

(1)  JJ.  66,  n*«  748  et  774,  juillet  1330. 

(2)  JJ.  66,  n»  1154,  avril  1333. 


-  103  - 

11  s'agit  de  Jean  Brisède,  pauvre  maréchal-f errant, 
demeurant  à  Neuvy-sur-Loire.  Un  jour  qu'il  rame- 
nait un  cheval  en  passant  par  Anthoigny,  il  rencontre 
sur  son  chemin  la  femme  de  Perrin  Houdôe,  labou- 
reur, «  sa  commère  et  bonne  amie  ».  Le  cheval  prit 
peur  et  renversa  la  femme  qui,  sur  le  coup,  ne  parut 
pas  blessée;  puis,  deux  mois  plus  tard,  elle  mourut, 
atteinte  sans  doute  d'une  <^,pidémie  régnant  dans  le 
pays.  Il  y  avait  quatre  ans  de  cela,  et  le  maréchal,  ^ 

redoutant  les  poursuites  de  la  justice,  s'enfuit  à  Gien, 
d'où  il  s'adresse  au  Roi,  qui,  en  raison  de  sa  bonne 
conduite  passée,  lui  remet  toute  peine  et  le  restitue  à 
son  pays,  à  sa  bonne  renommée  et  à  ses  biens. 
1 /homme  était  passible  de  la  juridiction  de  l'abbé  de 
Saint-Germain-des-Prés,  l'accident  ayant  eu  lieu  sur 
un  territoire  qui  lui  appartenait  (1). 

Après  un  intervalle  de  dix  années,  qu'il  nous  sera 
possible  de  vérifier  plus  tard,  nous  passons,  en  1390, 
d'un  vulgaire  meurtrier  ou  assassin,  exerçant  une  ven- 
geance plus  ou  moins  brutale  sur  son  rival,  à  la  mau- 
vaise gestion  d'un  contrôleur  du  grenier  à  sel  de  La 
Charité-sur-Loire,  le  nommé  Pierre  Béguin. 

Tout  le  moyen  âge  est  occupé,  fonctionnaires  et 
consommateurs,  des  fraudes  sur  le  sel  et  sur  la  gabelle, 
comme  aujourd'hui  sur  les  alcools.  A  part  les  chiffres 
actuels,  qui  font  bien  le  centuple  de  ceux  d'autrefois,  ! 

c'est  toujours  l'éternelle  histoire  d'alléger  à  son  profit  i 

la  rigueur  des  impôts  indirects.  \ 

Le  cas  de  Pierre  Béguin  était  grave.  Il  avait  cru  j 

prudent  d'éviter  de  comparaître  à  l'appel  des  a  géné- 
raulx  reformateurs  ordenez  »,  s'empressant,  comme 

nous  disons,  de  passer  la  frontière,  devenu,  par  là  î 

môme,  contumax  et  mis  en  défaut.  ^ 

M 

(1)  JJ.  118,  n- 197,  juin  1380.  } 

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-  iOi  - 

D'après  les  accusations  portées  contre  lui,  il  était 
consentant  et  complice  du  grenetier  en  défalquant  une 
grande  quantité  de  sel  vendu  au  grenier  de  La  Charité. 
Les  papiers  contenaient  l'enregistrement  d'une  quan- 
tité de  sel  de  beaucoup  inférieure  aux  livraisons  effec- 
tuées. Il  devenait  ainsi  complice  et  participant  d'avoir 
«  vendu  à  leur  proufit  ledit  sel  ainsi  défalqué  sanz 
gabeler  et  d'avoir  prins  nostre  droit  de  gabele  qui 
estoit  monté  à  VII^  et  Illl  livres  tournois  ou  environ.  » 

De  plus,  ils  avaient  favorisé  des  entremetteurs, 
marchands  de  sel,  qui  prélevaient  le  droit  de  salage, 
délivraient  des  quittances  fausses,  s'emparaient  de 
chevaux  et  autres  biens  advenus  au  grenier  pour 
causes  de  forfaitures,  donnaient  des  cédules  d'un  prix 
supérieur,  tous  actes  absolument  repréhensibles  et  qui 
exigeaient  une  punition  exemplaire. 

La  femme  et  les  amis  de  Béguin  ont  supplié  le  Roi 
de  le  recevoir  à  compensation  en  considération  de  la 
longueur  de  ses  services,  et  il  fut  admis  que  moyen- 
nant la  somme  de  250  francs  d'or,  restitution  et 
amende  comprises,  il  demeurerait  quitte  et  paisible  et 
serait  restitué  à  sa  bonne  renommée. 

Cela  prouve  que  le  12  janvier  1390,  date  des  lettres 
royales,  il  y  avait  aussi,  et  peut-être  davantage,  des 
accommodements  avec  le  Grand  Conseil  du  Roi,  môme 
pour  des  employés  coupables  de  concussion  (1). 

L'affaire  de  Tannay  révèle  le  curieux  usage  pour  les 
habitants  de  mettre  à  l'abri  leur  linge  et  effets  de 
ménage  dans  des  coffres  placés  en  une  partie  de 
l'église,  comme  plus  en  sécurité  que  dans  les  maisons 
livrées  à  l'abandon.  C'était  la  même  idée  que  les 
coffres-forts  loués  dans  les  banques  pour  bijoux, 
valeurs  et  argenterie. 

(1)  JJ.  138,  n»  93. 


—  405  - 

On  va  voir  que  les  mesures  de  précaution  manquaient 
à  Téglise  de  Tannay  et  qu'on  en  prenait  un  peu  trop  à 
son  aise. 

Un  jeune  marié,  avec  deux  enfants,  Clément  Ber, 
allant  visiter  son  arche  de  l'église  «  s  adressa  à  l'arche  » 
voisine  de  la  sienÈie,  appartenant  à  Jean  Le  Char- 
pentier, de  Tannay,  l'ouvrit  avec  une  de  ses  clefs,  y 
déroba  <•  cinq  petis  draps  de  lit,  une  touaille  de  quatre 
aulnes,  un  cueuvrechief  et  environ  trois  livres  de  cire 
et  autres  menues  choses  qui  pouvoient  valoir  en  tout 
40  sols  »)  et  plaça  le  tout  dans  son  arche  qu'il  referma 
soigneusement. 

Le  Charpentier  s'aperçut  promptement  de  la  sous- 
traction, il  le  fit  annoncer  au  prône  de  l'église  et  les 
soupçons  tombèrent  de  suite  sur  Clément  qui,  à  cette 
nouvelle,  «  s'absenta  du  pays  ». 

Les  lettres  ne  portent  aucune  excuse  sérieuse  pour 
ce  vol  manifeste.  On  le  rétablit  en  grâce  et  renommée 
sans  raison  plausible  autre  que  le  suppliant  a  été  de 
bonne  vie  et  conversation,  qu'il  est  fugitif  et  laissera 
mendiants  sa  femme  et  ses  enfants,  et  qu'il  a  mal  agi 
sous  l'impulsion  de  la  jeunesse  et  de  la  pauvreté. 

C'était  vraiment  peu  de  réduire  l'affaire  à  une  simple 
réparation  civile. 

A  Tronsanges,  dans  une  auberge,  des  paysans  s'étant 
pris  de  querelle,  s'en  retournent  chez  eux  par  la  nuit 
noire  et  se  battent  en  chemin  avec  coups  et  blessures 
tels  que  le  nommé  Durand  Boquin  fut  tué  par  un  cer- 
tain Jehan  Salé.  Deux  autres  témoins  du  crime,  Jean 
Maillet  et  Guillaume  Berigny,  avaient  cherché  à 
éteindre  un  tison  enflammé  dont  on  s'était  servi,  crai- 
gnant d'être  considérés  comme  complices  du  crime, 
font  valoir  leurs  bons  antécédents  de  simples  labou- 


~  106  - 

reurs,  sans  aucun  vilain  cas,  et  obtiennent  facilement 
la  miséricorde  royale  (1). 

Les  gens  craignaient  d'être  inquiétés  par  la  justice 
et  prenaient  les  devants  pour  obtenir  une  situation 
nette  auprès  des  juges  locaux.  Le  bailli  royal  de  Saint- 
Pierre  était  toujours  chargé  de  les  garantir. 

Même  querelle  dans  une  auberge  à  Veninges,  après 
avoir  joué  et  bu  ensemble,  Huguenin  Grumet  et  Petit 
Bachelier  se  battent  à  coups  de  couteau.  Celui-ci  en 
meurt  huit  jours  après  et  Huguenin,  qui  n'avait  pas 
d'autre  mauvais  cas,  est  délivré,  sur  cette  phrase  : 
«  voulans  miséricorde  en  ceste  partie  estre  préférée  à 
rigueur  de  justice  »  (2). 

Le  cas  de  Guillaume  Guiart,  de  Parzy ,  près  Garchizy , 
se  rapporte  à  un  fait  de  guerre.  Les  forteresses  de 
Bulcy,  près  La  Charité,  des  Riaux  et  de  Cours-les- 
Barres,  étaient  occupées  par  des  Anglais  qui  ravageaient 
tout  le  pays.  Quelques-uns  s'étaient  retiré  dans  une 
maison  dite  le  Pressoir  de  La  Marche,  à  Pierre  de  Sury , 
chevalier,  et  une  autre  à  Guillaume  d'Azy,  écuyer. 
Guiart  crut  protéger  le  pays  de  grands  inconvénients 
et  périls  en  mettant  le  feu  à  ces  maisons  qui  servaient 
de  repaires  à  ces  pillards  ;  mais  comme  il  redoutait 
l'action  de  la  justice,  il  s'adressait  en  toute  confiance 
au  Roi,  qui  lui  accorda  ses  lettres  de  rémission  en 
juin  1390.  A  cette  époque  de  guerre  et  de  fréquents 
combats,  les  mœurs  se  ressentaient  sensiblement  d'une 
vie  aussi  cruelle. 

Guillaume  Debeuvron,  laboureur,  avait  été  cité  par 
Jean  Baulart,  de  Livry,  devant  l'official  de  Nevers  et 
excommunié  pendant  deux  ans.  Assez  longtemps  après, 
les  deux  hommes  se  rencontrèrent  sur  le  grand  chemin 


(1)  JJ.  138,  n«*  209  et  220,  mai  1890. 

(2)  JJ.  438,  n-  270. 


-  107  — 

de  Nevers,  et  Guillaume  l'accabla  de  reproches.  Bau- 
lart  le  frappa,  ce  que  voyant,  Guillaume  lui  donna  sur 
le  corps  et  sur  la  tête  des  coups  de  bâton  qui  entraî- 
nèrent la  mort.  Il  fut  ensuite  saisi  et  mis  dans  la  prison 
du  château  d'Aunay,  au  sire  de  La  Rivière,  premier 
chambellan  du  Roi,  où  il  attendait  la  rigueur  de  la 
justice.  Sur  sa  bonne  réputation  il  est  remis  de  toute 
peine  corporelle,  criminelle  et  civile  et  rétabli  dans 
sa  bonne  renommée  (1). 

Le  cas  suivant  montrera  jusqu'où  allait  la  clémence 
royale  lorsqu'il  se  présentait  des  vols  et  rapines  plus 
ou  moins  mêlés  aux  faits  de  guerre. 

Guillaume  Le  Jaillier  végétait  dans  les  prisons  du 
duc  de  Bourgogne,  à  Decize,  attendant  d'être  jugé. 
Il  se  décide  à  adresser  une  supplique  au  Roi,  et  reçoit, 
en  juin  1390,  des  lettres  de  rémission  où  sont  exposés 
une  partie  seulement  de  ses  méfaits  :  premier  vol  d'ar- 
gent et  effets  dans  la  garde-robe  d'un  écuyer  ;  autre  vol 
d'écus  d'or  et  d'objets  divers  appartenant  à  Guillaume 
Lamoignon  au  Val-de-Bargis  ;  troisième  vol  de  sou- 
liers en  cuir  blanc  à  la  poulaine  commis  à  Decize,  et 
pour  lequel  il  avait  été  incarcéré.  Cette  récidive  prou- 
vait bien  l'habitude  invétérée  du  vol;  pourtant  le 
Conseil  du  Roi,  ayant  égard  à  la  durée  de  sa  détention, 
le  condamna  «  en  prison  fermée  par  l'espace  de  2  mois 
au  pain  et  à  l'eaue  et  sera  tenu  de  faire  un  pèlerinage 
à  Notre-Dame  de  Boulongne  sur  la  mer,  dedens  2  mois 
après  sa  délivrance,  dont  il  sera  tenu  de  rapporter  cer- 
tifBcacion  par  devers  le  bailli  de  Saint-Pierre -le- 
Moûtier  »  (2). 

Pierre  Marandat,  pauvre  laboureur , demeurant  près  La 
Charité  (3),  était  allé  recueillir  la  succession  de  sa  mère, 

(i)  JJ.  138,  !!••  246  et  249. 

(2)  JJ.  138,  n»  254. 

(S)  9aint-0ay,  Saint-Loais,  ancienne  chapelle  à  La  Pointe. 


-  108  — 

décédée  au  pays,  il  y  a  trois  mois,  et,  arrivé  sur  place, 
il  trouve  un  certain  Regnaut  Cayot  mis  par  justice  en 
possession  des  biens.  S  étant  déclaré  et  ayant  été 
reconnu  héritier,  Cayot  ne  lui  en  délivra  qu'une  très 
minime  partie  ;  «  elle  avoit  esté  riche  femme  et  elle 
avoit  grant  finance  ».  Maraudât  «  dolent  et  courroucé  » 
s'introduisit  de  nuit  dans  la  maison  de  Cayot,  y  prit 
une  jument  et  un  poulain  «  qui  valoient  xu  frans  »,  les 
emmena  dans  un  hôtel  en  la  justice  du  prieur  de  La 
Charité,  et  regrettant  son  action  laissa  les  bêtes  et 
s'en  alla.  Mais  les  gens  du  prieur  le  poursuivirent  et 
le  ramenèrent  à  La  Charité  où  il  fut  incarcéré. 

C'est  de  la  prison  qu'il  adresse  sa  supplique  au  Roi. 
Les  bêtes  ayant  été  rendues  au  propriétaire,  et  Maran- 
dat  n'ayant  pas  d'autre  vilain  cas  sur  la  conscience,  il 
obtient  d'être  élargi  (1). 

Tristan  Le  Chauffeur,  écuyer,  réclamait  sa  solde  à 
Rogier  Le  Mire,  de  Jaligny, receveur  de  notre  cham- 
bellan Guichart  Dauphin, maître  des  arbalétriers.  Il  avait 
reçu  73  sols  4  deniers  tournois  et  Rogier  lui  demandant 
des  quittances  pour  d'autres  sommes.  Tristan  chargea 
Jean  Tirant,  notaire  à  Saint-Pierre-le-Moûtier,  de  les 
préparer.  Ayant  présenté  ses  quittances  il  prétendait 
que  Rogier  lui  devait  encore  un  écu.  Des  paroles  et  des 
injures  on  en  vint  aux  coups  ;  Rogier  reçut  au  bras  et  à 
la  poitrine  un  coup  de  couteau  tranche-pain  et  s'irrita 
tellement,  sans  se  soigner,  que  deux  jours  après  il 
mourut  ((  du  feu  de  Saint-Anthoine  qui  se  prinst  en 
sa  plaie  »  (1) 

Tristan  s'adresse  au  Roi  qui  reconnaît  qu'il  est  de 
bonne  renommée,  l'a  loyalement  servi  dans  les  guerres 

(1)  JJ.  lU,  11- 121,  février  ISifâ. 

(1)  Feu  Saint-Antoine  ou  feu  sacré.  I^  membre  atteint  devenait  noir 
et  sec  comme  s'il  avait  été  brûlé  (Trévoux).  C'est  une  érésipèle  ou  ma- 
ladie de  peau.  Dans  notre  cas,  c*e8t  la  gangrène. 


-  109  — 

en  la  compagnie  du  chambellan,  que  le  cas  n'est  pas 
advenu  «  de  fait  appensé  mais  de  chaude  cole  »,  qu'il 
n'y  avait  haine  ni  rancune  et  qu'ils  étaient  môme  bons 
amis. 

En  somme,  ce  n'était  qu'un  accident  regrettable. 
Tristan  fera  dire  un  service  annuel  pour  le  salut  de 
l'àme  dudit  feu  Rogier  et  ira  en  pèlerinage  à  Saint- 
Jacques  en  Galice,  et  rapportera  lettres  certifîca- 
toires  (1). 

Querelle  entre  jeunes  gens  à  une  noce,  au  village 
de  Reugny,  paroisse  de  Cossaye.  Colin  Dufour,  pauvre 
homme,  couturier,  poursuit  Guyot  Baulon,  et  d'un 
seul  coup  de  couteau  sur  la  tête  lui  fait  une  blessure 
qui,  sans  repos  ni  soins,  occasionne  la  mort  vingt- 
quatre  jours  après.  Colin  s'est  absenté  du  pays,  il  est 
poursuivi  et  redoute  une  griève  punition,  si  les  lettres 
ne  lui  obtiennent  miséricorde  (2). 

Guillaume  Guiller  d'Asthée,  châtellenie  de  Mou- 
lins-Engilbert,  laboureur,  surveillant  son  moulin,  voit 
des  chèvres  gardées  par  la  femme  Guillemin  entrer 
dans  son  pré.  Il  s'empara  des  chèvres  en  garantie  du 
dommage  et,  en  chemin,  lui  et  la  femme  se  heurtèrent 
mutuellement  sans  se  faire  apparence  de  mal.  La 
femme  revint  vers  les  autres  pâtres,  filant  et  causant 
avec  eux  ;  quand,  à  midi,  elle  cessa  subitement,  en 
proie  à  une  attaque  qui  la  fit  «  sarrer  les  dens , 
escumer  par  la  bouche,  entachée  de  maladie  de  saint 
que  l'en  dit  au  pals  le  grant  mal  »  et  mourut  sur  le 
soir.  Cité  en  justice,  condamné,  par  défaut,  au  ban- 
nissement du  comté  de  Nevers,  il  s'est  enfui  et  ses 
amis  s'adressent  à  la  miséricorde  du  Roi  qui  lui  est 
acquise  (3) . 


(i)  JJ.  144,  n*  163,  mars  1393. 

Ci)  JJ.  14i,  no  ÎM6,  avril  1393. 

(.^  JJ.  144,  Qo  221,  avril  1393,  après  Pâques, 


—  110  - 

Jean  Bovet,  de  Nuars,  âgé  de  vingt-quatre  ans, 
avait  été  condamné  à  payer  six  boisseaux  d'avoine, 
mesure  de  Moulins-Engilbert ,  en  compensation  du 
dégât  commis  par  sa  jument  dans  un  champ  d'avoine 
à  Guillaume  Dissars.  Furieux  de  ce  jugement ,  il 
réunit  plusieurs  amis  et  profitant  de  l'absence  de 
Dissars,  il  enlève  dans  sa  maison  les  six  boisseaux 
d'avoine,  un  chaperon  et  un  écu  d'or,  le  tout  d'en- 
viron 30  sols  parisis.  Il  redoute  la  justice  du  duc  de 
Bourgogne  ;  une  bonne  partie  de  la  valeur  a  été  resti- 
tuée, ses  amis  s'adressent  au  Roi  pour  l'acquitter  de 
ce  délit  de  jeunesse,  le  seul  qu'il  ait  à  se  reprocher  (1). 

Guillaume  Fautrier,  de  Fougues,  jeune  laboureur 
de  bras,  et  un  prêtre,  appelé  Jean,  étant  devant  le 
presbytère,  rencontrèrent  un  certain  Louis  de  Four- 
neau, prêtre,  fermier  de  la  cure  de  Fougues,  armé 
d  une  épée,  couteau  et  taloche,  et  accompagné  de  deux 
individus.  Ils  en  vinrent  à  se  disputer  et  chacun 
tirant  ses  armes,  se  frappèrent  si  fort  que  Louis  resta 
mort  sur  place.  Le  suppliant  craignant  rigueur  de 
justice  s'est  absenté  du  pays  ;  il  est  jeune,  il  a  femme 
et  petits  enfants.  Louis  était  un  prêtre  de  vie  très 
mauvaise  et  dissolue  «  soustraieur  de  femmes  mariées, 
bateur  de  gens,  suivant  tavernes  »  ;  il  le  poursuivait 
de  sa  haine,  le  menaçait  et  de  plus  lui  devait  de 
l'argent.  Guillaume  est  pardonné,  après  réparation 
civile,  sans  aucune  autre  punition  (2) . 

Ferreau,  Huillier  et  plusieurs  camarades  boivent 
ensemble  et  jouent  aux  billes.  Une  dispute  éclate,  ils 
prennent  des  lattes  pour  battre  Ferreau,  lequel  s  ar- 
mant à  son  tour  d'une  fourche  de  bois,  en  donne  à 
Huillier  sur  la  tête  un  seul  coup  qui  l'étend  mort.  Il 

(1)  JJ.  144,  n«  295,  mai  1398. 

(2)  JJ.  144,  no  327,  avril  1393. 


—  112  — 

cause  de  sa  mauvaise  renommée,  les  jeunes  gens  sont 
acquittés  (1). 

Jeanne  de  Crusay,  dame  de  Saint-Pôre-à- Ville, 
femme  de  Guillaume  de  Migé,  écuyer,  goutteux  et 
impotent,  administrait  elle-même  ses  biens.  Elle  se 
plaignit  à  un  sien  cousin,  Guillaume  de  Maisoncomte, 
écuyer,  du  tort  que  lui  faisait  un  certain  Guillaume 
Dangly  en  réduisant  le  prix  des  tailles  de  ses  hommes 
de  8  à  3  fr.,  ainsi  que  ses  revenus  sur  la  juridiction 
de  Saint-Père-à- Ville  dont  elle  avait  le  quart.  D'autres 
amis,  Philibert  de  Billy  et  Moreau,  écuyers,  étant 
venus  la  voir,  reçurent  également  ses  plaintes.  Les 
trois  hommes  convinrent  entre  eux  que  Dangly  méri- 
tait d'être  battu.  Maisoncomte  cependant  chercha  des 
prétextes  pour  ne  pas  se  joindre  à  eux.  La  dame  les 
suppliait  de  se  servir  seulement  de  bâtons  afin  d'éviter 
les  blessures  mortelles.  Ils  le  promirent  en  s'en  allant, 
puis  le  lendemain,  sans  rien  dire,  ils  allèrent  le  soir 
chez  Dangly,  qui  soupait  avec  un*  de  ses  amis,  Guil- 
laume de  Railly.  Irrité  de  leur  présence,  il  courut  sur 
eux  l'épée  haute,  voulant  les  tuer,  et  dans  la  bagarre, 
il  reçut  une  blessure  grave.  S'étant  fait  transporter  à 
Decize,  son  mal  empira  par  le  mouvement  et  la  grosse 
chaleur  et  il  mourut  au  bout  de  quelques  jours.  La 
suppliante  nest  pas  responsable,  il  lui  faut  avoir 
recours  à  des  parents  et  amis.  Elle  obtint  rémis- 
sion (2). 

Guiot  Rémon,  jeune  homme  d'Onlay,  expose  que 
Renart  avait  acheté   une  cuisse  de  porc  et  l'avait 


(1)  JJ.  145,  n-  39,  octobre  1393. 

(2)  JJ.  145,  n»  40,  octobre  1393.  —  Trois  antres  lettres  pour  même 
affaire  concernant  Guillaume  de  Maisoncomte,  écuyer,  chambellan  de 
Louis  de  Sancerre,  maréchal  de  France,  relatant  les  mêmes  circonstances 
et  obtenant  de  n'être  aucunement  inquiété  par  tous  officiers  de  justice 
\1bid,,  n«  42)  ;  Philibert  de  Billy  et  Jean  Moreau  Çlbid.,  w  104  et  196;. 


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J 

i 


—  113  — 

donnée  à  porter  dans  Moulins-Engilbert  à  Macaut, 
lequel  la  déroba  pour  son  usage.  Plus  tard,  s'étant 
rencontrés  chez  Jean  Guillaude,  prêtre,  chapelain 
d'Onlay,  qui  avait  taverne,  ils  se  dirent  des  paroles  de 
haine,  et  Guiot  ayant  été  envoyé  chercher  des  porcs, 
rencontra  les  individus  qui  l'injurièrent  et  lui  jetèrent 
des  pierres  ;  en  se  défendant  contre  eux,  il  lança  une 
pierre  si  malencontreusement  qu'il  tua  Macaut.  Il  est 
retenu  pour  ce  fait  dans  la  prison  du  comte  de  Nevers, 
à  Moulins-Engilbert,  et  s'adresse  au  Roi  qui  l'acquitte 
en  lui  infligeant  un  mois  de  prison  en  plus  de  ce  qu'il 
a  déjà  fait  (1). 

Olivier  de  Saint-Limier,  chirurgien,  revenant  de 
Corbigny,  où  il  allait  en  pèlerinage  avec  son  fils,  ren- 
contre un  moine,  Robert  de  Montenceaume ,  qu'il 
accuse  de  l'avoir  fait  mettre  en  prison  pour  avoir 
dérobé  une  somme  de  15  gros.  Des  disputes  ils  en 
viennent  aux  coups  ;  le  moine  reçut  un  coup  de  cou- 
teau ;  puis  apparurent  d'autres  individus,  armés  de 
leviers,  contre  lesquels  le  fils,  Jehannin,  s'étant  atta- 
qué, il  atteignit  l'un  d'eux,  Chape,  qui  «  tantost  ala  de 
vie  à  trépas  ».  Olivier  s'est  absenté  du  pays,  ses  amis 
intercèdent  pour  lui,  le  Roi  lui  accorde  son  pardon  en 
raison  de  ses  bons  antécédents  (2). 

Il  y  eut  plusieurs  grosses  affaires,  l'une  concernant 
de  pauvres  laboureurs  :  Thomas  Bureau  père  et  fils 
rencontrent  des  individus  qui,  au  retour  de  la  foire  de 
Vezelay,  à  la  Magdelaine,  les  poursuivent  à  coups  de 
bâton.  Le  fils,  pour  protéger  son  père,  s'en  prend  à  un 
certain  Jehannot  et  le  tue  d'un  coup  de  bâton  sur  la 
tête.  Guillaume  Guedon,  de  Saint-Martin-du-Puy,  est 
poursuivi    d'injures  et  de  menaces  par  un   certain 

(1)  JJ.  146,  n»  142,  novembre  4394. 

(2)  JI.  145,  n»  303,  décembre  1393. 

T.  XX,  3»  série,  g 


—  114  - 

Guillaume  Geneaul.  Us  étaient  également  une  bande 
de  part  et  d'autre  et  Guédon,  voulant  défendre  son 
père,  attaque  l'autre  avec  une  «  ronce  de  char  »  et  le 
tue. 

Ces  deux  meurtriers,  n'ayant  pas  d'autre  vilain  cas, 
sont  acquittés  sur  leur  demande  (1). 

Jean  Bérgon  et  Jean  Bretin,  revenant  de  la  messe 
de  Saint-Denis  au  couvent  deCommagny,  se  disputent 
à  propos  d'une  femme.  Bergon,  frappé  d'un  pal  de 
vigne,  se  jette  sur  Bretin  et  lui  met  les  genoux  sur  le 
corps  ;  ils  tirent  l'un  sa  dague,  l'autre  son  couteau,  et 
finalement  Bretin  est  tellement  blessé  qu'il  en  meurt. 
Les  amis  de  Bergon  obtiennent  le  pardon  pour  un  fait 
qui  n'était  que  le  résultat  d'un  moment  de  fureur  bien 
expliqué  (2). 

Henry  de  Bourbon,  contrôleur  du  grenier  à  sel  de 
Nevers,  avait  consenti  à  s'entendre  avec  le  grènetier 
et  son  clerc  Pilavoine  pour  réduire  les  quittances  et 
s'attribuer  une  part  dans  la  vente  du  sel  ;  il  s'était  fait 
ainsi  un  bénéfice  indu  de  40  fr.  Surpris  par  les  com- 
missaires Jacques  Dugat  et  Pierre  de  Bertigny,  il 
implore  le  pardon  du  Roi,  se  fondant  sur  sa  jeunesse  (il 
a  eu  le  contrôle  à  dix-huit  ans),  sur  son  peu  de  res- 
sources pour  sa  femme  et  ses  enfants,  pendant  neuf 
ans  il  a  servi  à  60  fr.  de  gages  par  an,  et  sur  son 
dévouement  bien  connu.  Il  est  acquitté  à  la  condition 
de  payer  les  40  fr.  ci-dessus  (3). 

Etienne  Godot,  à  Moraches,  était  couché  avec  sa 
femme  et  son  enfant  dans  la  maison  de  son  beau-père, 
où  il  demeurait.  Survient,  en  pleine  nuit,  Guillaume 
Joly,  déguisé  en  femme  ;  il  frappe  d'abord  Godot,  puis 

(1)  JJ.  145,  no«  217  et  285,  décembre  1393  et  janvier  1394. 

(2)  JJ.  145,  n*  317,  février  1394. 

(.3)  JJ.  145,  11»  425,  mars  1394.  -  Ci-dessus  (p.  103),  en  13S0,  affaire  du 
même  genre  pour  PieiTc  Hôguiii,  contrôleur  à  f^  Charité. 


—  lis- 
sa femme,  qu'il  tire  du  lit  en  la  maltraitant.  Le  beau- 
père,  réveillé  par  le  bruit,  essaie  de  faire  de  la  lumière; 
il  est  étendu  à  terre  d'un  coup  sur  la  tôte.  Joly  s'en- 
fuit, le  croyant  mort,  et  laisse  tomber  sa  robe  en  se 
sauvant.  Godot,  le  reconnaissant,  entre  en  fureur  et  le 
poursuit  à  coups  de  fourche,  aidé  d'un  mâtin  qui  lui 
mord  les  jambes  ;  pendant  ce  combat  entre  les  deux 
hommes  et  le  chien,  la  femme  arrive,  dégage  son 
mari,  cogne  sur  Joly,  qui  cherche  à  se  sauver  et  qui, 
poursuivi  par  le  chien,  tombe  à  terre  et  meurt.  Le 
mari  languit  dans  les  prisons  du  seigneur  de  Moraches, 
la  femme  a  quitté  le  pays  ;  leurs  amis,  Jaisant  valoir 
qu'ils  ont  été  victimes  d'une  mauvaise  action,  obtien- 
nent pour  eux  le  pardon  (1). 

Guillot  Durand,  marchand  à  Nevers,  rencontre,  à 
son  passage  dans  la  ville,  un  valet  pelletier,  Guillaume 
Lerouge,  qui  l'injurie  devant  du  monde  et  l'exaspère 
tellement  qu'il  le  frappe  sur  la  tête  d'un  coup  de  cou- 
teau. Le  barbier  qui  le  pansait  lui  recommandait  de  se 
reposer  et  de  ne  pas  boire,  néanmoins  il  but  du  vin 
sans  eau  et  se  promena  avec  les  camarades  pelletiers 
dans  la  taverne  du  lieutenant  du  bailli  de  Nevers, 
s'enivrant  et  ne  prenant  aucune  précaution.  Le  bar- 
bier prévint  le  bailli  et  Guillaume  lui-même,  disant 
qu'il  mourrait  s'il  continuait,  et,  en  effet,  huit  jours 
après,  à  la  suite  d'une  orgie  de  vin  et  de  viandes,  il 
passa  de  vie  à  trépas.  Guillot,  sur  la  demande  de  ses 
amis,  fut  acquitté  (2). 

Guiot  Buletin  et  Jean  Pautrart,  laboureurs,  sur 
l'ordre  des  officiers  du  duc  de  Bourgogne  à  Donzy, 
avaient  aidé  à  mener  en  prison  Etienne  Leduc.  Trois 
mois  après,  celui-ci  les  rencontre  à  Perroy,  les  injurie 


(1»  JJ.  145,  n-  462,  avril  1394. 
(2)  JJ.  145,  n*  444,  avril  1303, 


-  416  - 

et  les  frappe,  et  ceux-ci,  armés  d'un  couteau,  lui  font, 
en  se  battant,  une  blessure  mortelle.  Comme  Leduc 
était  de  mauvaise  renommée,  ils  sont  facilement 
acquittés  (1). 

Les  frères  Gautier  et  Guillaume  Dorneaul,  labou- 
reurs, tenaient  ensemble  une  exploitation  agricole. 
Gautier  après  une  journée  de  corvée  pour  le  seigneur 
de  Vaux,  rentra  tard  à  la  maison;  les  femmes  lui 
reprochaient  d'être  ivre  et  de  ne  s'occuper  de  rien  ;  la 
querelle  s'envenime,  les  deux  frères  se  menacent, 
Gautier  s'en  va  chez  lui  se  disant  malade,  mais  Guil- 
laume le  poursuit  avec  un  gros  pal  et  les  deux  hommes 
se  battent  furieusement.  Guillaume  reçoit  un  coup  de 
couteau  et  meurt  en  disant  :  «  Mon  frère,  fuy-t-en  car 
je  suis  mort  ».  Malgré  la  gravité  de  ce  crime,  les  amis 
de  Gautier  s'adressent  au  Roi  et  obtiennent  sa  rémis- 
sion (2). 

Guillaume  de  Corvau,  bâtard,  âgé  de  vingt  ans, 
avait  emmené  une  femme.  Jeannette  Ducrot,  chez  sa 
mère.  Andrieu,  Guillaume  Naudin  et  une  bande  de 
jeunes  gens  viennent  frapper  à  la  porte  et  envahissent 
la  maison,  battant  la  mère,  emmenant  la  femme  malgré 
elle  et  saccageant  tout.  Guillaume  va  chez  son  père, 
Guy  de  Corvau,  chevalier,  prendre  sa  cote  et  sa 
taloche  et  aidé  de  deux  amis,  Simon  Maréchal  et  Guil- 
laume Leroy,  ils  s'en  vont  à  Isenay  et  à  Vandenesse 
chercher  leurs  adversaires.  Quand  ils  eurent  trouvé 
Naudin,  la  bataille  recommença  et  d'un  coup  de 
badolaire  celui-ci  fut  étendu  mort.  Les  amis  de  Guil- 
laume de  Corvau  s'adressent  au  Roi  qui,  ayant  égard 

(1)  JJ.  145,  n«  534,  mai  1394.  —  1393,  octobre.  [Vidimus  d'une  charte 
de  Tarchevéque  de  Bourge»  de  mars  1393,  relative  à  un  homicide  commis 
par  Girard,  clerc,  sur  Jean  Gautier,  laïque  du  diocèse  de  Nevers.  — 
JJ.  145,  n-  46. 

(2)  JJ.  146,  n- 10,  mai  1394, 


I 


-  117  — 

aux  bons  et  loyaux  services  du  chevalier  dans  les 
guerres  veut  bien  faire  grâce  à  la  condition  que  le 
meurtrier  a  sera  détenu  prisonnier  un  mois,  au  pain  et 
à  Teaue  (1)  » . 

Deux  cas  de  querelle,  concernant  :  l'une,  Girart  Car- 
roget,  laboureur,  pour  des  réclamations  d'argent  ; 
l'autre^  Pierre  Corcelle  qui  se  dispute  avec  les  deux 
frères  Stevenot,  se  terminent  par  une  blessure  entraî- 
nant la  mort.  Les  meurtriers  sont  acquittés  (2). 

Jean  Jardon,  pauvre  homme,  avait  bu  un  jour  de 
f ftte  dans  une  taverne  de  Parenche  (Azy-le-Vif),  avec 
Jean  de  Chapitre.  Celui-ci  lui  avait  pris  son  chaperon 
et  quand  il  rentra  très  tard  chez  lui,  sa  femme  lui 
reprocha  de  s'être  laissé  voler.  Malgré  lui,  elle  voulut 
aller  chez  Chapitre,  but  avec  cet  homme  et  s'en  revint 
vers  minuit.  Mécontents  de  cela  ils  se  disent  des 
injures,  puis,  la  femme  la  première  lui  donna  un  gros 
coup  de  poing  au  visage,  il  se  lève  hors  de  lui  et  la 
frappe  d'un  coup  de  couteau  taille-pain,  dont  elle  mou- 
rut deux  jours  après.  A  cause  de  ses  enfants  et  de  sa 
conduite  passée,  il  en  est  quitte  pour  deux  mois  de 
prison  au  pain  et  à  l'eau  (3). 

Jeanin  Régnant,  laboureur,  s'était  fâché  avec  le  fils 
du  bailli  de  Prelart  (AUigny-en-Morvan),  qui  avait 
tué  une  de  ses  bêtes  d'un  coup  de  pierre.  Plus  tard, 
pour  ce  même  sujet,  ils  se  disputèrent  de  nouveau  et 
d'un  coup  de  bâton  Régnant  fit  une  blessure  qui  alla 
jusqu'à  effusion  de  sang.  Dans  l'intérêt  de  sa  femme  et 
de  ses  enfants  réduits  à  la  misère,  il  est  acquitté. 

Perreau  Ferrant  et  ses  amis  revenaient  de  Chaulgnes 
après  boire  et  passaient  devant  la  maison  de  la  femme 
Chatingat  qui  venait  d'accoucher.  La  chambrière  leur 


(1)  JJ.  146,  n*  27,  mai  1394. 

(?)  JJ.  146,  n«*  34  et  53,  mai  1394. 

(3)  JJ.  146,  n«  55,  jain  1394. 


-  118  — 

dit  de  payer  le  vin  et  les  hommes,  déjà  fortement  émus, 
se  disputent,  Laurent  s'empara  du  chaperon  de  Per- 
reau et  les  deux  hommes  se  poursuivant  de  coups  et 
d'injures.  Laurent  fut  poussé  dans  le  feu  et  vint,  armé 
d'un  coiteau,  sur  Perreau  qui,  blessé  sérieusement,  le 
poignarda  à  son  tour  lui  faisant  une  blessure  dont  il 
mourut  (1). 

Etienne  Barole.  de  Champlemy,  comté  de  Nevers, 
travaillait  dans  son  champ  de  blé,  quand  le  bœuf  de 
son  voisin  pénétra  dans  le  champ  brisant  la  récolte  ;  il 
renvoie  le  bœuf  chez  Coquart,  qui  travaillait  à  côté, 
et  celui-ci  insultant  le  valet  d'Etienne,  il  vient  à  son 
tour  sur  place  et  les  deux  hommes  se  poursuivent  à 
coups  de  pierres,  dont  l'une  fit  une  forte  blessure  à  la 
tète  de  Coquart.  Il  alla  se  plaindre  en  justice;  ils  com- 
parurent et  le  juge  leur  proposa  «  l'asseurement  »,  que 
des  amis  leur  empochèrent  de  conclure  ;  puis,  quelques 
jours  après,  Coquart,  pris  du  mal  Saint-Antoine,  se 
met  au  lit  et  meurt.  Etienne,  dans  l'intérêt  de  sa 
femme  et  de  ses  enfants,  est  acquitté  (2). 

Jean  Millaut,  de  Saint-Baudière,  près  Marzy,  avait 
une  femme  «  tanceresse  »  qui  poursuivait  sa  mère  d'in- 
jures et  de  coups.  Une  fois,  lui-même  s'enferma  et  la 
femme  brisa  la  porte  pour  l'attaquer  ;  furieux,  il  lui 
fait  d'un  coup  de  bâton  sur  la  tête  une  plaie  dont  elle 
mourut  cinq  jours  après.  Comme  il  ne  voulait  point 
la  tuer  et  seulement  se  défendre,  il  est  facilement 
acquitté  (3). 

Jean-Charles  allait  fêter  la  Saint-Fiacre,  un  soir,  à 
Tintury,  chez  Seguenot  Roussel,  marchand  de  bes- 
tiaux. Après  avoir  bu,  ils  s'en  vont  tous  les  deux  en 
pleine  nuit  et  volent  une  jument,   qui  fut    ensuite 

ri)  Ji   146,  n*>  200  et  216,  juin  1394. 

(2)  .TJ.  146,  n*  270,  septembre  1394. 

(3)  .TJ.  147,  n*  9,  décembre  1394. 


—  H9- 

reconnue  à  Anlezy  et  payée  par  Charles  au  proprié- 
taire. Ils  se  rencontrent  un  mois  plus  tard  et  volent 
encore  un  troupeau  de  douze  pourceaux  qu'ils  emmè- 
nent et  qu'ils  rendent  lorsqu'on  le  reconnaît,  puis  deux 
poulains  qu'il  rendit  de  lui-même.  Charles,  qui  cachait 
chez  lui  tous  ces  animaux  commençait  à  voir  que  la 
compagnie  de  Seguenot  pouvait  lui  faire  du  tort,  il 
rompit  définitivement  avec  lui,  et  comme  depuis  ce 
temps  il  a  commis  d'autres  larcins,  il  craint  rigueur  de 
justice  et  il  a  quitté  le  pays,  demandant  au  Roi  sa 
rémission.  Le  suppliant  est  jeune,  il  n'a  pas  d'autre 
vilain  cas,  il  a  agi  par  «  envortement  de  Seguenot  et 
temptacion  de  l'ennemy  »,  les  biens  ont  été  restitués 
sans  contrainte.  Il  est  acquitté  après  a  deux  mois  en 
prison  fermée  »  (1). 

Thevenin  Pelvé,  à  Champlemy,  assiste  à  une  que- 
relle entre  son  fils  et  sa  bru.  La  femme  avait  pris  un 
tison  enflammé  et  en  frappait  son  mari.  Thevenin, 
étant  armé  d'un  couteau,  cherche  à  les  séparer,  mais, 
par  un  faux  mouvement,  la  femme  tombe  sur  le  cou- 
teau et  se  fait  une  profonde  blessure  au  côté,  dont  elle 
meurt.  Les  amis  exposent  que  c'est  un  accident  invo- 
lontaire, et,  pour  sa  bonne  renommée.  Thevenin  est 
acquitté  (2). 

Pierre  Tixier,  jeune  homme  de  Chàtillon-en-Bazois, 
et  son  ami  Jean  Bavelle,  s'en  vont  à  la  nuit  au  moulin, 
où  ils  trouvent  la  Guyotte  avec  Picquart,  valet  de 
Guichard  Dauphin,  maître  des  arbalétriers  de  France 
et  seigneur  de  Châtillon  (3).  La  fille  consent  à  les  suivre, 
mais  les  hommes  se  disputent  et  se  battent  à  main 
armée.  Bavelle,  excité  par  Tixier,  s'attaque  au  cama- 
rade de  Picquart,  nommé  Quatrecôtes,  et  le  tue  d'un 

(1)  JJ.  147,  n*  119,  février  1305. 

(2)  JJ.  147,  n*  195,  mars  1395. 

(3)  Déjà  cité  ci-dessas  (p.  106),  en  mars  .1393. 


-  420  - 

coup  de  couteau.  Sa  jeunesse  et  sa  bonne  renommée 
le  font  acquitter  par  le  Roi,  auquel  ses  amis  avaient 
adressé  une  supplique  (1). 

Guillaume  de  Reugny,  écuyer,  avait  de  mauvaises 
paroles  avec  un  prêtre  nommé  Jean  Rossignol ,  à 
Cressv.  S'étant  rencontrés  dans  une  taverne,  ils  s'in- 
jurièrent  de  nouveau  et  se  battirent.  Guillaume  tira 
un  grand  couteau  sans  intention  de  tuer  et  seulement 
pour  faire  peur,  mais  Tarme  tourna  entre  ses  mains 
et  fit  une  grosse  blessure  à  la  tête  qui  causa  la  mort 
de  Rossignol  huit  jours  après.  Considérant  que  Guil- 
laume est  bon  écuyer .  qu'il  s'est  accordé  avec  les 
amis  du  défunt,  et  qu'il  s'adresse  au  Roi  le  vendredi- 
saint,  jour  de  pardon  à  cause  de  la  Passion  de  Notre- 
Seigneur,  il  est  acquitté  à  la  condition  de  payer  à 
«  l'Hôtel-Dieu  de  Paris  la  somme  de  cent  francs  d'or  et 
avecque  ce  fera  faire  un  anué  de  messes  de  Requiem 
pour  l'âme  d'icellui  défunt  (2)  ». 

Bertram  Dechasteau,  clerc,  marié,  reconnu  cou- 
pable de  faux  en  écritures  publiques,  condamné  à  une 
grosse  amende,  et  ensuite  puni  par  l'évêque  de  Paris, 
obtient  rémission  pour  pouvoir  reprendre  du  travail  ; 
elle  est  signifiée  au  bailli  de  Saint- Pierre  -  le - 
Moûtier  (3). 

Jean  Petit ,  laboureur  à  Marcigny ,  près  Saint- 
Pierre-le-Moûtier,  vint  offrir  à  une  petite  fille  de  dix 
ans  de  garder  sa  jument  avec  celle  de  Jean  Garant, 
lui  offrant  un  blanc  de  cinq  tournois.  La  petite  Jeanne 
Galeine  accepta  et  l'autre  étant  revenu  abusa  d'elle, 
mais  sans  la  violer  et  lui  donna  un  blanc.  De  vilaines 
gens  la  poussèrent  à  faire  une  plainte  au  prévôt  de 
Saint-Pierre,  puis  la  plainte  faite  elle  vint  déclarer  à 

(1)  JJ.  147,  n»  200.  avril  1395. 

(2)  JJ.  147,  n«  259,  9  avril  4395. 

(3)  JJ.  147,  n*  342,  juin  1395. 


-  i21  - 

tin  notaire  qu'elle  n'avait  pas  dit  la  vérité  au  juge.  A 
cause  de  cette  contradiction,  il  est  acquitté  (1). 

Jean  Deboys ,  pauvre  laboureur,  âgé  de  soixante 
ans,  allait  faucher  dans  un  pré,  quand  il  rencontra 
Guillaume  Robert,  se  disputa,  lui  donna  des  coups  de 
poing  et  lui  répartit  :  «  p.  pour  ta  bourgeoisie  et  pour 
ton  Roy  ».  Il  était  ivre,  mais  quand  même  craignant 
pour  ces  paroles  dites  dans  une  bataille,  sans  bles- 
sures, il  s'adresse  au  Roi  qui  l'acquitte  après  un  mois 
de  prison  fermée  au  pain  et  à  l'eau  (2) . 

Guillaume  Petit,  de  Montigny-sur-Canne,  et  Jean 
Courbeau,  cousins  par  leurs  femmes,  étaient  allés  à 
la  chasse  aux  écureuils.  Ils  se  disputent  d'abord,  se 
réclamant  de  l'argent  pour  des  peaux  prises  autrefois. 
Devant  eux  saute  sur  un  arbre  un  écureuil  que  Petit 
atteint  d'une  pierre,  l'écureuil  tombe  dans  la  rivière 
la  Canne,  entraîné  par  le  courant.  Petit  est  encore 
furieux  de  l'avoir  perdu,  il  tire  son  couteau  et  menace 
Courbeau  qui  s'enfuit,  il  lui  lance  alors  une  pierre 
qui  l'atteint  à  la  tête  si  grièvement  qu'il  en  mourut. 
Avant  sa  mort,  il  dit  devant  plusieurs  témoins  qu'il 
pardonnait  à  Petit  et  qu'il  avait  eu  des  torts  vis-à-vis 
de  lui.  Pour  cela,  le  Roi  l'acquitta  (3). 

Jean  Moneret,  laboureur .  témoin  d'une  rixe  où 
Guillaume  Passeau,  de  Champvert ,  avait  été  tué, 
faisait  pour  cela  un  mois  de  prison  à  Decize.  Son 
beau-frère  ,  Jean  Renart ,  l'excitait  tout  le  temps 
contre  ce  Passeau  et  il  avait  dit  une  fois  qu'il  voulait 
bien  qu'on  le  batte,  mais  sans  le  tuer.  Moneret  craint 
de  rester  en  prison  et  ses  amis  s'adressent  au  Roi  qui 
l'acquitte  (4). 

(1)  JJ.  148,  n*  85,  août  1396. 
(2)JJ.  148,  n>  141,  août  1396. 

(3)  JJ.  148,  n*  146,  août  1395' 

(4)  JJ.  148,  n*  212,  octobre  139 


1 


-  422  — 

Etienne  Paquet,  maréchal  au  service  des  religieux 
de  Bellary,  se  prend  de  querelle  en  jouant  aux  quilles 
avec  des  camarades.  Rossé  d'abord  par  eux,  il  reprend 
le  dessus,  et  en  se  défendant  il  tue  Etienne  de  Beau- 
voir d'un  seul  coup  de  bâton.  Comme  il  n'avait  pas 
d'autre  blâme  et  reproche  dans  sa  vie,  il  obtint  facile- 
ment sa  grâce  (1). 

Jean  Mariotte,  laboureur  à  Grenois,  se  prend  de 
querelle  dans  un  cabaret  avec  Jean  Cheraut,  dit  Le 
Camus,  et  le  tue  d'un  coup  de  bâton.  Les  femmes  et 
les  habitants  se  rassemblent  et  le  font  incarcérer  dans 
les  prisons  de  la  dame  de  La  Tour,  où  il  croit  «  finir 
ses  jours  »  si  le  Roi  ne  lui  fait  grâce.  Il  obtient  son 
pardon,  après  satisfaction  civile,  en  ajoutant  â  sa  peine 
deux  mois  en  prison  fermée  (2). 

Guillemin  Bourdelier,  laboureur  à  Ourouér-aux- 
Amognes.  étant  en  course  à  Sury,  rencontre  dans  une 
auberge  un  porteur  de  semonces  nommé  Demores  qui 
accablait  d'injures  le  curé  d'Ourouër;  il  le  blâme  de 
traiter  ainsi  un  homme  d'église,  de  bien  et  d'honneur  ; 
la  dispute  s'envenime  et  se  termine  par  un  gros  coup 
de  bâton  que  Demores  reçoit  sur  la  tôte.  Cependant  il 
reste  à  s'enivrer  toute  la  nuit  et  plusieurs  jours  après 
il  marche  encore,  mais  on  le  trouve  mort  dans  un 
champ  le  samedi  suivant. 

Guillemin,  n'ayant  que  ce  fait  à  se  reprocher, 
s'adresse  au  Roi  ;  il  a  voulu  venger  les  injures  faites  au 
curé;  son  adversaire  était  un  homme  de  mauvaise  vie 
et  gouvernement  ;  étant  mort  quelques  jours  après,  il 
peut  avoir  été  atteint  d'un  autre  coup  dans  les  champs 
comme  un  malfaiteur  qu'il  était  ;  sa  veuve  et  ses  amis 
ont  reçu  satisfaction  ;  bref,  Guillemin  en  sera  quitte 


(1)  JJ.  156,  n- 144,  mai  1401. 
(2)JJ.  156,  n*  164,  juin  14(H. 


-  123  - 

pour  un  mois  de  prison  fermée  et  sera  entièrement 
réhabilité  (1). 

Le  pardon  fut  accordé  par  lettres  royales  de  juillet 
1401  à  Guillaume  Bureau,  charbonnier  à  Précy, 
redoutant  d'être  poursuivi  pour  meurtre  sur  la  per- 
sonne de  Guillaume  Thibaut. 

Plusieurs  détails  dans  cette  lettre  tiennent  de  loin 
à  l'affaire  et  sont  autant  de  traits  de  mœurs.  Bureau 
faisait  du  charbon  dans  les  bois  du  seigneur  de  Précy, 
Philippe  de  Bonnay  (2).  Il  y  avait  à  Précy  une  grosse 
forge  à  faire  du  fer,  laquelle  forge  était  dirigée  par  un 
certain  maître  Hennés,  du  pays  d'Allemagne.  Bureau 
y  vendait  son  charbon.  Tous  ces  gens  venaient  à  La 
Charité  faire  leurs  provisions  et  passaient  les  ponts  de 
Loire,  le  grand  passage  pour  les  deux  rives  du  fleuve. 
Des  religieux  achevai  allant  de  La  Charité  à  Aubigny 
se  rencontrent  sur  les  ponts  avec  des  habitants  qui 
venaient  du  pèlerinage  de  Saint -Antoine  de  Garchy, 
le  forgeron  allemand  s'y  trouvait  aussi  ;  une  bagarre 
s'ensuivit  entre  lui,  les  religieux  et  les  pèlerins,  où 
finalement  Guillaume  Thibaut  trouva  la  mort  (3). 

Ces  événements  sont  décrits  avec  assez  de  confu- 
sion, mais  ils  indiquent  une  vie  mouvementée  et  assez 
active  dans  ces  localités. 

L'année  suivante,  des  lettres  de  rémission  de  sep- 
tembre 1402  traitent  d'une  affaire  connexe  à  celle-ci. 

C'est  encore  un  forgeron  allemand  venu  de  son  pays 
depuis  une  dizaine  d'années  pour  demeurer  en  Berry 
et  en  Nivernais  et  y  travailler  de  son  métier  de  forge, 
nommé  Volleaume.  Il  se  trouve  impliqué  dans  la 
bagarre  entre  le  religieux  d'Aubigny  et  les  pèlerins 
de  Sancergues,  sur  les  ponts    de  Loire.  Craignant 

(1)  JJ.  156,  n*  170,  juin  440t. 

(2)  Près  Sancergues  (Cher). 

(3)  JJ.  156,  n»  217. 


-  124  - 

d'être  poursuivi  pour  le  meurtre  de  Thibault,  pour 
lequel  d'ailleurs  il  était  retenu  à  la  prison  de  Saint- 
Pierre-le-Moùtier,  il  s'adresse  au  Roi.  Les  lettres 
disent  «  qu'aians  pitié  dudit  Voleaume  et  de  sadite 
femme  et  enffans  »,  on  lui  remet  sa  peine  (1). 

Il  n  est  fait  aucune  allusion  à  sa  qualité  d'étranger  ; 
il  semble  être  traité  sur  le  même  pied  que  les  Fran- 
çais. 

Nous  verrons  dans  la  suite  que  la  colonie  allemande 
de  forgerons  était  très  nombreuse  en  Nivernais. 

Le  meurtre  commis  à  Lormes,  dans  la  maison  appe- 
lée la  Grange,  attira  une  double  affaire  pour  Hugues 
de  Saint- Aubin,  chevalier,  et  son  page  Jean  Petit. 
Hugues  réclamait  d'un  des  hommes  de  Lormes  lo 
temps  de  louage  qui  lui  était  dû  et  que  celui-ci  lui 
refusait  avec  insolence.  Il  y  avait  eu  entre  eux  des 
injures  et  des  menaces  suivies  de  coups.  Le  page, 
voyant  son  maître  irrité,  lui  demanda  la  cause  de  sa 
fureur  et  entreprit  de  le  venger.  Le  chevalier  y 
consentit,  mais  à  la  condition  formelle  que  tout  se  bor- 
nerait à  une  forte  correction  sans  entraîner  mort 
d'homme,  «  deux  ou  trois  batteures  sans  mort  »,  ou 
autrement  qu'il  désavouerait. 

Le  page  chercha  des  camarades  ;  la  rencontre  eut 
lieu  et,  dans  la  chaleur  de  la  lutte,  l'un  des  adver- 
saires, Perrenot,  reçut  un  coup  mortel. 

L'affaire  fut  très  désagréable  au  seigneur  de  Saint^ 
Aubin  :  il  devait  se  mettre  à  la  disposition  de  la 
justice,  ses  biens  allaient  être  saisis.  Ses  parents  et 
amis,  très  préoccupés  de  ces  conséquences,  s'employè- 
rent auprès  du  Roi  pour  obtenir  les  lettres  de  rémission 
de  janvier  1402  (2). 


(1)  JJ.  157,  n*  182. 

(2)  JJ.  157,  n-  41. 


—  425  - 

Quant  au  jeune  clerc  Jean  Petit,  son  affaire  avait 
été  proinptement  réglée,  au  mois  de  décembre  précé- 
dent, «  par  contemplation  de  nostre  très  chier  et  très 
amé  oncle  le  duc  de  Bourgoigne  qui  de  ce  nous  a  fait 
supplier  (1)  ».  Avec  la  protection  d'un  seigneur  de 
cette  importance,  l'escapade  sanglante  du  jeune  page 
devait  défier  les  rigueurs  de  la  justice. 

A  Château-Chinon,  en  janvier  1402,  eut  lieu  une 
querelle  entre  femmes.  La  femme  Marion,  en  compa- 
gnie de  son  mari,  Jeannot  Dubouc,  et  d'un  barbier 
nommé  Jean  Pugnet,  buvaient  dans  un  hôtel  de  la 
ville.  Une  nourrice,  accompagnée  de  la  veuve 
Regnaulde,  vint  les  accabler  d'injures,  puis  de  coups, 
la  frappant  du  poing  sur  la  tète  et  par  le  visage  et 
frappant  aussi  son  mari.  Mue  de  chaleur  et  de  cour- 
roux, la  femme  Marion  s'arma  de  son  petit  couteau 
taille-pain  et,  d'un  seul  coup  en  pleine  poitrine,  tua 
la  nourrice.  Grâce  fut  accordée  parce  que  «  la  feue 
nourrisse  fut  agresseresse  et  commença  le  débat  », 
tandis  que  l'autre  n'était  convaincue  d'aucun  blâme 
précédent  (2). 

Une  joyeuse  bande  d'hommes  et  de  femmes,  pour 
fôter  la  Saint-Pierre,  étaient  allés  «  s'esbattre  en  un 
villaige,  près  de  Commaigni  »,  â  Merry,  près  Moulins- 
Engilbert.  Garnier  et  Favier,  s'étant  disputés,  en 
vinrent  aux  mains  et,  au  milieu  de  la  bagarre,  Garnier 
fut  atteint  d'une  pierre  dans  la  tête  dont  il  mourut 
quinze  jours  après.  Favier,  condamné  au  bannisse- 
ment par  défaut,  se  voit  quand  même  rentré  en  grâce 
sur  la  demande  de  ses  amis  (5). 

Querelle  de  jalousie  entre  Huguenin  Ducrocq , 
paroisse  de  Gacogne,  qui  trouve  son  parent  Rigault 

d)  JJ.  156.  n-  326. 

(2)  JJ.  156,  n»  331. 

(3)  JJ.  156,  n-  450,  mars  1402. 


—  126  - 

av6c  sa  femme  et  le  tue  d'un  coup  de  bâton  sur  la  tète. 
Lé  suppliant,  qui  avait  fui  le  royaume,  démontra  aisé 
ment  que  c'était  une  pure  vengeance  pour  des  rela- 
,  tiens  déjà  anciennes  et   il  obtint  grâce   devant   la 
justice  (1). 

Regnault  Depoussy,  tonnelier  à  Nevers,  passait  un 
soir  â  Fougues  et  demandait  à  souper  à  l'hôtel  de 
Guillaume  Fautrer  ;  il  s'attabla  avec  quelques  autres 
et,  après  boire,  une  querelle  s'éleva  entre  eux  suivie 
d'injures  et  de  coups  violents.  Nativeault,  fortement 
pris  de  vin  et  plus  irrité  que  les  autres,  menaça 
Regnault  d'un  couteau  qu'il  tenait  en  main,  et  celui-ci. 
saisissant  un  bâton,  lui  en  donna  sur  la  tête  un  coup 
qui  retendit  par  terre.  Le  lendemain,  il  était  mort. 
Les  amis  de  Regnaut  exposent  qu'il  s'était  borné  à  se 
défendre,  que  son  adversaire  était  ivrogne  et  mal  famé, 
qu'il  a  pu  mourir  d'une  autre  maladie  comme  de  sa 
blessure.  Aussi  la  rémission  fut  facilement  obtenue  en 
mai  1402  (2). 

Guillaume  de  La  Bruyère,  écuyer,  demeurant  à 
Coussay,  se  rend  à  Champlemy,  où  il  rencontre  un 
certain  Jean  Guillot,  qui  l'avait  autrefois  battu  et 
((  fait  plusieurs  villenies  ».  A  la  première  altercation, 
ces  gens  le  mettent  en  chasse,  en  le  poursuivant  à 
coups  de  grosses  pierres,  et  s'arrêtent  seulement  devant 
un  sergent  du  duc  de  Bourgogne  survenu  avec  le  frère 
dudit  Guillaume.  Mais  celui-ci  revint  â  la  charge  et, 
rattrapant  le  nommé  Deflfère,  il  le  frappa  sur  la  jambe 
d'un  coup  de  bâton  si  violent  qu'il  en  mourut.  A  la 
suite  de  ce  fait,  Guillaume  disparut,  craignant  d'en- 
courir le  bannissement.  Ses  parents  et  amis  s'adres- 
sent à  la  miséricorde  du  Roi,  disant  qu'il  a  toujours 


(1)  JJ.  157,  11»  24,  avril  i403. 

(2)  J.Î.  157,  n"  48.  —  Ci-dessus  p.  110,  môme  nom  à  Fougues. 


^  127  - 

été  de  bonne  vie  et  honnête  conversation,  qu'il  en 
voulait  à  Jean  Guillot  et  non  à  Deffère,  et  que  c'est  par 
pure  méprise  qu'il  Ta  frappé. 

Sur  cet  argument  d'assez  peu  de  valeur,  le  Roi 
accorde  la  rémission  (1). 

Jeannot  Acot,  serf  de  la  dame  d'Aunay,  veuve  de 
Bureau  de  La  Rivière ,  premier  chambellan  de 
Charles  V,  passait  à  Varzy  pour  affaires  et  rencontra 
Jean  Belleperche,  avec  lequel  il  se  prit  de  querelle 
suivie  d'injures  et  de  coups.  Il  fut  même  traduit,  à  ce 
snjot,  devant  le  prévôt  de  l'évêque  d'Auxerre,  à  Varzy, 
où  Ton  voulait  le  condamner  au  bannissement.  Comme 
serf,  il  ne  peut  en  appeler  ;  il  n'a-  que  vingt  ans,  il 
vient  en  aide  à  ses  parents  par  son  travail  ;  il  n'y  a  eu 
mort,  mutilation,  sang  ni  plaie.  On  lui  accorde  l'auto- 
risation de  revenir  sans  être  inquiété  par  la  justice  (2). 

Encore  une  querelle  d'auberge  à  Maison-Dieu,  où 
Alexandre  Morillon,  laboureur,  et  Monin  Humbert  se 
rencontrent  en  revenant  de  Saulieu.  Ils  s'injurient 
pour  une  femme,  sur  le  compte  de  laquelle  Monin 
tenait  de  mauvais  propos,  ce  qui  donne  lieu  à  des 
actions  en  justice  devant  le  bailli  de  Donzy,àClamecy, 
et  simultanément  à  Saint-Pierre-le-Moûtier.  Ils  se 
retrouvent  à  la  foire  de  la  Madeleine,  à  Saint-Père- 
sous-Vézelai,  où  ils  avaient  des  arbalètes  et  des  petites 
épées,  dites  bazelaires.  Monin  reçut  un  coup  d'estoc, 
il  fut  pansé  et  guéri  par  un  barbier  d'Auxerre,  puis, 
dix  jours  après,  faute  de  soins,  il  mourut  des  suites 
de  cette  blessure. 

L'exposant  qui  avait  quitté  le  pays  obtint  réparation 
complète  pour  une  affaire  aussi  obscure,  où  il  ne  pou- 
vait être  condamné  (3). 

(1)  JJ.  157,  m  127,  mai  1402. 

(2)  JJ.  157,  n*  206,  novembre  1402. 

(3)  JJ.  157,  n-  209,  juillet  1102.  • 


-  128  - 

A  rAnnoncîation  de  Notre-Dame,  1402,  un  jeune 
homme,  Regnaut  Le  Marrillier,  avait  prêté  de  l'argent  à 
Pierre  Citot,  curé  de  Saint-Martin-du-Puy.  Ayant  joué 
aux  dés  et  à  la  paulme,  à  Lormes,  en  nombreuse  compa- 
gnie, Citot  f(  qui  est  homme  joueur,  tavernier  et  de  vie 
dissolue  »,  nia  la  dette,  refusa  de  rendre  Targent  et 
proféra  de  telles  injures  que  Regnaut,  hors  de  lui,  le 
frappa  d'un  coup  de  couteau  sur  la  tôte.  Après  être  allé 
de  maisons  en  tavernes  dans  la  ville  de  Lormes,  expo- 
sant sa  plaie  à  l'air  et  buvant  sans  ménagement,  il 
mourut  au  bout  de  trois  semaines. 

Les  lettres  excusent  le  meurtrier  sans  hésiter  pour 
la  situation  du  défunt  et  l'acquittent  à  la  seule  condition 
qu'il  fera  le  pèlerinage  du  Mont  Saint-Michel  (1). 

Perrenot  Barat,  de  Villiers,  près  Lormes,  revenant 
avec  Guillaume  Pechin,  se  prit  de  querelle  avec  lui  et 
lui  fit  une  large  blessure  à  la  tête.  Il  est  poursuivi  par 
le  bailli  du  .^eigneur  de  Chalon,  séant  à  Lormes.  Il 
obtient  acquittement  par  lettres  d'avril  1403  (2). 

En  juin  1403,  rémission  en  faveur  de  Guyot  Léri- 
tier,  laboureur  à  Riousse,  paroisse  de  Livry.  S'étant 
disputé  avec  Guillaume  Perrot,  maçon,  homme  de 
mauvaise  vie  qui  entretenait  des  relations  avec  sa 
femme,  il  lui  donna  un  coup  de  barre  de  fléau,  lequel, 
par  ricochet,  vint  frapper  l'un  des  assistants,  nommé 
Bureteau.  La  plaie,  toute  petite,  s'envenima  et,  faute 
de  soins,  l'homme  mourut  quelques  jours  après  (3). 

Jean  Jobelin,  homme  de  petite  conscience,  faisait 
manger  à  ses  bœufs  les  prés  de  ses  voisins  et  causait 
des  dommages  de  tout  genre  à  leurs  cultures.  Une  nuit 
on  le  surprit;  il  voulut  résister  et  menaça  d'un  piochet 
qu'il  tenait  à  la  main,  puis,  dans  la  bagarre,  Perrin 

(1)  JJ.  157,  n-  440. 

(2)  JJ.  157,  n»  444. 
{S)  JJ.  158,  n*  9. 


Perrin  était  gendre  du  propriétaire  volé;  on  le 
cozisidéra  comme  défeodant  son  bien,  et  à  ce  titre  il 
obtint  rémission  du  meurtre  qui  débarrassait  la 
contrée  d'un  malfaiteur.  Denis  Loquet,  qui  avait  par- 
ticipé au  meurtre,  fut  également  absous  (1). 

L'afiaire  du  gentilhomme  qui  a  tué  son  fermier, 
exposée  dans  les  lettres  d'octobre  1403,  mérite  d'être 
racontée  avec  quelques  détails. 

Bleuet  de  Montagu,  un  joli  nom,  âgé  de  vingt-deux 
ans,  quittait  le  Bourbonnais  pour  se  rendre  dans  le 
comté  de  Nivernais,  où  il  avait  à  payer  un  douaire  de 
dix  livres  tournois  par  an  à  Jeannette  de  La  Forest, 
femme  de  son  feu  père  Jehan  de  Montagu,  et  à  présent 
femme  de  Jean  de  Cossaye,  écuyer.  Il  passa  par  les 
villages  de  Saint^Martin  et  La  Varenne,  paroisse  de 
Trezelles,  chez  Henry  Bonneaul,  sou  fermier,  pour 
être  payé  de  20  sols  tournois  de  taille  annuelle,  15  petits 
blancs  et  4  bichets  de  blé,  dus  de  l'année  précédente. 
Il  trouva  André,  fils  du  fermier,  et  les  femmes,  qui  lui 
dirent  que  Bonneaul  était  &  Bourbon.  Bleuet  lui 
demanda  s'il  aurait  de  l'argent  et  du  blé,  à  quoi  André 
répondit  qu'il  y  en  avait,  mais  qu'il  n'était  pas  prêt, 
ayant  l'air  de  se  moquer  de  lui. 

Pourtant,  l'année  passée.  Bleuet  avait  déjà  envoyé 
huit  ou  dix  fois  son  valet  pour  lui  réclamer,  et  dans 
cett«  course  de  dix  lieues  il  avait  plus  dépensé  en 
frais  qu'il  n'avait  touché  d'argent;  il  lui  ajouta  qu'il 
voulait  être  payé  le  mardi  suivant  au  plus  tard  ou 
qu'il  86  fâcherait.  André  répondit  qu'il  ne  lui  faisait 
pas  peur,  ce  que,  voyant.  Bleuet  lui  répéta  la  môme 

W  li.  158,  n*  57,  août  1408, 
T.  IX,  S*  aéne,  ^ 


—  430  — 

injoDctioDi  de  s'exécuter,  et  André,  hautement  et 
h&tiyement,  déclara  «  qu'il  n'estoit  pas  villain,  que  ce 
que  il  avoit  et  tenoit  il  Tavoit  plus  franchement  que 
ce  que  tenoit  ledit  Bleuet,  et  plus  ou  aussy  franche- 
ment que  le  Roy  ne  tenoit  son  royaume  ».  Indigné  de 
ces  paroles,  Bleuet  le  traita  de  menteur,  le  menaçant 
de  le  frapper,  et  l'autre  lui  dit  qu'il  pouvait  bien 
frapper,  qu'il  ne  demandait  pas  autre  chose. 

Les  femmes  intervinrent,  cherchant  à  le  calmer  et  à 
l'emmener  à  la  maison,  craignant  qu'à  la  fin  les  deux 
hommes  n'en  vinssent  à  se  battre. 

André  répéta  qu'il  n'oserait  pas,  mêlant  les  injures 
et  les  moqueries  à  tel  point  que  Bleuet,  ne  se  possé- 
dant plus,  mit  la  main  à  son  épée  et  allait  se  lancer 
sur  André  quand  son  compagnon  de  voyage,  Henry 
de  Couses,  écuyer,  se  mit  entre  les  deux  leur  défen- 
dant de  se  battre,  mais  Bleuet  s'échappa,  piqua  des 
éperons  son  cheval  et  fondit  sur  André  Tépée  nue, 
lui  assénant  deux  coups  de  plat  d'épée  sur  la  tête, 
André  se  sauva  vers  la  maison  prit  un  gros  b&ton  et, 
revenant  avec  menaces,  allait  assommer  Bleuet  quand 
celui-ci  l'abattit  d'un  seul  coup  d'estoc. 

Bleuet  le  laissa  sur  place  et  traversa  la  Loire  pour 
continuer  son  chemin  en  Nivernais.  Il  apprit  plus  tard 
qu'André  était  mort  le  jour  même  et  craignant  la 
justice,  il  s'est  absenté  du  pays,  ne  voulant  pas  y 
revenir  avant  d'avoir  reçu  sa  grâce.  «  Bleuet  est 
noble  home,  disent  les  lettres,  ses  prédécesseurs  nous 
ont  servy  en  nos  guerres  et  espère  ledit  Bleuet  de 
nous  y  servir  quand  mestier  sera  ;  le  fait  est  advenu 
par  la  grande  importunité  dudit  feu  André  et  par  ses 
mauvaises  paroles  et  injurieuses.  Bleuet  a  toujours 
été  de  bonne  vie,  renommée  et  honneste  conversa- 
cion  ». 

En  somme,  il  est  remis  de  toute  peine,  et  eonfisca-* 


-131  - 

tioD  de  biai9  et  restitaé  en  bonne  rMiommée.  Il  fera 
simplement  «par  manière  de  pénitence,  un  pèleri- 
nage à  pié  à  l'église  de  Notre-Dame-du-Puy ,  en 
Auvergne,  et  avecquee  ce  fer»  chanter  cent  messeï 
pour  le  aakt  de  l'âme  du  trépassé  en  l'église  parro- 
cliial  où  i)  demeuroit  ». 

n  faut  avouer  que  dans  certains  cas  difficiles  comme 
celui-là  pour  les  ofBciers  ordinaires  de  justice ,  le 
jugement  du  Roi  pouvait  avoir  du  bon,  l'issue  de  ta 
bataille  devant  être  fatale  aussi  bien  pour  l'un  que 
pour  l'autre  (1). 

En  décembre  1403,  furent  rendues  deux  lettres  de 
rémission  concernant  quatre  officiers  de  la  suite  du 
comte  Dauphin  d'Auvergne  :  c'était  alors  Béraud  III, 
dont  la  fille,  héritière  du  comté,  épousa,  en  1438, 
Louis  I*'  de  Bourbon,  comte  de  Montpensier. 

Ces  jeunes  gens  avaient  été  envoyés  préparer  une 
chasse  dans  la  forôt  de  Charnes  et  s'arrêtèrent  dans  la 
taverne  du  village  du  Plessis,  où  on  leur  montra  une 
femme  galante  qu'ils  voulaient  emmener  avec  eux.  La 
femme  s'en  allait  avec  deux  hommes  qu'ils  ne  connais- 
saient pas.  Ils  se  prirent  de  dispute  avec  eux,  et 
pendant  que  Perdrieur  disparaissait  dans  tes  bois  avec 
la  femme,  ses  deux  compagnons,  Putolot  et  Prévost, 
étaient  assaillis  à  coups  de  pierres;  Perdrieur  fut 
aussi  atteint  &  la  tête  et  dans  la  bouche,  mais  s'étant 
défendus  avec  leurs  épées,  ils  firent  à  Gillet  une  pro- 
fonde blessure  à  la  tôte  dont  il  mourut  peu  de  jours 
après. 

Gillet  était  le  mari  et  Taing  le  frère  de  la  femme  ; 
mais  comme  la  vie  de  celle-ci  était  parfaitement  notoire 
et  qu'ils  ne  connaissaient  pas  les  individus,  l'affaire 

(1)  ».  15B,  n*  83, 


-  132  - 

n'avait  pas  la  même  gravité  et  «  la  contemplacion 
dudit  comte  Dauphin  ^  arrangea  tout  (1). 

Jehannot  Le  Mariât,  cordonnier,  serf  du  duc  de 
Bourbon,  demeurant  à  Lormes,  était  en  procès  avec 
Criselat  devant  le  ch&telain  de  Lormes.  Ils  se  trou- 
vaient dans  une  taverne  avec  un  certain  Savote,  dit 
le  Galant,  sorte  d'homme  d'affaires  qui  les  mit  d'accord 
entre  eux,  à  la  condition  de  payer  quatre  gros  et 
quatre  pintes  de  vin  qu'ils  burent  ensemble.  Bientôt 
ils  se  prirent  de  paroles  grosses  et  injurieuses,  oubliant 
leur  premier  entretien,  et  en  vinrent  aux  coups.  Mariât, 
blessé  à  la  tête,  protégé  sous  une  claie  à  faire  des 
gâteaux,  tira  un  petit  couteau  dont  il  frappa  Savote 
sur  l'épaule,  lui  faisant  une  blessure  mortelle. 

Mariât,  enfermé  dans  les  prisons  de  Châteauchi- 
non,  risque  d'y  finir  ses  jours  ;  la  supplique  adressée 
au  Roi  considérant  que  la  victime  était  un  homme  de 
très  mauvaise  et  déshonnète  conversation,  cherchant 
noise  à  tout  le  monde,  le  meurtrier  est  absous  de  toute 
peine  et  amende  (2). 

Guillaume  Bourgeois^  bâtard,  âgé  de  soixante  ans, 
avait  une  seconde  femme  a  de  très  mauvaise  vie  et 
déshonnète  gouvernement  et  abandonnée  de  son 
corps  »,  laquelle  prit  fantaisie  d'aller  tenir  une  taverne 
près  de  Saint-Saulge,  où  elle  vendait  vin  à  ceux  qui 
lui  plaisaient.  Guillaume  y  alla  ;  elle  lui  refusa  avec 
arrogance  le  vin  qu'il  lui  demandait,  et,  après  toutes 
sortes  d'insultes,  il  devint  tellement  en  fureur  qu'il 
tira  un  petit  couteau  et  en  «  ferit  sa  dite  femme  un 
seul  cop  par  la  hanche  jusques  à  effusion  de  sanc, 
duquel  cop  elle  ne  f u  mie  estanchiée  à  point  ne  gou- 
vernée, et  pour  ce  eUe  alla  assez  tost  après  de  vie  à 
trespassement  ». 

(1)  JJ.  158,  n-  219. 

(2)  JJ.  158,  n*  251,  janvier  1404, 


-133  — 

Il  s'absenta  du  pays  et  adressa  unô  supplique  au 
Roi  qui,  par  pitié  et  miséricorde,  l'acquitta  de  ce 
meurtre  où  ni  lui  ni  la  société  n'avaient  à  souffrir  (1). 

Plusieurs  jeunes  gens  de  Crux-la- Ville  étaient  allés 
un  dimanche  jouer  aux  billes  dans  un  champ  voisin, 
l'un  d'eux  en  jouant  lança  sa  bille  près  de  l'oreille,  à  la 
tête  de  son  camarade,  qui  en  mourut. 

Le  meurtrier  prouva  facilement  «  que  ledit  fait 
D'avint  pas  par  hayoe  ne  de  fait  precogité,  mais 
d'aventure  »,  et  sa  supplique  fut  admise  sans  aucune 
peine  (2). 

Jean  Craupin,  pauvre  vieillard  ainsi  que  sa  femme, 
avaient  donné  un  «  asseurement  devant  le  prévôt  de 
Ciez  y>  à  Guiot  Jobert,  qui  était  un  mauvais  plaideur. 
Depuis  on  les  avait  vus  boire  et  manger  ensemble, 
plusieurs  pouvaient  en  témoigner,  même  parmi  ceux 
qui  ont  disparu  dans  la  dernière  mortalité.  Puis 
Jobert,  s'étant  disputé  avec  un  autre,  vint  déclarer 
devant  le  juge  qu'en  faisant  une  batture,  il  avait 
enfreint  l'assurement  (3)  pour  quoi  il  fut  mis  en  prison 
parles  officiers  au  siège  d'Auxerre.  Comme  Craupin 
n'avait  aucun  vilain  blasme  ou  reproche,  il  obtint  gain 
de  cause  (4). 

Un  jeune  homme  de  dix-sept  ans,  Jean  Broussier, 
compagnon  maréchal  â  Lurcy-le-Bourg ,  avait  été 
mis  dans  les  prisons  de  l'évêquedeNevers,  àPrémery, 
pour  avoir  violé  une  certaine  fille,  Agnès,  gardeuse 
de  bêtes,  qu'il  avait  suprise  dans  un  champ.  En  raison 
de  sa  jeunesse,  et  comme  il  est  prêt  à  épouser  ladite 


(1)  JJ.  168,  ■)•  362,  mai  1404. 
(3)  JJ.  158,  »•  366,  mii  1404. 

(3)  Serment  qui  engageait  la  parole. 

(4)  JJ.  158,  n<  303,  juin  1404. 


—  134  - 

âUe,  sur  la  demande  de  ses  amis  le  Roi  lui  accorde 
dee  lettres  de  rémission  (1). 

Les  lettres  de  janvier  1405  acquittent  une  affaire  de 
vol  pourtant  assez  grave.  Jean  Morin,  serviteur  d'un 
chambellan,  Guillaume  Martel,  avait  pénétré  chez  le 
sire  de  Garencières,  autre  chambellan,  demeurant  i 
l'hôtel  Saint-Paul,  à  Paris.  Il  avait  dérobé,  après 
effraction,  dans  un  coffre  de  bahut,  six  vingts  écus  en 
or,  des  anneaux  d'or  et  d'argent ,  une  croix  d'or  où 
était  de  la  vraie  croix,  un  reliquaire  rond  d'argent 
garni  de  ses  reliques ,  quatre  vervelles  ou  anneaux 
d'argent  aux  armes  de  Garencières  pour  marquer  les 
faucons.  Ce  vol  consommé,  Jean  Morin  avait  quitté 
son  maître  et  s'était  installé  à  Pouilly  où,  après  s'être 
marié,  il  tenait  paisiblement  un  hôtel  depuis  neuf 
ans,  lorsque,  par  hasard,  le  sire  de  Garencières,  pas- 
sant à  Pouilly,  le  reconnut,  le  convainquit  du  vol  et 
le  fit  enfermer  dans  les  prisons  de  Cosne,  sans  recourir 
d'ailleurs  à  la  juridiction  spéciale  des  chambellans  à 
laquelle  il  avait  droit.  Morin  offrait  de  le  satisfaire 
complètement,  le  chambellan  ne  lui  avait  sans  doute 
pas  autrement  gardé  rancune,  et  les  lettres  le  resti- 
tuèrent à  sa  bonne  renommée  (2). 

Le  jeune  Guiot,  après  être  allé  à  la  messe  à  Chan- 
tenay  s'était  mis  à  boire  et  à  jouer  à  la  paulme  avec 
des  camarades.  Ils  étaient  de  noble  lignée.  Mison, 
l'un  d'eux,  traita  Guiot  de  truand  et  homme  de  rien. 
Après  le  jeu,  ayant  pris  leur  chemin,  les  mêmes  injures 
recommencèrent  à  tel  point  que  Guiot  sortit  sa  dague 
et  en  donna  à  Mison  un  grand  coup  sur  la  tête  lui  fai- 
sant une  profonde  blessure.  Transporté  chez  lui,  à 
Saint-Pierre,  il  mourut,  faute  de  soins,  huit  jours  après. 


(1)  JJ.  158,  n*  396,  mai  1404. 

(2)  JJ.  159,  n- 170. 


—  135  — 

Le  meurtrier  expose  qu'il  s'est  absenté  du  pays  pour 
éviter  les  sentences  des  seigneurs  justiciers  dont  il  est 
sujet  et  qu'il  risque  de  ne  pouvoir  jamais  revenir  s'il 
n'obtient  des  lettres  de  rémission.  On  considère  que 
a  le  fait  est  advenu  en  grande  partie  par  les  paroles 
et  atisemens  »  et  qu'il  était  de  bonnes  vie  et  renommée. 
«  Il  fera  deux  pèlerinages,  l'un  au  mont  Saint-Michel, 
et  l'autre  à  Notre-Dame  de  Chartres,  demorera  un 
mois  en  prison  fermée  et  rapportera  certif Qcation  de 
chacun  desdis  lieux  (1)  ». 

Guillaume  Le  Barbier,  pauvre  laboureur,  âgé  de 
soixante-dix  ans,  habitant  Verneuil,  avait  donné  im 
«  asseurement  »  devant  le  prévôt  de  Cercy  à  un  nommé 
Manyot,  homme  «  noiseux  et  rioteux  »,  cherchant 
querelle  à  tout  propos.  Or,  celui-ci  fut  pris  une  nuit 
dans  sa  maison  par  plusieurs  individus  et  si  fort  battu 
qu'il  en  mourut.  Avant  sa  mort,  il  avait  eu  le  temps 
de  dire  que  Le  Barbier  faisait  partie  de  cette  bande, 
et  pour  cela  il  fut  détenu  dans  les  prisons  de  Nevers 
par  les  officiers  de  notre  cousin  le  duc  de  Bourgogne, 
alors  comte  de  Nevers.  «  Gehiné,  mis  à  la  question  et 
interrogé  »,  il  finit  par  avouer  qu'il  avait  dit  de  battre 
Manyot,  mais  sans  le  tuer,  et  que  ces  gens  lui  avaient 
pris  par  force  les  pièces  d'argent  qu'il  possédait. 

Pour  cette  méprise,  il  allait  finir  ses  jours  en  prison. 
Mais  comme  il  était  de  bonne  vie  et  le  défunt  de  très 
perverse  condition.  Le  Barbier  fut  absous,  sauf  «  qu'il 
tendra  prison  fermée  trois  mois  entiers  au  pain  et  à 
l'eaue,  et  sera  tenu  faire  un  pèlerinage  &  Notre-Dame 
du  Puy,  en  Auvergne,  pour  l'âme  du  trépassé  et  de 
faire  chanter  treize  messes  et  de  dire  treize  fois  le 
saultier  (3)  ». 


(1)  JJ.  159,  n»  216,  février  1405. 

(2)  JJ.  159,  n*  2aD,  avril  1485. 


—  136  - 


CHRONIQUE  ET  MÉLANGES 


Pour  raniiée  1900. 


Aucun  fait  saillant  n'est  à  signaler  dans  le  résumé  de 
nos  travaux  de  l'année  1900.  Les  séances  ont  été  régu- 
lièrement suivies  et  occupées  par  des  lectures  formant 
des  articles  insérés  au  Bulletin,  Les  remarques  pré- 
sentées aux  séances  et  n'offrant  pas  la  matière  d'un 
article  ont  été  simplement  indiquées  ici  ;  les  dons  de 
manuscrits  et  de  livres  sont  aussi  mentionnés  de 
manière  à  fixer  ces  souvenirs  tout  en  supprimant 
l'impression  des  procès- verbaux. 

Les  sujets  traités  dans  les  articles  sont,  comme 
toujours,  variés  et  recueillis  par  vous  au  hasard  des 
recherches  et  des  découvertes,  mais  ils  n'en  sont  pas 
moins  utiles  pour  les  historiens  locaux. 

Nous  en  sommes  au  dix-neuvième  volume  de  notre 
Bulletin,  Il  y  a  déjà  une  masse  considérable  de  maté- 
riaux et  d'études  historiques  disséminées  dans  cette 
collection  qui  remonte  à  l'origine  de  notre  société. 
Nous  ne  la  connaissons  pas  assez,  nous  la  consultons 
rarement,  nous  nous  y  reportons  très  peu.  et  nous 
ignorons  souvent  les  ressources  qu'elle  peut  offrir. 
Quelques  ouvrages  plus  étendus  et  plus  spéciaux,  dus 
aux  études  de  nos  prédécesseurs  Mgr  Crosnier  et  M.  de 
Soultrait,  semblent  renfermer  tous  les  éléments  de 
notre  histoire.  Le  Bulletin  qui  s'augmente  chaque 
année  devra  fournir  d'importants  compléments  aux 
recherches  de  ces  auteurs. 


-137  - 

En  1891,  j'ai  fait  une  table  sommaire  des  dix  pre* 
miers  volumes  que  chacun  de  nous  doit  toujours 
consulter  avant  de  toucher  à  un  point  d'histoire  quel- 
conque; il  nous  en  faudra  bientôt  une  autre  pour  la 
suite  de  nos  volumes. 

Le  musée  lapidaire  et  les  archives  ont  obtenu  quel- 
ques pièces  et  peu  à  peu  nos  collections  prennent  de 
Timportance.  Vous  voyez  par  vous-mômes  que,  loin  de 
péricliter,  notre  compagnie  gagne  d'année  en  année. 

Voici  maintenant  le  résumé  des  études  non  insérées 
au  Bulletin  : 

«-  M.  de  Saint- Venant  présente  à  la  compagnie  divers  objets 
de  caractère  mérovingien,  entre  autres  un  sabre  de  guerre  et 
une^  agrafe,  ainsi  que  plusieurs  objets  préhistoriques,  époque 
intermédiaire  de  la  pierre  taillée  et  de  la  pierre  polie,  trouvés 
par  M.  Hîppolyte  Marlot,  d'Arleuf,  dans  les  communes  de 
Lormes,  Cervonet  Dirol. —  Il  annonce  la  découverte  d'un  tronçon 
de  voie  militaire  romaine  allant  de  Thaiz  à  Saint-Honoré, 
signalée  mais  non  encore  explorée.  Cette  voie  traverse  les  bois 
et  à  l'aide  des  essences  d'arbres  qui  poussent  dans  la  ligne  on 
pourra  la  reconnaître.  —  Il  montre  encore  un  bois  gravé 
représentant  un  hussard,  tête  de  lettre  d'avis  à  l'usage  des 
recruteurs  des  armées  dans  l'ancien  régime  pour  obtenir  des 
engagements.  —  A  la  séance  de  janvier  1900  il  explique  que 
le  bronze  du  musée  de  Nevers  reproduit  dans  ï Album  du 
Nivernais  serait  une  variante  de  VHercule  de  Feurs,  réduction 
de  la  statue  de  Lysippe^  connue  seulement  par  les  textes. 

—  M  Gaston  Gauthier  expose  l'état  de  la  continuation  des 
fouilles  de  Champvert  qui  n'ont  encore  pour  l'instant  rien 
donné  de  nouveau.  Il  présente  une  sorte  de  trompe  en  terre 
cuite  grisâtre  trouvée  dans  le  lit  de  la  Loire  à  Gharrin,  par 
M.  Gonin,  et  servant  à  appeler  les  passeurs  d'eau  ou  les 
conducteurs  de  troupeaux. 

—  Achèvement  de  la  restauration  du  chevet  de  Saint-Etienne 
de  Nevers;  M.  de  Toytot  expriine  l'espoir  que  la  ville,  après 


lai  havtux  si  bien  exécutés  par  TEtaty  s'occupera  de  dégager 
complètement  la  place  sur  la  rue  de  la  Barre. 

—  Médaillons  de  Tartisle  italiea  Nini  conservés  au  musée  de 
Ne  vers  ;  M.  de  Saint -Venait  donne  des  détails  sur  le  séjour  et 
les  travaux  de  Nini  à  La  Charité-sur-Loire. 

—  Objets  romains  remarqués  dans  des  bois  de  Sauvigny 
appartenant  à  M.  Ricfaani^  note  présentée  par  M.  Paul  Meu- 
nier. 

-^  Inventaire  des  bagues  et  joyaux  de  Marguerite  de  Bourbon, 
comlesoe  de  Nevers^  en  1560,  dressé  par  quatre  experts  orfè- 
vres lapidaires  de  Paris,  exposé  par  M.  de  Lespinasse  d'après 
le  manuscrit  tr.  4682  de  la  BiblioMqne  nationale.  Ces  joyaux 
merveilleux  étaient  déposés  à  Thôtel  de  Nevers,  à  Pans. 

—  Lettres  du  célèbre  médecin  nivernais  Roche,  lues  par  le 
docteur  Subert,  et  notes  biographiques  sur  ce  personnage,  né 
le  27  juillet  1790. 

—  Lettre  de  M.  Hyde  de  Neuville  relative  à  divers  faits  de  la 
petite  Vendée  du  Sancerrois,  original  appartenant  à  M.  Sarriau. 

—  Tapisseries  de  Marie  d'Albret  au  musée  de  Nevers,  à  l'occa- 
sion d'un  mémoire  de  M.  le  comte  Charles  de  Beaumont  au 
congrès  des  sociétés  des  Beaux-Arts  du  25  mai  1899,  M.  de 
Saint* Venant  croit  qu'elles  sont  une  oeuvre  bien  française  et 
non  produite  par  des  artistes  flamands. 

—  Les  importantes  copies  de  dom  CaflSaux  relatives  à  des 
familles  nivemaises  sont  indiquées  par  notre  confrère  M.  Léon 
Mirot  et  Ton  rappelle  à  ce  su,  et  qu'il  en  existe  une  copie  aux 
archives  de  la  Nièvre. 

—  Inventaire  de  la  garbe-robe  de  Charles  de  Bourgogne, 
comte  de  Nevers,  habillements,  objet  de  toilette  et  de  chasse, 
armes,  jeux,  instruments  de  musique,  garniture  de  chapelle, 
en  Tannée  1464,  d'après  le  manuscrit  fr.  4679  de  la  Biblio- 
thèque nationale,  M.  de  Lespinasse  ajoute  à  cette  curieuse 
description  diverses  notes  sur  la  vie  guerrière  et  mondaine  de 
ce  seigneur.  La  publication  de  cet  inventaire  ainsi  que  des 
joyaux  de  Marguerite  de  Bourbon  est  réservée  à  la  bibliothèque 
de  l'Ecole  des  Chartes. 

-^  Le  prieuré  de  Gommagny  et  sa  curieuse  église  sont  l'objet 
d'une  petite  description  par  M.  Victor  Moreau. 


-130  - 

— >  M.  Tabbé  Bogros,  curé  de  Many,  notre  confrère,  t  eu  les 
honneurs  de  YEglantine  aux  jeux  floraux  de  Toulouse  pour  ie 
discours  en  prose  intitulé  :  La  part  de  Vâme  et  celle  du  corps 
dam  Véducatian. 

-^  Le  Comité  des  Sociétés  savantes  a  bien  touIu  accorder  une 
deuxième  subvention  de  300  fr.  aux  fouilles  gallo-romaines 
de  Champvert  entreprises  sous  les  auspices  de  notre  Société 
par  notre  zélé  confrère  M.  Gauthier. 

—  A  l'issue  de  la  séance  du  31  «mai,  la  compagnie  a  visité, 
sous  la  conduite  de  M.  le  chanoine  Sery,  les  substructions  et 
vestiges  de  l'ancien  couvent  des  Récollets,  à  Nevers. 

—  Spécimens  de  la  flore  de  la  période  houillère  des  mines  de 
La  Machine;  beaux  dessins  et  préface  d'une  importante  étude 
sur  le  dépôt  houiller  nivernais,  préparée  sous  les  auspices  de 
M.  Bosquet,  directeur  des  mines,  par  notre  confrère  M.  Pous- 
sereau. 

-^  M.  Pic,  conservateur  du  musée  de  Prague,  en  Bohème, 
étant  de  passage  à  Nevers,  offre  à  la  Société  nivernaise  d'entre- 
tenir des  relations  scientifiques  avec  la  Société  savante  de 
Prague. 

—  Collège  de  La  Charité^ur-Loire.  L'immeuble,  autrefois 
hôtel  Lespinasse,  appartenant  aujourd'hui  à  notre  confrère 
M.  Debourges,  avocat  à  Nevers,  est  exproprié  pour  cause  de 
reculement.  Avant  la  démolition  il  a  été  tiré  une  photographie 
de  l'ancienne  construction  ;  il  est  également  montré  un  bouton 
d'uniforme  orné  de  deux  palmes  avec  légende  de  cet  établisse- 
ment d'instruction,  qui  a  eu  son  moment  de  célébrité  en  Niver- 
nais jusqu'en  1850. 

—  Communications  de  M.  Henri  Sarriau  : 

—  «  Pùugue$  en  il69.  Extrait  de:  Raulin  (D^).  —  Obser- 
vations sur  l'usagé  des  eaux  minérales  de  Pougues...  avec 
l'analyse  chimique  des  eaux  par  M.  Castel,  ancien  apothicaire, 
aide-major  des  camps  et  armées  du  Roi...  —  Paris,  Edme, 
1709,  in.l2  ; 

»  La  route  de  Paris  à  Pougues,  qui  est  une  des  grandes  routes 
de  Lyon,  est  très  belle  et  très  agréable  ;  on  y  a  toutes  les 


-  140- 

commodités  possibles  :  bon  vin  et  alimens  salubres  en  tout 
genre. 

9  Le  bourg  de  Fougues  a  beaucoup  d'agrémens;  Tairy  est  fort 
sain  ;  il  y  a  des  promenades  champêtres,  et  surtout  beaucoup 
de  couvert.  Le  pain  et  le  vin  y  sont  excellens.  On  y  boit  com- 
munément du  vin  blanc  de  Pouilly,  qui  a  de  la  réputation,  et 
dont  l'usage  est  recommandé,  avec  une  croûte  de  pain,  immé- 
diatement après  qu'on  a  pris  les  eaux.  Ce  déjeuner,  qui  ne 
charge  point,  n'empêche  pas  de  dîner  de  bon  appétit. 

»  Les  habitans  de  Nevers  qui  ont  des  biens  ou  des  vignes  dans 
le  territoire  de  Fougues,  y  entretiennent  des  maisons  com- 
modes, très  logeables  et  proprement  meublées.  On  les  loue  en 
tout  ou  en  partie,  et  à  tel  terme  que  l'on  veut.  Il  y  a  un  bureau 
de  poste,  et  le  grand  courrier  passe  plusieurs  fois  la  semaine 
par  le  bourg.  Plusieurs  carrosses  et  voitures  publiques  passent 
aussi  par  cette  route.  A  l'entrée  du  bourg,  est  une  source  d'eau 
douce  très  bonne  ;  et  la  Loire,  dont  l'eau  est  une  des  meilleures 
du  Royaume,  n'est  éloignée  que  d'environ  une  lieue. 

1»  La  ville  de  Nevers,  qui  n'est  qu'à  deux  lieues  de  Fougues, 
fait  seule  une  vraie  promenade,  qui  présente  des  points  de  vue 
variés  et  de  belles  perspectives  de  la  plus  grande  étendue. 

y>  Enfin  la  position  des  Eaux,  dans  un  aspect  riant  et  dans  un 
pays  bien  ouvert,  ne  sauroit  être  plus  agréable  :  avantage 
presque  unique  ou  dont  jouissent  très  peu  d'eaux  minérales  en 
France  et  ailleurs.  Son  A.  S.  Mgr  le  Frince  de  Conti  a  fait 
planter  plusieurs  allées  d'arbres  qui  aboutissent  au  grand 
chemin  et  qui  conduisent  aux  Eaux.  Du  lieu  où  elles  sont,  on 
traverse  une  prairie  charmante  dans  laquelle  on  a  pratiqué  de 
petits  chemins  sablés  à  l'anglaise,  pour  s'y  promener  à  pied 
sec.  Au  milieu  de  cette  prairie,  est  une  allée  de  tilleuls  qui 
mène  à  un  plateau  d'où  l'on  découvre  le  village  à  gauche,  et  à 
droite  près  de  deux  lieues  de  la  grande  route.  Au  retour  de 
cette  même  allée  des  Eaux,  on  a  l'aspect  d'un  grand  vignoble, 
de  plusieurs  bouquets  de  bois  et  de  collines  qui  décrivent  une 
espèce  de  fer  achevai,  dont  les  deux  extrémités  ont  deux  lieues 
d'éloigneraent.  Le  bas  pays,  fertile  en  grains,  forme  un  terrein 
qui  varie  encore  la  scène,  étant  coupé  de  monticules  dont  tous 
les  fonds  sont  des  prairies,  » 


-144  - 

<  Numismatique  nivémaise.  —  La  vente  du  7  avril  1900,  à 
rhôtel  Drouot,  renfermait  les  pièces  suivantes  dont  je  m'em- 
presse de  signaler  Texistence  aux  collectionneurs  nivemais  : 

MEREAUX  DE  LA  COLLÉGIALE  DE  SAINT-PIERRE- 

LE-MOUTIER 

Clef  et  crosse  disposées  en  sautoir,  cantonné  d'étoiles  aux 
2,  3  et  4  ;  autour,  filet  et  grènetis.  (Type  du  n»  9  de  Tétat 
actuel  de  la  Numism,  niv,) 

R.  Le  chiffre  VI  dans  le  champ,  accosté  de  4  roses. 

On  ne  connaissait  jusqu'à  présent  que  les  chiffres  II  et  Xll. 
(N<»  80  du  catalogue  de  la  vente)  acquis  par  le  musée  de 
Nevers. 

Clef  et  crosse  en  sautoir  cantonné  aux  1-4  de  fleurs  de  lis, 
aux  2-3  de  la  date  15-84.  Autour,  filet  et  grènetis.  (Type  du 
no  11  de  l'état  actuel  de  la  Numism,  niv.) 

R.  Le  chiffre  XII  dans  le  champ,  accosté  de  4  roses.  Autour, 
filet  et  grènetis.  De  cette  série  on  ne  possédait  que  le  chiffre  YI. 
(No  81  du  catal.) 

MÉDAILLES  DE  THÉODORE  DE  BÈZE 

Médaille  frappée  en  1835,  à  Genève,  pour  le  3®  jubilé  de  la 
Réformation  et  présentant  au  droit  les  bustes  de  Calvin,  Farel, 
Viret  et  de  Bèze,  disposés  2  et  2  dans  le  champ. 

Br.  62  mm. 

(Je  regrette  de  ne  pouvoir  présenter  une  description  plus 
complète).  » 

—  D'importants  papiers  sur  les  forges  au  charbon  de  bois  en 
Nivemais  avaient  été  recueillis  par  notre  ancien  confrère 
M.  de  Pierredon,  pendant  son  séjour  comme  directeur  des 
usines  d'Imphy  ;  ne  comptant  plus  les  utiliser  lui-même,  il  a 
préféré  les  offrir  à  la  Société. 
M.  de  Lespinasse  a  cité  plusieurs  documents  assez  curieux 


Ik^rtant  svr  des  enquêtes  faites  en  1810  et  1838,  coneemant 
les  forges  de  MM.  de  Berthier,  à  Bîzy^  Septier  de  Rigny,  à 
l'AUine,et  TayllerandPérigord,  à  Vandeoesse.  ly autres  papiers 
de  même  nature,  mais  moins  intéressants  parce  que  ce  sont  des 
comptes  d'ouvrages  de  la  forge  de  Gigogne,  sont  également 
offerts  à  la  Porte  du  Croux  par  un  Nivernais  M.Ladrey,  notaire 
honoraire  à  Annecy.  La  Société,  en  remerciant  ces  messieurs 
de  leur  précieux  hommage,  confie  ces  papiers  à  M.  Paul  Meu- 
nier qui  s'occupe  d'un  travail  sur  le  inême  sujet. 

—  Après  la  séance  du  25  octobre,  la  compagnie  visite  les  caves 
voûtées  de  l'ancienne  abbaye  de  Notre-Dame,  décrites  par  M.  le 
chanoine  Sery. 

—  M.  l'abbé  Bridet,  curé  de  Saint-Bonnoi,  ofire  à  la  Société 
un  document  daté  de  1571  et  contenant  un  cens  servile  modifié 
en  bordelage.  Cette  pièce  viendra  s'ajouter  à  d'autres  que  nous 
possédons  déjà  sur  cette  curieuse  question  d'histoire. 

—  Mme  Moncharmont  donne  au  musée  deux  pierres  ornées 
de  billettes  provenant  de  Tabbaye  de  Notre-Dame. 

En  terminant,  messieurs,  je  vous  renouvellerai  mes 
instances  pour  vous  décider  à  signaler  les  divers  objets, 
documents  ou  faits  d'histoire  qui  peuvent  vous  passer 
sous  les  yeux  ;  isolés,  disparates,  insignifiants  par 
eux-mêmes,  ces  renseignements,  consignés  dans  cette 
chronique  du  Bulletin,  sont  susceptibles  de  servir  à 
un  moment  donné  aux  travailleurs  en  attirant  leur 
attention  sur  une  source  ou  un  fait  qui  leur  aurait 
échappé.  Le  moindre  détail  viendra  ainsi  offrir  une 
réelle  utilité  ;  par  ce  moyen  facile  pour  vous  tous  et 
qui  se  rencontre  à  chaque  instant,  nous  prendrons 
intérêt  aux  travaux  de  nos  confrères  les  plus  laborieux 
et  nous  aiderons  au  but  de  notre  chère  Société 
nivernaise. 


~  143  - 

Quelques  livres  offerts  à  la  Société  par  ses  membres 
ou  autres  auteurs  particuliers,  en  dehors  des  revues 
d'échanges  ou  des  nombreux  envois  administratifs  : 

—  Authenticité  des  Titres  des  Croisades  de  la  collection  Cour- 
tois, par  Robert  de  Courson. 

—  Comédie  par  Francis  et  Moreau,  intitulée  :  Les  CheviUes  de 
M^Adam  ouïes  Poètes  Artisans,  Masson  libraire,  in- 12, 1806. 
Offert  par  M.  le  colonel  de  Courson. 

—  Le  Pont  d'Avignon^  par  M.  Massillon  Rouvet. 

—  Thèse  de  doctorat:  Le  Servage  et  les  Communautés  servUes 
en  Nivernais^  par  M.  Paul  Mohier. 

Membre  décédé  : 

—  M.  le  docteur  Fichot,  médecin  en  chef  de  Thôpital,  à  Nevers. 

Nouveaux  membres  admis  en  1900  : 

—  M.  Bayle,  notaire  à  Nevers,  présenté  par  MM.  Sery  et 
Meunier  ; 

—  M.  Dubost,  avoué  à  Nevers,  par  MM.  Meunier  et  Duminy  ; 

—  M.  le  comte  René  Benoist  d'Azy,  par  MM.  Massillon 
Rouvet  et  Meunier  ; 

—  Mme  la  comtesse  René  Benoist  d'Azy,  par  MM.  Massillon 
Rouvet  et  Meunier  ; 

—  Mme  la  baronne  Denys  Benoist  d'Azy,  par  MM.  de  Lespi- 
nasse  et  Sery  ; 

—  M.  le  vicomte  René  d'Armailié,  par  MM.  Charles  du  Verne 
et  de  Lespinasse. 

—  M.  Dameron,  architecte  à  Nevers,  par  MM.  d'Assigny  et  le 
comte  de  Maumigny. 

R.  DE  L. 


Navers,  imp.  6«  YaUière» 


—  145  - 


Li  TOMBE  DE  SERÊNE  DE  GREVANT 

Femme   de  FRANÇOIS  II  de  CHABANNES, 
Comte  de  Saignes,  baron  de  Charlus,  etc. 

ET  DE  VÂLENTINE  DE  GHÂBÂNNES,  LEUR  FILLE. 

En  Végliêe  de  Trucy-V  Orgueilleux, 

ET 

M.  TOMBE  DE  JACQUES  DE  CHABANNES, 

Baron  de  Vergers  et  de   Sainte -Colombe, 
Dans  Vancienne  église  de  Vergers,  commune  de  Suilly^la^Tour, 


La  t©mbe  de  Serène  de  Crevant  et  de  Valentine  de 
Chabannes  attire  depuis  très  longtemps  l'attention 
des  amateurs  d'archéologie.  Dans  son  Répertoire 
archéologique  du  département  de  la  Nièvre,  notre 
regretté  Président,  le  comte  de  Soultrait,  en  a  fait  la 
description.  Plusieurs  autres  publications  en  ont  aussi 
parlé  et.  Tannée  dernière,  elle  a  reçu  la  visite  de  plu- 
sieurs de  nos  confrères.  L  un  d'eux,  M.  de  Flamare, 
en  nous  parlant  de  cette  visite,  nous  exprima  le  regret 
que  les  inscriptions  et  les  armoiries  qui  figurent  sur 
cette  tombe,  disparussent  peu  à  peu,  par  suite  de 
l'usure  occasionnée  par  le  passage  fréquent  sur  cette 
pierre,  de  ceux  qui  pénètrent  dans  l'élise.  En  effet, 
cette  tombe,  qui  était  primitivement  dans  le  chœur 
près  du  maître-autel,  se  trouvait,  sans  avoir  changé 
de  place,  à  l'entrée  de  l'église,  depuis  1773,  date  où 
le  chœur,  orienté  au  levant,  fut  transporté  à  l'extrémité 

T.  IX,  3*  série.  10 


-  146  — 

opposée.  Désireux  d'assurer  la  conservation  de  cette 
dalle  funéraire,  précieuse  par  son  antiquité,  les  sou- 
venirs qu'elle  rappelle,  les  inscriptions  et  les  armoi- 
ries qui  la  couvrent,  nous  en  parlâmes  au  comte  Henri 
de  Chabannes,  notre  confrère,  arrière  petit-neveu  de 
Serène  de  Crevant,  qui  accepta  très  volontiers  de  faire 
les  frais  nécessaires  pour  obtenir  ce  résultat.  Grâce  à 
Textrôme  obligeance  et  aux  soins  intelligents  de 
M.  l'abbé  Camus,  curé  de  Trucy-l'Orgueilleux,  cette 
tombe  a  été  transportée  dans  la  chapelle  des  anciens 
seigneurs  de  Trucy,  et  adossée  contre  le  mur  du  fond, 
après  qu'on  y  eut  placé  dans  l'épaisseur  de  la  maçon- 
nerie une  boîte  contenant  les  ossements  de  Serène  de 
Crevant  et  de  sa  fille,  ainsi  que  le  cœur  de  celle-ci 
renfermé  dans  une  capsule  de  plomb.  Ces  restes  se 
trouvaient  sous  la  tombe  où  leur  présence  avait  été 
déjà  constatée  en  1844,  lors  de  la  réfection  du  dallage 
de  l'église.  Voici  ce  que  dit  à  ce  sujet  feu  l'abbé  Gui- 
bliU;  alors  curé  de  Trucy,  dans  le  registre  paroissial  : 

«  Le  28  novembre  1844,  les  tailleurs  de  pierre,  rele- 
vant le  pavé  de  l'église,  trouvèrent  sous  ime  pierre 
tumulaire,  un  cœur  en  plomb,  renfermant  probable- 
ment le  cœur  d'un  enfant.  De  ce  cœur,  s'échappait  une 
liqueur  très  agréable  (1).  J'ai  vu  et  tenu  ce  cœur,  j'ai 
senti  l'agréable  odeur  qui  s'en  exhalait. 

))  La  pierre  tumulaire  était  placée  près  du  maltre- 
autel,  lorsque  le  sanctuaire  regardait  le  levant  avant 
1793. 

»  Cette  pierre  fut  replacée  dans  la  môme  position  et 
le  cœur  fut  remis  dessous  avec  les  petits  ossements 
de  l'enfant  ». 

(1)  L'un  des  maçons  avait  fait  nn  trou  dans  la  capsule  en  plomb. 


—  147  - 

Après  avoir  relaté  les  inscriptions  de  la  tombe,  le 
bon  curé  ajoute  : 

«  On  trouva  sous  la  pierre,  les  ossements  de  l'enfant 
et  plus  bas  ceux  de  la  mère  » . 

Par  suite  de  la  nouvelle  position  de  la  dalle,  il  a  été 
possible  de  relever,  de  la  façon  la  plus  exacte,  les 
anciennes  inscriptions  de  cette  tombe,  très  inexacte- 
ment reproduites  jusqu'ici  ;  c'est  M.  le  Curé  de  Trucy 
qui  a  bien  voulu  encore  prendre  cette  peine,  et  nous 
ne  saurions  assez  l'en  remercier  : 

D'après  le  fac-similé  ci-joint,  dans  toutes  les  copies 
de  l'épitaphe  publiées  jusqu'ici,  on  avait  oublié  le  mot 
D'ARMES,  «  Dame  6! Armes  du  Tour,  etc.  »,  puis  on 
avait  pris  pour  un  8  ou  pour  un  6  le  chiffre  qui  vient 
après  les  mots  AVEC'LVY,  et  qui  est  un  5,  point  au 
sujet  duquel  divers  actes  concernant  Serène  de  Cre- 
vant ne  permettent  aucim  doute.  D'un  autre  côté,  en 
ce  qui  est  des  inscriptions  régnant  en  exergue  autour 
de  la  tombe,  on  les  a  reproduites  tout  aussi  inexacte- 
ment. Du  mot  TIBI  on  avait  fait  la  fin  d'une  inscrip- 
tion placée  à  la  suite  de  l'épitaphe,  ce  qui  n'est  pas.  Le 
mot  TIBI,  précédé  des  trois  lettres  IDA  non  mention- 
nées jusqu'à  ce  jour,  doit  être  la  fin  de  l'inscription 
latine  LECTOR-MORSTVAMORSCHRISTIAN  A, 
à  laquelle  l'usure  a  enlevé  sept  ou  huit  mots  avec  les 
premières  lettres  du  mot  terminé  par  IDA.  On 
n'a  pas  remarqué  davantage  que  l'inscription 
«  SON  •  ESPERANCE  •  S'EST  •  NORRIE  •  ENVER- 
TVEVSE-  (sic)  ATTENTE  »  se  termine  par  les 
mots  POVR'VO  VS  et  que  par  suite  il  manque  égale- 
ment à  cette  inscription  cinq  ou  six  mots. 

La  description  des  armoiries  figurant  sur  l'écusson 
placé  près  de  la  croix  est  en  grande  partie  effacée  ; 
cette  description,  que  nous  trouvons  dans  le  Répertoire 


—  148  - 

archéologique  cité  plus  haut,  laisse  aussi  très  fort  à 
désirer  comme  exactitude.  Elle  est  ainsi  conçue  : 

((  Parti  au  1  d'un  écartelé  et  d'un  lion,  et  aux  2  et  3 
de  la  Tour  c^' Auvergne  à  un  chef  chargé  de......  et 

au  4  parti  d'un  écartelé  » . 

L'auteur  a  voulu  dire  sans  doute,  que  le  1®'  parti 
était  divisé  en  trois  parties.  Trompé  par  l'usure  de 
cet  écu,  et  aussi  par  la  maladresse  de  l'ouvrier,  il  a 
indiqué  très  confusément  et  inexactement  les  pièces 
de  l'écu  sans  tenir  compte  des  règles  du  blason.  Si  le 
1®'  parti  avait  compris  réellement  trois  divisions,  il 
aurait  dû  dire  :  Parti  au  1  coupé  de  deux,  etc. 

En  réalité,  cet  écu  est  parti  de  la  1"  moitié  des  armes 
de  François  de  Chabannes,  mari  de  Serène  de  Crevant 
et  d'un  écartelé  d'argent  et  d'azur,  armes  de  cette  der- 
nière. 

Les  armes  de  François  de  Chabannes,  qui  apparte- 
naient à  la  branche  cadette  des  Chabannes,  comte  de 
Saignes,  étaient  ainsi  composées  quand  mourut  sa 
femme  :  «  Ecartelé  aux  1  et  4  de  gueules  au  lion  d'her- 
mines armé,  couronné  et  lampassé  d'or  qui  est  Cha- 
bannes, et  aux  2  et  3  contr'écartelé,  aux  1  et  4  d'azur 
semé  de  fleurs  de  lys  d'or  à  la  tour  d'argent  maçonnée 
de  sable,  qui  est  la  Tour,  et  aux  2  et  3  d'or  au  gon- 
fanon  de  gueules,  frangé  de  sinople,  qui  est  Auvergne 
avec  l'écu  de  Boulogne  qui  est  d'or  à  trois  tourteaux 
de  gueules  sur  la  contr'écartelure  ».  Tout  en  rappelant 
une  des  belles  alliances  des  Chabannes,  les  armes  des 
la  Tour  d'Auvergne  étaient  là  comme  brisure,  car, 
autrefois,  c'était  une  règle  absolue,  que  le  chef  de  la 
famille  avait  seul  le  droit  de  porter  les  armes  pleines 
de  sa  maison. 

((  Le  blason  plein  échoit  en  partage  à  l'atné,  tout 
autre  doit  briser  comme  il  est  ordonné  ».  C'est  pour  le 


JL 


r<it-TSr-HAvLTB-£T  PViisttTZ 


EFILI 


FlLtt.VNIÛVE-VAlEWriWE 

g  iovAs-APH£ysA-Meft,£-nin- 


CI-GIT- H  aVLT-PVISSANT-SEIG 
a  lALOfrNMK-PARTlS-K-OROlje    5 

|WE*'-f(JVfrJM-AM£.  2! 


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-A*  rnt*i  >  JAtfHli  tt  tu. 
^n4u.pi-ii  t^.it4tj,  tt  Ut  t 
3ÀKOH  et  \tK»tAi,  raiisLittu   *'m^i>-dj 


—  149  — 

même  motif  que  la  branche  à  laquelle  appartenait 
Valentine  d'Armes,  mère  de  François  de  Chabannes 
brisait  d'un  lambel,  ainsi  qu'on  le  voit  sur  la  statue 
tombale  de  cette  dame,  qui  était  autrefois  dans  l'église 
de  Trucy  (1)  et  que  l'autre  branche  cadette  des 
d'Armes  avait  comme  brisure  une  engrôlure  d'or  au- 
tour de  l'écu. 

Plus  tard,  à  la  mort  de  son  père,  arrivée  en  1610, 
François  de  Chabannes  mit  sur  le  tout  des  grands 
quartiers  de  ses  armes,  l'écu  des  Blanchefort  qui  est 
d'or  à  deux  lions  léopardés  de  gueules,  l'un  sur  l'autre. 
La  seigneurie  de  Boislamy  lui  advenait  alors  par 
suite  de  la  substitution  établie  par  Françoise  de  Blan- 
chefort, à  l'occasion  de  son  contrat  de  mariage,  le 
6  février  1498,  avec  Jean  de  Chabannes,  baron  de 
Curton,  en  faveur  des  puînés  de  la  maison  de  Cha- 
bannes .  Une  des  clauses  de  cette  substitution  était  que 
le  bénéficiaire  devait  porter  le  nom  et  les  armes  de 
Blanchefort. 

Maintenant,  ce  qui  a  dû  contribuer  à  tromper  l'au- 
teur du  Répertoire  archéologique,  au  sujet  des  armes 
gravées  sur  la  tombe,  c'est  que  l'ouvrier  peu  habile, 
trouvant  trop  difficile  de  faire  tenir  les  armes  assez 
compliquées  des  la  Tour  d'Auvergne  dans  le  quart  de 
l'écu,  a  anticipé  sur  le  premier  quart  que  le  lion  d'her* 
mines  aurait  dû  seul  occuper.  Par  suite,  ce  lion  est 
devenu  un  lion  passant  qui,  môme,  parait  tourné  à 
senestre. 

Les  deux  dessins  à  la  plume  ci- joints  et  le  fac-similé 
de  la  tombe,  rendront  tout  à  fait  saisissable  ce  qui 
vient  d'être  dit  au  sujet  des  armoiries  et  des  inscrip- 
tions. 


(1)  Cette  statae  est  actaellement  dans  la  chapelle  da  château  4e  la  Toa- 
rette,  apparteaant  au  comte  H.  de  Chabannes. 


—  450  ^ 

Serène  de  Crevant  (1)  fille  de  Louis  de  Crevant, 
chevalier  de  Tordre  du  Roi,  seigneur  de  Bauché,  la 
Morandière,  Beauregard ,  Saulnay,  etc.  (2),  et  de 
Claude  de  la  Marthonie  (3)  fut  mariée,  le  7  février  1595, 
en  la  chapelle  du  château  de  Bauché,  par  l'abbé  de 
Maubec,  avec  François  II  de  Cliabanncs,  comte  de 
Saignes,  baron  de  Charlus-Chabannes,  Tinières  (4), 
Sautré  (5),  seigneur  de  Boislamy,  Nouzerolles  (6),  du 
Coudray,  de  Mariol  (7)  etc.,  chevalier  de  Tordre  du 
Roi,  capitaine  de  cinquante  hommes  d'armes,  conseiller 
du  Roi  en  ses  conseils  d'Etat  et  privé.  François  II,  qui 
épousa  en  secondes  noces  Hélène  de  Daillon  du  Lude, 
était  le  deuxième  fils  de  François  de  Chabannes  le 
jeune,  et  de  Valentine  d'Armes.  Il  avait  pour  frère 
cadet  Jacques  de  Chabannes,  baron  de  Vergers,  etc., 
dont  descendent  les  Chabannes,  actuellement  fixés  en 
Nivernais.  Le  chef  actuel  de  cette  branche  est 
M.  Eugène  marquis  de  Chabannes  de  Vergers,  domi- 
cilié au  château  d'Argoulais,  près  Château-Chinon. 

On  ignorait,  jusqu'à  ces  derniers  temps,  la  date  de 
la  mort  et  le  lieu  de  la  sépulture  de  Jacques  de  Cha- 
bannes, auteur  de  la  branche  des  Chabannes  de  Ver- 
gers, mais  sa  tombe  que  nous  avons  eu  la  bonne  fortune 
de  découvrir,  récemment,  dans  l'ancienne  église  de 
Vergers,  transformée  en  magasin,  nous  a  renseigné  à 
cet  égard.  L'épitaphe  de  cette  tombe  est  conforme  au 
fac-similé  ci- joint  : 

Jacques  de  Chabannes,  chevalier  de  Tordre  du  Roi, 

(i)  Crevant,  ancienne  maison  de  la  Touraine  connue  depuis  Ârcham- 
bault  !•%  qui  épousa  en  1302  Isabeau  de  la  Fauconnière.  La  branche  de 
Bauché,  l'atnée,  s'éteignit  en  1681 ,  et  celle  des  ducs  d*Humières  en  1694. 

(2)  Localités  de  Tlndre  et  d'Indre-et-Loire. 

(3)  Vieille  famille  du  Périgord. 

(4)  Saignes,  Charlus-Chabannes,  Tmières  en  Limousin. 

(5)  Sautré  (Maine-et-Loire). 

(6)  Bêislamy  et  Nouzerolles  dans  la  Creuse. 
(1)  Le  Goudray  et  Mariol  en  Bourbonnais. 


—  451  — 

baron  de  Vergers  et  de  Sainte-Colombe-des-Bois  etc., 
était  né,  suivant  une  note  de  son  père,  le  2  dé- 
cembre 1581,  au  château  de  Trucy-l'Orgueilleux,  en 
la  chambre  haute  de  la  tour.  Il  fut  baptisé  le  18  du 
môme  mois,  par  messire  Jean  Fautier,  curé  de  la 
paroisse  de  Corvol-rOrgueilleux,  et  eut  pour  parrains 
messire  Hubert  de  la  Rivière  et  François  de  Cha- 
bannes,  son  frère  aîné,  et  pour  marraine,  damoiselle 
Bonne  de  Bamault ,  femme  de  messire  Balthasar 
de  la  Tournelle,  seigneur  de  Montjardin,  tante  de 
Valentine  d'Armes,  sa  mère.  Il  épousa  par  contrat  du 
23  août  1610,  Gabriel  de  Babute,  fille  de  feu  Léonard 
et  de  feue  Anne  de  la  Porte. 

« 

TESTE. 


—  152  — 


FRAGMENTS  DE  L'OBITUAIRE 


DE  L'ÉGLISE 


SAINT-MARTIN  DE  CLAMECY 


Lorsque,  il  y  a  deux  ans,  nous  avons  publié  ici  môme 
le  texte  de  VObituatre  de  Saint-Martin,  tel  qu'il  est 
conservé  dans  le  manuscrit  du  British  Muséum,  nous 
exprimions  le  souhait  que  le  hasard  permît  un  jour 
de  retrouver  les  parties  disparues  de  ce  martyrologe. 
Or,  dans  le  manuscrit  français  33074  de  la  Bibliothèque 
nationale  (composé  d'extraits  que  fit  dom  Qaffiaux, 
en  1770,  au  cours  d'un  voyage  entrepris  dans  le  Niver- 
nais), se  trouve  une  partie  du  nécrologe,  que  nous 
publions  aujourd'hui. 

Nous  avions  supposé  précédemment  que  le  texte  de 
l'obituaire  utilisé  par  l'abbé  Lebœuf  dans  Y  Histoire 
civile  et  ecclésiastique  de  la  ville  et  du  diocèse 
d*Auxerre  était  plus  complet  que  celui  actuellement 
possédé  par  le  British  Muséum,  et  que  ce  manuscrit 
était  à  cette  époque  la  propriété  du  chapitre  de  Saint- 
Martin.  Cette  hypothèse  devient  une  certitude,  en 
présence  des  extraits  de  dom  Caffiaux,  et  Ton  peut 
affirmer,  sans  réticence,  qu'en  1770,  le  manuscrit  exis- 
tait, intégral,  à  Clamecy. 

Ces  extraits  occupent  les  folios  67  v©  à  70  v©  du  manus- 
crit, moins  quelques  lignes  où  sont  intercalés  des 
titres  de  la  Chartreuse  de  Basseville  ;  ils  s'étendent  du 


-153  — 

9  des  calendes  de  janvier  (34  décembre)  au  4  décembre. 
Nous  les  avons  reproduits,  sauf  les  mentions  allant  du 
5  des  calendes  de  mai  (27  avril)  au  6  des  nones  de 
juillet  (2  juillet),  cette  partie  étant  déjà  comprise  dans 
notre  première  publication. 

Ils  nous  ont  permis  de  retrouver  quelques  noms  de 
famille  complétant  les  listes  déjà  données  dans  la 
première  publication  et  de  rectifier  certaines  erreurs, 
notamment  en  ce  qui  concerne  la  famille  d'Arthe  ou 
d'Arthel.  Ces  retouches  nous  ont  été  facilitées  par 
M.  de  Flamare;  nous  le  remercions  sincèrement  de 
l'obligeance  avec  laquelle  11  a  bien  voulu  nous  commu- 
niquer ses  notes,  encore  manuscrites,  sur  les  familles 
nivernaises. 

LÉON  MIROT. 


(Fol.67,vo)  EXTRAICT 

Du  Martirologe  du  chapitre  de  Clamecy. 

(24  déc).  —  Au  9  des  calendes  de  janvier  en  1427, 
anniversaire  de  Pierre  Grasset,  TEneien. 

{85  déc).  —  Au  8  des  calendes  de  janvier  1334, 
mort  de  Simon  le  Duc,  quia  donné  un  bien  à  Villaines, 
tenant  aux  héritiers  de  Guillaume  Félix  et  à  la  terre 
de  M.  de  Villaines, 

(26  déc).  —  Au  7  des  calendes  de  janvier,  anniver- 
saire d'Odon  de  Maisy,  de  Milon,  son  fils,  et  d'Agnès, 
femme  dud.  Odon,  qui  ont  donné  du  bien  au  moulin 
de  Vaux  ;  au  môme  jour,  mort  de  M.  Gaucher  de 


—  154  - 

S.  André,  prestre.  En  1380,  mort  de  Pierre  Grasset 
TEncien,  qui  a  donné  un  bien  tenant  à  Jean  de 
Paroy  (1). 

(FoL  68.)  {Ijanv.).  —  Au  jour  des  calendes  de  janvier,  anni- 
versaire de  Guillaume  d'Arthe,  chevalier,  et  de  dame 
Agnès  d'Arthe,  sa  sœur,  vers  1300  (2). 

{2janv.).  —  Le  4  des  nones  de  janvier  vers  1300, 
anniversaire  d'Agnès,  femme  de  Guillaume  Le  Petit. 

{3  j'ano.).  —  Au  3  des  nones  de  janvier  vers  1300, 
anniversaire  de  Gui,  dit  de  Gourion,  chanoine  de 
Clamecy. 

{lî  Janv.).  —  Au  3  des  ides  de  janvier  vers  1300, 
de  Jean  Tardieu  (ou  Fardel),  prêtre,  de  Hugues,  dit 

(1)  Jean  de  Paroy  appartenait  à  la  même  famille  qu'Agnès  de  Paroy, 
morte  Ters  1900  ;  il  descendait  sans  doute  de  Millet  de  Paroy,  mort  le 
6  août  1327.  Millet  eut  pour  fils  Jean,  père  sans  doute  de  ce  Jean  de  Paroy. 
Sa  femme  Jeanne  testa  le  90  juin  1400  et  demanda  à  être  inhumée  dans 
le  grand  cloître  de  Saint- Martin  de  Qamecy.  Il  eut  deux  enfants,  un  fils 
nommé  Jean,  et  une  fille  Marie,  épouse  de  Jean  Odeneau. 

(2)  La  fimille  d'Arthe  ou  d*Arthel,  que  nous  avions  à  tort  identifiée  avec 
la  famille  d'Arcy,  occupa  la  vicomte  de  Clamecy  jusqu'au  début  du 
zv*  siècle.  La  plus  ancienne  mention  que  nous  connaissions  remonte  à 
la  fin  du  XIII*  siècle,  avec  Seguin  d'Arthe,  trésorier  de  l'église  de 
Varzy  et  chanoine  de  Clamecy,  mort  en  1297-1296.  Son  neveu  Gauthier, 
qualifié  de  vicomte,  est  mentionné  en  1281,  et  en  1289  ;  sa  femme  se 
nommait  Isabeau.  Vers  la  même  époque,  nous  trouvons  du  même  nom 
Hugues,  Guillaume  et  Agnès  morts  vers  1900  ;  Perrin  qui,  en  1912,  fait 
à  Guy  de  Ghastelluz  un  dénombrement  de  terres  sises  i  Fiez  et  NeufTon- 
taines  ;  en  1399,  Jean  d'Arthel,  du  bailliage  de  Bourges,  donne  quittance 
pour  service  militaire  ;  de  même  en  1957,  Gaucher  d'Arthel  ;  en  1956, 
Jean,  précédemment  nommé,  est  qualifié  de  vicomte  ;  en  1400  et  1407, 
nous  trouvons  Guillaume,  dont  un  frère,  Liéband,  était  mort  en  1400. 
Le  neveu  de  ces  deux  personnages  se  nommait  Hugues  de  Quincy.  Les 
membres  de  la  famille  d'Arthel  étaient,  semble-t-il,  inhumés  dans  l'église 
de  Saint-Martin  (testament  d'Antoine  de  Billy,  en  1420);  la. vicomte  de 
Clamecy  qui  parait  avoir  été  héréditaire  dans  leur  famille,  passa  proba- 
blement par  sobstitution  à  la  famille  de  Billy. 


-  155  — 

Valasses  et  de  sa  femme,  père  et  mère  de  Pierre, 
prêtre,  curé  de  Coincy  (ou  Quincy)  et  de  Haye,  sœur 
dudit  prêtre,  épouse  de  Laurent. 

(12  Jane).  —  A  la  veille  des  ides  de  janvier,  anni- 
versaire de  Philleron,  femme  de  Petitjean  d'Armes, 
qui  a  fait  une  donnation  Tan  1311  ;  le  même  jour  en 
1357,  mourut  Alix,  femme  de  Gui  Lavoe,  laquelle 
donna  au  chapitre  3  s.  sur  une  vigne  au  lieu  dit  en 
Foliose,  tenant  à  Jean  Buchart  (1). 

(Î3  Janv.).  —  Le  jour  des  ides  de  janvier  vers  1300, 
l'anniversaire  de  Hugues  de  S.  Gangulphe,  chanoine 
d'Auxerre  et  de  Clamecy,  lequel  a  donné  10^ 
avec  lesquels  le  chapitre  a  acheté  des  rentes  de 
M.  Jout  de  S.  Maurice  et  de  Hye  Fardelle. 

(14  janv.).  —  Le  19  des  calendes  de  février,  anni- 
versaire de  Jean  Goste,  mort  le  samedi  avant  la 
purification  1381^  époux  de  Jeanne,  fille  de  Mathieu 
d'Austun. 

(22  janv.).  —  Le  11  des  calendes  de  février,  mourut 
Geoffroy  d'Asnières,  chevalier,  vers  1300  ;  le  même 
jour,  Jean,  dit  le  Chauve,  qui  a  donné  une  rente  sur 
la  vigne  de  Folieuse,  tenant  à  la  vigne  de  Jean  Bui- 
chard.  Le  même  jour,  en  1403,  mourut  Bienvenue, 

(1)  Buchart)  Bouchart,  Boussart,  famille  bourgeoise  très  nombreuse 
au  xiY*  siècle,  et  dont  la  filiation  est  fort  difficile  à  établir.  Elle  nous  est 
connue  par  Guy  ou  Guiot,  qui  figure  en  1350  et  mourut  le  10  août 
1359  ;  il  avait  épousé  Isabeau  de  Hougemont,  dont  il  eut  quatre  enfants  : 
Isabelle,  Jean,  Guillemrlte,  épouse  de  Jean  Goujon,  et  Bonne.  Un  autre 
membre  de  cette  famille,  Gautier,  mort  en  1367,  avait  eu  de  deux  ma- 
riages. Bonne,  épouse  de  Jean  Fillon,  et  Marie,  épouse  de  Tasquin  de 
Saint-Omer-l'Eglise.  Au  début  du  xiv«  siècle,  nous  voyons  mentionnés 
plusieurs  autres  membres  de  cette  famille,  parmi  lesquels  Guillaume, 
Jean,  garde  du  scel  de  la  prévôté  en  1311,  etc. 


1 


—  156  - 

veuve  de  Perrin,  dit  Gillet  (1),  couturier  à  Varzy, 
laquelle  a  donnée  pour  l'anniversaire  de  sond.  mari  et 
d'elle  2"  6*  apprendre  sur  une  pièce  de  vigne  au 
finage  de  Varzy,  appelée  la  Coste  du  Pré,  tenant  aux 
religieux  de  N.-D.  de  Bouras  et  à  Guillaume  de  Bœuf. 

(29  janv,).  —  Le  4  des  calendes  de  février,  vers 
1300,  mort  de  Hugues,  fils  de  Pierre  de  S.  Maurice; 
en  1382,  mort  Amodote,  fille  de  Jean  de  Paroy, 

{3fév.).  —  Le  3  des  nones  de  février  1419,  mort  de 
M.  Jean  Bochard,  chapplain  de  S.  Eloi,  qui  a  donné 
au  chapitre  20  s.  sur  sa  maison  audit  Clamecy. 

{Ifév.y  —  Le  7  des  ides  de  février,  vers  1300, 
mort  de  Hugues,  vicomte  de  Clàmecy. 

{9fév.).  —  Au  5  des  ides  de  février,  acte  du  7  fé- 
vrier 1531,  portant  que  le  chapitre  a  receu  de  n,  sr. 
Jean  de  Magelier^  écuier,  élu  à  Ch&teau-Chignon  et 
lieutenant  du  bailli  du  Nivernois  à  Clamecy,  la  somme 
de  12 1.  légué  audit  chapitre  par  feu  Etiennette  Grasset^ 
veuve  d'Olivier  de  Magelier,  écuier . 

(iOfêv.),  —  Le  4  des  ides  de  février,  vers  1300,  obit 
d'Adeline,  dame  du  Mont. 

.  (12fév.).  —  Le  2  des  ides  de  février,  vers  1300,  obit 
de  M.  Gui  de  Chaignai,  chevalier. 

{13fév.).  —  Le  jour  des  ides  de  février,  vers  1400, 
anniversaire  de  M.  Liebaut,  que  doivent  payer  le 


(1)  Daim  son  testament,  Bienvenne  demandait  à  ôtre  enterrée  au  grand 
cloître  de  Saint-Martin,  près  de  la  femme  de  Jean  de  Paroy,  Elle  instituait 
comme  légataire  Jean  Odeneau,  son  cousin. 


.ht. 


-  157  — 

vicomte  de  Clamecy,  Guillaume  d'Arthe,  chevalier, 
firère  dud.  Liebaut  et  Hugues  de  Quinsy,  écuier,  leur 
nepveu. 

{14fév.).  —  Le  16 des  calendes  de  mars,  vers  1400, 
obit  de  M.  Guillaume  de  Blanchefort,  écuier  (1). 

{Î6fév.).  —  Le  14  des  calendes  de  mars,  acte  du 
17  février  1404,  passé  par  devant  Jean  Odeneaul,  clerc 
juré  et  notaire  de  madame  de  Bourgogne  sous  le  scel 
de  la  prévoté  de  Clamecy,  ladite  pièce  signée  Ode- 
neaul  (orig.) 

{88fév.).  —  Le  3  des  calendes  de  mars  1332,  mou- 
rut Jean  Buichart,  pour  lequel  Jean  Buichart,  son  sgr. 
a  donnée  5  s.  le  même  jour.  Vers  1400,  obit  de  Gélon, 
dit  le  Borne,  Aramburge  sa  femme,  et  Gaulier,  leur 
fils,  qui  ont  donnée  un  bien  tenant  à  Colas,  aussi  fils 
dudit  Gilon  et  de  sadite  femme.  Le  môme  jour  (vers  le 
môme  temps),  obit  de  dame  Isabelle,  dite  de  Minières, 
veuve  de  messire  Guillaume  de  Blanchefort,  chevalier. 

{22fév.).  —  Le  8  des  calendes  de  mars  1293,  obit 
de  feu  de  bonne  mémoire  Jacques  de  Rougemont  (2). 


(1)  Cette  faucille  de  Blancafort  ou  Blanchefort  ne  semble  pas  pouvoir 
être  rattachée  à  la  célèbre  maison  limousine,  qui  au  xyi«  s.  posséda  la 
baronnie  d'Âsnois.  Antérieurement  i  ce  Guillaume  de  Blanchefort,  nous 
connaissons  dans  la  première  moitié  du  xiv«  s.,  Guillaume,  époux  de 
Isabelle  de  Minières,  et  Jean,  mort  le  9  juin  1340. 

(2)  Plusieurs  membres  de  cette  famille  nous  sont  connus.  Outre  Jacques, 
vivant  en  1286,  et  mort  vers  1293,  nous  connaissons  antérieurement 
André  qui  figure  en  1210  (Marolles,  Inventcâre  des  titres  de  la  Chambre 
des  comptes  de  Nevers,  p.  476)  ;  Herbert  en  1222  ;  plus  tard,  Guillaume 
en  1294  ;  Hugues  en  1907.  La  fille  d'Herbert,  Isabeau,  avait  épousé 
Gui  Bonssard»  et  mourut  en  1350.  En  1330,  nous  voyons  Philippe  de 
Roagemont,  en  1386  Nicolas. 


—  458  — 

{17  mars).  —  Au  16  des  calendes  d'avril.  Tan  1373, 
obit  de  M.  Liebaut  de  Corre,  chevalier. 

(23  mars).  —  Le  10  des  calendes  d'avril,  vers 
1400,  obit  de  Humbert  l'Asne  Salligny  (1). 

(30  mars).  —  Au  3  des  calendes  d'avril,  acte  du 
pénultième  mars  1413,  passé  par  devant  Odeneaul, 
portant  que  ledit  jour  mourut  Jean  Maistrejean ,  qui 
fonda  son  anniversaire  dans  l'église  de  Clamecy. 
Uacte  est  signé  Odeneaul.  (orig). 

(31  mars).  —  Le  2  des  calendes  d'avril  1316,  le 
jour  d'avril  mourut  Audeline,  fille  de  Jean  le  Roux, 
mère  de  Jean  et  Guillaume  Buchart ,  laquelle  donna 
12  s.  pour  son  anniversaire.  Ledit  jour,  l'an  1320, 
obit  de  Jeanne,  fille  de  Regnoart  et  veuve  de 
M.  Regnaud  l'Anglois,  laquelle  donne  une  rente  sur 
une  vigne  que  tient  Robert  Regnoart. 

(f«'  avril).  —  Jour  des  calendes  d'avril,  1328,  obit 
de  Marion,  fille  de  feu  Regnaud  Langlois  et  de  lad. 
Jeanne,  fille  de  Guillaume,  dit  Regnoart. 

(2  avril).  —  Le  4  des  nonnes  d'avril,  vers  1300, 
obit  de  Gautier  d'Arthe,  chevalier  ,  vicomte  de  Cla- 
mecy ;  l'an  1316  obit  de  Jean  de  Vaux,  chanoine  de 
Sens. 


(1)  Cette  famille  apparaît  à  la  fin  du  xiii«  siècle,  avec  Humbert,  garde 
du  sel  de  la  prévoté  de  Clamecy  ;  il  eut  sans  doute  pour  fils  Jean,  figu- 
rant en  1309  ;  Pierre,  fils  de  Jean ,  et  vivant  en  1393 ,  eut  pour  fils 
Jean,  dont  rexistence  est  attestée  en  1407.  En  1463  et  en  1469,  nous 
connaissons  Jean  et  François. 


-  159  - 

(5  avril).  —  Le  jour  des  nonnes  d'avril  1416,  obit  de 
Jeanne,  femme  de  Pierre  de  S.  Verain  des  Bois  (1). 

(8  avril).  —  Le  6  des  ides  d'avril  1297,  obit  de 
Seguin  d'Arthe,  chanoine  de  Clamecy,  que  il  donna 
un  bien  que  tiennent  Hugues  de  Bignons  de  Chivre, 
et  Emeryard  sa  femme,  Isabelle  leur  fille,  et  Vigneron, 
mari  de  lad.  Isabelle. 

(FoL68,v°)      {i4  avril).  —  Le  18  des  calendes  de  mai,  l'an  1422, 

obit  de  Marie,  femme  de  Pierre  Grasset  l'alné,  qui 
donna  un  bien  qui  fut  à  mess.  Durant  Fabre,  prêtre, 
tenant  aux  héritiers  d'Antoine  de  Billy,  écuier  (2). 

(16  av.).  —  Le  16  des  calendes  de  mai  1414,  obit 
d'Agnès,  veuve  de  Regnaud  le  Quarault  de  Moley, 
jadis  servante  de  M.  Jean  Bochard. 

(17  avril).  —  Le  17  des  calendes  de  mai  1420,  obit 
de  Perin,  dit  Raffart,  qui  a  donné  un  bien  au  finage 
de  Baugy,  tenant  à  la  vigne  qui  fut  à  Guillaume 
Buchart. 

(i)  La  maison  de  Saint- Verain  posséda  très  longtemps  la  seignearie 
d'Âsnois,  qui  passa  ensuite  anx  Blanchefort. 

(2)  La  famille  de  Billy  semble  avoir  succédé  à  la  famille  d'Ârthe 
dans  la  vicomte  de  Qamecy.  Le  premier  membre  connu  est  Symon,  en 
1239;  puis  Jean,  maréchal  du  Nivernais,  en  1249-1252.  D'Adeline,  sa 
femme,  il  eut  Jean,  Geoffroy,  et  Isabeau,  femme  de  Guion  Berchart  En 
1300,  apparaît  Jean  ;  puis  ett  1328,  Pierre,  sgr  de  MaiUy-le-Château, 
qui  céda  ses  droits  sur  Billy,  à  sa  cousine  Huguette  ;  en  1350,  Jean  de 
Billy  fait  aveu  au  comte  d'Eu  pour  des  biens  sis  à  Ghâteau-Ghinon  ;  en 
1^7  et  en  1380,  Robert  paraît  comme  sgr  de  Verou  et  de  Champcourt, 
du  chef  de  sa  femme  Ysabeau  de  Champdiou.  Sa  fille  Alixand  eut  de 
Henri  Bauge  une  fille  qui  épousa  Jean  d'Avril.  Jean  de  Billy,  sgr  de 
Vèvre  en  1377,  eut  pour  fils  Jean  et  Guillaume.  En  1406,  Antoine  de 
Billy,  écuyer,  sgr  de  Châteaux  et  de  Saint-Martin  de  la  Bretonnière,  vend 
des  biens  à  Saint-Saulge.  Il  est  qualifié  de  vicomte  de  Clamecy,  et  eut 
pour  fils  Jean.  La  vicomte  de  Clamecy  fut,  en  1460,  vendue  au  comte  de 
Nevers. 


—  160  — 

{Ï8  av.).  —  Le  14  des  calendes  de  mai,  obit  du 
vendredi  après  la  résurrection  1417,  de  Louis,  dit 
Blandin^  écuier,  s'  de  Cor  vol  TOrgueilleux ,  qui  a 
fondé  son  anniversaire  et  celui  de  Jean  Blandin,  son 
fils  {1). 

[Les  mentions  du  27  avril  au  2  juillet,  occupant  les  t^  68 
et  69  v<>,  sont  comprises  dans  le  texte  que  nous  avons  précé- 
demment publié.] 

{2 juillet).  —  Le  6  des  nones  de  juillet,  vers  1400, 
obit  de  Jeanne,  femme  de  Jean  de  Paroy. 

(7 juillet).  —  Le  jour  des  nones  de  juillet  1400,  obit 
de  A.  h.  Antoine  de  Billy. 

{8 juillet).  —  Le  8  des  ides  de  juillet  1349,  obit  de 

dame  Bonne,  femme  de  Jean,  dit  Buchart,  laquelle  a 

donné  pour  son  anniversaire  20  s.  de  rente  apprendre 

sur  la  vigne  du  Bois  Micheau,  qui  fut  à  Geoffroy 

Jeannelet,  tenant  à  la  vigne  de  Jean  Fadel,  laquelle 
rente  doit  Pierre  Chevalier. 

* 

(16  juillet).  —  Le  17  des  calendes  d'aoust,  obit  de 
n.  sflf  Colart  d'Arly,  chevalier. 

(Fol.  70.)  (i 7  juillet).  —  Du  16  des  calendes  d'aoust,  acte  du 
1  d'aoust  1413,  portant  que  pardevant  Jean  de  Villiers, 
prestre,  notaire  juré  de  m^r  le  comte  de  Nevers, 
comparu  Perin  Rafiart,  de  Clamecy,  lequel  reconnu 
avoir  donné  au  chapitre  de  Clamecy  8  s.  de  rente  pour 
l'anniversaire  de  feu  Huguenin  Raffart,  son  père  et  de 

(1)  Louis  Blandin,  sgr  de  Corvol-rOrgneilIeux ,  avait  épousé  Jaquette 
de  Billy.  Son  fils  Jean  épousa  Marguerite  du  Deffent.  Le  père  de  Louis, 
Pierre,  mourut  en  1968. 


—  461  - 

feue  Jeanne,  fille  de  feu  N.  Aucoustier,  sa  femnoie, 
laquel  rente  il  a  assigné  sur  sa  maison  du  marché 
tenant  d'une  part  à  la  maison  de  Guillaume  Baclin,  et 
d'autre  part  au  pavillon  de  Jean  Odeneaul  (orig.). 

{19  juillet).  —  Au  14  des  calendes  d'aoust  1372, 
obit  de  Gui  Lavoe, 

(23  juillet).  —  Le  10  des  calendes  d'aoust  1322,  le 
vendredi  après  la  Madeleine,  mort  de  N.  Louis,  comte 
de  Nevers  et  de  Rethel  (1). 

{28  juillet).  —  Le  5  des  calendes  d'aoust  1257,  mort 
de  N.  dame  Mahaut,  comtesse  de  Nevers  (2).  Le 
mesme  jour  1400,  obit  de  Gillet  Boicheron,  fils  de  feu 
Regnaud  Boicheron,  qui  donna  pour  l'anniversaire  de 
Jeanne,  sa  femme,  7  s.  6  d.  sur  sa  maison  devant 
l'église  de  S.  Martin  de  Clamecy,  tenant  à  Michel 
Boicheron,  son  frère,  et  à  M.  Jean  Bouchart  (Bou- 
quardi). 

(6  août).  —  Le  8  des  ides  d'aoust  1327,  mort  de 
Milet  de  Paroy,  qui  donna,  pour  son  anniversaire  et 
celui  d'Isabelle,  sa  femme,  5  s.  sur  les  tenemens, 
lesquels  5  s.,  Jean  de  Paroy,  son  fils,  a  assigné  sur  la 
moitié  d'une  maison  situé  en  la  grande  rue  de  Cla- 
mecy, qui  fut  à  Gautier,  dit  Seignoret,  tenant  à  la 
maison  de  Gilet,  dit  Constant,  et  sur  2  prés  séant  à 
Latrault,  au  lieu  dite  En-La-Molaise,  qui  furent  aud. 
Gautier  Seignoret,  à  cause  de  sa  femme. 

(8  août). —  Le  7  des  ides  d'aoust,  vers  1350,  obit  de 
Gautier  Buchart. 


(\)  Louis  II  de  Crécy,  comte  de  Flandre. 
(2)  Mahaut  I^»,  épouse  d'Hervé  de  Donzy. 

T.  IX,  3*  série.  11 


{9  août).  —  Le  5  des  ides  d'aoust,  vers  1300,  obit  de 
Richard,  vicomte  de  Clamecy  ;  le  môme  jour  1416, 
mort  de  N.  dame  Issabeau  de  Villecendrier,  dame 
d'Anois,  de  la  Bretagne  et  de  La  Lande. 

{10  août).  —  Le  4  des  ides  d'aoust  1550,  mort  dlssa- 
beau,  femme  de  Gui  Buchard,  qui  donna  pour  son 
anniversaire  5  s.  apprendre  sur  la  maison  sous  la 
Boucherie,  qui  fut  à  Herbert  de  Rougemont,  père  de 
ladite  Issabeau.  Le  môme  jour  1359,  mort  de  Guiot 
Bouchart,  qui  a  donné  5  s.  sur  sa  grange  et  sa  terre 
de  Cholet,  dont  Issabelle  sa  fille  tient  un  quart  ;  Jean 
dit  Buchart  son  fils  un  autre  quart,  Guillemille  sa  fille 
un  autre  quarts  et  Bonne  sa  fille  un  autre  quart.  Ledit 
Jean,  dit  Buchart,  et  nommé  plus  bas  dans  le  môme 
article  Jean  Boussart,  frère  de  Bonne,  fille  dudit  Guiot 
et  frère  de  Guillemette. 

{îl  août).  —  Au  3  des  ides  d'aoust  1268,  jour  de 
S.  Laurent,  mort  de  Gillet^  dit  Seignoret. 

{i9  août).  —  Au  14  des  calendes  de  septembre, 
vers  1340,  obit  de  Marguerite,  femme  de  Gautier 
Seignoret. 

{1  sept.).  —  Le  jour  des  calendes  de  septembre 
1373,  le  mardi  après  la  Sainte  Croix,  mort  de  Jeanne 
de  Montaigu. 

{2  sept.).  —  Le  4  des  ides  de  septembre,  vers  1300, 
obit  de  Regnaud  d'Angeliers,  chevalier. 

{24  sept.).  —  Le  8  des  calendes  d  octobre  1404,  de 
Guillaume,  dit  Buchart,  qui  a  donné  8  s.  de  rente  sur 
le  manage  de  sa  grange  et  sur  sa  vigne  tenant  à  celle 
de  Michel  Boicheron. 


—  163  — 

{S8  sept,).  —  Le  4  des  calendes  d'octobre  1372, 
mort  de  Guillemette,  fille  de  Gui  Buchart.  Elle  et 
Jean,  dit  Goyon,  son  mari  ont  donnée  une  pièce  de 
terre  au  chemin  de  Druye,  tenante  à  Bonne,  fille  de 
Guiot  Buchart,  pour  leurs  anniversaires  et  celui  ^'Issa- 
beau  leur  fille. 

{29  sept.).  —  Le  3  des  calendes  d'octobre  1378, 
mort  de  Mary  on,  femme  de  Tasquin  de  S.  Orner,  qui 
adonnée  une  rente  sur  sa  vigne  à  Baugy,  tenant  & 
Pierre,  dit  RaiSart,  et  à  Guillaume,  dit  Buchart. 

{6  oc  t.).  —  Le  2  des  nones  d'octobre,  vers  1300, 
anniversaire  d'Agnès  de  Paroy. 

(7  oct.).  —  Le  jour  des  nones  d'octobre  1343,  mourut 
Catherine  de  Billy,  abbesse  de  Crisenon,  pour  l'anni- 
versaire de  laquelle  n.  h.  Gautier  de  Billy,  écuier, 
vicomte  de  Clamecy,  son  neveu,  fit  une  donnation. 

{2ï  oct.).  —  Le  12  des  calendes  de  novembre  1416, 
mort  de  Jean  Odeneau  (Odenelli),  qui  a  donné  au  cha- 
pitre de  Clamecy  20  s.  tournois,  tant  pour  son  anni- 
versaire que  pour  celui  de  Marie,  sa  femme,  de  rente 
apprendre  sur  la  moitié  de  la  dime  d'Arcy.  Ladite 
Marie,  sa  femme,  mourut  le  jour  des  octaves  de 
S.  Martin  d'hiver. 
Il  est  marqué  en  marge  que  ladite  dime  appartient 
.  a  presant  au  chantre  et  au  chapitre  de  Clamecy, 
comme  appert  par  lettre  qui  sont  au  trésor  dudit 
chapitre,  moyennant  quoi  les  héritiers  dud.  Jean 
Odeneau  sont  demeurés  quittes  des  2  s.  de  rente. 

(Fol.70,v**)      (26  oct.).  —  Le  7  des  calendes  de  novembre  1362, 

obit  d'Isabeau,  fille  de  feu  Gui  Buchart. 


—  164  - 

{26  oct.),  —  Le  7  des  calendes  de  novembre  1324, 
mort  de  Bienvenue,  femme  de  Guillaume  Buychard. 
Le  môme  jour,  1361^  obit  de  Issabeau,  femme  de  Jean 
Buchard,  qui  a  donné  5  s.  de  rente,  laquelle  et  du 
par  ses  héritiers.  Le  môme  jour,  anniversaire  de 
Hugues,  dit  Boussart,  et  de  Hugues,  dit  Boussart,  son 
père,  pour  lesquels  ledit  Hugues,  dit  Boussart  fils,  a 
donné  au  chapitre  11  s.  3  d.  de  rente  à  Gaver oche 
{apud  cavam  ruppam) ,  scavoir  :  sur  un  pré  au  finage 
dud.  lieu  tenant  au  pré  de  Jean  de  Dormeaulx,  écuier, 
et  de  Jean  Odeneau  (Odenelli),  comme  appert  par 
lettre  sur  ce  fait  le  jeudi,  jour  S.  Verain,  1419  (orig,). 

{4  nov.).  —  Le  2  des  ides  de  nov.  1262,  anniversaire 
de  Hugonel  Florence,  de  sa  femme  et  de  Robert,  leur 
fils,  clerc,  qui  ont  donnés  10  s.  de  rente  que  doit 
Gautier  Buchart. 

{18  nov.).  —  Le  14  des  calendes  de  décembre  1417, 
mort  de  Marie,  veuve  de  feu  Jean  Odeneau  (Odenelli)^ 
laquelle  a  donnée  au  chapitre  de  Clamecy  20  s.  tour- 
nois de  rente,  scavoir  10  s.  pour  l'anniversaire  de  Jean 
de  Paroy ,  son  ayeul,  et  10  s.  pour  Marie  et  Jeanne,  ses 
filles,  apprendre  sur  la  moitié  de  la  dime  d'Àrcy,  qui 
a  esté  assigné  au  finage  du  Clos  Clainose,  comme  il  a 
été  dit  ci-dessus  du  12  des  calendes  de  novembre,  où 
il  a  esté  question  dudit  Jean,  son  mari. 

[20  nov.).  —  Au  12  des  calendes  de  décembre, 
mourut  Jean  de  Paroy,  pour  lequel  Marie,  veuve  de 
feu  Jean  Odeneau,  a  donné  au  chapitre  de  Clamecy 
10  s.  tournois  de  rente  sur  la  moitié  de  la  dime  d'Arcy , 
au  finage  du  clos,  comme  il  est  dit  ci-dessus  au  14  des 
calendes  de  décembre. 


—  165  - 

{2i  nov.).  —  Au  11  des  calendes  de  décembre,  mort 
de  n.  n.  filles  de  feu  Jean  Odeneau,  pour  lesquelles 
Marie,  leur  mère,  a  donnée  au  chapitre  de  Clamecy 
10  s.  de  rente  sur  la  moitié  de  la  dime  d'Arcy,  comme 
il  est  dit  au  14  des  calendes  de  décembre. 

(25  nov.).  —  Au  7  des  calendes  de  décembre  1301, 
morte  de  Rose,  femme  de  Jean,  dit  Buchart. 

{4  déc).  —  Le  2  des  nones  de  décembre  1330, 
morte  d'Emenjard,  dite  Bourgeoise,  femme  de  Phi- 
lippe de  Rougemont,  et  fille  de  feue  Guillaume,  dit 
Regnoart,  laquelle  a  donnée  une  rente  sur  une  vigne 
tenant  à  Michel  Boicheron  et  à  Jean  Belin. 

LÉON  MIROT. 


—  166  — 


PROMENADE  ARCHÉOLOGIQUE 


COSNE,  SAINT -PÈRE,   SAINT -LAURENT 
SAINT-VERAIN  &  ENVIRONS 


PREMIÈRE  PARTIE 


COSNE 


SaintrJacques.  ~  Saint-Agnan.  —  Les  Forges.  —  Les  Augustins. 
Le  Château.  —  Notre-Dame-de-Galles.  —  Le  palais  épiscopal. 
—  Vieilles  maisons. 

Dans  ses  séances  de  mars  et  avril,  alors  que  les 
rigueurs  d'un  hiver  particulièrement  désagréable  et 
prolongé  favorisaient  l'évocation  de  jours  meilleurs,  la 
Société  nivernaise  décidait  ime  exploration  archéolo- 
gique sous  la  conduite  de  son  vice-président,  M.  de 
Flamare,  qui  connaît  si  bien  son  Nivernais  antique  et 
moyenâgeux  ;  nous  le  savions,  mais  nous  en  avons  eu, 
à  cette  nouvelle  occasion,  des  preuves  qui,  pour  être 
superflues,  n'en  ont  pas  moins  été  parfois  fort  piquantes. 
C'est  ici  un  curé  qui  a  la  prétention,  généralement  jus- 
tifiée, il  faut  en  convenir,  de  bien  connaître  son  église  ; 
là,  c'est  le  propriétaire  ou  l'habitant  d'une  maison  du 
temps  passé;  en  ville  surtout,  car  le  paysan  préfère 
observer  à  distance  et  en  silence,  c'est  un  voisin  ou  un 
passant  qui,  voyant  des  messieurs  le  nez  en  l'air,  et 
plein  de  pitié  pour  leur  ignorance  extrême,  car  ce  sont 


Coma.  —  Ssint-J)cques 


Group*  an  bois  sctilpU  (égli»  da  Cours] 


—  167  - 

sans  doute  des  étrangers  puisqu'ils  ne  sont  pas  d'ici, 
leur  offre  avec  une  libéralité  sans  bornes  le  secours 
de  ses  lumières.  Or,  quand  les  uns  ou  les  autres,  les 
premiers  surtout,  avancent  une  allégation  ou  une 
hypothèse  un  peu  hasardeuse  et  qu'ils  se  les  enten- 
dent contredites  ou  rectifiées  avec  une  placide  cour- 
toisie, mais  avec  une  netteté  parfaite,  il  y  a  quelque- 
fois des  jeux  de  physionomie  curieux  à  observer,  car 
un  archéologue  n'est  pas  tenu  de  borner  son  attention 
aux  vieilles  pierres,  surtout  lorsqu'il  est  en  déambu- 
lation. 

L'excursion  commença  sous  d'heureux  auspices  ;  le 
temps,  détestable  encore  la  veille,  était  charmant,  et 
digne  des  premiers  jours  de  mai  ;  un  seul  reproche 
put  lui  être  fait,  celui  de  n'avoir  pas  persisté  davantage 
dans  ses  bonnes  dispositions.  Vers  dix  heures,  nous 
arrivons  à  Cosne,  sans  avoir  négligé  les  beaux  paysages 
de  la  route,  ni  sans  avoir  salué  au  passage  les  lieux 
intéressants,  un  instant  entrevus,  et  où  l'on  se  promet 
de  s'arrêter  un  jour.  Que  de  projets  de  la  sorte  se  sont 
envolés  dans  les  fumées  de  la  locomotive  I 

II  n'est  peut-être  pas  indispensable  d'ébaucher  ici 
l'histoire  de  Cosne,  ce  qui  reviendrait  par  à  peu  près 
à  écrire  un  paragraphe  de  guide  Jeanne  ;  qu'il  nous 
suffise  de  constater  qu'elle  est  d'une  antiquité  capable 
de  satisfaire  l'archéologue  le  plus  exigeant  puisqu'elle 
est  mentionnée  dans  l'itinéraire  d'Antonin,  cette  sorte 
de  livre  de  poste,  quelque  chose  comme  nos  indica- 
teurs de  chemins  de  fer,  qui  donnait  le  tableau  des 
stations  et  des  étapes  de  l'empire  romain  vers  le 
rv«  siècle. 

Cosne  tire  son  nom  du  celtique  Condate  qui  veut 
dire  confluent  d'après  MM.  de  Soultrait  et  de  Flamare, 
appuyés  sur  l'autorité  de  Jules  Quicherat  et  d'Arbois 
de  Jubainville  ;  mais,  d'après  d'autres,  coin  de  terre, 


—  168  — 

parce  que  la  ville  forme  en  effet  un  angle  compris 
entre  le  Nohain  et  la  Loire.  Du  reste,  au  fond,  la 
différence  n'est  pas  si  grande  et  réside  en  ce  qu'on 
envisage  ou  la  cause  ou  l'effet  ;  le  confluent  détermine 
un  angle,  et  l'angle  est  formé  par  la  rencontre  des  deux 
cours  d'eau  ;  dans  l'un  et  l'autre  cas,  le  nom  est  des- 
criptif du  lieu.  M.  de  Soûl  trait  note  Condida  vers  600, 
Villa  Condita  super  Jlumum  Ligerim  en  849,  Cona, 
Canada,  Castellania  Conade  en  1157,  Li  Chatiau  de 
Cône  en  1250,  Villa  Conade  en  1263,  Conne-sur-Loire 
en  1403,  enfin  exactement  l'orthographe  actuelle,  Cosne- 
sur-Loire  dès  1469.  Sur  cette  question  d'étymologie 
et  les  points  litigieux,  ou  simplement  douteux,  qu'elle 
peut  soulever,  le  dernier  mot  doit  être  laissé  à  un 
spécialiste  éminent,  notre  collègue,  M.  l'abbé  Meunier  ; 
nous  serait-il  permis  de  lui  rappeler  qu'à  lune  des 
dernières  séances  le  président  lui  demandait  de  fixer 
les  éty mologies  des  chefs-lieux  de  cantons. . .  pour  com- 
mencer ? 

L'entrée  de  Cosne  est  celle  d'une  petite  ville  ;  l'aspect 
se  relève  très  sensiblement  lorsqu'on  arrive  dans  la 
rue  où  se  dresse  la  tour  Saint-Jacques  et  à  l'extrémité 
de  laquelle  se  trouve  Saint-Agnan. 

En  1020,  Hugues  de  Châlon,  évoque  d'Auxerre, 
faisait  construire  à  Cosne  ime  église  Saint-Laurent  : 
«  Après  avoir  restauré  à  Varzy  l'église  de  Sainte- 
Eugénie,  disent  les  auteurs  de  la  Gallia  christtana,  il 
y  établit  deux  chanoines  et  leur  procura  les  ressources 
nécessaires  ;  il  attribua  aussi  à  des  chanoines  l'église 
construite  à  Cosne,  sous  le  vocable  de  saint  Laurent, 
dans  l'enceinte  du  château  épiscopal  ». 

Dans  la  suite,  on  érigea  un  titre  paroissial  sous  le 
vocable  de  Saint- Jacques  le  Majeur  ;  la  paroisse  fut 
réimie  au  chapitre  en  1486,  qui  pourrait  bien  être  la 
date  de  la   construction  de  l'église  actuelle^    et  le 


I 


»  —  169  ^ 

chantre,  chef  du  chapitre,  fut  le  curé  primitif.  Il  était 
naturellement  à  la  nomination  de  l'évoque  d'Auxerre. 
La  collégiale  de  Saint-Laurent,  qui  comptait  primitive- 
ment douze  chanoines,  puis  dix,  par  suite  de  Tinsuffi- 
sance  des  revenus,  nisi  necessaria  mendicarent,  n'en 
avait  plus  que  trois  à  la  Révolution  :  le  chantre-curé, 
le  trésorier  et  un  chanoine  :  tresfaciunt  capitulum.  Le 
chantre-curé  se  nommait  Pyrent,  et  l'un  des  bons 
patriotes  de  l'époque  s'exprimait  en  ces  termes  sur  son 
compte  :  «  Pyrent  est  prêtre  ;  je  l'ai  toujours  vu  agir 
comme  un  bon  patriote  ;  ses  discours  étaient  dans  le 
même  sens  ;  mais^  en  mon  àme  et  conscience,  je  le 
regarde  comme  un  aristocrate  et  un  fanatique...  »,  et 
Pyrent,  sur  cette  singulière  dénonciation,  fut  envoyé 
à  l'échafaud.  Ames  sensibles  et  consciences  étrange- 
ment délicates  I  II  est  des  moments  où  la  défense  répu- 
blicaine a  de  bien  cruelles  exigences  1 

M.  de  Flamare  attire  notre  attention  sur  ce  qu'il  y 
a  de  plus  remarquable  dans  la  façade,  à  savoir  la  sin- 
gulière disposition  de  la  partie  supérieure  du  pignon  : 
«  C'est  une  plate-forme  qui  s'avance  en  encorbellement 
au-dessus  de  la  façade,  sur  un  plan  demi-octogonal, 
entourée  d'une  balustrade  découpée  à  jour  qui  lui 
donne  l'apparence  d'une  chaire  à  prêcher.  On  y  accède 
par  un  escalier  qui  suit  le  rampant  nord  du  pignon. 
Cet  édicule  a  pu  servir  de  loge  au  veilleur  ;  cependant 
la  vue  est  masquée  du  côté  sud  par  la  lourde  tour  de 
l'église  ». 

La  partie  la  moins  connue  de  l'église  Saint- Jacques, 
est,  évidemment,  le  caveau  situé  sous  la  chapelle  des 
fonts  baptismaux,  puisque  le  souvenir  en  avait  à  peu 
près  disparu  jusqu'en  1845,  date  à  laquelle  M.  l'abbé 
Violette,  curé  de  la  paroisse,  en  fait  une  légère  men- 
tion, mais  sans  y  attacher  autrement  d'importance. 
Ce  ne  fut  qu'en  1885,  qu'un  ouvrier,  ayant  perforé  le 


-  170  —  ♦ 

dallage,  laissa  tomber  le  mètre  qu'il  avait  introduit 
dans  l'ouverture  pour  se  rendre  compte  de  la  profon- 
deur et  enleva  le  pavement  dans  le  seul  but  que  son 
instrument  ne  fût  pas...  perdu.  Le  mot  dont  il  se 
servit  fut  un  peu  plus  vif  et  tel  que  pouvait  le  justifier 
le  dépit  ressenti  à  voir  son  mètre  échapper  à  ses 
mains  et  disparaître  dans  le  vide  mystérieux. 

Telle  est  la  circonstance,  toute  fortuite,  qui  permit 
de  découvrir  le  caveau  qui,  depuis  lors,  est  retombé 
dans  son  obscurité  première.  C'était  donc  une  attrac- 
tion que  ne  pouvait  négliger  le  chef  de  l'expédition, 
qui  s'enquit  auprès  du  sacristain  de  la  possibilité  d'une 
descente  dans  le  réduit  abandonné.  «  Il  y  aurait  tout 
de  môme  moyen,  lui  fut-il  répondu,  mais  l'entrée  est 
occupée  par  un  loriot  que  plusieurs  hommes  peuvent 
seuls  déplacer^  ainsi  que  la  couverture  d'ailleurs  ». 
M.  de  Flamare,  homme  circonspect^  n'insista  pas,  ni 
personne  de  l'assistance  ;  mais,  au  sortir  de  l'église, 
l'examen  des  lieux  nous  fit  constater  que  le  fameux 
loriot,  qui,  nous  en  avons  tous  fait  l'aveu  ultérieure- 
ment, avait  exercé  notre  imagination  pendant  tout  le 
cours  de  la  visite,  n'était  autre  qu'un  magnifique  lau- 
rier apporté  pour  la  décoration  de  l'église  à  l'occasion 
des  cérémonies  de  la  confirmation.  Il  fut  convenu  que 
des  hommes  seraient  mandés  pour  faire  le  nécessaire 
et,  le  lendemain  matin,  en  efiet,  la  partie  la  plus  aven- 
tureuse des  excursionnistes  pénétra  dans  le  gouffre 
béant. 

Le  principal  intérêt  de  ce  caveau  consiste  en  une 
peinture  qui  orne  la  voûte  ;  elle  est  d'une  bonne  exé- 
cution, dans  \m  état  satisfaisant  de  conservation  et 
porte  tous  les  caractères  de  la  fin  du  xv«  siècle.  Dans 
un  quadrilobe  formé,  aux  angles,  d'arcs  brisés  séparés 
par  la  pointe  d'un  carré  posé  en  losange,  le  Christ 
assis  bénit  de  la  main  droite,  tandis  que  son  genou 


—  171  — 

supporte  la  boule  du  monde  sur  laquelle  s'appuie  la 
main  gauche.  A  l'entrée  des  angles  du  quadrilobe,  les 
attributs  des  quatre  évangélistes  sont  représentés  en 
môme  temps  que  les  personnages  sont  désignés  par 
leur  nom  latin  sur  des  phylactères,  en  belles  lettres 
gothiques.  La  figure  du  Christ,  regardant  le  couchant, 
fait  face  aux  visiteurs  qui  entrent  dans  le  caveau  par 
le  côté  du  levant,  car  il  existe  une  porte  à  chacune  des 
deux  extrémités  du  caveau,  et  le  sens  de  la  fresque 
établit  que  l'entrée  du  levant  était  la  plus  usitée  parce 
que  seule  elle  permet  de  contempler  le  Christ  dans  sa 
situation  normale  et  de  lire  à  la  manière  accoutumée, 
et  non  pas  à  l'envers^  le  nom  des  évangélistes.  De  cette 
disposition,  il  faut  conclure,  non  seulement  que  la 
porte  du  levant,  qui  communiquait  avec  l'extérieur  par 
le  mur  latéral  de  l'église,  était  devenue  le  passage 
ordinaire,  mais  encore  que  l'autel  se  trouvait  un  peu 
au-devant  de  la  peinture,  et  non  adossé  à  la  muraille, 
car  de  ce  fait  eût  été  condamné  l'escalier  du  couchant 
qui  aboutit  dans  la  clôture  des  fonts  baptismaux.  Ces 
différents  points,  soigneusement  déduits  par  M.  le 
chanoine  Sery,  ont  leur  intérêt  puisque  cette  partie 
souterraine  de  Saint-Jacques  n'avait  jamais  encore 
été  examinée,  et  que  son  existence  môme  était  vague- 
ment connue. 

L'église  Saint-Jacques  possède  deux  souvenirs  pré- 
cieux de  la  chartreuse  de  Bellary,  ou  Belle-Demeure, 
Bellum  laricum  in  bosco  (1),  l'un  des  trois  monas- 
tères fondés  en  1219  par  Hervé  de  Donzy  comme  prix 

(1)  Telle  est  bien,  à  n'en  pas  douter,  l'étymologie  ;  mais,  puisque  nous 
sommes  en  promenade,  par  conséquent  en  récréation,  pourquoi  ne 
citerais-je  pas  Fexplication  fantaisiste  que  Ms*"  Crosnier  n'a  pas  craint  de 
rapporter  lui-même  au  grave  congrès  archéologique  de  France,  en  1851  : 

«  Bellary,  comme  je  l'ai  dit,  était  un  des  établissements  fondés  par 
Hervé  en  réparation  de  la  faute  qu'il  avait  commise.   Permettez -moi, 


—  172  - 

des  dispenses  obtenues  du  pape  Innocent  III  pour  la 
régularisation  de  son  mariage  avec  sa  parente  au  degré 
prohibé,  Mahaut,  fille  de  Pierre  de  Courtenay,  qui  lui 
avait  apporté  en  dot  le  comté  de  Ne  vers  et  en  espé- 
rances ceux  de  Tonnerre  et  d'Auxerre.  Notons,  en 
passant,  le  rôle  bienfaisant  des  Souverains  Pontifes 
qui,  en  favorisant  ou  en  prescrivant  les  fondations  de 
monastères  en  ces  temps  de  dissensions  intestines, 
n'avaient  d'autre  but  que  de  multiplier  les  refuges 
munis  du  droit  d'asile  et  de  mettre  un  frein  aux  exi- 
gences d'un  vainqueur  trop  souvent  impitoyable. 

Les  stalles  de  Beaumont-la-Ferrière  proviennent, 
paralt'il,  de  Bellary;  c'est  en  tout  cas  l'origine  du 
maltre-autel  de  Saint- Jacques  qui  est  fort  remarquable  ; 
il  est  en  forme  de  tombeau  antique  avec  inscrustations 
de  marbres  variés  et  précieux  ;  sur  le  devant  se  détache 
un  cartouche  en  forme  d'écusson  en  style  du  commen- 
cement du  xvm*  siècle  ;  il  figure  une  urne  cinéraire 
enveloppée  de  deux  palmes,  l'une  de  laurier  et  l'autre 
de  lys,  symboles  de  la  pureté  et  de  la  victoire  par  le 
sang.  Le  tabernacle  est  entouré  de  colonnettes  de 
marbre  supportant  une  coupole  ;  on  remarque  parti- 
culièrement le  groupe  d'anges  en  marbre  blanc  qui 


mesneors,  de  rapprocher  une  légende  populaire  du  trait  d'histoire  que 
vous  venez  d'entendre. 

•  Mahaut,  disent  les  gens  du  pays,  vivait  avec  Hervé  sans  avoir  fait  bénir 
son  mariage  par  l'Eglise  ;  mais  souvent  elle  était  triste  et  des  larmes 
abondantes  inondaient  son  visage,  car  son  crime  était  toujours  présent 
devant  ses  yeux.  Souvent  Hervé  lui  avait  demandé  la  cause  de  sa  tristesse 
et  de  ses  larmes,  le  silence  était  sa  seule  réponse.  Un  jour,  qu'il  la  voyait 
plus  triste  que  de  coutume,  il  lui  fit  de  nouvelles  et  plus  pressantes 
instances  ;  Mahaut  finit  par  lui  rappeler  l'invalidité  de  leur  mariage.  Le 
comte,  pour  la  consoler,  lui  promit  de  demander  au  Souverain  Pontife  la 
dispense  nécessaire,  alors  la  heUe  a  ri,  et  le  nom  de  Bellary  fut  donné 
au  monastère  dans  le  lieu  même  où  la  belle  avait  ri.  Sans  doute,  comme 
vous,  je  me  garderai  d'admettre  cette  étymologie  ;  cependant  nous  devons 
remarquer  que  la  légende  le  rapproche  beaucoup  de  l'histoire  •. 


—  173  — 

forme  la  partie  antérieure  du  couronnement.  Le  taber- 
nacle est  lui-môme  surmonté  de  têtes  d'anges  d'une 
exécution  extrêmement  délicate  et  gracieuse. 

Cet  autel  fut  acheté  par  la  fabrique,  en  1804,  pour 
une  somme  de  900  fr.,  de  M.  Petit  de  Touvenay, 
deuxième  acquéreur  des  biens  du  couvent. 

M.  l'Archiprêtre  actuel  a  reçu  des  offres  très  impor- 
tantes, mais  il  a  refusé,  à  juste  titre,  de  démunir  son 
église  d'un  souvenir  aussi  précieux.  L'autel  fut  posé 
en  1804,  vers  les  fêtes  de  la  Pentecôte,  par  un  sieur 
Queneau,  mécanicien  et  organiste,  en  remplacement 
d'un  autel  fort  délabré  et  dont  on  avait  dissimulé  la 
laideur  sous  des  tapisseries  tendues  sur  le  devant. 

Un  autre  souvenir  de  la  chartreuse  consiste  en  un 
calice  en  vermeil  du  xvii®  siècle,  auquel  l'intelligent 
clergé  de  la  paroisse  attache  justement  un  grand  prix 
et  qui  mérite  une  description. 

Le  calice  est  en  vermeil  ;  la  coupe,  évasée,  en  argent 
battu,  est  ornée  de  rayons  en  relief  alternativement 
droits  et  flamboyants.  Le  nœud  est  assez  gros  et 
godronné.  Le  pied  en  est  incontestablement  la  partie 
la  plus  remarquable. 

Des  rayons,  analogues  à  ceux  de  la  coupe,  semblent 
sortir  du  bas  de  la  tige  et  se  développent  jusqu'au  bord 
de  la  circonférence  inférieure  qui,  elle-même,  se  déta- 
che en  saillie  entre  huit  lobes  en  demi-cercle  formant 
\me  sorte  de  feston.  Sur  le  devant  du  calice,  entre 
deux  rayons  flamboyants,  un  cartouche  oblong,  dont 
les  angles  droits  sont  arrondis,  est  encadré  d'une  mou- 
lure demi-ronde;  il  renferme  la  scène  de  Jésus  en 
croix  entre  la  sainte  Vierge  et  saint  Jean,  debout. 
Dans  l'intervalle  de  tous  les  rayons,  sont  semées  régu- 
lièrement une  fleur  de  lys  héraldique  et,  plus  près  du 
bord,  une  rosace  à  cinq  feuilles,  sauf  dans  la  partie 
occupée  par  le  petit  tableau  du  Crucifiement.  Toute 


—  174  — 

cette  riche  ornementation  est  ciselée  en  relief.  Enfin, 
dans  les  huit  lobes  demi-circulaires,  sont  gravés  au 
trait  :  une  tête  de  vieillard  à  longue  barbe  et,  détail 
surprenant,  avec  des  ailes  largement  déployées  ;  deux 
goupillons  croisés  l'un  sur  l'autre  ;  un  cœur  surmonté 
de  trois  clous,  une  abeille,  \m  marteau,  des  tenailles, 
deux  dés,  ime  sorte  de  balai  (le  roseau  et  l'éponge  de 
la  Passion),  des  cierges  allumés. 

L'orfèvre  a  inscrit  son  nom  en  deux  endroits  : 
1**  sous  la  tige,  à  l'extérieur  du  rebord  qui  couvre  la 
vis  ;  2^  sur  le  pied  où  il  se  joint  à  la  tige  ;  il  se  nomme 
Chrétien.  A  la  seconde  signature,  il  a  ajouté  les  lettres 
I.  E.  P. 

Les  dimensions  du  calice  sont  les  suivantes  :  hau- 
teur totale,  0"  20  ;  hauteur  de  la  coupe,  0°*  07  ;  dia- 
mètre de  la  coupe,  0°*093. 

Terminons  notre  visite  à  Saint-Jacques  par  quelques 
particularités  qui,  elles  non  plus,  n'ont  pas  encore  été 
relevées.  La  clé  de  voûte  de  l'abside  représente  les 
armes  de  France  en  grandes  proportions  ;  on  Ta  sauvée, 
pendant  la  Révolution,  en  la  dissimulant  dans  un 
gâchis  de  plâtre.  La  clé  de  voûte  de  la  chapelle  située 
derrière  les  stalles  est  mobile,  ainsi  que  nous  le  fait 
constater,  en  la  secouant  véhémentement,  le  sacristain 
au  loriot,  qui  paraît  connaître  à  fond  son  église  et  s'y 
intéresse  intelligemment  :  elle  représente  le  Père  Eter- 
nel coiffé  de  la  tiare  (fin  du  xv«  siècle).  Cette  clé  de 
voûte,  ainsi  que  deux  de  celles  de  la  nef,  de  môme 
modèle  et  peintes  également,  proviennent  de  la  cha- 
pelle de  Notre-Dame-de-Galles  et  sont  d'autant  plus 
précieuses  que  plus  rares  sont  les  vestiges  de  cet  inté- 
ressant monument. 

En  sortant  de  Saint-Jacques,  un  spectacle  nous 
attend  qui  n'est  dépourvu  ni  de  pittoresque,  ni  d'inté- 
rêt :  c'est  mercredi,  jour  du  marché  â  Cosne,  et  nous 


-  175  - 

avons  devant  les  yeux  les  habitants  des  campagnes 
d'alentour  avec  les  denrées  et  produits  qu'ils  sont 
venus  vendre  à  la  ville  ;  ce  qui  me  frappe  tout  d'abord, 
c'est  la  couleur  à  peu  près  uniformément  blanche  des 
volailles,  alors  que  nos  poules,  à  Ne  vers  et  dans  les 
environs,  sont  généralement  noires.  Un  proverbe  latin 
cite  le  poulet  blanc  comme  le  type  achevé  de  l'orgueil 
et  de  l'arrogance  : 

Gallinœjilius  albœ. 

Ce  dicton  n'est  assurément  pas  d'origine  gallo- 
romaine  des  environs  de  Cosne,  car  ici  les  fils  de 
poules  blanches  ne  peuvent  se  targuer  de  cette  descen- 
dance comme  d'une  distinction;  ils  constituent  au 
contraire  le  profanum  vulgus. 

Après  avoir  traversé  le  marché,  nous  avons  une 
échappée  ravissante  sur  la  vallée  du  Nohain  et,  après 
s'être  attardé  un  instant  à  s'en  rafraîchir  la  vue  depuis 
le  pont  du  Dimanche,  on  aperçoit  bientôt  sur  sa  gau- 
che la  belle  abside  de  Saint-Agnan,  qui  donne  un 
grand  aspect  de  noblesse  à  ce  modeste  quartier. 

L'historien  Nitard,  petit-fils  de  Charlemagne,  retiré 
à  Cosne  où  il  écrivait  en  843,  parle  d'une  église  Sancti 
Frodualdi,  qui  a  dû  être  remplacée  par  Saint-Agnan, 
ancienne  église  d'un  prieuré  de  l'ordre  de  Cluny,  qui 
date  du  xip  siècle,  a  été  remaniée  au  commencement 
du  xvi«,  enfin  en  partie  reconstruite  après  un  incendie 
en  1738.  Le  récit  de  ce  désastre,  fait  au  moment 
même,  mérite  d'être  reproduit  ;  M.  de  Flamare  l'a 
relevé  dans  les  registres  paroissiaux  de  Saint-Agnan, 
déposés  à  la  mairie  de  Cosne  :  «  Le  mesme  jour,  troi- 
siesme  mars  1738,  à  quatre  heures  et  demie  du  matin, 
nous  avons  eu  la  douleur  de  voir  la  ruine  entière  de 
notre  église,  qui.  a  péri  par  le  poids  immense  du  clo- 
cher qui  étoit  entre  le  chœur  et  la  nef,  qui  a  fait 


—  176  — 

écrouler  les  piliers.  Cette  église  étoit  du  vf  siècle  ;  le 
clocher  avait  été  brûlé  en  1626,  les  cloches  fondues. 
Aujourd'huy,  dans  la  chute  du  clocher,  de  quatre 
cloches  qui  y  étoient,  il  n'y  en  eut  qu'une  cassée  ;  les 
baïis  de  l'église,  qui  lui  faisoient  une  rente  d'environ 
50  livres,  ont  été  entièrement  écrasez  avec  les  stalles 
du  chœur,  jxae  chaire  toute  neuve,  les  tableaux  des 
autels,  les  autels  mesmes,  les-  bastons  des  confrairies 
du  Saint-Sacrement,  de  Saint-Eloy  et  de  Saint- 
Hubert,  en  un  mot,  tout  a  péri,  exceptez  le  rétable,  le 
tabernacle  et  la  sacristie,  que  Dieu,  par  sa  miséri- 
corde,  nous  a  conservez.  Cette  église,  en  réparations 
depuis  1718,  avait  coûté  jusqu'à  ce  jour  dix  mille 
livres  d. 

Bien  que  les  proportions  de  l'édifice  ne  soient  pas 
considérables,  l'abside  romane  a  fort  grand  air  ;  à 
l'autre  extrémité,  le  portail ,  qui  s'ouvre  sous  un 
porche,  est  extrêmement  curieux  ;  parmi  les  sujets 
sculptés  dans  les  bandeaux  cintrés  qui  le  composent, 
on  voit,  côte  à  côte  avec  de  saints  personnages,  un 
basilic,  un  aigle,  un  âne  jouant  de  la  harpe,  une 
brebis  et  des  agneaux ,  un  porc,  une  tortue,  une 
colombe  à  tête  humaine,  etc.. 

A  l'intérieur,  plusieurs  bons  tableaux  et  notam- 
ment des  portraits  de  religieuses  bénédictines  des 
xvn®  et  xvin®  siècles,  sans  doute  des  prieures  du  cou- 
vent établi  à  Saint- Agnan,  par  Mgr  Pierre  de  Broc 
(1640-1671).  Citons  aussi  l'apparition  du  cerf  à  saint 
Hubert,  dont  la  confrérie  est  mentionnée  plus  haut, 
et  qui  se  trouve  dans  le  même  état  de  délabrement 
où  l'a  mis  l'incendie  et  l'effondrement  de  1738. 

Une  maison  tout  flamblant  neuf,  située  en  face  de 
l'abside,  porte  bizarrement  encastrée  une  console  de 
la  fin  du  XV®  siècle,  représentant  un  écusson  tenu  par 
deux  anges  et  portant  trois  aumônières  carrées  avec 


Abside  de  Saint-Agnan  i  Cosna 


—  177  — 

une  fleur  de  lis  ;  on  a,  certes,  bien  fait  de  sauver  ce 
vestige  d'une  construction  autrefois  élevée,  semble-t- 
il,  sur  le  môme  emplacement,  mais  la  disposition  est 
étrange.  Non  moins  étrange,  le  nom  de  la  ruelle  voi- 
sine :  petite  rue  Folâtre  I 

En  quittant  l'église  Saint- Agnan,  nous  descendons 
sur  la  Loire  et  nous  longeons  ces  magnifiques  bâti- 
ments que  visita  Mme  de  Sévigné  alors  qu'ils  étaient 
en  pleine  activité  :  «  Hier  soir,  à  Cosne,  écrit-elle  à 
sa  fille,  le  1*'  octobre  1677,  nous  allâmes  dans  un 
véritable  enfer  ;  ce  sont  les  forges  de  Vulcain  ;  nous 
y  trouvâmes  huit  ou  dix  cyclopes  forgeant  non  pas 
les  armes  d'Ënée,  mais  des  armes  pour  les  vaisseaux. 
Jamais  vous  n'avez  vu  redoubler  des  coups  si  justes 
ni  d'une  si  admirable  cadence...  ».  C'est,  en  effet,  les 
ancres  qui,  pendant  deux  siècles,  furent  la  spécialité 
de  Cosne  ;  au  début,  on  y  fabriqua  aussi  des  canons, 
mousquets  et  autres  armes  ;  plus  tard,  c'est-à-dire  au 
commencement  du  siècle  dernier,  la  fonderie  à  fer  et 
à  acier  eut  une  vogue  immense.  «  Le  grand  monde, 
dit  M.  Corbier,  historien  des  forges  de  la  Chaussade, 
recherchait  ses  lustres,  candélabres ,  vases  à  fleurs, 
grilles,  balcons,   etc.  Ces  objets  d'art,  d'un  travail 
exquis,  produisaient  un  effet  admirable  par  le  brillant 
que  prend  l'acier  poli,  le  beau  bleu  qu'il  acquiert  par 
le  recuit,  la  couleur  d'eau  qu'on  lui  donne  avec  la 
pierre  sanguine,  et  que  relevaient  de  légers  et  gra- 
cieux filets  d'or.  Le  prix  très  élevé  des  ouvrages  de 
cette  fonderie  fut  la  cause  principale  de  sa  décadence  ; 
elle  tomba  avec  la  mode  qui  lui  avait  valu  ses  succès  ». 

Cette  incursion  dans  le  monde  industriel  ne  nous 
fait  pas  sortir  du  monde  ecclésiastique  ou  monastique 
en  dehors  duquel,  d'ailleurs,  aucune  œuvre  de  civili- 
sation ne  s'est  accomplie  dans  notre  pays.  Dès  le  com- 
mencement du  xu^  siècle,  les  religieux  de  Roches 

T.  n,  3*  série.  IS 


-  178  — 

possédaient  à  Cosne  des  chutes  d'eau  situées  devant  la 
tour  appelée  la  Fraite,  puis  la  Tour  Froide.  En  1212, 
ils  les  cédèrent  à  un  certain  Gaston  Balerme  sa  vie 
durant,  sous  la  condition  d'y  faire  construire  des 
moulins  qui,  après  lui,  feraient  retour  aux  moines 
et  qui  s'appelèrent  effectivement  les  Moulins-aux- 
Moines.  En  1660»  après  bien  des  changements  de  pro- 
priétaires, ils  furent  achetés  par  Elie  Grégoire  pour 
en  faire  une  manufacture  d'armes ,  celle  que  visita 
Mme  de  Sévigné,  et,  en  1734,  les  forges  de  Cosne 
furent  vendus  38,000  livres  à  divers,  parmi  lesquels 
Pierre  Babaud  de  la  Chaussade. 

Des  forges  et  des  bords  de  la  Loire  qui  sont  magni- 
fiques à  cet  endroit,  nous  rentrons  en  ville  et  le 
contraste  est  grand  ;  au  sortir  de  ces  vastes  horizons 
où  le  regard  se  perd  et  se  délecte,  voici  bien,  et  brus- 
quement, l'aspect  de  la  ville  tel  que  le  dépeint  d'un 
mot  le  bon  Gillet  des  annuaires  :  a  Excepté  la  rue  où 
passe  la  grande  route ,  qui  est  belle,  les  autres  sont 
étroites  et  tournoyantes  ». 

Voici  tout  d'abord  et  tout  près  les  Augustins.  Il  y 
y  avait  en  France  deux  congrégations  d' Augustins 
réformés  (fin  du  xiv**  siècle)  :  la  congrégation  de 
Bourges  et  celle  des  Augustins  déchaussés.  Les  pre- 
miers s'appelaient  Petits -Augustins  ou  Guillelmîtes, 
de  leur  fondateur  saint  Guillaume  de  Bourges;  ils 
avaient  trois  maisons  en  Nivernais  :  Saint-Pierre-le- 
Moûtier,  Prunevaux  et  Cosne.  Le  couvent  de  Cosne 
fut  fondé  en  1616  ;  on  y  instruisait  la  jeunesse  et,  de 
fait,  les  bâtiments  n'ont  pas  changé  de  destination, 
car  ils  sont  encore  occupés  actuellement  par  le  collège 
municipal.  Le  presbytère  Saint- Jacques  s'y  trouve 
également  ;  nous  y  trouvâmes  un  moment  d'agréable 
hospitalité,  ce  qui  nous  permit  d'admirer  une  superbe 
cheminée  du  xviP  siècle  qui  fait  revivre,  dans  le 


—  179  — 

salon  de  M.  l'Archiprêtre,  la  décoration,  un  peu  froide 
mais  majestueuse,  du  grand  siècle. 

La  maison  des  Augustins,  devenue  propriété  de 
l'Etat  à  la  Révolution,  fut  cédée  à  la  ville  de  Cosne, 
puis  vendue,  en  l'an  VI,  à  M.  Dageville  de  Marseille, 
acquéreur  de  biens  nationaux.  Elle  revint  de  nouveau 
à  la  ville  en  l'an  XI,  par  suite  d'un  échange  ;  la  muni- 
cipalité céda  en  retour  à  M.  Dageville  un  pré  qu'elle 
possédait  sur  les  bords  du  Nohain  et  qui  était  estimé 
10,000  fr. 

En  face  le  collège  et  le  presbytère  se  trouve  la  prison 
encastrée  dans  les  restes  du  château.  Cosne,  situation 
stratégique,  fut  fortifié  et  confié  à  la  garde  des  barons 
de  Donzy,  chargés  de  défendre  la  position  contre  les 
Normands  qui  suivaient  les  rives  de  la  Loire.  Plus 
tard,  il  fut  occupé  par  les  comtes  de  Nevers.  Ce  qu'il 
en  reste  offre  les  caractères  du  xiii®  siècle  ;  ils  consis- 
tent en  quelques  pans  de  murs  assez  élevés  et  trois 
tours.  Les  anciennes  fortifications  ont  laissé  encore 
quelques  restes  informes  sur  différents  points  de  la 
ville. 

En  continuant  à  pénétrer  dans  la  ville,  on  arrive  à 
ce  qui  subsiste  de  Notre-Dame-de-Galles  iCapella 
Nostre  Domine  de  Galles,  ainsi  qu'elle  est  nommée 
dans  un  règlement  donné  à  la  collégiale  Saint-Lau- 
rent, par  Ferry  Cassinel,  évoque  d'Auxerre),  monu- 
ment gothique  remarquable  et  situé  dans  l'enceinte  de 
la  ville,  dit  un  vieil  auteur.  Elle  fut  fondée  par  Wala, 
évoque  d'Auxerre,  de  873  à  879  ;  elle  fut  remaniée  et 
embellie  à  la  fin  du  xi®  siècle,  et  enfin  fut  restaurée, 
dans  sa  magnificence  définitive  en  1490,  par  l'évoque 
Jean  Baillet. 

Auprès  de  cette  chapelle,  l'évéque  Humbaut,  qui 
vivait  à  la  fin  du  xi®  siècle,  fit  bâtir  une  maison  épis- 
copale  que  son  successeur,  Hugues  de  Noyers,  trans- 


-  180  - 

• 

forma  en  véritable  palais.  Mais  bien  longtemps  aupa- 
ravant, les  évoques  possédaient  une  résidence  ;  alors, 
en  effet,  que  Cosne  ne  subsistait  encore  qu'à  Tétat 
embryonnaire,  en  850,  Héribalde,  trente-cinquième 
évoque  d' Auxerre,  donna  aux  chanoines  de  sa  cathé- 
drale, pour  la  dépense  de  leurs  vêtements,  les  quarante 
maisons  qui  entouraient  la  maison  de  plaisance  épis- 
copale,  Condidam  villam  super  JLuvium  Ligeris  sitam, 
avec  les  terrains  a  voisinants.  En  ce  qui  touche  le 
palais  épiscopal,  faut-il  en  voir  les  restes  dans  l'im- 
portant édifice  dont  on  voit  les  élégantes  fenêtres  du 
xiii^  siècle,  tout  près  de  Notre-Dame-de -Galles  ?  Ce 
n'est  qu'une  conjecture,  mais  elle  est  fort  vraisemblable. 
Le  quartier,  qui  répond  de  tous  points  à  la  description 
sommaire  de  Gillet,  offre  encore  quelques  maisons 
anciennes,  sur  lesquelles  l'œil  se  repose  avec  complai- 
sance. 

Je  terminerai,  en  ce  qui  concerne  Cosne,  par  la  nomen- 
clature des  revenus  que  les  évoques  y  possédaient  ; 
elle  est  peu  connue,  puisqu'elle  est  reléguée  dans  les 
annexes  d'un  vieil  ouvrage,  lui-môme  assez  peu 
répandu,  et  n'a  jamais  été  traduite  ;  il  ma  paru  bon 
d'en  donner  aussi  le  texte  original,  tant  pour  donner  un 
échantillon  du  latin  du  temps  et  du  lieu,  que  pour 
fournir  au  lecteur  la  possibilité  de  suppléer  à  l'insuf- 
fisance ou  à  l'inexactitude  de  la  traduction. 


F 


-  181  — 


Etat  du  revenu  de  Véoéché  d*Auxerre  vers  l'an  1290, 
tiré  d'un  volume  de  ce  tems-là,  conservé  dans  les 
archives  de  Véoéché  (1). 


Prœpositura  circa  cix  lib. 

EmenâsB  PrsepositurdB  in 
quibus  Dominas  habet 
medietatem  circa  x  lib. 

Tallia  de  rivo  ad  placitum 
circa  vj  lib  et  x  sol, 

Tallia  ad  placitum  de  ripa- 

ria  xiij    libras  xiij    sol. 

et  vj  den. 
Tallia  abonnata  viij.  lib  et 

xviij  sol. 
Magnus  census  viij  lib. 
Census  Rungefer  v  sol. 
Census    Fervelli    m  i  1  i  t  i  s 

xxvj.  sol. 
Census  chambellanarum  iv 

sol.  et  vj  den. 
Census  6{e  PaisselieresxiJ  s. 

et  vij  den. 


Prévôté ,  environ  109 
livres.  - 

Sur  le  prix  des  Prévôtés 
dont  la  moitié  revient 
au  seigneur  évoque , 
environ  10  livres. 

Taille  de  la  rivière,  i  ta 
volonté  de  l'évéque, 
environ  6  liv.  et  4  sol. 

Id.  13  liv.  13  sols  et 
6  deniers. 

Taille  fixe  8  liv.  et  18  s. 

Gros  cens  viij  liv. 

Cens  Rungefer  5  sol  (2). 

Cens  du  chevalier  Fré- 

veau. 

Cens  pour  les  charges  de 

chambellans  4  s.  et  6d. 
Cens  de  Paisselières,  17 

sols  et  7  deniers. 


(i)  Mémoires  concernant  VHUtoire  eccléiiastique  et  civile  éTAuxerre, 
par  11.  Vabhé  Lebœvf,  chanoine  et  sous-chantre  de  l'église  cathédrale  de  la 
même  ville,  de  TÂcadémie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  3  vol.  in-4*. 
—  A  Paris,  chez  Durand,  libraire,  rue  Saint-Jacques  ;  à  Saint-Landry, 
et  au  Griffon.  M  DGC  XLUI. 

(2)  Renaud  Rongefer,  firère  de  Gibaud  baron  de  Saint- Verain  ;  le  fils 
de  ce  Rongefer,  également  appelé  Renaud,  et  cousin  de  Hugues  baron 
de  Saint- Verain,  fut  la  souche  des  seigneurs  de  Sain^Pierre-du-Mout  et 
d'Asnois  ;  ils  firent  aux  abbayes  de  belles  donations. 


—  482  - 


Census  de  Villa-Catuli  xv 

lib.  et  X  sol. 
Stallagium  sive    Burgesia 

i  sol. 
In    crastinum    Nativitatis 

Domini  panis   et  vinum 

xl  sol. 
Gallindô  venditaB  circa  x  sol. 

Forestagium  xj  sol. 
VinsB  de  Conada  ix  sol. 

Pratum  subtus  stagnum 
xl  sol. 

Pratade  hastis  xl  sol. 

Portus  Conadaô  vlij  liv.  et 
X  sol. 

Portus  Auberici,  circa  Ixx 
lib. 

Furnus  Conadse  ix  sol. 

Furnus  de  Foro  xx  sol. 

Carnificeria  xv  lib. 

Sergenteria  boisseli,  circa 
xl  sol. 

Décima  vini  de  Conada, 
circa  i  lib. 

Molendina  de  Pree  xviij 
sext.  fromenti. 

Item  XXX  sext.  mouturae. 

Molendinum  Domini  Epis- 
copi  quod  tenent  Tem- 
plari,  j.  mod.  avenae  ad 
mensuram  de  Conada,  et 
debent  conducere  in 
horreo  Domini  Episcopi. 


Cens  de  Villechaud  15  1 . 
et  10  s. 

Droit  de  place  ou  de  ré- 
sidence 1  s. 

Pain  et  vin  pour  le  len- 
demain de  la  Nativité 
40  s. 

Sur  la  vente  des  poules 
environ  10  s. 

Fores  tage  11  sol. 
Vignes  de  Cosne  9  s. 
Pré  sous  l'étang  10  s. 

Pré  des  hastes  40  s. 
Port  de    Cosne   8   liv. 

10  s. 
Port     Aubery     environ 

70  liv. 
Four  de  Cosne,  9  sol. 
Four  du  marché  20  s. 

Boucherie  15  1. 

Offices  des  mesureurs  pu- 
blics environ  4  s. 

Dîme  du  vin  de  Cosne, 
environ  1  1. 

Moulins  de  Pree,  18  sep- 
tiers  de  froment. 

Id .  30  septiers  de  mouture . 

Moulin  du  Seigneur  Eve- 
que  occupé  par  les 
Templiers  ;  un  boisseau 
d'avoine  à  la  mesure 
de  Cosne,  rendu  dans 
le  grenier  de  l'Evêque. 


—  183  — 


Grangia  de  portu  Auberici 
j.  mod.  silig.  et  j.  mod. 
avense  ad  cumulum. 

Molendina  de  Petra  in  qui- 
bus  Dominus  Episcopus 
habet  medietatem,  valent 
vij  sext.  f rumen ti  et  di- 
mid.  frumenti,  et  sext.  dr 
dimid.  mouturaB. 

DecimsB  et  tertise  Villaô-Ca- 
tuli  et  ConaddB  circa  xxii j 
mod.  ij  mod.  frumenti 
videlicetxmod.  et  dimid. 
silig.  X  mod.  et  dimid. 
tam  ordei  quam  avense. 

Coustumse  natalis  Domini,  j 
mod.  avensB  ad  cumul. 

Item  coustumse  grangia- 
rum  juxta  stagnum  xiij 
sext.  avenaô. 

Apud  Villam-Catuli  sunt 
xviij  arpenta  vinearum 
qu8d  valent  cum  décima 
circa  xx  lib.  redditus. 

Pratorum  circa  iij  arpent. 
Item  ij  arpenta  ad  astes, 
unum  stagnum,  garanna, 

Nemus  juxta  garannam 
quod  vocatur  It  Foilleus, 
quod  vendi  potest  de  sex 
annis  in   sex  annos,   et 


Grange  du  port  Aubry 
1  mesure  de  seigle  et 
1  mesure  d'avoine. 
Moulins  de  Pierre  dont 
la  moitié  appartient  au 
Seigneur  Evoque  ;  ils 
valent  7septiers  1/2  de 
froment  et  10  septiers 
1/2  de  mouture. 
Les  dîmes  et  les  tierces 
de  Villechaud    et   de 
Cosne,  environ  22  me- 
sures de  froment,  c.-à- 
d.  10  mesures  1/2  et  10 
septiers  1/2  tant  d'orge 
que  d'avoine. 
Redevance  pour  Noôl  de 
l'Evoque,  1  muid  d'a- 
voine comble. 
Id.  redevances  des  gran- 
ges près  de  l'étang  13 
septiers  d'avoine. 
Prés  de  Villechaud  il  y  a 
18  arpents  de  vignes 
qui  valent  avec  la  dî- 
me environ  20  livres 
de  revenu. 
Environ    3    arpents   de 
prés.  Id.  2  arpents  aux 
hastes,  un  étang,  une 
garenne. 
Un  bois  près  delà  garenne, 
appelé  li  Foilleus  ;  la 
coupe  peut  se  faire  de 
six  en  six  ans  et  rap- 


—  484  — 


valet    quando    venditur 
circa  Ix  lib. 
Nemus  juxta  stagnum  eo- 
demmodo  vendi  potest, 
et  valet  circa  xxx  lib. 

In  novitate  Episcopi  debent 
homines  de  Villa-Catuli 
i  lib.  Domino  Episcopo 
pro  quodam  palefrido. 


porte  environ  60  livres. 

Un  bois  près  de  l'étang, 
aménagé  de  la  même 
façon;  valeur  environ 
30  livres. 

A  l'intronisation  de  l'E- 
voque, les  hommes  de 
Villechaud  doivent  une 
livre  au  Seigneur  Evê- 
que  pour  un  palefroi. 


DEUXIÈME  PARTIE 


Villemoison.  —  Saint-Père.  —  Saint-Laurent-rAbbaye. 

La  matinée  du  premier  jour  avait  été  consacrée  à  la 
visite  pédestre  de  Cosne  ;  l'après-midi,  nous  montions 
en  voiture,  nous  suivions  la  verdoyante  vallée  du 
Nohain  et  mettions  pied  à  terre  à  la  commanderie  de 
Villemoison,  où  le  propriétaire  actuel  nous  avait 
devancés  pour  nous  en  faire  les  honneurs,  ce  qui  a 
augmenté  considérablement  le  charme  d'une  prome- 
nade déjà  si  attrayante. 

Une  commanderie  était  l'ensemble  des  domaines 
d'un  ordre  religieux  ou  militaire  administrés  par  un 
religieux  ou  un  chevalier  de  l'ordre  appelé  comman- 
deur. Il  y  avait  des  commanderies  et  des  comman- 
deurs dans  les  ordres  des  chevaliers  de  l'Hôpital- 
de-Saint-Jean-de-Jérusalem ,  des  chevaliers  Teuto- 
niques,  du  Temple,  de  Saint-Lazare,  de  la  Trinité,  de 
Saint-Antoine,  dans  la  congrégation  des  chanoines 


—  185  — 

réguliers  des  Prémontrés.  C'est  au  xii«  siècle  que  se 
sont  constituées  les  plus  anciennes  commanderies  des 
hospitaliers  de  Saint-Jean-de-Jérusalem  et  de  l'ordre 
des  Templiers,  et  c'est  à  cette  époque  qu'il  faut  attri- 
buer la  chapelle  de  Villemoison  (1). 

Dans  la  circonscription  actuelle  du  diocèse  de 
Nevers,  il  y  avait  six  commanderies  :  1®  aux  Hospi- 
taliers, Bou,  Feuilloux,  Tourny;  2^  aux  Templiers, 
Biches,  Champallement  et  Villemoison. 

La  seule  partie  conservée  des  b&timents  primitifs  à 
Villemoison  est  l'abside  de  la  chapelle  du  xii*  siècle  ; 
à  la  voûte,  une  peinture  représente  le  Christ  bénis- 
sant dans  une  gloire  elliptique  ;  l'ensemble  et  le  genre 
d'ornementation  rappellent  la  fresque  de  Sainte-Julitte 
qui  représente  le  même  sujet.  On  serait  tenté  d'ex- 
primer le  désir  que  les  exigences  de  l'exploitation 
du  domaine  et  les  aménagements  de  la  ferme  per- 
missent de  veiller  à  la  conservation  de  ce  respectable 


(1)  Une  obligeante  communication  de  M.  de  Flamare  me  met  sous  les 
yeux  un  important  traTail  publié  par  M.  à.  Trudon  des  Ormes  dans  la 
Revue  de  VOrient  latin  et  intitulé  :  «  Liste  des  maisons  et  de  quelques 
dignitaires  de  Tordre  du  Temple  en  Syrie,  en  Chypre  et  en  France,  d'après 
les  pièces  du  procès  ».  En  raison  de  la  rareté  des  renseignements  connus 
sur  la  commanderie  des  enrirons  de  Cosne,  il  y  a  intérêt  à  reproduire  la 
notice  qui  la  concerne. 

Villemoison»  —  Maison  du  Temple  ayant  chapelle,  sise  dans  le 
diocèse  d'Auxerre  (villa  Moron,  Tilla  Muoçonis),  et  dont  le  Diction- 
naire topographique  de  la  Nièvre  indique  le  pi^écepteur  ou  commandeur 
en  1244,  frère  Gervais. 

Le  procès  nous  fournit  les  noms  de  deux  successeurs  de  Gervais,  dont 
run,  Gautier  Goniier,  sergent,  est  dit  avoir  reçu  en  la  maison  vers  1281. 
Le  dernier  maître  fut  le  chevalier  du  Temple,  frère  Guillaume  de  Lus 
(de  LuTs)  qui,  de  1303  à  1307,  procéda  à  diverses  admissions  dans  Tordre, 
en  la  chapelle  de  Villemoison,  le  chapelain  étant  alors  frère  Etienne  «  de 
Santo  Questo  »  ;  la  dernière  de  ces  réceptions  aurait  eu  lieu  au  mois  de 
juillet  1307. 

Dans  le  même  travail,  Champallement  et  Biches  ont  une  mention  à  la 
suite  de  celle  de  Villemoison. 


-  186  — 

vestige.  On  pourrait  alors  y  joindre  un  fragment  d'une 
statue  de  sainte  de  la  fin  du  xvi«  siècle,  qui  se  trouve 
dans  le  hangar,  avant  la  chapelle. 

A  signaler  également  une  belle  grange  du  xvr  siècle. 

Mais  le  joyau  de  Villemoison,  c'est  le  logis  du 
commandeur,  construit  en  1535  ;  avec  ses  fenêtres  à 
meneaux  surmontées  de  lucarnes  bizarrement  orne- 
mentées, avec  son  profil  élégant  et  vieillot  qui  se 
détache  dans  une  verdure  exubérante,  elle  offre  le 
plus  charmant  coup  d'œil.  Puis,  quand  on  a  gravi 
son  escalier  presque  branlant  et  qu'on  a  franchi  la 
porte,  une  surprise^  de  caractère  très  délicat,  vous 
attend  :  l'intérieur  se  compose  de  plusieurs  pièces 
entièrement  garnies  de  tentures  aux  couleurs  cha- 
toyantes et  disposées  dans  un  art  très  moderne  et  avec 
un  goût  exquis  ;  le  contraste  est  saisissant,  mais  il 
n'est  pas  heurté;  on  dirait  d'un  nid  dans  les  ruines. 
Rien  ne  manque  à  l'hospitalité  qui  nous  est  offerte,  ni 
les  intelligents  propos,  ni  même  un  vin  dont  les  tons 
ambrés  et  l'arôme  feraient  penser  qu'il  provient  de 
quelque  domaine  méditerranéen  des  anciens  proprié- 
taires. 

Au  sortir  de  cette  délicieuse  étape,  et  en  quelques 
minutes,  nous  arrivons  à  la  paroisse,  autrefois  Nuzy, 
nom  qui  a  été  remplacé  par  le  vocable  de  l'église 
paroissiale,  Saint-Pierre-du-Trépas,  à  cause  des  nom- 
breuses sépultures  que  renferme  l'église  ;  aujourd'hui, 
c'est  la  commune  de  Saint-Père. 

La  paroisse  existait  avant  le  xip  siècle;  l'église 
primitive  a  complètement  disparu  et  a  été  remplacée, 
fin  du  xv«  siècle,  par  l'église  actuelle,  dont  l'aspect,  si 
gracieux,  est,  au  premier  abord,  déconcertant  ;  elle  a 
bien,  en  effet,  les  proportions  restreintes  que  justifie 
l'exiguïté  de  la  population,  mais  elle  apparaît  avec  une 
distinction  de  silhouette  et  une  richesse  d*ornementa- 


-  187  - 

tion  qui  ne  se  rencontrent  pas  communément  dans  une 
église  de  village.  La  surprise  cesse  dès  que,  s'étant 
approché,  on  remarque  les  croix  de  Malte  gravées  sur 
les  murs  et  les  armes  sculptées  sur  la  façade  ;  on  voit 
que  les  paroissiens  de  Villemoison  ont  passé  par  là. 
Pendant  que  nous  en  sommes  encore  à  la  façade,  citons 
un  trait  de  cette  liberté  qu'on  se  donnait  volontiers 
autrefois  de  faire  servir  l'ornementatioa  des  lieux 
saints  à  ses  fantaisies  allégoriques  ou  satyriques.  Au 
portail  figure  un  chien  rongeant  un  os,  ce  qui  ne 
s'explique  guère,  sinon  pour  afficher  la  détresse  du 
curé,  dont  presque  tous  les  revenus  avaient  été  dis- 
traits par  l'évêque  d'Auxerre,  Guillaume  de  Seignelay, 
au  profit  du  chapitre  de  Cosne  qu'il  venait  de 
fonder. 

L'intérieur  offre  d'intéressantes  particularités  ;  l'une 
des  plus  remarquables  et  les  plus  dignes  d'intéresser 
notre  Société  consiste  en  une  pierre  tumulaire  du 
xvi*  siècle  qui  forme  le  degré  de  l'autel  de  la  chapelle 
latérale  nord  ;  nous  dûmes  enlever  le  tapis  de  pied  qui 
la  recouvre  pour  l'examiner.  Elle  représente  trois 
hommes  d'armes  revêtus  de  l'armure  du  temps,  les 
mains  jointes,  les  casques  et  les  gantelets  à  terre  à 
côté  d'eux,  agenouillés,  l'un  derrière  l'autre,  devant 
l'Enfant-Jésus  emmaillotté.  M.  de  Flamare  a  observé, 
ce  qui  avait  échappé  à  V Album  du  Nivernais  et  même 
à  M.  de  Soultrait,  que  deux  autres  fragments  de 
pierre  représentent  trois  dames  agenouillées,  les  mains 
jointes,  l'une  derrière  l'autre,  dans  le  sens  opposé  à 
celui  des  hommes  d'armes,  et  destinées,  selon  toute 
évidence,  à  leur  faire  pendant.  Est-il  admissible  que 
cette  pièce  importante  continue  à  servir  de  marche- 
pied jusqu'à  complet  effacement?  Et  puisque.nous  en 
sommes  à  verser  nos  griefs  dans  le  sein  de  la  Société 
nivernaise,  pourquoi  n'exprimerions-nous  pas  l'éton- 


-  188  — 

nement  que  l'église  de  Saint-Père  ne  soit  pas  classée 
parmi  les  monuments  historiques  ? 

Puisqu'il  ne  nous  reste  pour  ainsi  dire  plus  que  le 
souvenir  de  Notre-Dame-de-Galles  que  nous  savons 
avoir  été  si  belle,  donnons  un  coup  d'œil  sur  les  beaux 
vitraux  qui  en  proviennent  et  qui  ont  été  replacés  ici 
au  petit  bonheur  :  ainsi  voilà  saint  Martin,  dont  le 
buste  se  trouve  dans  l'abside,  tandis  que  le  pauvre 
auquel  il  offre  la  moitié  de  son  manteau  est  hors  de 
portée  de  sa  libéralité,  dans  la  fenêtre  du  côté  nord. 
Les  convenances  les  plus  élémentaires  ne  demande- 
raient-elles pas  qu'il  fût  remédié  à  cette  inconcevable 
incurie  ? 

Il  convient  également  de  noter  l'élégant  tableau  du 
xvi«  siècle  peint  sur  pierre  contre  le  pilier  de  la  der- 
nière travée,  séparant  la  nef  du  collatéral  unique  qui 
se  trouve  du  côté  nord.  Le  sujet  représenté  n'est  pas 
une  Adoration  des  Bergers,  mais  des  Mages  ;  comme 
dans  toutes  les  peintures  de  l'époque  représentant  ce 
sujet,  on  aperçoit  les  bergers  dans  le  fond ,  au  second 
plan,  mais  ils  ne  sont  pas  en  adoration.  Cette  légère 
rectification  est  due  à  l'œil  impeccable  de  M.  de 
Flamare. 

Dans  un  site  pittoresque,  dont  l'agrément  est  rendu 
plus  sensible  par  le  paysage  relativement  ingrat  que 
le  voyageur  doit  parcourir  pour  se  rendre  de  Saint- 
Père  à  Saint-Laurent,  se  dressent  les  vestiges  impor- 
tants qui  subsistent  de  l'ancienne  abbaye. 

Ce  fut  d'abord  un  monastère  fondé,  vers  550,  par 
Wulfin,  prince  de  sang  royal,  en  un  lieu  près  d'un 
long  mar%is,  et  qui  fut  appelé  pour  cela  Longorotense 
monasterium,  appellation  à  laquelle  fut  joint  le  mot 
albatorum,  parce  que  les  religieux  qui  l'occupaient 


—  189  - 

étaient  vêtus  de  blanc  et  qu'il  fallait  le  différencier 
d'un  autre  monastère  fondé  dans  les  mômes  condi- 
tions dans  le  Berry  et  dont  les  moines  étaient  vêtus 
de  noir. 

Ce  monastère  fut  appelé  plus  tard  Saint-Laurent 
des-Aubats,  Saint-Laurent-l'Abbaye ,  et  monastère 
des  saints  Laurent  et  Hilaire,  parce  que  les  chanoines 
de  Saint -Hilaire  de  Poitiers,  y  avaient  des  droits 
ainsi  qu'en  témoigne  cette  mention  de  la  coutume  du 
comté  et  bailliage  d'Auxerre  :  «  Les  doyen  et  cha- 
pitre de  Saint-Hilaire-le-Grand  ,  de  Poitiers ,  sei- 
gneurs de  la  terre  et  chàtellenie  à  Longretz  ».  Ce 
serait  le  fondateur  Wulfin  qui  leur  en  aurait  fait  don. 

Au  XI®  siècle,  Robert  de  Nevers,  évêque  d'Auxerre 
(1070-1084),  érigea  le  monastère  en  abbaye  et  le  remit 
aux  chanoines  réguliers  de  Saint- Augustin  qui,  depuis, 
entr'autres  dons,  reçurent  de  l'évêque  de  Nevers 
(Guy)  l'église  de  Saints-Loup-et-Gildard  qui,  par  la 
suite  des  temps,  ne  conserve  plus  que  son  second 
vocable,  car  ce  qui  nous  est  resté  de  la  vie  de  saint 
Loup  est  bien  peu  de  choses  et  tient  plutôt  à  la 
légende.  L'évêque  de  Nevers,  par  cette  donation,  avait 
pour  but  de  rendre  Saint -Gildard  à  sa  destination 
première,  car,  par  suite  des  vicissitudes  de  ces  temps 
troublés  par  les  guerres  et  les  changements  de  pro- 
priété et  les  spoliations  qui  en  étaient  la  suite,  Saint- 
Gildard  n'était  plus  qu'une  paroisse  et  il  redevint 
monastère  lorsque  quelques-uns  des  moines  de  Saint- 
Laurent  vinrent  en  prendre  possession.  L'abbé  de 
Saint-Laurent  obtint,  en  1147,  du  pape  Eugène  III 
une  bulle  confirmative  dans  laquelle  se  trouvent  men- 
tionnées ,  outre  Saint-Loup  et  Saint-Gildard ,  les 
églises  d'Urzy,  de  Saint-Martin-d'Heuille  et  d'Aubi- 
gny-le-Chétif. 

Saint-Laurent  fut  le  thé&tre  de  la  lutte  entre  Pierre 


—  490  - 

de  Courtenay  et  Hervé  baron  de  Donzy,  pour  la 
possession  du  comté  de  Gien  :  Pierre  de  Courtenay 
n'avait  pas  le  droit  pour  lui,  et  ses  alliés,  les  Cotte- 
reaux,  qui  venaient  précisément  d'exercer  leurs  dépré- 
dations sur  l'abbaye  de  Saint-Laurent,  n'étaient  pas 
faits  pour  rendre  sa  cause  plus  recommandable.  Il  fut 
battu  et  même  tomba  au  pouvoir  d'Hervé.  L'église  fut 
entièrement  ruinée  (1199),  ce  dont  saint  Etienne  et 
saint  Laurent  se  vengèrent  dans  la  même  année  et  le 
propre  jour  de  l'Invention  du  corps  de  saint  Etienne, 
ainsi  que  le  rapporte  naïvement  un  vieux  manuscrit 
cité  par  D.  Viole  :  «  Anno  1099,  in  festo  inventionis 
corporis  B.  protomartyris  Stephani,  contritus  est 
exercitus  Pétri,  comitis  Nivernensis,  cum  omnibus 
baronibus  et  Coterellis;  factum  est  apud  abbatiam 
B,  Laurentii  ab  Herveo,  domino  Donziaci,  beatissi- 
mis  Stephano  atque  Laurentio  ipsum  adjuvantibus, 
cujus  omnino  ecclesiam  detvuxerant  ». 

Après  les  Cottereaux,  les  Armagnacs,  qui,  dans 
leurs  guerres  avec  les  Bourguignons,  s'établirent  à 
Saint-Laurent  et  enlevèrent  les  objets  précieux  qui 
excitaient  leurs  convoitises  :  «  En  l'an  1411,  dit  encore 
D.  Viole,  lorsque  la  guerre  était  plus  échauffée  entre 
les  ducs  d'Orléans  et  de  Bourgogne,  la  môme  abbaye 
de  Saint-Laurent,  bien  que  fermée  et  environnée  de 
bonnes  murailles,  fut  surprise  par  Jean  de  Cabelonne 
(Jean  de  Chalon),  frère  du  comte  de  Tonnerre,  capi- 
taine du  château  de  Saint- Verain-des-Bois  pour  le  duc 
d'Orléans,  ainsi  que  les  religieux,  qui  chantaient  la 
grand'messe,  lequel  pilla  tous  les  vaisseaux  sacrez  d'or 
et  d'argent,  châsses,  reliquaires,  calices,  livres,  cou- 
verts d'argent,  grand  nombre  de  riches  ornements,  et 
généralement  tous  les  meubles  du  monastère  et  des 
habitants  du  bourg  qui  s'y  étaient  réfugiés.  Et  non 
content  de  cela^  il  emmena  l'abbé  et  ses  religieux  et 


-  191  — 

six-vingts  desdits  habitants,  liés  et  garottés,  au  châ- 
teau de  Saint- Verain,  dans  l'espérance  d'en  tirer  une 
grosse  rançon  ». 

Au  XVI*  siècle,  ce  fut  encore  pis  et,  en  1567,  les 
hérétiques  calvinistes  achèvent  l'œuvre  de  destruction 
sans  que  les  abbés  com mandataires  aient  même  fait  le 
nécessaire  pour  loger  les  religieux,  réduits  à  habiter 
pour  la  plupart  chez  les  habitants.  Pendant  longtemps, 
la  discipline  y  avait  été  gardée  avec  une  rigueur  parti- 
culière, mais  elle  se  relâcha  insensiblement,  ce  qui 
motiva  l'intervention  de  l'évêque  d'Auxerre  et  du 
Parlement.  Des  difficultés  s'élevèrent  aussi  avec  le 
chapitre  de  la  cathédrale  de  Nevers,  où  Saint-Gildard, 
dépendance  de  Saint-Laurent,  avait  deux  prébendes. 
Une  transaction  termina  le  procès.  Saint-Gildard  fut 
remis  en  toute  propriété  au  chapitre  de  Saint-Cyr,  qui 
abandonna  en  retour  son  droit  de  nomination  aux 
cures  de  Saint-Trohé,  d'Apremont  et  d' Avril-sur- 
Loire. 

La  fin  de  l'abbaye  Saint-Laureût  fut  sans  gloire  ; 
aujourd'hui  encore,  ceux  môme  qui  en  habitent  les 
constructions  les  mieux  conservées  professent  â  son 
endroit  la  plus  complète  indifférence;  interrogez-les 
sur  ce  qu'ils  savent  de  l'histoire  du  monastère,  même 
pour  l'époque  la  plus  rapprochée  de  nous,  demandez- 
leur  certains  détails  sur  les  parties  les  moins  acces- 
sibles de  leur  habitation ,  ils  vous  répondront  : 
«  A  quoi  bon?  Ce  qui  est  passé  est  passé;  qu'y 
ferons-nous?  Il  n'y  a  qu'à  tirer  le  meilleur  parti 
possible  du  présent  ».  Mais  nous,  qu'un  penchant 
•naturel  attache  fidèlement  à  notre  devise  Revert i- 
mini  ad  antiquitatem ,  nous  nous  étonnons  que  l'on 
puisse  rester  insensible  au  milieu  de  ces  témoins  si 
impressionnants  du  passé.  Voici  le  portail  en  saillie, 
formé  de  quatre    archivoltes   cintrées,  décorées   de 


tètes  de  clous  en  creux,  de  besants,  de  grecques,  retom- 
bant sur  un  entablement  autrefois  soutenu  par  des 
colonnes  qui  ont  été  enlevées  ;  par  compensation  on  y 
a  accolé  de  misérables  constructions  ;  la  corniche  au- 
dessus  est  garnie  de  modillons  à  petites  volutes  ;  à 
droite  et  à  gauche,  se  trouvent  des  baies  cintrées, 
encadrées  par  des  cordons  de  tôtes  de  clous,  qui  éclai- 
raient les  bas-côtés  ;  une  troisième  baie  s'ouvrait  dans 
le  haut  du  pignon. 

Le  clocher  central  avait  chacune  de  ses  huit  faces 
percée  de  deux  baies  légèrement  ogivales,  festonnées 
de  huit  lobes,  comme  à  La  Charité,  sous  une  achivolte 
décorée,  conformément  à  un  motif  de  décoration  per- 
sistant, de  tête  de  clous  en  creux  et  soutenue  par  des 
colonnettes  d'un  travail  soigné.  La  façade  permet 
encore  de  juger  de  cette  disposition. 

L'intérieur  de  l'église  paroissiale  actuelle  n'a  gardé 
de  l'église  abbatiale  que  le  transept,  avec  travée  du 
chœur  et  une  chapelle  du  xiii*  siècle.  C'est  du  reste  à 
cette  époque  que  les  arcs  en  plein  cintre  ont  été  ren- 
forcés d'arcs  ogivaux.  L'ensemble  des  bâtiments 
conventuels  formait  un  parallélogramme  dont  l'église 
occupait  le  côté  sud,  la  demeure  de  l'abbé  étant  à  Touest, 
la  grange  au  nord,  et  les  autres  dépendances  à  l'est.  Le 
cloître  occupait  le  centre,  c'est  aujourd'hui  le  jardin  du 
presbytère  ;  on  y  remarque  une  série  très  complète  de 
corbeaux  qui  indiquent  la  disposition  du  cloître.  Au- 
dessus,  de  petites  ouvertures  que  les  gens  du  pays, 
malgré  leur  indifférence  systématique  au  sujet  de  la 
destination  des  différentes  parties  des  bâtiments,  disent 
avoir  été  celles  de  l'infirmerie  ;  nous  inclinons  à  croire 
que  c'étaient  les  cellules  des  moines,  et  qu'à  l'extrémité 
devait  se  trouver  une  salle  d'où  les  malades  pouvaient 
suivre  la  messe.  Le  logis  abbatial  du  xvi«  siècle,  mais 


Saint-Pèr*-let>CDSne 


Commandtrie  dg  Villsmoison 


—  103  - 

fortement  remanié,  est  remarquable  ainsi  que  la  grange 
avec  ses  fenêtres  gothiques. 

L'aspect  de  ces  beaux  vestiges,  dont  aucune  précau- 
tion, môme  commandée  par  l'intérêt,  n'entrave  la 
destruction  quotidienne,  inspire  une  sorte  de  mélancolie 
que  favorisent  les  ombres  approchantes  du  soir.  C'est 
le  moment  de  rentrer  au  logis  et  de  se  ragaillardir  par 
des  conversations  d'où',  décidément,  toute  tristesse  est 
bannie.  Irons-nous,  après  cela,  jeter  la  pierre  aux 
habitants  de  Saint-Laurent  ? 


TROISIÈME  PARTIE 

Cours.  —  Saint-Loup.  —  Saint- Verain. 

Le  lendemain,  dès  le  matin,  mais  non  toutefois  sans 
avoir  fait  une  visite  complémentaire  à  Saint-Jacques, 
on  se  met  en  route  pour  la  deuxième  journée  de 
l'excursion,  qui  sera  beaucoup  moins  chargée  que  la 
première. 

Quatre  kilomètres  et  nous  voilà  à  Cours-les-Cosne. 
L'église  devait  être  considérable  avant  d'avoir  été  en 
partie  détruite  par  les  huguenots  ;  ce  qu'il  en  reste, 
tout  en  ayant  belle  allure,  offre  l'aspect  toujours 
pénible  de  quelque  chose  de  tronqué.  Les  voûtes,  fort 
élevées,  possèdent  des  clés  sculptées,  dont  l'une  porte 
la  date  de  1531,  celle  de  l'achèvement  de  l'église.  Dans 
le  chœur  se  trouve  une  statue  d'une  extrême  élégance 
représentant  saint  Jean  TEvangéliste  ;  c'est  un  beau 
spécimen  du  commencement  du  xvi*  siècle.  L'église 
renferme  également  un  fragment  d'une  sculpture  sur 
bois  du  XV®  siècle  qui,  dans  son  intégrité,  représen- 

T.  IX,  3*  série.  13 


-  194  - 

tait  la  mort  de  la  Vierge.  Nous  avons  été  assez 
heureux  pour  en  prendre  une  photographie  qui  permet 
d'en  apprécier  Tintérôt,  car  c'est  un  morceau  de  choix  ; 
le  dessin  et  l'exécution  sont  tout  à  fait  remarquables. 

Dans  la  cour  du  presbytère,  un  puits  mérite  d'ôtre 
visité  ;  dans  sa  forme  conique  trapue  et  avec  son  abri 
en  tuiles,  il  a  beaucoup  de  caractère. 

Une  courte  distance  nous  sépare  de  Saint-Loup  ;  la 
situation  pittoresque  de  ce  bourg  est  rappelée  dans 
deux  des  noms  qu'il  a  portés  naguère,  Sanctus  Lupus 
in  nemoribus  et  Sanctus  Lupus  juxta  rupes;  le  cime- 
tière en  particulier,  en  amphithéâtre  derrière  l'église, 
dont  il  est  séparé  par  la  route,  occupe  un  site  qui  attire 
et  retient  le  regard. 

L'église  a  été  reconstruite  à  la  fin  du  xv®  siècle,  sauf 
le  chevet,  qui  est  resté  du  xui*  ;  au  milieu  se  dresse 
une  petite  flèche  en  ardoise. 

Nous  y  retrouvons,  comme  à  Saint-Père  et  à  Cours, 
un  seul  bas-côté  du  côté  de  l'Evangile,  et  les  voûtes 
ont  des  arêtes  sous-faitières  ;  les  membrures  retom- 
bent sur  des  consoles,  dont  plusieurs  sont  curieuses. 

De  Saint-Loup,  nous  gravissons,  au  hasard  des  sen- 
tiers ou  de  la  route,  la  colline  au  sommet  de  laquelle 
se  détache,  bien  campé  sur  l'horizon  et  heureusement 
encadré  de  verdure,  un  petit  château  qui  mérite  d'ôtre 
vu  de  près,  et  dont  l'aspect  mi-seigneurial  mi-bour- 
geois est  des  plus  agréables;  c'était  la  maison  de 
campagne  des  abbés  de  Roches. 

Notre-Dame-de-Roches,  paroisse  de  Myennes,  fut 
fondée  par  les  barons  de  Donzy  et  les  seigneurs  de 
Saint- Verain  sous  Hugues  de  Montaigu,  évoque 
d'Auxerre.  Après  une  existence  mêlée  de  vicissitudes, 
au  premier  rang  desquelles  il  faut  noter  les  dépréda- 
tions des  protestants  qui  forcèrent  les  moines  à  se 
retirer  â  Cosne  de  1567  à  1578,  l'abbaye  s'éteignit  à  la 


—  195  — 

Révolution,  n'ayant  plus  que  deux  ou  trois  religieux, 
de  trente  qu'elle  avait  comptés. 

La  route,  à  partir  de  Saint-Loup  et  de  son  châtelet, 
est  agréable  à  parcourir  :  elle  est  légèrement  acci- 
dentée et  noyée  dans  une  abondante  verdure  qui  rap- 
pelle un  peu  le  bocage  vendéen  et  où  apparaissent,  de 
plus  en  plus  nombreux ,  les  arbres  à  cidre ,  avant- 
coureurs  de  la  Puisaye.  Tout  à  coup,  non  loin  de  soi. 
Ton  aperçoit  une  tour  dont  la  masse  revôche  occupe 
une  énorme  place  dans  le  paysage,  plutôt  coquet  et 
souriant,  et  plus  près  encore,  à  droite  de  la  route,  de 
larges  pans  de  murailles  apparaissent  à  travers  la  ver- 
dure qui  a  envahi  leur  gigantesque  et  bizarre  ossature  ; 
im  instant,  on  perd  de  vue  les  ruines  qui  bientôt  repa- 
raissent, véritablement  formidables  cette  fois  ;  ce  sont 
des  murailles  effondrées,  des  aiguilles  de  pierres  qui 
se  dressent  tragiquement  vers  le  ciel,  des  avalanches 
de  moellons  écroulés  d'un  bloc  sans  se  désagréger  et 
qui  ont  revêtu  des  formes  fantastiques,  c'est  surtout 
le  donjon  dominateiu*  et  qui  a  conservé  comme  un  air 
de  défi.  Le  spectacle  est  saisissant  ;  il  est  étrange  qu'il 
soit  si  peu  connu,  môme  des  Nivernais  ;  combien  de 
voyages  lointains  et  coûteux  n'offrent  pas  le  môme 
intérêt. 

C'est  que  Saint- Verain  fut  une  baronnie  dont  on 
peut  mesurer  l'importance  en  songeant  qu'elle  devint 
le  siège  d'une  châtellenie  dont  le  ressort  s'étendait 
sur  le  territoire  qui  forme  le  canton  de  Saint-Amand, 
la  partie  nord  du  canton  de  Cosne  et  la  partie  nord- 
ouest  du  canton  de  Donzy,  ainsi  que  sur  plusieurs 
paroisses  des  départements  du  Loiret  et  de  l'Yonne  ; 
cent  quatre  fiefs  en  relevaient. 

Saint- Verain  trouve  son  origine  dans  un  prieuré 
qui  dut  lui-môme  la  sienne  à  l'établissement  de 
moines  institués  pour  garder  les   reliques  de  saint 


-"  196  - 

Verain,  évoque  de  Cavaillon,  transportées  dans  le 
Donziois  au  xiv  siècle  ;  nous  nous  retrouvons  d'accord 
en  cela  avec  le  style  de  l'église. 

Le  saint  dont  on  déposa  les  reliques  en  ce  lieu 
n'avait  pas  été,  de  son  vivant,  sans  contact  avec  le 
pays  où  devaient  séjourner  ses  restes  ;  il  s'était  ren- 
contré avec  notre  saint  Arigle  au  Concile  de  Mâcon 
en  585,  et  en  589,  à  Poitiers,  au  monastère  de  Sainte- 
Radegonde ,  à  l'occasion  des  troubles  suscités  par 
Chrodielde,  fille  du  roi  Caribert. 

Aussi  bien,  les  reliques  du  saint  évoque  n'auraient 
pu  être  placées  en  un  lieu  où  elles  fussent  entourées 
de  plus  de  vénération  ;  de  nombreux  pèlerinages  s'y 
établirent  parmi  lesquels  nous  pouvons  citer  Pouilly, 
La  Charité,  Neuvy,  Cosne  et  Entrains.  Mais  entre 
tous  les  dévots  à  saint  Verain,  Nevers  tient  la  pre- 
mière place  ;  la  ville  s'était  mise  officiellement  sous  sa 
protection  et  il  faut  croire  que  le  pacte  conclu  fut 
tenu  fidèlement  de  part  et  d'autre,  car  il  tint  long- 
temps. En  1584,  nous  voyons  une  procession  de 
Saint-Cyr  de  Nevers  à  Sain t-Sil vain,  hors  la  porte  de 
la  Barre,  pour  de  là  aller  à  Saint- Verain  en  pèleri- 
nage, prier  Dieu  par  l'intercession  de  ce  saint,  qu'il 
lui  plaise  apaiser  son  ire  et  faire  cesser  la  peste  de 
laquelle  cette  ville  avait  été  et  était  misérablement 
affligée  depuis  deux  ans  et  demi. 

En  1499,  nous  relevons  un  compte  de  47  livres  tour- 
nois à  Lucas  Lyonnet,  marchand  et  ouvrier  de  cire, 
pour  sept-vingt  et  une  livres  de  cire  par  lui  mises  en 
chandelle  «  de  l'enceinte  et  circuite  de  la  ville  «  sur 
quatre  roues  (1),  pour  les  vœux  faits  par  la  ville  à 

(i)  Les  quatre  cierges  de  longueur  du  circuit  de  la  ville,  pesaient  cha- 
cun 35  livres  1/4  ;  ils  étaient  enroulés,  comme  un  cordeau,  sur  une  roue 
ou  cercle  large  avec  rebord,  et  présentaient  environ  la  grosseur  de  la 
bougie  de  poche  connae  actuellement  sous  le  nom  de  queue  de  rat. 


—  197  — 

M9'  St. -Sébastien  de  Montbeugny,  à  la  vraye  croix 
de  Bourbon-rArchambault,  à  M9'  Saint- Verin-des- 
Boys  et  M9'  Saint-Anthoine-lez-Nevers,  afin  qu'ils 
fussent  intercesseurs  envers  Notre-Seigneur  Jésus- 
Christ  pour  la  cessation  de  la  peste. 

En  dehors  de  ces  pèlerinages,  qui  avaient  lieu  aux 
moments  de  détresse;  là  ville  de  Nevers  donnait  un 
témoignage  de  sa  constante  dévotion  par  la  fondation 
d'une  messe  mensuelle,  et  nous  trouvons,  dans  les 
comptes  de  la  ville  pour  l'année  1613,  quittance  de 
messire  Jean  Garnet,  prètre-curé  de  Saint- Verain,  de 
la  somme  de  10  livres  tournois  pour  la  messe  qu'il 
célèbre,  depuis  un  an,  chaque  mois,  à  l'intention  des 
habitants  de  Nevers  ;  à  la  quittance  est  joint  le  certi- 
ficat, en  date  du  16  mai,  des  officiers  de  monseigneur, 
en  sa  baronnie  de  Saint- Verain,  attestant  que  véné- 
rable et  discrète  personne  messire  J.  Garnet  a  célébré, 
chacun  mercredi  de  chacun  mois,  depuis  un  an,  la  messe 
en  la  chapelle  dudit  Saint-Verain,  sise  hors  la  ville. 

Cette  pieuse  coutume  fut  religieusement  observée, 
car,  en  1742,  la  ville  délivre  au  sieur  Brière,  curé  de 
Saint- Verain-les-Cosne,  270  livres  pour  vingt -sept 
années  échues  à  la  fin  décembre  1741  de  la  rente  à 
lui  due  pour  les  messes  célébrées  en  son  église  par 
suite  du  vœu  de  la  ville. 

De  plus,  la  chapelle  située  dans  l'enceinte  du  château 
était  entretenue,  au  moins  en  partie^  aux  frais  de 
Nevers  qui  donnait,  en  1598,  à  Marceaul  Vacherin 
6  écus  pour  vitres  aux  fenêtres  de  mons.  saint  Verain, 
audit  lieu  de  Saint-Verain.  Parmi  les  autres  dépenses 
d'aménagement  et  entretien  dont  nous  trouvons  la 
trace  dans  les  comptes  de  la  ville,  nous  en  relevons  une 
d'importance  :  30  livres  tournois,  en  1627,  à  un  maître 
charpentier  de  Saint-Verain  pour  réparations  à  la 
chapelle. 


—  198  — 

Les  reliques  de  saint  Verain,  objet  d'un  culte  si 
touchant,  furent  profanées  en  1793,  mais  elles  furent 
recueillies  par  de  pieux  fidèles  et,  longtemps  après, 
Mff*  Dufôtre  les  reconnut  avec  le  luxe  de  précautions 
usitées  en  pareil  cas  et  en  constata  la  parfaite  authen- 
ticité. 

Notons,  pour  être  complet,  que  le  corps  de  saint 
Verain,  déposé  à  l'origine  comme  nous  l'avons  indi- 
qué, avait  été  transporté,  au  xni®  siècle,  à  Gergeau- 
sur-Loire,  probablement  à  cause  des  guerres  qui  déso- 
laient continuellement  le  pays  ;  mais  une  portion 
considérable  en  avait  été  conservée. 


Les  ruines  de  Saint- Verain  offrent  tous  les  genres 
d'intérêt  :  le  simple  touriste,  en  quête  de  pittoresque 
inédit,  en  remportera  une  impression  inoubliable; 
l'archéologue  y  peut  étudier,  dans  l'application  des 
meilleures  règles,  le  type  achevé  des  châteaux-forts  du 
moyen  ftge. 

Au  sommet  d'un  mamelon,  le  donjon  dresse  son 
énorme  masse.  Les  murs,  très  épais,  sont  percés,  dans 
leur  profondeur,  de  conduits  que  le  Congrès  archéolo- 
gique de  France,  réuni  à  Nevers  en  1851,  a  reconnus 
pour  des  communications  acoustiques  et  qui  ne 
seraient,  d'après  M.  de  Soultrait,  que  des  moules  de 
chaînages  en  bois.  Cinq  tours  défendaient  le  donjon. 

A  l'abri  et  au  pied  du  donjon  et  de  ses  défenses,  se 
trouvait  le  château  proprement  dit,  c'est-à-dire  l'habi- 
tation du  baron  et  la  chapelle,  construite  en  1576  et 
rebâtie  en  1608  par  les  échevins  de  Nevers  en  exécu- 
tion d'un  vœu  ;  elle  n'a  disparu  entièrement  qu'au 
commencement  du  xix®  siècle.  C'était,  en  dehors  du 


—  199  - 

donjon,  la  première  enceinte  que  défendaient  de  nom- 
breuses tours. 

La  deuxième  enceinte  comprenait  les  dépendances 
du  manoir  féodal  ;  le  dernier  vestige  qui  en  ait  subsisté 
est  la  maison  de  justice  du  xin®  siècle,  dont  l'inté- 
rieur, qui  n'était  pas  dénué  d'intérêt,  pouvait  encore 
être  visité  en  1876,  d'après  V Annuaire  de  V  Yonne, 
qui  a  publié  un  important  et  intéressant  article  de 
M.  Charles  Blanche. 

Enfin  la  ville,  avec  laquelle  on  communiquait  par 
une  porte  qui  a  grande  allure,  ainsi  qu'on  peut  encore 
en  juger  par  la  photographie  que  nous  avons  réussi  à 
prendre.  L'enceinte  était  flanquée  de  quinze  tours  et 
percée  de  trois  portes.  Les  murs  de  cette  troisième 
enceinte  sont  les  mieux  conservés,  bien  qu'ils  aient 
servi  abondamment  à  la  construction  des  maisons  du 
village.  La  maçonnerie,  composée  d'un  blocage  de 
silex  noyé  dans  le  mortier,  est  d'une  telle  solidité 
qu'elle  ne  se  désagrège  pas  ;  de  temps  à  autre,  sous 
l'eiSort  du  temps  ou  sous  la  main  de  l'homme,  des 
pans  s'effondrent  tout  d'une  pièce,  et  les  déchirures 
qui  en  résultent  affectent  des  formes  bizarres  et  décon- 
certantes ;  on  dirait  parfois  du  proûl  tourmeuté  de 
certaines  montagnes. 

De  môme  que  les  vestiges  imposants  de  Saint- 
Verain  nous  donnent  une  des  images  les  plus  complètes 
que  l'on  puisse  trouver  actuellement,  en  France,  d'une 
fortQresse  féodale,  de  môme  l'histoire  de  ses  seigneurs 
fait  revivre  la  vie  du  moyen  âge  dans  ce  qu'elle  a  de 
plus  caractéristique.  Il  ne  peut  s'agir  d'étude  histo- 
rique dans  ce  simple  récit  d'une  promenade  d'explo- 
ration ;  mais  voyez  cette  scène  du  début  du  xiv«  siècle  : 

Le  baron  Erard,  assisté  du  comte  de  Sancerre, 
Dreux  de  Mello,  Miles  de  Noyers,  sénéchal  de 
Champagne  et  de  Brie,  défait  le  puissant  Oudard,  sire 


—  200  - 

de  Montai  gu,  cadet  de  la  maison  capétienne  des  anciens 
ducs  de  Bourgogne,  secouru  par  le  Dauphin  d'Au- 
vergne, les  trois  frères  de  la  seigneurie  de  Vienne  et 
Béraud  de  Mercœur,  qui  tombe  entre  ses  mains.  Mais 
les  fumées  du  triomphe  ne  se  sont  pas  dissipées  que 
les  redoutables  murailles,  qui  dédaignent  les  assauts 
furieux  des  hommes  d'armes,  s'ouvrent  devant  la  verge 
fleurdelysée  des  sergents  royaux  que  Philippe-le-Bel 
a  dépêchés  auprès  des  seigneurs  assez  osés  pour  régler 
leurs  différents  sans  l'agrément  du  roi,  et  les  vain- 
queurs vont  à  leur  tour  en  captivité.  Par  là,  se  mar- 
quent les  progrès  du  pouvoir  royal,  jadis  si  précaire, 
et  la  décadence  de  la  puissance  féodale,  qui  eut  cepen- 
dant quelques  revanches  passagères,  lorsque,  par 
exemple,  en  1315,  une  ordonnance  a  octroya  à  tout 
noble  homme  les  armes  et  les  guerres  quand  il  lui 
plairait  ».  Comme  les  choses  changent  d'aspect,  selon 
le  point  de  vue  sous  lequel  on  les  envisage  !  Notre 
instinct  démocratique  nous  porte  à  applaudir  aux  pro- 
grès de  la  puissance  royale,  car  les  petits  souffraient 
terriblement  des  luttes  entre  les  grands,  et  c'est  pour 
la  protection  des  gens  paisibles  et  des  cultivateurs  que 
le  grand  roi  saint  Louis  avait  publié  son  édit  de  1257 
sur  les  guerres  privées. 

Nous  ne  pouvons  songer  à  ce  règne  de  saint  Louis 
sans  nous  rappeler  ce  que  ces  temps,  si  calomniés  par 
l'ignorance  ou  la  mauvaise  foi,  eurent  de  glorieux  et 
de  fécond  ;  ils  marquèrent,  pour  les  habitants  de  Saint- 
Verain,  un  événement  heureux  et  bien  digne  d'être 
noté  :  En  1359^  Hugues  de  Saint- Verain  et  Isabeau, 
sa  femme,  d'accord  avec  l'évêque  d'Auxerre,  déclarent 
«  quitter  à  perpétuité  la  mainmorte  et  tel  droit  qu'ils 
pouvaient  avoir  sur  les  bourgeois,  manants  et  habi- 
tants de  Saint-Verain-les-Boys,  en  quelques  lieux 
qu'ils  fussent,  pour  raison  de  ladite  mainmorte..*  »  Ce 


-  201  - 

fut  la  charte  des  habitants  de  Saint- Verain  et  l'origine 
de  leurs  franchises. 

C'était  l'époque  des  croisades,  et  aucune  pièce  histo- 
rique ne  relate,  que  nous  sachions,  la  participation  de 
Saint- Verain  ;  mais  les  noms  de  Jéricho,  Bethléem, 
Jérusalem,  Nazareth  qu'ont  retenus  des  fermes  ou  des 
hameaux,  ne  permet  pas  de  penser  que  les  ancêtres 
des  habitants  de  ces  contrées  soient  restés  indifférents 
&  la  croisade  prôchée  par  saint  Bernard  au  temps  de 
Gibaud,  l'un  des  plus  illustres  seigneurs  de  Saint- 
Verain,  homonyme  de  celui  qui,  cent  ans  plus  tôt, 
fonda  la  formidable  forteresse. 

On  ne  songera  sans  doute  pas  à  s'étonner  que  les 
seigneurs  de  Saint- Verain  n'aient  pas  toujours  fait  de 
leur  puissance  un  usage  digne  d'être  approuvé.  En 
1411,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  précédemment,  Jean 
de  Châlon,  capitaine  du  château  de  Saint- Verain  pour 
le  duc  d'Orléans,  détruisit  l'abbaye  de  Saint-Laurent 
et  emmena  prisonniers  les  religieux  et  les  habitants, 
ce  qui  ne  lui  porta  pas  bonheur,  non  plus  d'ailleurs 
qu  a  Pierre  de  Courtenay  et  à  ses  Cottereaux,  car 
c(  environ  ce  temps-là,  dit  D.  Viole,  le  château  de 
Saint- Verain,  qui  était  l'une  des  plus  fortes  places  de 
Bourgogne,  fut  démoli  en  sorte  qu'il  ne  subsiste  plus 
aujourd'hui  que  par  ses  ruines  qui  donnent  témoignage 
de  ce  qu'il  a  été  autrefois  ». 

Ce  furent  les  guerres  de  religion  qui  portèrent  le 
dernier  coup  â  Saint- Verain  ;  en  1576,  une  armée  de 
Suisses  et  d'Allemands,  la  prétendue  Réforme  pactisa 
toujours  avec  les  étrangers ,  s'empara  de  la  place 
moitié  par  force,  moitié  par  artifice,  et  massacra  la 
garnison  avec  les  habitants  de  la  ville  qui  s'y  étaient 
réfugiés.  Ce  fut  la  fin,  et  Saint-Verain  ne  joua  plus 
depuis  aucun  rôle;  au  xv«  siècle-,  la  baronnie  avait 
disparu ,    absorbée  par    le    comté  de  Nevers  ;    au 


—  202  - 

XVI*  siècle,  la  ville  bourgeoise  était  anéantie  ""par  la 
guerre  civile.  Il  ne  resta  plus  que  la  chapelle  et  l'église 
avec  les  reliques  qui  attirèrent  longtemps  encore  la 
population.  C'est  l'idée  religieuse  qui  avait  présidé  i 
la  fondation  de  Saint-Verain  ;  c'est  elle  qui  la  sou- 
tint jusqu'au  bout.  Eternelle  leçon  éternellement 
méconnue  I 

L'église,  du  style  roman  de  transition,  offre  plu- 
sieurs des  caractères  de  l'architecture  cistercienne, 
sans  doute  à  cause  du  voisinage  de  Roches,  filiation 
de  Clteaux.  Au  temps  où  M.  de  Soûl  trait  en  a  fait  la 
description  dans  son  classique  Répertoire  archéolo- 
gique, la  fenêtre  centrale  du  chevet  était  bouchée  ; 
elle  a  été  depuis  réouverte  et  garnie  d'un  vitrail  du 
xup  siècle,  retrouvé  en  démolissant  la  maçonnerie  qui 
remplissait  la  baie.  Pourquoi  ce  commencement  de 
restauration  n'a-t-il  pas  été  continué  ?  le  presbytère 
lui-môme  est  inhabitable,  ce  qui  prive  la  paroisse 
d'un  curé...  Situation  déplorable  i  tous  égards. 

C'est  à  Saint- Verain  que  se  fit  la  dislocation  de  la 
caravane  qui  n'était,  du  reste,  pas  nombreuse,  puis- 
qu'elle ne  comptait  que  six  personnes.  Un  plus  grand 
nombre  d'excursionnistes  étaient  inscrits,  mais  des 
empêchements,  des  plus  sérieux,  étaient  survenus  à 
la  dernière  heure.  Si  tout  autre  historiographe  avait 
été  chargé  de  la  relation,  il  n'aurait  pas  eu  de  peine  & 
démontrer  à  quel  point  les  absents  ont  eu  tort. 

Albert  MARON. 


—  203- 

Le  travail  qui  précède  était  complètement  terminé 
lorsque  M.  l'abbé  Camus,  vicaire  à  Saint-Jacques  de 
Cosne,  à  l'obligeance  duquel  nous  devions  déjà  d'utiles 
renseignements,  nous  fit  parvenir  de  nouveaux  docu- 
ments dont  nous  avons  tiré  ce  qui  suit  : 

CHAPELLE  SAINT-FIRMIN 

Il  y  avait,  à  côté  du  pont  Saint- Agnan,  à  Cosne, 
vis-à-vis  l'Hôtel-Dieu,  une  chapelle  dont  il  ne  reste 
depuis  longtemps  aucun  vestige  et  qui  a  môme  com- 
plètement disparu  de  la  mémoire  des  hommes  ;  il 
appartient  à  l'archéologue  et  il  lui  plaît  de  réparer  de 
tels  oublis. 

Aussi  bien,  deux  siècles  et  demi  se  sont  écoulés 
depuis  la  destruction  accidentelle  de  cet  oratoire  : 
«  Le  23  février  1658,  lit-on  dans  les  registres  de  la 
paroisse,  la  rivière  du  Noin  (remarquons  cette  ortho- 
graphe qui  donne  bien  la  prononciation  usuelle),  qui 
passe  entre  la  ville  et  le  faubourg  Saint-Agnan  de 
cette  ville  de  Cosne,  fut  si  violente  et  furieuse  qu'elle 
abattit  le  pont,  emporta  la  maison  de  Talbon,  de 
Garnier,  de  M.  Vaillant,  de  Mlle  Guy  on,  des  Trois- 
Rois,  et  plusieurs  autres  avec  tous  les  meubles  qui 
étaient  dans  lesdites  maisons,  de  plus  elle  abattit  et 
engloutit  la  chapelle  Saint-Firmin,  la  moitié  de  l'Hôtel- 
Dieu,  et  fit  une  grande  brèche  à  la  chaussée  qui  est 
entre  ladite  rivière  de  Noin  et  celle  de  la  Loire,  et 
plusieurs  autres  ravages  qui  montent  pour  le  moins  à 
la  somme  de  150»000  livres  ». 

Le  curé  de  cette  époque,  M.  Tolleron,  ajoute  en 
marge  cette  curieuse  mention  :  «  Pour  comble  de  mal- 
heur, l'année  suivante  (1659),  le  premier  jour  d'août, 
un  méchant  garnement  du  nom  de  Duplay ,  suppôt  des 
partisans  Maltoutiers  et  Gabeloux,  vint  encore  dans 


-  204  — 

cette  yiUe^  envoyé  par  ces  ennemis  du  peuple  et  de 
TËtat,  et  il  ruina  entièrement  la  ville  et  ses  habitants, 
sans  sujet  et  sans  cause  ».  Cela  ne  donne  pas  une  haute 
idée  de  la  façon  dont  l'impôt  se  levait  à  Cosne  à  cette 
époque  ;  il  serait  curieux  de  connaître  des  détails  sur 
Texpédition  de  <x  ce  mauvais  garnement  » . 

Quelque  trente  ans  plus  tard,  la  chapelle,  quoique 
détruite,  était  encore  présente,  du  moins  par  quelques 
vestiges,  aux  yeux  des  habitants,  et  la  cent  quaran- 
tième reconnaissance  du  terrier  de  Cosne,  composée 
en  1683,  fait  mention  d'une  maison  située  proche  le 
pont  du  faubourg  Saint-Agnan,  par  le  devant  du 
grand  chemin  de  Paris  à  Lyon,  d'autre  part  à  la  rivière 
du  Nohain,  passant  sous  ladite  maison,  d'autre  à  une 
ruelle  de  la  chapelle  Saint-Firmin. 

Mais  cinquante  ans  plus  tard,  la  pauvre  chapelle  ne 
vit  plus  qu'à  l'état  de  souvenir  déjà  bien  effacé  ;  le 
11  mars  1739,  les  officiers  du  bailliage  de  Cosne  firent 
sous  le  bon  plaisir  de  Monseigneur,  un  bail  au  sieur 
François  Gandré,  contrôleur  des  actes,  d'un  terrain, 
dépendant  d'une  petite  maison  située  vis-à-vis  de 
THôtel-Dieu  de  Cosne,  derrière  l'endroit  où  était  autre- 
fois  la  chapelle  de  Saint-Firmin. 

Depuis,  c'est  la  nuit  noire  de  l'oubli  total  :  M.  Le- 
bœuf  qui,  dans  son  Histoire  ecclésiastique  et  civile 
d'Auxerre,  publiée  en  1743,  n'a  omis  aucune  des  églises 
et  chapelles  de  Cosne,  ne  parle  pas  de  celle  de  Saint- 
Firmin.  Il  faut  du  reste  penser  que  cet  oratoire  n'avait 
jamais  été  très  important,  car  un  sieur  Duplessis  qui, 
dans  son  testament  du  15  août  1504,  avait  été  fort  exact 
à  faire  des  legs  à  chacune  des  églises  de  Cosne,  et 
même  à  quelques-unes  des  environs,  ne  fait  aucune 
mention  de  celle  de  Saint-Firmin.  L'exiguité  de  la 
chapelle  a  du  reste  seule  permis  qu'elle  fût  engloutie 
par  une  rivière  telle  que  le  Nohain  ;  en  tout  cas,  il 


■ 

I 

/ 


—  205  — 

était  grand  temps,  ce  nous  semble,  d'interrompre 
la  prescription  de  Toubli  qui  paraissait  en  bonne  voie 
de  s'acquérir. 

CHAPELLE  NOTRE-DAME-DE-GALLES 

M.  Lebœuf,  auteur  de  l'ouvrage  plusieurs  fois  cité 
précédemment,  conteste  l'antiquité  et  l'origine  géné- 
ralement admises  de  ce  sanctuaire  ;  il  se  fonde  sur  ce 
qu'à  l'époque  où  il  écrivait,  c'est-à-dire  vers  le  milieu 
du  xvni'^  siècle,  il  n'y  avait  rien  dans  l'édiSce  qui 
remontât  à  plus  de  deux  cent  cinquante  ans.  Il  n'en  est 
pas  moins  vrai  que  cette  chapelle  existait  antérieure- 
ment à  l'évèque  Humbault,  puisqu'il  est  dit  que  ce 
prélat  l'orna  et  l'enrichit.  Un  autre  évêque  d'Auxerre, 
F.  Cassinel,  porta  en  1385  un  règlement  qui  disposait 
que  toute  la  cire  offerte  dans  la  chapelle  de  Notre- 
Dame-de-Galles  appartiendrait  au  chantre  de  la  collé- 
giale de  Cosne. 

La  date  la  plus  lointaine  qu'admettrait  M.  Lebœuf 
sarait  celle  de  l'épiscopat  de  Jean  Baillet  (1477-1513), 
car  il  signale  les  armoiries  de  cet  évoque  en  plusieurs 
endroits  de  la  chapelle,  savoir  au-dessus  du  grand 
portail  et  à  plusieurs  vitraux  ;  l'édifice  est  effective- 
ment du  style  de  cette  époque,  mais  ce  pourrait  être 
la  date  de  la  restauration  ou  de  la  réédification.  En 
tout  cas,  la  chapelle,  dont  l'existence  antérieure  est 
démontrée,  comme  nous  venons  de  le  voir,  eût  été 
située  ailleurs,  ce  qui  n'est  guère  probable,  car  on  n'en 
a  jamais  relevé  les  traces  et  il  n'en  est  parlé  nulle 
part. 

Un  certain  nombre  de  chapelains  étaient  attachés  à 
ce  sanctuaire  ;  le  testament  précité  du  noble  homme 
Duplessis  accorda  un  écu  d'or  à  cinq  d'entre  eux  : 


I 

i 


—  206  — 

mesures    Martin   Roux»    Vincent    Pailieron,    Louis 
Caillot;  Jacques  Cotaud  et  Jacques  Belin. 

La  dévotion  à  Notre-Dame-de-Galles  semble  avoir 
été  assez  suivie^  car,  malgré  la  pénurie  de  documents 
conservés  à  Cosne,  nous  voyons  encore  Jacques  Bailly, 
marchand  en  ladite  ville,  léguer,  par  testament  en 
date  du  27  octobre  1699,  à  la  fabrique  de  Cosne,  en 
considération  de  ce  qu'il  sera  inhumé  en  la  chapelle 
de  Notre-Dame-de-Galles,  le  bien  à  lui  appartenant, 
sis  au  lieu  de  Parigny,  paroisse  d'AUigny,  consistant 
en  b&timents,  demeure,  cours,  jardins,  chenevières, 
terres  labourables  et  non  laboiu'ables,  prés  et  p&tures, 
le  tout  ainsi  que  le  dit  bien  se  poursuit  et  comporte 
à  la  charge  par  les  procureurs  fabriciens  de  l'église 
Saint-Jacques  de  faire  dire  annuellement  et  à  perpé- 
tuité une  messe  basse  de  Requiem  dans  la  chapelle  de 
Notre-Dame-de-Galles.  Le  môme  testateur  ordonne 
qu'il  sera  placé  dans  la  chapelle  une  tombe  sur  laquelle 
seront  inscrits  son  nom,  le  jour  de  son  décès,  son  &ge 
et  ladite  fondation.  Il  veut  aussi  qu'il  soit  placé,  vis-à- 
vis  de  sa  tombe,  une  épitaphe  sur  laquelle  seront 
inscrits  en  lettres  d'or  ladite  fondation  et  son  testa- 
ment. Ses  volontés  furent  fidèlement  exécutées  et, 
dans  les  derniers  temps,  alors  que  la  chapelle  était 
profanée  et  tombée  à  l'usage  d'écurie,  on  pouvait 
encore  lire  l'inscription,  bien  qu'elle  eût  été  grattée  et 
endommagée. 

La  chapelle  de  Notre-Dame-de-Galles  était,  en  effet, 
devenue  l'écurie  de  l'hôtel  du  Grand-Cerf  ;  plusieurs 
démarches  furent  faites  pour  la  sauver  en  la  mettant 
sous  la  sauvegarde  soit  de  l'Etat,  soit  de  la  commune  ; 
deux  préfets  donnèrent  môme  les  meilleures  assu- 
rances ;  mais  la  lenteur  des  formalités  administratives 
et  l'indifférence  du  conseil  municipal  x^q  permirent 


—  207  — 

pas  d'aboutir.  En  1897,  la  façade  de  la  chapelle  fut 
démolie  pour  cause  d'alignement. 

Les  beaux  vitraux  des  verrières  de  Tabside,  qui 
représentaient  la  généalogie  de  Notre-Seigneur  Jésus- 
Christ,  se  dispersèrent  chez  quelques  amateurs. 
L'église  de  Saint-Père  acquit,  on  ne  sait  comment, 
quelques  pièces  qui  furent  mises  en  place  avec  le  soin 
et  l'intelligence  que  nous  avons  vus. 

LE  PALAIS  ÉPISCOPAL 

Il  parait  que  l'emplacement  où  se  trouvait  le  palais 
épiscopal  b&ti  par  l'évoque  Humbault,  à  la  fin  du 
XI*  siècle,  a  été  l'objet  de  vives  discussions  locales  ;  il 
ne  parait  cependant  y  avoir  aucun  doute  à  cet  égard  ;  un 
dénombrement  fait  au  xvn»  siècle  mentionne  «  l'an- 
cienne maison  épiscopale  oU  est  contenu  Vauditoire  » 
et  différents  autres  textes  plus  anciens,  où  se  trouvent 
des  références  topographiques,  confirment  cette  indica- 
tion suffisamment  catégorique  d'ailleurs  par  elle-même. 

Le  palais  épiscopal  devint  tour  à  tour  couvent, 
palais  de  justice,  et  hôtel  de  ville  jusqu'à  la  construc- 
tion de  la  mairie  actuelle. 

L'HOTEL-DIEU 

L'origine  de  cette  maison,  située  sur  la  paroisse 
Saint-Agnan,  ne  nous  est  pas  connue  ;  nous  savons 
seulement  que  l'Hôtel-Dieu  existait  déjà  au  début  du 
XVI»  siècle,  puisqu'on  1504,  Claude  Duplessis  lui  laissait 
par  testament  diverses  libéralités  ;  il  y  existait  une  cha- 
pelle que  le  pieux  donateur  n'eut  garde  d'oublier. 

Les  Sœurs  d«  la  Charité  de  Nevers  ont  commencé 
à  desservir  l'Hôtel-Dieu  de  Cosne  en  1782,  et  sœur 
Prazède  Bernard    fut  leur  première  supérieure.  La 


—  208  — 

maison  avait  alors  un  peu  plus  de  1,300  livres  de 
revenus  placés  en  rentes  sur  TEtatet  administrés,  sous 
le  titre  de  Dot  des  Pauvres^  par  les  échevins,  les  deux 
curés  et  quelques  notables. 

Ainsi  que  cela  se  pratiquait  couramment  sous  Tan- 
cien  régime,  à  l'assistance  publique  était  jointe  Tins- 
truction;  dans  plusieurs  documents  des  premières 
années  du  xviii«  siècle,  il  est  question  de  subventions 
municipales  à  l'école  des  filles  établie  à  THôtel-Dieu. 

LA  MALADRERIE  DE  COSNE  OU  HERMITAGE 

Il  est  possible,  mais  non  pas  certain,  que  ce  soit  de  la 
chapelle  de  la  maladrerie  de  Cosne  qu'il  est  question 
dans  un  accord,  de  l'année  1313,  entre  Hervé  de  Donzy^ 
seigneur  de  Gien,  et  l'évèque  d' Auxerre,  mais  elle  exis- 
tait sûrement  au  xiv*  siècle,  car  elle  est  nommée  dans 
impouillé  du  diocèse  d' Auxerre,  rédigé  suivant  les  tra- 
ditions et  usages  du  xv*  siècle,  ainsi  qu'en  fait  foi  la 
copie  écrite  en  l'an  1535  :  In  leprosaria  Conadœ 
est  quœdam  capellania  cujus  collatio  pleno  jure  per- 
tinet  ad  Dominum  episcopum,  nec  revocabilis  ad 
nutum.  Ce  qui  n'empêcha  pas  le  duc  de  Nivernais» 
en  l'année  1675,  de  comprendre,  dans  l'énumération 
des  droits  généraux  dépendant  de  son  ch&tel  de  Cosne, 
la  collation  et  entière  disposition  de  la  chapelle  de 
Saint-Lazare,  ^  ancienne  fondation  de  nos  seigneurs 
les  Ducs  et  Comtes  de  Nevers  » . 

Cette  léproserie,  encore  occupée  en  1504  par  des 
ladres,  objet  des  inépuisables  libéralités  testamentaires 
de  Claude  Duplessis  (une  rue  de  Cosne  porte-t-elle 
au  moins  son  nom?),  fut  réunie  à  THôtel-Dieu  à 
une  époque  indéterminée.  Les  biens  qui  en  dépen- 
daient n'étaient  pas  très  considérables,  si  l'on  en  juge 
par  certains  baux  du  xvnv^  siècle  sans  grand  intérêt. 


-.  209  - 


LES  BÉNÉDICTINES  DE  COSNE 

En  Tannée  1649,  Pierre  de  Broc,  évoque  d'Auxerre, 
ayant  fait  revenir  les  bénédictines  d'Auxerre  de 
Charentenet ,  leur  maison  de  campagne ,  où  elles 
s'étaient  retirées  depuis  les  guerres  de  la  Ligue,  les 
engagea  à  prendre  la  réforme  du  Val-de-Grâce ,  en 
môme  temps  qu'elles  rentraient  dans  leur  monas- 
tère de  Saint- Julien  qui  venait  d'être  rétabli  à  neuf. 
Une  des  religieuses  qui  avait  le  plus  contribué  alors 
à  ladite  réforme  établit  peu  de  temps  après,  sous  la 
môme  règle,  une  communauté  au  faubourg  Saint- 
Agnan  de  Cosne,  sous  les  auspices  du  prélat.  Nicolas 
Colbert,  qui  occupa  le  siège  épiscopal  d'Auxerre  de 
1670  à  1676,  fit  fermer  par  de  hautes  murailles  le 
monastère  des  bénédictines  créé  en  1665. 

En  1722,  il  y  avait  huit  religieuses  :  dames  Fran- 
çoise de  Blutteau,  prieure  perpétuelle;  Madeleine 
Billacois  ,  sous  -  prieure  ;  Marie  Lefèvre,  Claudine 
Guérin,  Marie  de  Jouvart,  Elisabeth  Renaud,  Fran- 
çoise Saujet  et  Marguerite  Maillard.  Etaient  prieures 
en  1678^  dame  Marie  de  la  Barre  et,  en  1738,  dame 
Marguerite  Dargouges  de  Grateau. 

Les  bénédictines  de  Cosne  embrassèrent  les  idées 
jansénistes,  sous  l'influence  de  leur  directeur  spiri- 
tuel, M.  Rigault,  curé  de  Saint-Père,  qui  professait 
ces  doctrines,  ainsi  qu'un  bon  nombre  des  prêtres  du 
diocèse;  malgré  la  défense  formelle  de  l'évêque  qui 
leur  avait  interdit  de  recevoir  M.  Rigault,  les  béné- 
dictines s'obstinèrent  dans  leur  erreur  et  ne  parais- 
sent pas  môme^  dans  leur  désobéissance,  avoir  gardé 
les  formes  ;  elles  crurent,  sans  doute,  de  leur  hon- 
neur de  rester  fidèles  à  leur  directeur,  sujet  à  ce  que 

T.  TL^  a*  série.  14 


les  jansénistes ,  dangereux  novateurs  dans  TEglise, 
appelaient  la  persécution. 

A  la  Révolution,  le  couvent  des  bénédictines  subit 
le  sort  commun  des  biens  nationaux  et  fut  longtemps 
occupé  par  un  pensionnat  ;  un  moulin  sur  la  rivière 
de  Nohain  en  dépendait. 

Tels  sont  les  renseignements  qui  nous  ont  été 
fournis  depuis  le  jour  où  la  partie  principale  de  ce 
travail  a  été  soumise  à  la  Société  Nioernaise  ;  ils 
intéresseront  particulièrement  les  habitants  de  Cosne, 
mais  ils  ne  sont  pas  dépourvus  d'un  intérêt  plus 
général  et  d'ailleurs  plus  l'histoire  locale  sera  connue 
dans  ses  détails ,  plus  nous  arriverons  à  connaître  et 
surtout  à  comprendre  l'histoire  provinciale  et  géné- 
rale. A.  M- 


>■  t>— 


-  211  - 


U  TAILLE  ET  LA  CAPITATION 

DANS  LA 

PAROISSE  DE  CHAMPVERT  EN  1779 


Au  nombre  des  impôts  qui,  de  l'époque  féodale  à 
la  Révolution,  pesèrent  lourdement  sur  le  peuple, 
figurent  la  taille  et  la  capitation. 

Nous  dirons  un  mot  de  chacune  de  ces  redevances 
avant  d'aborder  l'examen  d'un  Rôle  dressé,  en  1779, 
par  les  collecteurs  de  la  paroisse  de  Champ  ver  t. 

Taille.  —  La  taille,  établie  par  Charles  VII,  fut, 
à  l'origine,  uniquement  affectée  à  l'organisation  des 
troupes  permanentes  ;  mais  cet  impôt,  ayant  ensuite 
changé  de  destination,  fut  remplacé,  en  1549,  par  une 
redevance  spéciale  à  l'entretien  de  l'armée  :  le  taillon, 
ou  annexe  de  la  taille. 

La  taille,  ou  impôt  foncier,  pouvait  être  réelle^ 
personnelle  ou  mixte.  Dans  le  premier  cas,  on  la  per- 
cevait sur  les  meubles  et  les  immeubles  ;  en  second 
lieu,  elle  était  due  par  les  industriels,  commerçants  et 
artisans,  en  raison  de  leur  travail  ;  enfin,  elle  frappait 
simultanément  les  terres  et  les  revenus. 

De  plus,  elle  était  arbitraire  puisque  la  somme  à 
payer  —  dépendant  du  bon  plaisir  du  roi  et  n'étant 
pas  toujours  calculée  sur  le  revenu  ou  la  valeur  des 
biens  —  pouvait  varier  d'une  année  à  Tautre. 

Enfin,  contrairement  à  toute  justice^  les  nobles, 
le  clergé  et  les  magistrats  qui  avaient  acheté  leurs 


charges,  étaient  exempts  de  cet  impôt,  fixé  chaque 
année  par  le  roi,  ses  conseillers  ou  ses  ministres,  puis 
réparti  entre  les  provinces  (1). 

Dans  celles-ci,  le  rôle  était  dressé  par  les  Etats  ;  et, 
dans  les  pays  d'Election,  par  les  intendants.  Puis, 
les  collecteurs,  ordinairement  choisis  par  les  habitants 
assemblés  (2),  taxaient  chaque  individu  selon  ses 
moyens  présumés  et  percevaient  ensuite  l'argent  (3). 

Mais  cette  répartition  n'ayant  point  de  base  fixe, 
intendants  et  collecteurs  pouvaient  soulager  ou  charger 
qui  bon  leur  semblait  (4). 

La  besogne  de  ces  receveurs  improvisés  était 
d'ailleurs  compliquée  et  très  délicate  ;  et,  bien  que 
l'instruction,  le  prestige  ou  l'indépendance  leur  fissent 
généralement  défaut,  ils  étaient  responsables  du  mon- 
tant total  du  rôle  qui  leur  était  remis  (5). 

Il  fallait  donc  que  toutes  les  sommes  qui  y  figuraient 
fussent  entièrement  acquittées  ;  aussi  le  poids  de  cet 
impôt  —  établi  d'après  le  nombre  des  feux  —  retom- 

(1)  Gela  s'appelait  «  délivrer  le  brevet  ». 

(2)  Si  TAssemblée  n'en  désignait  point,  ils  étaient  nommés  d'office  par 
les  intendants. 

(3)  Les  collecteurs  s'assemblaient  généralement  au  cabaret  afin  de 
décider  entre  eux  le  chiffre  à  fixer  pour  chaque  habitant  ;  mais  ils  res- 
taient souvent  plusieurs  mois  sans  se  mettre  d'accord.  Quand  le  recouvrement 
était  décidé,  ils  sortaient  tous  ensemble  pour  procéder  à  la  levée  de  l'impôt, 
et  cela,  afin  d'éviter  les  injures  et  les  coups.  Il  leur  arrivait  même,  en 
parcourant  les  rues  de  se  rencontrer  avec  les  collecteurs  de  l'année  pré- 
cédente, qui  n'avaient  point  encore  achevé  leur  recouvrement,  tellement 
leur  passage  soulevait  d'imprécations  et  de  cris  de  la  part  des  paysans. 

(4)  Cette  latitude  fut  la  cause  d'injustices  regrettables  ;  on  voyait,  en 
effet,  des  paroisses  riches,  possédées  ou  protégées  par  de  hauts  fonc- 
tionnaires ou  de  grands  seigneurs,  moins  frappées  que  certaines  commu- 
nautés pauvres,  dépourvues  d'influences. 

(5)  Au  milieu  du  xvii«  siècle,  les  collecteurs  de  certaines  paroisses 
avaient  pour  rôle  un  bdton  carré  de  deux  doigts  de  large,  long  de 
deux  aunes,  sur  lequel  ils  faisaient  des  crans  au  couteau  pour  indiquer 
)es  sommes  dues  et  les  paiements  effectués. 


—  213  — 

bait-il  lourdement  sur  les  cultivateurs  indépendants 
et  les  petits  artisans. 

Cela  explique  pourquoi  certains  taillables  cher- 
chaient à  se  faire  croire  plus  pauvres  qu'ils  ne  Tétaient 
réellement,  simulant  la  misère  pour  payer  moins  ou 
versant  des  acomptes  dérisoires  (1). 

Et,  s'il  arrivait  que  des  paysans  paient  mal  ou  pas 
du  tout  et  que  les  collecteurs  refusent  de  parfaire  le 
montant  de  leur  rôle,  on  emprisonnait  ces  derniers 
sans  pitié  (2). 

«  C'est  ainsi,  disait  avec  raison  Turgot^  qu'on  rédui- 
sait successivement  à  la  misère  toutes  les  familles 
aisées  d'un  village  ». 

Capitation.  —  Quant  à  la  capiiation,  ou  cote 
personnelle,  elle  devait  être  calculée  sur  le  revenu  de 
chacun  ;  mais  le  clergé  s'en  fit  exempter  en  versant  une 
somme  égale  à  la  contribution  de  six  années. 

De  leur  côté,  les  nobles  obtinrent  que  leur  part  de 
cet  impôt  serait  déterminée  par  l'intendant  ;  celui-ci 
les  taxait  donc  d'oflBce  ou  plutôt,  par  politesse,  il 
acceptait  l'évaluation  faite  par  les  seigneurs  eux-mêmes, 
lesquels,  cela  se  conçoit,  se  taxaient  modérément. 

(1)  Quand  l'intendant  trouvait  trop  lente  à  son  gré  la  rentrée  des  impôts, 
il  envoyait  dans  la  paroisse  une  escouade  d'huissiers  et  de  sergents  ;  mais 
comme  souvent  on  payait  la  course  des  uns  et  qu'on  faisait  boire  les 
autres,  ils  repartaient  sans  avoir  inquiété  personne.  11  en  était  quelque- 
fois de  même  à  plusieurs  reprises,  ce  qui  constituait  pour  la  paroisse  une 
certaine  dépense.  Â  la  fin  cependant ,  Tintendant  se  fâchait  ;  alors  les 
huissiers  retournaient  au  village,  saisissant  tous  les  bestiaux  sans  s'occuper 
qui  avait  ou  n'avait  piis  payé,  les  habitants  étant  solidaires  entre  eux. 
Quand  la  vente  des  animaux  ne  suffisait  pas,  on  enlevait  les  meubles  des 
malheureux,  malgré  leurs  lamentations  ;  on  décrochait  même  les  portes  et 
les  volets  de  leurs  cabanes,  démolissant  celles-ci  au  besoin  pour  en 
vendre  les  briques  et  les  poutres. 

(2)  C'était  encore  aux  frais  des  habitants  que  les  huissiers  faisaient 
mettre  en  prison  les  collecteurs,  qui  n'en  sortaient  que  malades  et  ruinés 
pour  faire  place  à  d'autres  Tannée  suivante. 


-  214  - 

C'est  ainsi  que  cette  redevance  fut  versée  presque 
exclusivement  par  le  peuple,  sous  le  nom  de  capitation 
iaillable  (1). 

Voyons  maintenant  comment,  dix  ans  avant  la  Ré- 
volution, la  taille  et  la  capitation  se  répartissaient  entre 
les  habitants  de  Champvert. 

Le  rôle  que  nous  allons  examiner  fut  dressé  le 
18  mars  1779  (2).  Des  trente-deux  feuillets  rectangu- 
laires, cotés  et  paraphés,  qui  le  composaient  jadis,  les 
douze  premiers  ont  disparu  complètement  avec  la 
moitié  de  la  couverture  (3)  ;  les  dix  feuillets  suivants 
sont  à  demi  rongés  par  Thumidité  et  la  dent  des  rats  ; 
le  reste  est  à  peu  près  intact. 

Le  montant  de  la  taille  est  porté  au  verso,  et  le 
chiffre  de  la  capitation  au  recto  de  chaque  feuillet.  Ces 
deux  mots  se  répètent  en  haut  et  dans  la  marge  de 
chaque  page  correspondante  où  on  a  également  inscrit 
l'argent  versé. 

Le  total  des  sommes  à  percevoir  est  fait  en  livres  et 
en  sols  au  bas  de  chaque  page  et  sans  report.  Les  noms 
des  taillables  ont  été  biffés  après  le  paiement  intégral, 
certains  d'entre  eux  s'étant  acquittés  en  trois  fois. 

Les  parties  restées  intactes  des  feuilles  12  à  19,  in- 
diquent que  les  taillables  étaient  groupés  par  villages, 
et  ceux-ci,  inscrits  au  hasard,  sans  ordre  alphabétique. 

Dans  cette  énumération,  on  rencontre  en  sous-titre  : 
Im  Machine;  ce  lieu,  alors  de  peu  d'importance,  dé- 
pendait de  la»  paroisse  de  Champvert. 


(1)  A.  Hambaud,  Histoire  de  la  civilisation  française. 

(2)  Nous  en  devons  la  communication  à  Tobligeance  de  M.  Louis  Hoblin, 
des  Nolats,  qui  Tavait  découvert  dans  les  intéressantes  archives  de  feu  son 
père,  lequel  fut  longtemps  adjoint  de  la  commune  de  Champvert. 

(3)  Cette  couverture  était  un  acte  de  bordelage  sur  parchemin  dressé  au 
XVI*  sièdci  et  relatif  à  des  héritages  situés  à  Champvert. 


-  215  - 

Les  ((  biens  venants  »  (1),  qui  s'appliquent  à  cinq  tailla- 
blés,  sont  au  feuillet  32  ;  leur  montant  s'élève  à  11  livres 
16  sols  pour  la  taille,  et  à  12  livres  19  sols  pour  la 
capitation. 

C'est  à  la  suite  de  ces  totaux  que  se  trouvent  ces 
deux  mentions  : 

«  Exempt  :  M.  le  Curé. 

»  La  paroisse  est  composée  de  cent  quatre-vingt- 
dix-huit  cottes  ou  feux  ». 

Puis  on  lit  cette  formule,  également  répétée  à  la  page 
suivante,  avec  la  variante  du  mot  capitation  :  «  Fait, 
calculé  et  arresté  le  présent  roUe  de  taille,  qui  est 
conforme  à  la  commission,  en  présence  des  collecteurs 
qui  ont  déclarés  ne  sçavoir  signer  de  ce  enquis  (2). 
A  Decize,  ce  18  mars  1779  »  —  Signé,  Decray,  avec 
paraphe,  et  au-dessous  le  mot  :  Scribe. 

Vient  enfin  le  visa  de  l'élu  préposé  à  la  vérification 
du  rôle,  ce  qu'il  constate  simplement  pour  la  capitation 
par  ces  mots  :  «  Vérifié  le  29  mars  1779  )),  suivis  de  sa 
signature,  tandis  qu'au  bas  du  feuillet  32  —  le  dernier 
du  rôle  de  la  taille  —  il  inscrit  cette  longue  mention  : 
((  Vu,  calculé,  cotté,  paraphé,  le  présent  roUe  trouvé 
conforme  en  la  minute  et  monter  aux  sommes  portées 
par  la  commission,  dont  nous  permettons  la  levée,  à 
l'effet  de  quoy  le  déclarons  exécutoire  contre  les  y  dé- 
nommés, non  obstant  opposition  ou  appellation  quel- 
conque et  sans  y  préjudicier,  après  néanmoins  publica- 
tion faite  diceluy  a  lissue  delà  messe  ou  vespre  de 

(1)  Il  s'agit  évidemment  des  habitants  les  derniers  venus  dans  la  paroisse 
pour  s'y  fixer. 

(2)  En  présence  de  cette  déclaration,  on  est  tenté  de  se  demander 
comment  ces  collecteurs  illettrés  pouvaient  percevoir  les  sommeis  portées 
au  rôle  et  les  inscrire  en  marge  où  il  est  facile  de  constater  des  écritures 
différentes,  ce  qui  laisserait  supposer  que  plusieurs  d'entre  ces  collecteurs 
eurent  le  rôle  entre  mains. 


—  216  - 

paroisse,  du  jour  de  dimanche  ou  feiste.  Fait  par  nous, 
conseiller  du  roy  eslu,  à  Nevers,  le  29  mars  1779.  »  — 
Signé  :  Ferrand  de  la  Forest,  avec  paraphe  sembla- 
ble à  celui  qui  accompagne  la  cote  de  chacun  des 
feuillets  du  rôle. 

A  cet  examen  de  la  disposition  matérielle  du  registre, 
il  convient  d'ajouter  celui,  non  moins  intéressant,  des 
documents  qu'il  renferme,  ces  derniers  pouvant  servir 
non  seulement  à  l'histoire  de  Champvert  et  de  La  Ma- 
chine, mais  encore  de  terme  de  comparaison  pour 
l'assiette  de  la  taille  et  de  la  capitation  dans  d'autres 
paroisses. 

Ce  rôle  indique  que  le  second  impôt  était  plus  élevé 
que  le  premier.  On  y  rencontre,  en  outre,  un  certain 
nombre  de  noms,  qui  sont  ceux  de  familles  habitant 
encore  actuellement  Champvert  ou  La  Machine.  L'in- 
dication du  domicile,  de  la  profession  exercée  et  des 
biens  dont  ils  jouissaient  alors,  présente  aussi  son  uti- 
lité au  point  de  vue  de  l'histoire  locale. 

De  ce  rôle,  nous  avons  donc  extrait  les  notes  qui 
nous  ont  paru  les  plus  intéressantes  : 

Taille.  Capitation. 

Le  n*  JoUivot,  manœuvre  de 
la  thuillerie  de  Riéjot  ;  lad.  thuil- 
1er ie  appartenant  à  M.  de  Ver- 
neuil  (1),  de  laquelle  dépendent 
S  boisselées  (2)  de  terre,  jardin, 
chenevière  .  .• 8^  8^  16" 

Le  n^  Brelin,  laboureur  au 
domaine  de  Villecray 39^  15»       43M0» 

(1)  M.  de  Manmigny,  seigneur  de  Venieuil. 

(2)  La  boisselée  de  Decize  était  alors  de  6  ares  384  et  le  boisseau  de 
1  décalitre  361.  (Gillet,  Armuaire  de  Tan  X.) 


~  217  ~ 

Le  n^  Bourdin,  jouissant  du 
moulin  à  M.  de  Verneuil,  où  il  y 
a  un  petit  jardin  et  une  chêne- 
vière 351  391  17» 

Claude  Gelé,  marteleur  à  la 
forge  du  Ruau  Gaillard  (1)  et 
colecteur;  lad.  forge  à  M.  de 
Verneuil 8^  8^  16^ 

Jehan  Mathé  et  consorts,  logés 
dans  les  chambres  de  lad.  forge.  .30"  22* 

Claude  Boulizon,  laboureur  au 
domaine  du  Port 45^    2»       49^ 

Berger,  pontonnier,  jouissant 
du  port,  avec  une  petite  maison 
et  jardin  appartenant  à  M.  Mey- 
nis 71    4*         71  18» 

La  v^  Antoine  Ciron,  en  mai- 
son de  loyer  appartenant  à 
M.  Meynis 2^    4»         2^    8» 

Le  s^  Maheux,  propriétaire  à 
Roueterre  (2),  possède  une  mai- 
son et  un  grand  jardin 21^    8»       23^  11" 

Le  n^  Joly,  laboureur  au 
domaine  de  Roueterre 55^    4'       60M6» 

Le  n*  André,  laboureur  à 
Corcelles  ;  led.  domaine  apparte- 
nant à  M,  Legaingneulx ,  a 
2  charrues,  emblave  par  an 
18  razellées  (3)  de  terre  et  re- 

(1)  Le  Rio-GaUlard,  actuellement  dépôt  de  houille  des  minet  de  La 
Machine. 

(2)  Aujourd'hui  Rouëtard,  non  loin  de  Decize. 

(3)  La  razeUée  devait  être  une  mesure  locale  dont  la  superficie  nous  est 
encore  inconnue,  malgré  les  recherches  auxquelles  nous  nous  sommes 
livré.  —  Trévoux,  dans  son  Dictionnaire,  dit  que  la  raze  est  une  espèce 
de  grand  hoineau  ;  on  n'en  saurait  conclure  cependant  que  la  razeUée, 


-  218  — 

cueille  6  charoits  de  foin 60^  10»       6ff    8« 

Germain  Guay,  laboureur  à  la 
Fougère,  ledit  domaine  au  sieur 
Dougny,  a  2  charrues,  emblave 
15  razellées  de  terre  par  an  et  (d 

recueille  8  charoits  de  foin A8^  1»       53^    6" 

Jean  Auboy,  meunier  du  mou- 
lin de  la  Fougère 921    2»      1011    7» 

François  Fouillât,  manœuvre, 
en  maison  de  loyer  appartenant 
au  s' Robinet,  où  il  y  a  1  jardin 
et  1  chenevière gi  10»         2i  14» 

Joseph  Bourgeois,  fermier  du 
domaine  de  Marcy,  tant  pour  sa 
cotte   personnelle  (62i  14»)  que 

comme  la  hoisselée,  désigne  Tespace  de  terre  qu'on  peut  ensemencer 
avec  un  boisseau.  —  Du  Gange  rapporte  que  razelltim  indique  la  môme 
mesure  que  razeria,  razière  (terme  encore  usité  dans  le  Nord  de  la 
France),  mais  ne  domie  aucune  indication  de  grandeur.  —  Littré  et 
Maurice  de  La  Châtre  sont  muets,  dans  leurs  Dictionnaires,  sur  le  mot 
razellée.  —  L'Encyclopédie  du  xw^  siècle,  après  avoir  dit  a  que  la  quan- 
tité de  semence  que  pouvait  recevoir  le  sol  servait  souvent  de  base  à  son 
appréciation  »,  sgoute  :  «  Â  Dunkerque,  la  razière  vaut  159  1.  12,  el  à 
Saint-Omer,  431 1.  73  ».  il9-  vol.,  p.  90.) 

La  couverture  en  parchemin  du  présent  rôle  de  taille  nous  a  fourni 
quelques  indications.  —  C'est  une  reconnaissance  de  bordelage  du 
xvi«  siècle  concernant  des  héritages  sis  à  Champvert.  Le  mot  razellée 
y  figure  plusieurs  fois,  alternant,  —  comme  dans  le  rôle,  —  avec  celui 
de  boisselée  ;  et  on  y  lit  que  la  redevance  bordelière  se  composait  d'une 
certaine  somme  d'argent  et  d'un  «  reizcaul  de  froment  •.  —  Ce  dernier 
terme  devait  donc  correspondre  à  l'ensemencement  d'une  rezellée  de 
terre,  comme  le  boisseau  concordait  avec  la  boisselée.  —  On  a  émis 
devant  nous  cette  idée  que  la  razellée  ou  rezellée  pouvait  équivaloir  à 
la  demi-éoisselée,  et,  conséquemment,  le  reizeaul  au  demi-boisseau,  «- 
L'acte  de  bordelage  précité,  où  il  est  fait  mention  de  %  de  4  et  même  de 
4  rezcllées  1/2,  semble  indiquer  qu'il  n'y  a,  comme  étendue,  aucun 
rapport  exact  entre  les  mesures  de  boisselée  et  de  razellée,  la  grandeur 
de  cette  dernière  restant  jusqu'ici  indéterminée. 

(1)  Au-dessous  de  cet  article  figure,  à  la  capitation,  une  signature  très 
grossière  :  Martin,  qui  est  évidemment  celle  d'un  coUeeteur. 


--  219  — 

pour  son  droit  de  ferme  (5^  16'), 

faisant  en  tout 68^  10-        75^    8» 

(Ledit  domaine,  appartenant 
au  s'  Robinet,  a  2  charrues,  em- 
blave par  an  16  razellées  de  terre 
et  recueille  8  charoits  de  foin.) 

Paul  Lioup,  laboureur  au  do- 
maine Grosjean,  appartenant  au 
s'  Robinet,  a  2  charrues,  emblave 
par  an  20  razellées  de  terre  et    v 
recueille  8  ch.  de  foin 60^  19»        Q&  16* 

Le  n^  Dragne,  meunier  à 
Varioux,  ledit  moulin  apparte- 
nant aux  héritiers  Souiller,  où  il 
n'y  a  point  de  terre 11^    9»        12M2» 

Le  n*  Pannetier,  laboureur 
aux  Pages,  ledit  domaine  appar- 
tenant à  M.  Davrilly  (1),  a 
1  charrue,  emblave  10  raz.  de 
t.  et  recueille  6  ch.  de  foin! ....      20^  16»        29^    9" 

Le  sr  Rigny ,  régisseur  à  Roche, 
ne  possède  rien  dans  la  paroisse .       12^  13^    4' 

Le  n^  Garillarid,  laboureur  à 
Roche,  led.  d**®  appartenant  à 
M.  de  Roche 70^    4»        77116» 

Le  n^  Charier,  laboureur  aux 
Andrés,  led.  d°®  appartenant  à 
M.  de  Roche,  a  2  charrues,  em- 
blave 20  raz.  de  terre  par  an  et 
recueille  8  ch.  de  foin 56H2»        62^    6» 


(1)  Avrilly,  commune  de  Charrin,    ancienne   seigneurie  voisine   des 
Pages,  commune  de  ChampYert. 


—  220  - 

Le  n^  Bossut,  laboureur  à 
Vauvrille,  led.  d^  appartenant  à 
M.  de  Roche,  a  2  charrues,  em- 
blave par  an  18  raz.  de  t.  et 
recueille  8  ch.  de  foin 44^    8»       48^  17» 


LA  MACHINE 

Estienne  Desforges,  manœuvre 
et  propriétaire 5^  5^  10» 

Jean  Barbette,  en  maison  de 
loyer 15»  16» 

Claude  Tiraux,  prop'®,  possède 
une  petite  maison 8»  8» 

Louis  Poullinyer,  prop"^®,  pos- 
sède 1  m°°,  2  razellées  de  terre  et 
recueille  1  charoit  de  foin 13^  14^ 

,La  v^®  de  Jean  Desniaux, 
prop^«,  possède  1  petite  maison 
et  1  jardin 1^  1^    2» 

Esme  Barbette,  manœuvre  et 
prop",  possède  1  petite  maison 
avec  jardin  et  chenevière 1^  1^    2» 

Le  n^  Jean  Desniaux  possède 
une  petite  maison 2^    2»         2^    6» 

Jean  Henry,  prop™,  possède 
1  maison  et  6  b.  de  terre 6^  10»         7^    2» 

Claude  Gauteron,  prop™,  pos- 
sède 1  maison  avec  jardin,  che- 
nevière et  2  b.  de  terre 2^  2^    4" 

Louis  Roquelle,  maréchal  et 
prop",  possède  1  maison,  un 
jardin  et  4  b.  de  terre 6^  &    2" 


1 


—  2ai  - 


• 


François  Maillot,  manœuvre 
et  prop^®,  possède  1  petite  maison       1^  1^    2* 

Le  n^  Machecourt,  garde,  en 
maison  de  loyer  à  M.  le  Duc ....        1^  1^    2^ 

Léonard  Bonnet,  garde,  en 
maison  de  loyer  à  M.  le  Duc  (1).        1^  1^    2* 

Pierre  Bornay,  pauvre,  en 
maison  de  loyer 4"  5* 

Nicolas  Dubuisson,  manœuvre 
et prop'® ,  possède  1  petite  maison .  6"  ?• 

La  v^®  Guichard,  propriétaire, 
possède  une  petite  maison 1M5"         1^  13« 


CHAMPVERT 

Le  sieur  Guérin,  comme  fer- 
mier de  la  terre  de  Riéjot 15^  Itf  11* 

Le  s'  Texier,  fermier  du 
domaine  Miraux 4^  4^    8» 

Le  s' Edmond  Mouzat,  fermier 
du  d***  Grosjean 6^  6^  12* 

Germain  Gautron,  fermier  de 
Cherancy  (2) 1*  10»         1^  13« 

Michel  Delaud,  fermier  du 
domaine  Destampes  (3) 1^  10«         1^  13« 

Jean  Godemard,  fermier  du 
d»«  Picard li  1^    2« 

Pierre  Gauteron.  fermier  du 
bien  de  Noél  Gauteron,  en  Bornay        2^  2^    4» 

(1)  Le  dac  de  Nivernais  possédait,  en  effet,  outre  une  maison  près  de 
Téglise  de  Champvert,  de  belles  forêts  entre  La  Machine  et  Champvert. 

(2)  Aujourd'hui  Charancy. 

(3}  Domaine  de  la  famille  d'EstampeSy  devenu  par  corruption  I9 
domaine  des  Temples. 


—  222  — 


BIENS  VENANTS 

Le  n^  Boulizoû,  louager,  en 
m^°  de  loyer 1^  1^    2» 

Colas  Richard,  manœuvre,  en 
m"^  de  loyer 1^  1^    2» 

Jean  Ninlias,  propriétaire,  en 
maison  deloyer 10*  lO» 

Jean  Auboy,  fermier  du  d°®  de 
M-  de  Mareschet  (1) 6^  6^  13» 

Le  n*  Gendre,  charron,  en 
m^"»  de  loyer  à  M.  Dougny 3^    6»         3^  12« 


Exempt  : 
M.  le  Curé. 

Ainsi  se  termine  Ténumération  des  personnes  qui 
figurent  au  rôle  que  nous  avons  dépouillé. 

Gaston  Gauthier. 


(1)  Aujourd'hui  le  domaine  du  Ëourgf. 


-223- 


lE  STATUETTE  DE  U  DEESSE  EFOM 


PRÈS    NEVERS 


Dans  la  première  quinzaine  de  mai,  ayant  entendu 
parler  de  la  découverte  récente  de  quelques  débris 
antiques  dans  une  carrière  de  pierre  de  la  commune 
d'Urzy ,  nous  nous  sommes  rendus  sur  les  lieux,  plusieurs 
de  mes  confrères  de  la  Société  Nivernaise  (1)  et  moi. 

Nous  rencontrâmes  la  carrière  sur  la  droite,  et,  tout 
contre  la  route  de  Guérigny,  à  11  kilomètres  au  nord 
de  Nevers  et  à  500  mètres  au-delà  du  hameau  du  Greûx, 
au  lieu  dit  la  Boulaise  (n*  316,  section  B,  du  cadastre 
d'Urzy).  Cette  carrière  entame,  sur  plus  de  10  mètres 
de  hauteur  la  falaise  jurassique,  qui  limite  à  Test  la 
vallée  où  coule  paresseusement  la  Nièvre.  Elle  appar- 
tient à  notre  sympathique  confrère,  M.  Edmond  Hugon, 
et  est  exploitée  par  M.  Emile  Morlon,  aubergiste  au 
Greux,  qui  nous  a  fait  visiter,  avec  une  grande  complai- 
sance, l'emplacement  et  les, produits  de  ses  recherches. 

Celles-ci  ont  été  faites  dans  un  puits  comblé,  dé- 
couvert au  nord  de  la  carrière  ;  en  raison  de  la  hauteur 
de  la  nappe  aquifère,  M.  Morlon  n'a  pu  le  déblayer 
alors  que  sur  7  mètres  environ  ;  mais  ce  travail  a  suffi 
pour  lui  permettre  de  recueillir,  en  mélange  avec  des 
pierres  et  quelques  restes  de  foyers,  les  débris  anti- 
ques qu'il  nous  montra,  et  dont  les  caractères  gallo- 
romains  nous  frappèrent  à  première  vue:  tuiles  à 

(1)  MM.  le  chanoine  Sery,  Paul  Meunier  et  Albert  Maron, 


-  224  - 

rebords,  goulots  de  petites  amphores  typiques,  tessons 
minces  et  durs  de  vases  funéraires,  très  bien  cuits, 
à  couverte  noire  métallique,  morceaux  d'enduits  de 
murs  en  stuc,  avec  peinture  claire  coupée  de  raies 
rouges  et  vertes,  etc.  (1). 

Ces  restes  vulgaires,  rencontrés  très  fréquemment 
dans  le  Nivernais,  n'ont  qu'une  importance  documen- 
taire ;  mais  ils  étaient  en  compagnie  d'un  autre  objet 
antique  qui  mérite  de  fixer  notre  attention,  et  dont  il 
nous  reste  à  parler  :  c'est  une  statuette  de  pierre  grossière 
et  fort  mutilée,  mais  pas  assez  pour  qu'on  n'y  recon- 
naisse encore  nettement  une  femme  drapée,  assise  sur 
un  cheval.  Tel  qu'il  Subsiste,  ce  morceau  mesure  envi- 
ron 0^  33  de  longueur  et  autant  de  hauteur,  en  y 
comprenant  un  petit  pilier  de  consolidation  qui  reliait 
le  ventre  du  cheval  à  un  socle  plat,  dont  on  a  retrouvé, 
après  coup  et  séparément,  la  moitié  antérieure  sur 


(i)  Ce  puits  a  été  foré  sur  un  mètre  environ  de  diamètre,  et  certainement 
au  prix  de  grands  efforts,  à  coups  de  pic,  dont  les  traces  sont  demeurées 
partout  apparentes  dans  les  puissantes  et  dures  assises  rocheuses,  avec  des 
bossages  réservés  tans  doute  pour  permettre  la  descente  le  long  des  parois  ; 
il  ne  semble  pas  avoir  eu  de  revêtement,  qui,  du  reste,  eût  été  sans  utilité. 

Récemment,  un  habitant  d'Urzy  a  dit  qu'un  puits  avait  été  ouvert  dans 
cette  carrière,  il  y  a  cinquante  ans,  dans  le  but  de  procurer  aux  ouvriers 
de  l'eau  plus  à  portée  que  celle  de  la  rivière,  pourtant  peu  éloignée,  et  que 
ce  devait  être  le  puits  récemment  remis  au  jour. 

n  nous  est  impossible  de  donner  ici  une  opinion  personnelle  ferme,  vu 
Tabsence  de  caractères  suffisants,  pour  assigner  une  date  au  forage  de  ce 
dernier. 

Nous  préférons  donc  ne  pas  autrement  discuter  la  question,  qui  n*a  ici 
qu'un  intérêt  bien  secondaire;  pourtant,  nous  ferons  simplement  remarquer, 
que  pour  la  destination  spéciale  qui  a  été  indiquée,  l'emplacement  du  puits 
semble  assez  mal  choisi  ;  on  se  demande,  en  outre,  si  l'importance  du  travail 
était  en  rapport  avec  les  modestes  services  à  en  attendre  ;  et  puis,  comment 
expliquer  les  motife  de  sa  suppression,  à  une  époque  récente,  et  son  comble^ 
ment  avec  des  matériaux,  surtout  la  présence,  parmi  eux,  de  charbons  et 
d'objets  anciens,  dont  on  n*a  signalé  aucune  autre  trace  dans  le  voisinage? 


STATUETTE  ANTIQUE 

représentant  la  déesse  "  EPO  N  A  " 

trou  vf'e  sa  Sreux,  C%*d  'OrMj(Kivr»j  m  i$08. 


—  225  — 

laquelle  les  sabots   de  devant  de  la  monture   sont 
restés  adhérents. 

Le  personnage  n'a  plus  sa  tôte,  qui  était  rapportée 
et  fixée  par  un  tenon  dans  une  cavité  cylindrique  bien 
visible  au  haut  du  tronc.  Quant  à  l'animal,  il  est  privé 
tout  à  la  fois  de  sa  tête,  de  sa  queue  et  de  ses  jambes. 

Je  fus  frappé  immédiatement  de  l'analogie  que  pré- 
sente ce  petit  monument  avec  d'autres  déjà  signalés^ 
qu'on  semble  d'accord,  aujourd'hui,  pour  regarder 
comme  représentant  Epona,  l'antique  déesse  protec- 
trice des  écuries,  dont  les  Romains  auraient  emprunté 
le  culte  aux  Gaulois,  chez  lesquels  il  était  fort  répandu. 

Le  vêtement  de  l'écuyère  est  supérieurement  tout 
plissé  transversalement;  au  contraire  sa  longue  jupe 
descend  en  petits  plis  verticaux,  réguliers  et  raides, 
jusqu'aux  pieds,  dont  les  deux  bouts  seuls  émergent  : 
ceux-ci  sont  appuyés  sur  ime  traverse  horizontale  ou 
tablette,  comme  en  portent,  —  surtout  comme  en 
portaient  autrefois,  —  retenues  par  deux  courroies, 
des  selles  de  femme  disposées  en  siège. 

La  main  gauche,  la  seule  demeurée  entière,  tient 
une  boule  ovoïde  sur  laquelle  deux  traits  en  croix  sont 
nettement  et  assez  profondément  incisés,  détail  que 
nous  n'avons  pas  encore  observé,  sur  les  autres  figures 
d'Epona,  qui  portent  d'ordinaire  des  boules  lisses,  des 
fruits,  des  espèces  de  bourses,  des  couronnes,  cornes 
d'abondance,  patères,  œnochoés  ou  autres  vases,  etc. 

Autre  détail  particulier  sur  lequel  j'insiste  encore 
plus  spécialement  :  la  cavalière  est  assise  du  côté 
gauche  de  sa  monture,  tandis  que  les  autres  représen- 
tations connues  de  la  déesse,  tout  au  plus  à  une  ou 
deux  exceptions  près,  sont  toutes  assises  à  droite  (1). 

(1)  Plusieurs  de  ces  représentations  ne  nous  sont  connues  que  par  des 
gravures,  et  on  sait  que  souvent,  par  suite  d'inattention  du  graveur,  les 
positions  sont  inversées  et  les  écuyères  peuvent  être  figurées  dans  une 
position  symétrique  à  leur  véritable. 

T.  IZ;  3*  série.  15 


^ 


-  226  - 

La  crinière  du  cheval  est  indiquée  par  des  traits 
obliques  dirigés  presque  parallèlement  à  l'encolure. 

Cet  exemplaire,  comme  du  reste  la  presque  totalité 
de  ses  similaires  en  pierre,  est  d'un  travail  naïf  et 
barbare  ;  notamment  les  plis  de  la  draperie  sont  d'une 
raideur  toute  géométrique  et  rien  n'y  fait  deviner  les 
formes  recouvertes,  ni  sentir  un  mouvement  comme 
dans  les  œuvres  que  l'art  a  plus  ou  moins  inspirées. 

Malgré  ses  imperfections  et  son  état  de  regrettable 
mutilation,  cette  petite  sculpture  n'en  est  pas  moins 
fort  intéressante,  car  ses  pareilles  sont  encore  rares, 
surtout  celles  en  plein  relief,  et  cantonnées  dans  cer- 
taines régions  qui  toutes  ont  été  occupées  par  la  race 
celtique. 

La  Nièvre,  malgré  la  richesse  de  ses  gisements 
gallo-romains,  comme  ceux  de  Saint-Révérien  et 
d'EntrainS;  qui  ont  fourni  nombre  de  statuettes,  n'en  a 
pas  encore  livré  de  ce  modèle. 

Pourtant,  il  faut  le  dire,  Epona  n'était  déjà  pas  une 
étrangère  pour  le  Nivernais,  car  cette  dernière  localité 
d'Entrains  a  fourni,  en  1896,  deux  intéressantes  ins- 
criptions romaines  dédiées  à  notre  déesse  (1). 

La  Nièvre,  en  outre,  confine  au  groupe  de  dépar- 
tements qui  ont  fourni  le  plus  de  souvenirs  d'Epona  et 
qui  forment  une  vaste  région  occupant  tout  l'est  et  le 
nord -est  de  la  France,  pour  se  continuer  en  Allemagne, 
surtout  dans  les  provinces  rhénanes,  région  qu'on  peut 
considérer  comme  celle  où  son  culte  était  le  plus 
répandu. 

Il  y  a  quelques  années,  on  s'était  encore  fort  peu  occupé 


(1)  Elles  ont  été  décrites  dans  nos  ByMeHns  par  M.  Sarriau,  en  1897 
(tome  XVII,  p.  145  et  suiv.) 

On  ne  connaît  guère  que  25  inscriptions  ainsi  dédiées  et  la  France,  les 
deux  d'Entrains  comprises,  ne  figure  dans  cette  liste  que  pour  moins 
d*un  tiers  (je  n'en  connais  que  8}. 


^>^ 


—  227  — 

de  cette  question  d'Epona  et  on  ne  connaissait  guère 
qu'une  dizaine  de  ses  représentations  :  aujourd'hui, 
depuis  que  M.  Salomon  Reinach  a  pris  cette  étude  en 
mains  (1),  environ  plus  de  45  sont  relevées  rien  que 
pour  la  France  et  plus  de  25  pour  l'étranger  (plus  de 
20  pour  la  seule  Allemagne  de  la  région  du  Rhin),  ce 
qui  fait  un  total  de  plus  de  70. 

Sur  ce  nombre,  il  y  a  environ  25  bas-reliefs  en 
pierre  contre  moins  de  5  pleins  reliefs  comme  le 
nôtre,  plus  30  statuettes  en  terre  cuite  et  une 
dizaine  en  bronze  (2). 

Pour  continuer  le  relevé  statistique,  ajoutons  que 
jusqu'ici  19  départements  français  en  ont  fourni  ;  en 
tête  vient  V Allier  {7  exemplaires),  puis  l'ancien  dépar- 
tement de  la  Moselle  (6),  la  Côte-d'Or  et  Saône-et^ 
Loire  (chacun  5),  les  Vosges  (5). 

Chacun  des  suivants  n'en  ont  donné  qu'un  exem- 
plaire  jusqu'ici  :  Ain,  Aube  (?),  Charente,  Eure, 
Eure-et-Loir,  Finistère,  Gironde,  Isère,  Jura,  Marne, 
Haute-Marne,  Meurthe,  Vienne,  Yonne. 

Les  13  départements  soulignés,  qui  sont  contigus  et 
groupés  de  façon  à  former  presque  toute  la  région 
nord  orientale  de  la  France,  ont  fourni  à  eux  seuls  plus 
des  7/8  des  monuments  qui  nous  occupent  :  les  six  autres 
sont  disséminés  au  centre  ou  à  l'ouest,  entre  la  Seine 
et  la  Garonne  ;  le  Midi  n'en  a  pas  encore  livré. 

L'annexion  de  la  Nièvre  au  grand  groupe  de  l'Est, 
qui  va  de  Grenoble  et  Clermont  à  Metz,  porte  à  14  le 


(1)  BBOue  archéologique,  1895, 1,  p.  163-309  et  p.  327  ;  1896,  II,  p.  187- 
200  et  1899.  I,  p.  ©1-70. 

(2)  L'énidit  conservateur  du  muaée  de  Saint-Germain  nous  écrit  i 
l'instant  qa*on  lui  a  signalé  depuis  ses  publications  plus  de  dix  autres 
statuettes  et  bas-reliefs  d'Epona,  notamment  un  monument  très  important 
découvert  en  Mésie,  qui  porte  une  inscription  grecque  ;  il  a  lé  projet  dç 
les  publier  d'ici  peu. 


f 


-228  - 

nombre  des  départements  français  de  ce  groupe  qui  se 
continue  en  Allemagne. 

Pour  en  revenir  à  notre  exemplaire  et  pour  nous 
résumer,  il  présente  les  particularités  suivantes  : 

1®  L'écuyère  y  est  assise  à  gauche,  comme  les  ama- 
zones modernes  (tout  au  plus  deux  autres  cas  signalés  ?) 

2°  C'est  une  statue  de  pierre,  fait  fort  rare  égale- 
ment, la  plupart  des  autres  monuments  en  pierre 
étant  des  bas-reliefs,  et  les  matières  de  la  presque 
totalité  des  statues  sont  la  terre  cuite,  plus  rarement 
le  bronze. 

3«  La  planchette  servant  de  point  d'appui  pour  les 
pieds,  a  été  rarement  observée  aussi. 

A^  La  boule  à  croix  incisée  est  un  attribut  que  je  n'ai 
pas  encore  relevé  ailleurs. 

Maintenant,  faisons  des  vœux  pour  que  le  puits, 
après  déblaiement  complet,  nous  fournisse  en  son  fond 
d'autres  vérités,  comme  c'est  le  devoir  de  tout  puits 
comme  il  faut,  et  nous  restitue  aussi  quelques-uns  des 
trop  nombreux  morceaux  manquant  à  notre  Epona  : 
son  intérêt  scientifique  n'en  augmentera  peut-être  pas, 
mais  elle  pourra,  du  moins,  alors  se  présenter  plus 
convenablement,  nous  n'osons  dire  devant  ses  admira- 
teurs (car  ces  compléments  ne  sauraient  lui  refaire  une 
virginité  artistique),  mais  tout  au  moins  devant  ses 
curieux,  et  figurer  plus  décemment  dans  notre  musée 
lapidaire,  qui  lui  tend  les  bras. 

J.  DE   SAINT- VENANT. 
Juin  1901. 


-  229  - 


LES  PLUS  ANCIENNES  CHARTES 


DU   NIVERNAIS 


JUSQU'AU     X»     SIÈCLE 


Après  les  chroniques,  qui  sont  les  premières  sources 
des  origines  de  notre  histoire,  viennent  les  chartes  et 
diplômes,  qu'on  découvre  dans  nos  contrées  aussitôt 
que  la  société  française  commence  à  se  fixer  sur  le  sol. 

Nous  examinerons  ici  ces  anciens  documents,  non 
pour  les  étudier  au  point  de  vue  paléographique,  mais 
simplement  pour  rappeler  et  réunir  les  faits  histo- 
riques relatés  dans  ces  diplômes,  les  possessions,  les 
noms  de  localités,  les  seigneurs  donateurs. 

Ils  sont,  pour  la  majeure  partie,  imprimés  dans  le 
Gallia  Chrtstiana,  les  Historiens  de  France,  les  autres 
recueils  des  savants  Bénédictins  et  les  histoires  do 
provinces. 

Quelques-uns,  restés  encore  inédits,  ont  été  copiés 
dans  la  collection  Moreau,  déposée  à  la  Bibliothèque 
nationale. 

Moreau,  historiographe  du  Roi,  fut  chargé  de  la 
garde  du  Cabinet  des  Chartes,  vaste  conception  de 
M.  de  Paulmy,  mise  à  exécution  en  1759,  dans  le  but 
de  réunir  tous  les  documents  relatifs  aux  origines  de 
l'histoire  de  France.  Il  fallait  pour  cela  consulter  les 
innombrables  chartriers  disséminés  dans  toutes  les 
provinces,  dans  les  archives  publiques  ou  particulières. 
Lambert  de  Barive  copia  les  chartriers  de  Cluny  et 


—  230  — 

dom  Villevieille  s'attacha  principalement  aux  divers 
dépôts  du  Nivernais. 

Ces  recherches,  de  beaucoup  postérieures  à  celles 
des  Bénédictins  de  Saint-Maur,  qui  avaient  déjà 
fourni  tant  de  documents,  ont  apporté  un  notable 
contingent  de  pièces  nouvelles,  qui  sont  en  grande 
partie  conservées  dans  la  collection  Moreau  et  classées 
par  ordre  de  dates  en  confondant  toutes  les  provinces. 

Les  documents  ni  ver  nais  sont  tous  de  la  même 
main^  sans  indication  de  sources,  cartulaires  ou 
archives.  Il  m'a  été  impossible  de  découvrir  l'auteur 
de  ces  copies.  M.  Delisle  ni  les  autres  bibliothécaires 
n'ont  pu  me  citer  un  nom. 

Il  est  néanmoins  hors  de  doute  que  ces  copies  ont 
été  faites  officiellement,  comme  toutes  les  autres,  et 
qu'elles  présentent  les  caractères  d'une  authenticité 
suffisante . 

A  ces  époques  obscures  et  reculées,  les  documents 
concernent  toujours  des  églises  et  des  couvents,  qui 
résumaient  presque  uniquement  la  vie  d'alors  ;  à 
titre  exceptionnel  l'intervention  des  seigneurs  en  fait 
aussi  l'objet  de  notions  précieuses  pour  l'histoire 
civile. 

Aucun  de  nos  documents  ne  remonte  avant  le 
IX®  siècle. 

Le  plus  ancien  date  d'octobre  817  et  concerne  les 
environs  de  Sauvigny.  L'évêque  saint  Jérôme  y  avait 
érigé  un  oratoire  dédié  à  saint  Etienne.  Deux  seigneurs, 
Rodrado  et  sa  femme  Ildelinde,  déjà  donateurs  de 
nombreux:  biens,  avaient  donné  quelques  avantages  au 
chapelain  chargé  de  le  desservir.  Jérôme  était  mort  on 
816  et,  en  souvenir  de  sa  pieuse  fondation,  trois 
seigneurs  de  l'endroit,  Antidius,  Ogdilon  et  Bernoicus, 
s'entendent  pour  compléter  l'œuvre  du  saint  évoque. 

Ils  donnent  à  l'oratoire  de  Sauvigny  leurs  biens, 


—  231  — 

consistant  en  terres^  forêts  et  autres  champs  cultivés, 
réservant  pour  Tun  d'eux,  Bernoicus,  un  champ  et  des 
clôtures  en  bois  (macerias,  maizières),  le  tout  situé 
dans  le  pagus  de  Nevers,  au  territoire  de  Marigny,  au 
lieu  inconnu  actuellement  appelé  alors  Leobnago,  mais 
évidemment  placé  sur  les  bords  de  la  Loire,  près 
d'Imphy. 

A  titre  de  précaution,  presque  toujours  mentionnée 
dans  les  donations  d'église,  le  recteur  ou  bénéficiaire 
s'interdisait  de  distraire  la  moindre  parcelle  des  biens 
donnés  et  les  héritiers  des  donateurs  s'engageaient  à 
ne  jamais  les  reprendre. 

Les  noms  de  ces  premiers  donateurs  méritent  d'être 
sauvés  de  l'oubli  ;  ils  reparaissent  seuls,  au  bas  de 
l'acte,  avec  une  assez  longue  liste  de  témoins  pris 
parmi  les  serfs  de  l'endroit,  sans  intervention  de 
l'évêque  Jonas  ou  d'autre  personnage  important  (1). 

Plusieurs  diplômes  qui  suivent  sont  dus  à  l'empe- 
reur Charles  le  Chauve,  cherchant  par  de  nombreuses 
donations  à  témoigner  sa  reconnaissance  et  sa  joie  au 
pays  où  il  avait  remporté  la  victoire. 

Louis  le  Pieux,  mort  en  840,  avait  laissé  son  empire 
en  proie  aux  plus  terribles  dissensions.  Ses  trois  fils, 
Lothaire,  Louis  le  Germanique  et  Charles  le  Chauve, 
se  faisaient  une  guerre  acharnée.  Leurs  armées  se 
rencontrèrent  le  25  juin  841,  dans  un  endroit  appelé 
Fontenay  ou  Fôntanet,  non  encore  bien  déterminé,  et 
qui  se  trouve  certainement  entre  Donzy  et  Auxerre, 
par  conséquent  dans  nos  parages. 

Les  chroniques  disent  qu'il  y  eut  cent  cinquante 
mille  hommes  de  chaque  côté,  et  que  chaque  adver- 
saire perdit  quarante  mille  hommes. 

Les  guerres  de  César  dans  les  Gaules  surprennent 

(1)  Gallia  ChrUL,  t.  XU,  col.  297,  Inslrumenla. 


-  232  — 

par  le  nombre  des  combattants.  Celles  des  Carlovin- 
giens  semblent  presque  aussi  importantes,  et  l'on  se 
demande  comment  des  régions,  dépeuplées  par  l'ab- 
sence de  culture  et  les  fréquents  pillages,  pouvaient 
fournir  de  tels  contingents  aux  arinées. 

Les  deux  frères  Charles  et  Louis,  victorieux  de 
Lothaire,  restent  longtemps  dans  le  pays,  continuant 
ime  lutte  que  leur  union  rendait  redoutable,  mais  qui 
ruinait  les  habitants.  Six  mois  après  la  bataille  de 
Fontenay,  en  janvier  841-42,  Charles  le  Chauve 
accorde  à  l'évoque  de  Nevers,  Eriman,  la  confirmation 
des  biens  de  son  église  et,  selon  le  style  des  chartes  de 
cette  époque,  il  fait  des  allusions  aux  troubles  et  aux 
malheurs  qui  ont  accablé  aussi  bien  l'église  que  les 
autres  habitants,  car,  dans  de  si  graves  épreuves,  on 
ne  peut  séparer  les  uns  des  autres. 

L'église  de  Nevers,  lit-on  dans  le  diplôme  de  842, 
avait  été  bouleversée  par  les  événements  publics,  ses 
biens  étaient  détruits,  ses  serviteurs  disparus,  ses 
clercs  privés  de  ressources,  ses  chartes  pillées,  brûlées 
ou  dispersées,  en  sorte  que  tous  les  éléments  de  son 
existence  faisaient  défaut.  Dans  des  circonstances 
analogues,  Charlemagne,  Louis  le  Pieux  et  Pépin, 
avaient  accordé  aux  évoques  Jérôme  et  Jonas  (800  à 
829)  la  confirmation  des  biens  de  l'église  de  Nevers, 
et  Eriman,  qui  tenait  à  en  assurer  la  conservation, 
venait  demander  ce  qui  avait  déjà  été  renouvelé  à 
chaque  règne. 

Charles  le  Chauve,  en  vertu  de  l'autorité  de  cet 
acte,  constate  la  vraie  possession  de  tous  les  biens 
obtenus  par  l'église  de  Nevers,  soit  ceux  restitués  à 
saint  Jérôme^  soit  acquis  par  lui,  ainsi  que  ceux  possédés 
actuellement  et  qui  lui  viendront  par  les  pieuses  lar- 
gesses des  fidèles. 

Ce  diplôme,  rendu  à  Bourges,  est  le  plus  ancien  des 


—  233  - 

privilèges  de  l'église  de  Nevers,  renouvelant  ceux  de 
saint  Jérôme  et  de  Jonas  qui  n'existent  plus  ;  il  com- 
prend la  généralité  des  biens  sans  aucun  détail  sur  les 
hommes  et  les  localités  de  la  province. 

Peu  de  temps  après,  Charles  le  Chauve  reparaît  avec 
son  frère  Louis  dans  les  environs  de  Strasbourg,  où 
leurs  armées  prononcent  le  fameux  serment  raconté 
dans  les  chroniques. 

Dans  un  second  diplôme,  daté  de  843  et  assez  sem- 
blable au  précédent,  Charles  le  Chauve  rappelle  les 
ruines  de  l'église  de  Nevers  en  choses  et  en  hommes 
{rébus  et  mancipiis)  provenant  du  fait  des  guerres  et 
des  nombreuses  batailles  qui  eurent  lieu  dans  la  ville 
de  Nevers.  Il  reconnaît  avoir  lui-même  profondément 
opprimé  cette  localité  en  luttant  contre  ses  ennemis  et 
les  infidèles  et  en  déployant  toutes  les  forces  guerrières 
de  son  royaume. 

Les  soldats  de  la  région  nous  ayant  prêté  secours 
contl-e  nos  ennemis,  dit-il  dans  son  diplôme,  et  bravé 
la  mort  avec  nous,  nous  désirons  qu'aucun  d'eux  ne 
soit  dépossédé  de  ses  biens  à  moins  qu'il  n'ait  encouru 
une  peine  criminelle.  Nous  confirmons  également  à 
nouveau  les  biens  anciens  et  présents  de  l'église  de 
Nevers,  ainsi  que  nos  pères  l'avaient  fait,  afin  qu'ils 
restent  en  droit  sous  son  pouvoir. 

De  plus,  nous  accordons  de  notre  autorité  royale  que 
tous  les  biens  enlevés  à  l'église  et  tenus  actuellement 
par  nos  vassaux,  seront  conservés  par  eux  leur  vie 
durant,  en  rémunération  de  leurs  services  et  avec  le 
consentement  de  l'évêque,  pour  revenir  ensuite  à 
l'église  après  leur  mort.  A  l'exception,  toutefois,  de  ce 
que  le  comte  de  la  province  {cornes  ejusdem  potes- 
tatis)  doit  posséder. 

Ainsi  est  établie  par  ce  texte  l'existence  du  premier 
seigneur,  administrateur  de  la  province  et  représen- 


tant  du  Roi,  le  comte,  seigneur  placé  dans  une  posi- 
tion supérieure  à  tous  les  autres  et  comportant  une 
autorité  équivalente  à  celle  de  l'évèque,  puisqu'il  est 

autorisé  à  garder  les  possessions  prises  sur  le  domaine 
de  Téglise. 

Ces  administrateurs,  désignés  sous  le  nom  de 
comtes  amovibles  paraissent  dès  le  ix^  siècle  et  reste- 
ront pendant  près  de  cent  ans  avec  leurs  fonctions 
temporaires. 

Les  autres  seigneurs,  vassaux  du  Roi,  autorisés  à 
garder  leur  vie  durant  les  biens  saisis  sur  l'église 
ont  formé  sans  doute  l'origine  des  barons  vassaux  de 
l'évoque  qui  lui  devaient  foi  et  hommage  et  le  por- 
taient à  son  entrée,  les  barons  de  Druy,  Poiseux, 
Cours-les-Barres  et  Givry  (1). 

En  849,  l'évoque  Eriman  revient  encore  sur  la  pré- 
cédente prospérité  de  l'église  de  Nevers  et  les  nom- 
breux pillages  dont  elle  fut  victime  dans  les  guerres 
des  fils  de  Charlemagne.  Plusieurs  biens  avaient  été 
rendus  à  saint  Jérôme,  mais  ni  lui  ni  son  successeur 
Jonas  ne  s'étaient  occupés  du  chapitre  de  l'église. 
Eriman  attribue  aux  quarante  chanoines  des  biens 
(villas)  situés  à  Parigny,  Germigny,  Sauvigny,  Ve- 
ninges  (Viringium),,  Guérigny,  avec  leurs  dépen- 
dances. 

Cette  charte  de  849  mentionne  beaucoup  de  localités 
dont  les  noms  ont  totalement  disparu  et  qu'il  sera 
impossible  d'identifier  (2).  Elle  cite  également  un- 
comte  Hildrade,  cornes  Hildradus,  sur  lequel  on  ne 
sait  rien  autre  chose. 

L'évèque  Eriman,  ne  se  bornant  pas  à  améliorer  la 

(1)  Gallia  Chrisiiana,  pièce  U  et  III. 

(2)  En  Morvan  (in  agra  Morvin)  une  église  dédiée  à  Saint-Sauveur, 
Montilius,  Lions,  callidus  fons,  coloria,  arcua.  Pour  Saint-Martin,  Ârtado, 
Orbado,  Bordenago. 


—  235  — 

situation  des  chanoines  de  Saint-Cyr,  établit  plu- 
sieurs couvents  :  celui  de  Saint-Martin  de  Nevers, 
composé  de  seize  chanoines  et  doté  de  plusieurs  béné- 
fices ;  celui  de  Saint-Aignan,  occupé  par  des  moines  à 
Aubigny  en  Berry  ;  celui  de  Saint-Genest  de  Nevers, 
où  il  installe  des  femmes. 

Ces  établissements  et  les  biens  dont  ils  vivaient  sont 
une  indication  de  la  richesse  du  pays  ;  ils  ne  devaient 
être  attribués  en  aucun  cas  à  un  bénéfice  laïque,  mais 
ils  n'en  constituaient  pas  moins  des  ressources  et  un 
état  de  choses  satisfaisant. 

A  côté  des  couvents,  il  fait  des  fondations  chari- 
tables en  créant  à  Nevers  deux  hôpitaux  près  de  la 
ville,  l'un  pour  recevoir  les  pauvres,  l'autre  pour  les 
hommes  nobles  de  passage  (undique  conjluentes),  les 
deux  établissements  entretenus  aux  frais  de  l'église  et 
sur  ses  bénéfices. 

Eriman,  en  pasteur  très  zélé,  ne  négligeait  aucune 
occasion  de  consolider  les  possessions  de  son  église, 
aussi  bien  les  villas  et  autres  terres  rapportant  un 
revenu  direct  que  les  monastères  dépendant  de  son 
siège  épiscopal.  En  850,  se  trouvant  auprès  de  Charles 
le  Chauve  qui  attaquait  Paris,  il  obtint  une  nouvelle 
charte  générale  de  confirmation  pour  les  choses  appar- 
tenant actuellement  à  son  église.  On  n'y  voit  l'inter- 
vention d'aucun  seigneur  ni  pour  l'autorisation ,  ni 
comme  simple  témoin.  L'évoque  était  alors  la  seule 
autorité  vraiment  locale  ayant  prépondérance  dans  la 
région  (1). 

Au  Concile  de  Soissons,  en  853,  Eriman,  atteint 
par  l'âge  et  les  maladies,  demande  à  être  relevé  de 
ses    fonctions  ;    il    est  convenu    qu'il  restera    avec 

fi)  Gall.  Chrisl.y  pièces  IV  et  V. 


—  236  - 

Venilon,  archevêque  de  Sens,  jusqu'au  rétablissement 
de  sa  santé . 

Revenu  à  l'évôché  de  Nevers^  il  mourut  en  860. . 

Il  y  a  trois  textes  du  privilège  de  Magny  où  se 
trouvent  consignées  les  donations  faites  par  Charles 
le  Chauve  vers  859.  Là  encore,  on  trouvera  diverses 
indications  sur  Tétat  du  pays. 

Il  y  avait  à  Magny  un  pèlerinage  important  en 
l'honneur  des  saints  confesseurs  Vincent  et  Nazaire. 
Adelard,  prêtre  rempli  de  zèle  et  de  dévouement,  avait 
pu  conserver  les  précieuses  reliques  des  saints  expo- 
sées dans  la  crypte  de  l'église.  Des  anciennes  splen- 
deurs de  cette  station  tout  avait  disparu  dans  les 
guerres  qui  avaient  ravagé  le  pays.  Il  s'agissait  de 
remonter  cette  localité  si  vénérée.  Charles  le  Chauve, 
assisté  de  l'évêque  de  Nevers,  Abbon ,  se  rend  à 
Magny  et  y  signe  un  privilège  où  il  restitue  à  Adelard 
les  avantages  qu'il  possédait  auparavant.  Le  sanc- 
tuaire et  tout  ce  qui  en  dépend  relèvera  de  l'église  de 
Nevers  et  sera  placé  directement  sous  la  protection 
royale.  Ni  comte,  ni  juge,  ni  toute  autre  personne  ne 
pourront  exiger  un  cens,  des  parées  ou  quelque  impôt 
que  ce  soit.  Comme  seul  tribut,  le  bénéficiaire  devra 
donner  à  Nevers  une  livre  de  cire  à  la  fête  de  Saint- 
Cyr,  patron  du  diocèse.  Le  Roi  ajoute  qu'il  accorde 
ces  biens  à  Adelard  et  à  ses  successeurs,  en  l'honneur 
de  saint  Vincent  et  de  ses  reliques  auxquelles  il  doit 
le  succès  de  ses  armes  et  la  pacification  du  pays  et 
qu'il  pourra  toujours  de  son  vivant  choisir  celui  qui 
devra  lui  succéder. 

Cette  donation  royale  faite  en  859  fut  ratifiée  quel- 
ques années  après  en  867  dans  une  réunion  synodale 
de  tous  les  évêques  de  la  région.  Les  conditions  prin- 
cipales y  sont  renouvelées  ;  la  propriété  d'Adelard,  qui 
devra  rester  perpétuellement  aux  prêtres  de  Magny, 


-  237  - 

est  située  à  Lurcy  (1),  et  consiste  en  divers  manses 
garnis  de  maisons,  jardins  et  vignes,  où  il  peut  se 
faire  moyennement  cent  cinquante  muids  de  vin. 
Belle  et  ancienne  origine  pour  l'église  et  le  bourg 
de  Magny^  gracieusement  situés  sur  la  grande  route 
de  Paris,  mais  bien  déchu  de  sa  vieille  célébrité  reli* 
gieuse 

A  Tavénement  de  Louis  II  le  Bègue,  Tévéque  Abbon 
joint  le  Roi  à  Troyes  et  obtient  de  lui  une  confirma- 
tion générale  des  biens  de  l'église  de  Nevers  et  en 
particulier  de  la  donation  de  Magny ,  récemment 
obtenue  de  Charles  le  Chauve. 

On  a  soin  de  citer  comme  objets  de  donation,  les 
choses  et  les  serfs,  res  et  mancipia,  précaution  bien 
naturelle  qui  permettait  de  mettre  les  biens  en  valeur 
en  leur  assurant  les  bras  nécessaires  à  la  culture. 

Cette  mention  presque  toujours  portée  dans  les 
chartes,  témoigne  de  l'esprit  pratique  et  précis  des 
hommes  d'alors  qui,  par  leur  persévérance,  sont  par- 
venus à  peupler  et  à  cultiver  nos  campagnes. 

Abbon  assure  donc  à  son  église  des  terres  et  des 
habitants  pour  les  exploiter.  Ces  biens  étaient  situés 
un  peu  partout,  selon  le  hasard  des  donations.  Le 
diplôme  de  878,  pour  les  délimiter  dans  une  certaine 
mesure,  nomme  les  pagi  d'Auxerre,  Autun,  Nevers 
et  Avallon  où  vraisemblablement  ils  se  trouvaient  (2). 

En  878,  dans  une  charte  relative  à  Saint-Germain- 
d'Auxerre,  on  cite  le   comte  Conrad  et  sa  femme 


(1)  La  désignation  ne  laisse  aacun  doate  (in  pago  Nlv.  in  agro 
magniacense,  in  villa  Lursiaco),  c'est  l'ancienne  paroisse  de  Luicy-sur- 
Abron  aujourd'hui  réunie  à  Toury-sur-Abron.  LMnatallation  si  ancienne 
de  cette  colonie  vinicole  au  milieu  du  ix*  siècle  mérite  d'autant  plus 
d'êlre  signalée  qu'elle  a  été  omise  dans  le  Dictionnaire  lopogt  aphique, 
{G'ill.  GktUL,  pièce  IX.) 

^2)  0  ///.  ChrisL,  pièce  X). 


-238- 

Vadaldre,  ainsi  que  les  comtés  d'Auxerre  et  de  Ton- 
nerre. Ce  Conrad  étendait  certainement  son  pouvoir 
sur  le  Nivernais  comme  on  l'a  vu  dans  la  suite  (1). 

En  citant  l'église  de  Nevers,  on  dit  «  constructa  in 
honore  S.  Cyrici  martyris  ».  La  construction  de  Saint- 
Jérôme  doût  il  s'agit  remontait  environ  à  l'an  800. 
Celle  d'Abbon  devait  être  la  môme. 

On  dit  encore  pagi  et  non  comtés  ;  les  comtés  n'ont 
pas  gardé  les  délimitations  romaines  des  pagi,  mais 
à  cette  époque  on  désignait  alternativement  l'un  par 
l'autre.  Les  évôchés  paraissent  avoir  adopté  les 
mômes  limites  que  les  pagi. 

En  880,  l'église  de  Tannay  est  rendue  à  Adalgaire, 
évoque  d'Autun.  Ce  bien  {villa  Taniacum)  avait  été 
ravi  comme  tant  d'autres  à  l'évôché,  à  la  suite  des 
guerres,  il  faisait  alors  partie  du  comté  d' A  vallon  et 
fut  définitivement  rendu  à  l'évôché  d'Autun.  Cette 
donation  faite  par  le  roi  Carloman,  à  la  demande  de 
Richard,  comte  d'Autun,  est  datée  de  Nérondes, 
pagus  de  Bourges  (2). 

Carloman  rend  aussi  à  l'église  d'Orléans  une  série 
d'endroits  qui  lui  avaient  été  enlevés  par  incurie  ou 
par  violence  (3). 

En  881,  le  môme  évoque  Abbon  obtient  de  Car- 
loman la  restitution  de  Cours-les-Barres,  Curtim, 
situé  dans  le  pagus  de  Ne  vers,  vicairie  de  Lagny , 
latiniacense,  sur  le  fleuve  de  Loire,  consistant  en 
30  manses.  Jadis  possession  de  l'église,  ces  biens  lui 
avaient  été  enlevés  à  l'occasion  des  guerres.  Carloman 
consulte  le  conseil  des  grands  {cum  proceribus  et  pri-' 


(1)  DOM  BouQUKT,  Historiens  dti  France,  t.  IX,  p.  350. 

(2)  HùL  de  France,  t.  IX,  p.  418. 

(3)  Caltesia  et  Pauliacam  in  pago  Bituricensi,  Germiniacam  et  villam 
que  vocatur  Marsiacus  in  pago  NivemeDsi.  {Hisl.  de  France,  t  IX,  p.  419). 


-  239  - 

moribus  palatii  nostri)  et  approuve  cette  restitution, 
en  mémoire  de  lui  et  de  ses  ancêtres,  en  autorisant  de 
la  destiner  aux  pauvres,  aux  gages  des  clercs  ou  aux 
salaires  des  serviteurs  de  l'église  (1). 

(Curtim  inpago  Nevernense,  in  vtcaria  latiniacense 
super  Jluvium  Ltgeris,  pièce  xi,  col.  307).  Il  s'agit 
évidemment  de  Cours-les-Barres.  La  proximité  du 
fleuve  ne  saurait  être  appliquée  à  Cours-sous-Ma- 
gny,  situé  plus  haut  entre  Loire  et  Allier.  Le  texte  du 
Gallta  1770,  porte  Latiniacense,  celui  de  Dom  Bou- 
quet 1757,  antérieur  de  treize  ans,  (Hist.  de  France, 
t.  IX,  p.  419),  porte  évidemment,  par  erreur  d'im- 
pression, Patiniacense,  On  ne  saurait  admettre 
cette  forme  pour  la  localité  appelée  Patinges  (Cher). 
M.  Longnon,  dans  sa  Topographie  des  Gaules,  en 
vient  à  considérer  la  circonscription  administrative 
du  comté  de  Nevers,  appelée  la  vicairie  de  Lagny, 
comme  ayant  subi  un  de  ces  changements  de  noms 
assez  fréquents  dans  l'ancienne  Gaule,  et  propose  de 
lui  substituer  un  nom  de  saint.  Les  localités  appelées 
Saint-Germain-sur-l'Aubois  ou  Saint-Léger-le-Petit 
répondraient  tout  à  fait  aux  questions  de  proximité 
et  de  voisinage  de  la  Loire  indiquées  dans  l'acte  de  881. 

L'attribution  du  mot  Curtim  à  Cours-les-Barres  et 
l'indication  pour  cet  endroit  d'une  vicairie  du  comté  de 
Nevers  peuvent  être  considérées  comme  la  mention  la 
plus  ancienne  relative  à  cette  partie  de  territoire 
située  sur  la  rive  gauche  de  la  Loire,  aujourd'hui  dans 
le  Cher,  ayant  toujours  fait  partie  du  Nivernais. 

Au  Dictionnaire  topographique^  notre  vicairie, 
située  aujourd'hui  dans  le  Cher,  est  appliquée  par 
erreur  à  une  localité  dite  Latigny,  commune  de  Saint- 
Père,  près  Cosne.  Mfl'  Crosnier,   dans  le   Tableau  de 

(1)  Gali.  Chrùt.,  l.  XII,  pièce  XL 


-  240  - 

V Histoire  du  Nivernais,  y  porte  par  erreur  Cours- 
sous*Magny. 

Deux  diplômes  de  885  et  886  concernent  la  disposi- 
tion et  l'organisation  d'un  monastère  de  femmes  dédié 
à  la  sainte  Vierge  et  au  Sauveur,  fondé  à  Cusset, 
en  Auvergne,  diocèse  de  Clermont,  par  l'abbaye  Saint- 
Martin-de-Nevers.  (In  Cuciaco  qui  est  in  Arvernensi 
comitatu).  L'évèque  de  Ne  vers,  Eumène,  avait  présidé 
à  cette  fondation,  il  était  convenu  qu'il  nommerait 
l'abbesse  de  concert  avec  les  dames  du  couvent  et  à 
la  condition  formelle  de  la  prendre  parmi  elles.  Afin 
de  leur  reconnaître  comme  supérieur  Tévôquede  Nevers 
et  de  ne  pas  penser  à  s'affranchir  de  sa  suprématie,  il 
fut  constitué  en  sa  faveur  un  cens  d'une  livre  d'argent 
payable  à  la  fête  de  Saint-Martin  en  novembre  (1). 

Le  diplôme  de  Charles  le  Gros,  de  886,  expose  la 
demande  simultanée  du  comte  et  de  l'évèque  de 
Nevers  et,  dans  les  préliminaires  de  son  récit,  touche 
à  divers  points  d'histoire  qui  corroborent  les  chro- 
niques. 

Dans  le  cours  du  ix®  siècle,  il  y  a  eu  deux  Bernard 
que  les  historiens  ont  confondus.  L'un,  comte  de  Poi- 
tiers, marquis  de  Gothie  et  de  Septimanie,  l'autre, 
comte  d'Auvergne,  d'Autun  et  de  Nevers,  époux 
d'Hermengarde,  né  en  840  mort  en  886,  qui  eut  un  fils 
du  nom  de  Guillaume.  Ce  deuxième  Bernard,  dit 
Plantevelue,  se  distingua  dans  les  guerres  contre  Boson, 
duc  de  Provence  ;  il  est  parlé  de  lui  en  termes  très 
louangeurs  dans  le  cartulaire  de  Brioude  (2).  Baluze 
et  VArt  de  vérifier  les  dates  (3)  le  séparent  complète- 

(1)  GaU.  Christ.,  t  XII,  pièces  XII  et  XUI.  Hist.  de  France,  X,  p.  347. 
Mabillon,  de  re  dipL,  p.  654,  pour  la  deuxième  pièce.  IIaluze,  HUt.  de 
la  m.  d*Auv.,  t.  II,  p.  3. 

(2)  Baluze,  HisL  de  la  m.  d'Auv.»  t.  Il,  p.  3. 
(3;  T.  U,  p.  350. 


-  241  - 

ment  du  comte  de  Poitiers  que  Mo'  Crosnier  fait 
comte  de  Ne  vers. 

En  dernier  lieu>  Bernard  Plantevelue  assistait  au 
siège  de  Vienne,  soutenu  pendant  deux  ans  par  la 
femme  de  Boson,  avec  la  valeur  d'une  héroïne  et  Tha- 
bileté  du  commandant  le  plus  expérimenté,  puis  vers 
août  886,  il  fut  tué  dans  une  autre  batailldcontre  Boson. 

Notre  diplôme  vient  confirmer  en  tous  points  ces 
faits  de  la  vie  de  Bernard  qui  vraisemblablement 
joignait  à  ses  nombreuses  possessions  le  comté  de 
Nevers  ;  Guillaume  déclare  lui-môme  être  son  fils,  le 
Roi  le  considère  comme  son  fidèle  soutien  dans  toutes 
ses  guerres,  la  date  du  diplôme,  886,  est  celle  de  la 
mort  de  Bernard  et  de  Tavénement  de  Guillaume,  les 
donations  de  ce  genre  marquaient  presque  toujours  les 
débuts  de  l'administration  des  seigneurs  et  le  Roi  ne 
pouvait  rien  refuser  au  fils  du  fidèle  guerrier  qui  venait 
de  mourir  pour  sa  cause. 

Le  comte  Guillaume,  dit  Charles  le  Gros,  en  abor- 
dant Notre  Majesté  nous  a  supplié  que  pour  le  souvenir 
inviolable  et  la  fidélité  de  Bernard,  son  père,  pour 
la  mémoire  de  notre  nom  et  pour  le  salut  de  son  &me, 
nous  consentions  à  mettre  à  la  disposition  de  l'évoque 
de  Nevers  Eumène,  l'abbaye  d'Iseure  (Isodro),  au  comté 
d'Autun  et  le  couvent  de  Saint-Révérien,  au  comté  de 
Nevers.  D'après  l'avis  de  nos  conseillers,  nous  rap- 
pelant avec  quel  courage  et  dévouement  le  glorieux 
comte  et  marquis  Bernard  s'est  opposé  contre  nos 
ennemis,  traîtres  et  destructeurs  de  notre  royaume, 
principalement  Boson  et  ses  suivants,  et  qu'il  est  mort 
en  combattant  vaillamment  contre  ces  infidèles,  nous 
avons  trouvé  juste  de  consentir  à  la  demande  de  son 
fils  Guillaume  (1). 

(1)  Gallia  ChrUt.,  XII,  col.  dlO,  pièce  XIV.  —  Hist.  de  France,  tX, 
p.  549. 

T.  IX,  3*  série.  19 


-.242  — 

Guillaume  fut  surnommé  le  pieux.  Cette  première 
charte  signale  la  sainteté  de  sa  vie,  ses  libéralités  sont 
exposées  dans  Baluze  (1).  Les  localités  très  éloi- 
gnées l'une  de  l'autre  sont  prises  dans  deux  apanages 
différents,  déjà  appelés  comtés,  nom  administratif  de 
la  circonscription.  Iseure,  près  Moulins,  comté  d'Autun, 
Saînt-Révérien,  comté  de  Nevers,  couvent  dépendant 
de  Cluny . 

Ce  Guillaume  devint  premier  comte  héréditaire 
d'Auvergne,  marquis  de  Gothie  et  duc  d'Aquitaine. 

Le  diplôme  de  Charles  le  Gros,  de  887,  pour  les 
biens  du  diocèse,  contient  beaucoup  de  noms  de  lieux 
et,  dans  l'absence  des  actes  antérieurs,  peut  être  consi- 
déré comme  la  plus  ancienne  confirmation.  L'évéque 
Eumène  l'obtint  de  l'empereur  pendant  qu'il  combat- 
tait avec  lui  sous  les  murs  de  Paris  contre  les  Nor- 
mands. 

Parmi  les  abbayes  de  la  ville,  on  cite  :  Saint-Martin, 
hors  des  murs  ;  Saint-Trohé,  Saint-Arigle,  Saint-Sau- 
veur, Saint-Gildard  et  Saint-Loup,  Saint-Genest  et 
Notre-Dame,  où  sont  les  moniales  ;  Saint-Didier,  près 
la  porte  ;  puis  dans  les  environs  Saint  -  Franchy 
(S.  Francoveus),  près  Saint-Saulge  ;  Saint- Vincent- 
de-Magny,  Cours,  au  delà  de  la  Loire  :  Cusset,  dio- 
cèse de  Clermont,  abbaye  bâtie  par  l'évéque  Eumène  ; 
risle-sur- Allier  (insula  Galli),  près  Mars,  abbaye 
donnée  à  Eumène  par  le  comte  Richard  ;  l'abbaye  de 
Glandon  (?),  Saint-Péreuse-en-Morvan,  Saint-Parize, 
entre  Loire  et  Allier . 

Plusieurs  endroits  appelés  malli,  où  l'évoque  comme 
suzerain  du  lieu,  rendait  les  jugements  à  date  fixe, 
ordinairement  quatre  fois  par  an,  sur  la  place  publi- 

(ij  HUL  de  la  m,  d^Auv.^  t  I,  p.  4. 


—  243  - 

que  ou  sous  le  porche  des  églises,  Imphy,  Urzy,  Gué- 
rigny,  Marzy,  Prémery. 

Le  cloître  des  chanoines,  à  Nevers,  et  divers  champs 
autour  de  la  ville,  des  alleux  communs  accordés  au 
chapitre  d'après  d'anciennes  conventions,  à  Saint- 
Parize,  Cours-les-Barres,  Guérigny,  Germigny,  Sau- 
vigny  et  Veninges. 

D'autres  localités  non  encore  identifiées  appelées  : 
Dagoniaco,  Marsisiaco,  Diguntio,  A  rtado  et  de  bene' 
ficio  in  promntia. 

Enfin,  des  bénéfices  non  exactement  désignés  et 
situés  dans  les  comtés  de  M&con,  Chalon,  Autun, 
Auxerre,  Berry  et  Auvergne  (1). 

La  première  année  de  son  épiscopat,  894,  Tévèque 
Francon  fait  avec  un  seigneur  du  M&connais  une 
convention  dite  jorecarra  ou  prestaria,  c'est-à-dire, 
d'après  Ducange,  un  accord  entre  religieux  et  laïques. 
L'acte  prend  la  forme  d'un  diplôme  revêtu  de  la 
signature  du  roi  Eudes,  l'évéque  et  le  seigneur  étant  & 
la  suite  du  Roi.  La  date  de  lieu  manque. 

L'évéque  donne  à  Roccon,  Garna,  sa  femme,  Raoul 
et  Teudrade,  ses  enfants,  pour  leur  vivant,  plusieurs 
manses  situés  dans  le  comté  de  M&con,  appartenant  à 
Saint-Cyr,  Saint-Martin  et  Saint-Genest.  Les  pre- 
neurs paieront  un  cens  annuel  de  10  sols.  Les  biens 
reviendront  après  leur  mort  à  l'église  avec  toutes  leurs 
améliorations. 

Deux  autres  pièces  de  l'évoque  Francon.  datées  de 
897  et  903,  concernent  Mars,  Challuy  et  Gimouille. 

L'église  Saint- Symphorien,  de  Mars,  avait  été 
donnée  par  un  seigneur  nommé  Trutbald  et  occupée 
par  le  chanoine  Teutdgrimmus.  Sur  la  demande  de  ce 


(i)  Gallia  Christ.,  t.  XII,  pièce  XV.  *  HUU  de  France,  IX,  p.  358. -^ 
Mabillon,  ann.  Benéd.,  lU,  p.  687, 


-  244  - 

dernier,  Tévêque  lui  donne  une  lie  dans  le  fleuve 
d'Allier  et  un  pré,  pour  le  cens  de  10  sols. 

L'église  de  Cballuy,  appartenant  à  rarchidiacre, 
reçoit  également,  en  augmentation  de  revenu,  des 
dîmes  à  Sermoise  et  à  Saint-Laurent  de  Gimouille, 
une  villa  à  Suilly,  et  le  terrain  sur  lequel  est  bâtie 
l'église  de  Challuy. 

Le  diplôme  de  Charles  le  Simple,  daté  de  Soissons, 
919,  mentionne  l'origine  de  Cosne,  alors  simple  villa 
sur  les  bords  de  la  Loire  avec  chapelle  dédiée  à  saint 
Augustin.  Le  comte  Séguin  demande  au  Roi  l'autori- 
sation de  la  donner  à  son  fidèle  guerrier,  Eptin,  et  & 
sa  femme,  Grimelde.  A  la  suite  des  villa  et  chapelle, 
l'acte  cite  les  dépendances  rurales  ordinaires  et  les 
serfs  qui  l'habitaient  (que  sunt  appendices  ad  mllam 
Coniacum  ex  comitatu  nivernensi). 

En  935,  une  charte  datée  de  Nevers  contient  la 
donation  d'un  manse  avec  vigne  à  Parzy,  en  faveur 
du  chapitre  de  Saint-Cyr.  Les  donateurs  sont  des 
chanoines,  Jérôme,  Isembard,  Gui  et  Eumène.  Ils  agis- 
sent entièrement  seuls  et  leur  acte,  par  exception, 
n'est  approuvé  ni  par  l'évoque  ni  par  aucun  autre 
personnage. 

Le  roi  Raoul,  à  Auxerre,  en  935,  approuve  par 
diplôme  royal  la  donation  de  biens  domaniaux  par  le 
comte  Geoffroi  à  l'évoque  de  Nevers  Tedelgrin,  consa- 
crant ainsi,  pour  l'avantage  des  populations,  la  bonne 
entente  entre  les  deux  pouvoirs  ecclésiastique  et  laïque. 
Ces  localités  sont  Amazy,  Billy,  monasteriolum,  dans 
le  pagus  d'Autun;  Brinon,  Grenois  et  Chevroches, 
dans  le  pagus  de  Nevers. 

Ce  comte  Geoffroi  a  pu  être  chargé  de  l'administra- 
tion du  Nivernais  d'environ  925  à  940.  Il  s'agit  certai- 
nement de  Geoffroi  dit  Papabos,  nommé  par  le  roi 
Raoul,  en  927,  vicomte  héréditaire  de  Bourges,  à  la 


—  245  — 

place  de  Guillaume  II>  dernier  comte  de  Bourges  de 
la  première  série.  Il  y  avait  eu  entre  Guillaume  et 
Raoul  des  difficultés  en  Berri  et  en  Bourgogne,  à  la 
suite  desquelles  le  Roi  plaça  définitivement  le  Berri 
sous ladministration  royale  (1). 

Quant  à  Geoffroi,  notre  charte  de  Brinon  le  qualifie 
comte  en  935,  à  Auxerre.  L'année  suivante,  dans  une 
donation  à  Tabbaye  de  Cluny,  datée  de  Ne  vers  936, 
8  avril,  il  comparait  avec  son  épouse  Ava  et  mentionne 
la  mémoire  de  son  seigneur  Guillaume  (pro  anima 
quoque  seniorts  met  Wilelmi)  et  parmi  les  signataires 
de  Nevers  figure  Eptin  (2). 

Ces  coïncidences  permettent  d'identifier  ce  person- 
nage de  Geoffroi,  vicomte  de  Bourges  et  comte  de 
Nevers. 

R.  DE  LESPINASSE. 


(i)  ArL  de  véri/Ur  les  dates,  II,  p.  405. 
(2)  BnuEL;  Cari,  de  Cluny^  I,  n«  446. 


1 


—  246  - 


ABBAYE 

DES  RELIGIEUSES  BÉNÉDICTINES 

DE 

NOTRE-DAME-DE-NEVERS 


Le  plan  de  la  ville  d8  Nevers,  dressé  en  1759  et 
conservé  au  Musée  céramique,  peut  donner  une  idée 
de  la  grandeur  et  de  l'importance  de  labbaye  Notre- 
Dame  :  en  effet,  maisons,  églises,  cours,  jardins,  qui 
en  dépendent,  couvrent  im  vaste  espace  entre  les  rues 
du  Croux,  de  Saint-Gtenest,  de  Saint-Révérien  et  la 
dernière  enceinte  des  remparts,  en  dehors  de  laquelle 
sont  môme  restées  quelques  parcelles  du  couvent  pri- 
mitif. 

Peu  de  détails  subsistent  sur  cet  ancien  monastère 
qui  se  trouve  ainsi  environné,  à  nos  yeux,  comme 
d'une  clôture  mystérieuse  ;  d'autre  part,  chaque  jour 
voit  disparaître  quelqu'un  des  faibles  vestiges  échappés 
à  la  destruction,  en  môme  temps  que  s'effacent  les 
souvenirs  qui  en  fixaient  la  destination  ;  c'est  ce  qui 
m'a  décidé  à  entreprendre  une  esquisse  historique  et 
descriptive  de  l'abbaye  Notre-Dame  Le  lecteur  admi- 
rera peut-être,  comme  je  l'ai  fait  moi-môme,  à  quel 
point  l'histoire  de  l'abbaye  se  confond  avec  celle  de 
la  ville  de  Nevers  et  môme  celle  de  la  province  de 
Nivernais;  de  telle  sorte  que  cette  étude  offrira  le 
double  intérêt  de  nous  fournir  d'utiles  éclaircisse- 
ments sur  le  passé  de  notre  pays  et  de  satisfaire  notre 


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-  247  — 

légitime  curiosité  sur  les  faits  et  gestes  d'une  Com- 
munauté qui  vécut  derrière  les  murs  de  son  cloître. 

Le  précis  sommaire  de  la  fondation  du  couvent  et 
les  notices  des  abbesses  feront  la  matière  du  premier 
chapitre  ; 

Le  second  sera  consacré  au  personnel,  en  dehors  de 
l'abbesse  ; 

Et  le  troisième  ^ux  constructions  et  dépendances. 

Enfin,  le  récit  d'une  procession  à  l'abbaye  conclura 
le  tout  et  sera  comme  le  résumé  et  la  synthèse  dqs 
mille  détails  épars  dans  les  différentes  parties  de  cette 
étude. 


CHAPITRE  PREMIER 

Saint  Colomban,  moine  d'Irlande,  né  vers  le  milieu 
du  vi«  siècle,  vint  deux  fois  à  Nevers  ;  à  son  premier 
voyage,  en  600,  il  fonda  le  monastère  de  Saint-Etienne 
pour  des  religieuses  soumises  à  la  règle  qu'il  avait 
instituée.  En  France,  beaucoup  de  monastères  lui 
doivent  leur  origine. 

L'exemple  du  saint  religieux  et  l'édification  qui 
s'exhalait  de  ces  asiles  de  vertu  et  de  prière  étaient 
un  encouragement  aux  hommes  de  Dieu  de  fonder  de 
nouveaux  couvents  et  aux  âmes  pieuses  de  se  grouper 
pour  se  sanctifier  en  commun.  Aussi  Théodulphe 
Babolène,  abbé  de  Saint-Maur-les-Fossés,  fondateur 
de  trois  monastères  dans  le  Berry,  fut-il  sollicité  par 
Rauracus,  évoque  de  Nevers,  de  doter  sa  ville  épisco- 
pale  d'un  second  couvent  de  filles. 

Les  auteurs  sont  d'accord  pour  en  fixer  la  fonda- 
tion à  l'an  624. 

Le  monastère  de  Saint-Etienne  était  au-devant  de 
la  ville,  en  dehors  des  remparts. 


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-  248  — 

Celui  de  Notre-Dame,  situé  à  Topposô,  touchait  au 
pied  de  la  muraille  d'enceinte . 

Tous  les  deux  obéissaient  à  la  môme  règle  :  «  Item- 
que  aliud  Christi  virginum  juxta  Nivernense  oppidum 
sub  e&dem  régula,  nempe  Columbani,  construxit  (1)  r>. 

Le  choix  de  l'emplacement  du  monastère  de  Notre- 
Dame  fut  déterminé  par  un  événement  qui  rendait  ce 
lieu  digne  de  respect  et  de  vénération.  Cette  terre 
avait  bu  le  sang  du  premier  saint  connu  dans  le 
Nivernais  et  personne  ne  songeait  à  révoquer  en  doute 
l'authenticité  de  cette  croyance  profondément  enra- 
cinée dans  les  esprits  et  dans  les  cœurs  :  «  En  374, 
pendant  la  persécution  d'Aurélien,  suivant  une  pieuse 
tradition  conservée  jusqu'à  nos  jours,  dit  Parmentier. 
saint  Révérien  fut  martyrisé  en  cet  endroit  (2)  ».  Dans 
Tancien  enclos  de  l'abbaye,  le  nom  du  saint  donné  à 
une  source,  à  une  tour  et  à  une  rue  voisines,  a  cer-r 
tainement  pour  but  de  localiser  et  de  préciser  le  ber- 
ceau de  nos  origines  religieuses,  c  Le  lieu  môme  » 
où  le  saint  reçut  la  palme  du  martyre  «  était  renfermé 
dans  une  chapelle  »  qui  existait  du  temps  de  Parmen- 
tier, dans  le  jardin  de  l'abbaye  (3).  Cet  édicule,  vu 
ses  petites  dimensions,  n'est  pas  indiqué  sur  le  plan 
de  1759  ;  mais  il  figure  sur  un  ancien  pastel  (4)  qui 
représente  une  vue  du  vieux  Nevers  prise  un  peu  au- 
devant  de  l'abattoir  actuel. 

Tout  le  monastère  est  rempli  des  souvenirs  du  glo- 
rieux martyr  :  «  On  y  conserve  une  grande  pierre 
carrée  sur  laquelle  saint  Révérien  eut,  dit-on,  la  tête 
tranchée  (5)  ». 

(1)  JoNAS,  In  viti8  abhatum  Columbani  et  Eustasii,  lib.  X.  p.  297. 

(2)  Parmentier,  Archives  de  la  ville  de  Nevers,,  t  I«%  p.  383. 

(3)  Parmentier,  p.  383. 

(4)  Au  Mutée  de  la  Porte-da-Groaz. 
^)  Parmentier,  p.  883. 


-  240  ^ 

«  En  Tannée  1719,  continue  Parmentier,  une  figure 
de  pierre  en  relief ,  après  avoir  été  longtemps  à  la 
porte  de  l'église,  a  été  placée  au-dedans  où  on  la  voit 
encore.  Elle  a  environ  six  pieds  de  hauteur.  Tout  le 
corps  parait  enveloppé  d'une  manière  de  manteau  qui 
descend  jusqu'aux  pieds.  La  tête  repose  sur  un 
coussin;  les  deux  mains  sont  rapprochées  l'une  de 
l'autre  et;  jointes  au-dessus  de  l'estomac.  Le  corps  est 
sous  une  épée  inclinée  de  la  gauche  à  la  droite.  A 
chaque  côté  de  la  tête,  il  y  a  un  ange  qui  semble 
l'encenser.  La  position  de  cette  pierre,  du  xiv*  siècle, 
était  certainement  couchée  » . 

Notre  archiviste  et  historien  nivernais  réfute  l'opi- 
nion que  ce  personnage  fût  un  comte  de  Nevers, 
attendu  qu'aucun  comte  n'a  été  enterré  à  l'abbaye... 
Il  penche  à  croire  que  cette  représentation  était  plutôt 
celle  d'un  saint  :  les  anges  avec  leurs  encensoirs  rap- 
pellent la  sainteté  du  personnage  ;  l'épée ,  l'instru- 
ment de  son  supplice,  et  il  en  conclut  que  rien  n'em- 
pêche d'attribuer  à  saint  Révérien  tous  ces  points  de 
rapport  (1). 

Tel  est  aussi  le  sentiment  de  M»'  Crosnier  (2). 

La  possession  des  reliques  du  saint  martyr,  le  corps 
presque  entier,  était  le  trésor  le  plus  précieux  de 
l'abbaye.  Le  Père  Artus  du  Moûtier,  récollet,  dans  sa 
notice  de  Saint-Révérien  à  laqqelle  le  Père  Ribadé- 
neyra  fait  des  emprunts,  mentionne  deux  reliquaires  où 
sont  contenues  les  reliques  du  saint  martyr  :  «  Les 
dames  de  Nevers,  religieuses  de  l'ordre  de  Saint- 
Benoit,  ont  dans  leur  abbaye  le  chef  de  Saint-Révé- 
rien presque  en  entier  dans  une  châsse  d'argent^  et 

(1)  Cependant,  je  dois  dire  qae  la  présence  des  deux  anges  tenant  des 
encensoirs  ne  semble  qa'une  espèce  de  lieu  commun  que  Ton  retrouve  sur 
un  grand  nombr»  de  tombes  des  xiv*  et  xv"  siècles. 

(3)  Congrégations  religieuses  de  femmes  du  diocèse  de  Nevers,  p.'iQ. 


—  250  - 

dans  un6  caisse  de  bois  est  conservé  la  pldpart  de  son 
corps  (1)  ». 

Le  Martyrologe  d'Usuard  fixe  le  martyre  de  Sain t- 
Révérien  in  territorio  Nioernensi  (2).  Le  culte  du 
saint  était  public  au  vni*^  siècle  ;  le  prieuré  de  son  nom. 
en  Nivernais,  existait  dans  le  ix*. 

Néanmoins,  le  lieu  du  martyre  reste  im  point  d'his* 
toire  qui  n'est  pas  définitivement  tranché,  faute  de 
documents  positifs  anciens.  Autun  et  même  le  bourg 
de  Saint-Révérien  dans  la  Nièvre  prétendent  avoir  été 
le  théâtre  de  la  mort  du  saint  martyr. 

La  légende  de  saint  Révérien,  au  supplément  niver- 
nais  du  Bréviaire,  conforme  aux  traditions  locales, 
rapporte  que  Révérien,  évoque,  Paul,  prêtre,  et 
leurs  compagnons,  au  nombre  de  dix,  quittèrent 
Autun,  se  dirigèrent  vers  le  pays  situé  au  couchant, 
c'est-à-dire  le  pays  nivernais,  pour  y  répandre  la  divine 
parole.  Il  fut  saisi  avec  ses  frères  d'apostolat  par  les 
soldats  d'Aurélien  qui,  après  la  défaite  de  Tétricus  à 
Chàlons,  se  dirigeaient  sur  Autun,  et  essayèrent  inuti- 
lement de  le  faire  sacrifier  aux  faux  dieux  ;  ne  pouvant 
triompher  de  sa  constance,  ils  lui  tranchèrent  la  tête 
ainsi  qu'à  ses  compagnons  (3). 

Comment  le  nouveau  monastère,  sans  défense,  en 
dehors  de  la  ville,  traverserait-il  cette  époque  de 
troubles,  d'invasions  et  de  guerres  civiles,  qui  vien- 
draient l'assaillir  à  si  peu  de  distance  de  son  berceau  ? 
Nous  ne  devinons  que  trop  le  triste  sort  qui  lui  était 
réservé  :  la  ruine,  le  pillage  et  peut-être  l'incendie. 
Au  viii®  siècle,  les  Sarrasins  surtout  se  signalèrent 
par  le  saccage  et  la  dévastation  du  pays  avoisinant 
Nevers. 

(1)  RiBADÉNEYRA,  Vie  des  Scùnts^  !•'  juin. 

(2)  Patrologie  de  Migne,  Martyrologe  cTC/tuorci,  tome  U,  page  112. 

(3)  Supplément  nivernais  au  Bréviaire,  1*'  juin. 


I 


Toutefois^  le  couvent  fut  relevé  après  un  certain 
temps. 

Ce  fut  révoque  Hériman  qui,  après  l'avoir  recons- 
truit au  moins  en  partie,  <c  le  regarnit  de  moniales  ;  il 
leur  rendit  en  môme  temps  tous  les  biens  dont  le 
couvent  jouissait  jadis  et  leur  accorda  le  privilège  de 
choisir  elles-mèaMMi  leurs  supérieures,  à  la  charge  de 
les  faire  confiimûr  par  Tévéque,  et  que  s'il  ne  se  trou- 
vait pas  parmi  elles  de  sujets  capables,  elles  s'adresse- 
raient à  lui  et  qu'il  y  pourvoirait  (1)  ». 

Non  content  de  relever  le  monastère  Saint-Genès 
ou  abbaye  Notre-Dame,  il  fondait  deux  hôpitaux  près 
de  la  ville  et  comblait  de  ses  bienfaits  et  de  ses  lar- 
gesses l'abbaye  des  religieux,  de  Saint-Martin,  où  il 
exprimait  le  désir  d'ôtre  inhumé. 

Mais,  en  réalité,  ses  restes  furent  déposés  dans 
l'église  de  l'abbaye  Notre-Dame  dont  il  était  le  second 
fondateur.  «  Son  corps  repose  dans  la  chapelle  de  saint 
Jean  l'Evangéliste,  où  l'on  voit  encore,  dit  Parmen- 
tier,  son  tombeau  élevé  sur  quatre  petits  piliers  ou 
appuis  de  pierre.  La  voûte  (caveau)  sur  laquelle  il 
était  ayant  été  détruite  en  1689,  on  l'ouvrit  par  curio- 
sité ;  les  ossements  enveloppés  d  une  étoffe  de  soie, 
tirant  sur  le  bleu,  furent  trouvés  blancs  comme  neige. 
Les  Bénédictines  en  tirèrent  quelques-uns  ;  le  tombeau 
a  été  mal  rejoint  (2)  ». 

Plus  tard,  deux  évoques  bienfaiteurs  eurent  leur 
sépulture  dans  l'église  de  l'abbaye  :  Natran  devant 
l'autel  de  Notre-Dame  (3),  et  Geoffroy  devant  l'autel 
Saint-Pierre  (4). 


(1)  Charte  de  Tëvéque  Hériman  citée  par  Parmentier,  3S6. 

(2)  Paruentier,  886. 

(3)  Ihid.,  387. 

(4)  Ibid.,  389. 


-r  252  - 

Vers  870,  le  corps  de  saint  Genoul,  déposé  à  Saint- 
Pierre-le-Moûtier,  dans  le  temps  que  les  Normands 
désolaient  le  royaume,  fut  reporté  à  Ëstrées  par  les 
soins  de  l'abbé  Aéric.  L'auteur  anonyme  de  la  vie  du 
saint  dit  que,  au  passage  des  précieuses  reliques  à 
Nevers,  les  religieuses  de  Tabbaye  et  les  chanoines 
demandèrent  une  des  côtes  et  que.  Tayaut  partagée, 
le  sang  coula  des  deux  parties  coupées. 

Les  Religieuses,  qui  possédaient  une  terre  d'une 
certaine  importance  à  SardoUes,  pensaient  que  saint 
Genoul  leur  en  avait  fait  don;  mais  M9'  Crosnier 
explique  la  chose  autrement  et  d'une  façon  très  ration- 
nelle :  les  moines  d'Estrées,  ruinés,  se  réfugient  dans 
le  Nivernais  et  viennent  à  Saint-Pierre-le-Moûtier  ;  on 
peut  supposer  que  leur  détresse  leur  procure  quelques 
donations,  entre  autres  la  terre  de  SardoUes.  Or,  dans 
les  chartes  du  moyen  &ge,  on  trouve  souvent  cette 
formule  :  a  Je  donne  à  Saint-Hugues,  à  Saint-Benoit, 
au  lieu  de  dire  aux  religieux  de  Saint-Hugues,  de 
Saint-Benoit.  Les  religieux  de  Saint-Genoul,  pour 
témoigner  leur  reconnaissance  aux  Bénédictines  de 
Nevers  dont  ils  avaient  reçu  une  généreuse  hospitalité, 
leur  laissèrent  la  relique  mentionnée,  et,  en  outre, 
prétendaient  les  bonnes  sœurs,  la  tôte  de  saint  Genoul. 
Pour  les  religieux  d'Estrées,  rentrant  dans  leur 
monastère,  la  lointaine  propriété  de  SardoUes  en 
Nivernais  ne  pouvait  être  qu'une  charge  ;  ils  l'aban- 
donnèrent à  l'abbaye  Notre-Dame,  et  ainsi  les  reli- 
gieuses bénédictines  la  tenaient  en  réalité  de  saint 
Genoul,  c'est-à-dire  des  religieux  de  Saint-Genoul  (1)  ». 

L'évèque  Eumène  fit  confirmer  les  biens  de  l'abbaye 
par  un  diplôme  de  Charles-le-Gros  en  date  du  18  dé- 
cembre 888  (2). 

(1)  Mr  Crosnier,  Congrégations  religieuses  de  femmesy  page  11. 

(2)  Parmentibr,  387. 


—  253^ 

En  1121,  Tévèque  Frwnond  reconstruit  tout  le 
monastère  (1)  et  Cotignon  dit  qu'il  en  dédia  l'église  (2). 

Vers  1130,  le  môme  évoque  réunit  à  l'abbaye  Notre- 
Dame  plusieurs  communautés  religieuses  disséminées 
à  Saint-Genest,  Saint-Laurent  et  Saint-Arigle,  et  au 
lieu  de  Saint-Arigle  le  Gallia  Christiana  dit  SainU 
Trohé;  Michel  Cotignon  donne  les  noms  des  quatre 
églises  (3). 

En  1180,  Etienne,  comte  de  Sancerre,  certifie  par 
une  charte  scellée  de  son  sceau  que  Florence  de  Cour- 
celle  donne  à  l'église  Notre-Dame  de  Nevers  sa  vigne 
de  Saint-Satur,  dite  de  Pont-Dom. 

En  1229,  le  comte  Gui  et  la  comtesse  Mahaut  de 
Courtenay  donnent  à  l'abbaye  le  droit  de  prendre 
chaque  jour,  pour  le  chauffage,  une  voiture  de  bois 
vif  et  mort  de  la  charge  de  deux  chevaux,  à  condition 
qu'on  ferait  à  l'église  Notre-Dame  leur  anniversaire  et 
celui  du  feu  comte  Hervé  (4). 

La  plus  jolie  charte  du  fonds  des  Archives  de  la 
Nièvre  est  une  petite  pièce  d'octobre  1229,  malheu- 
reusement dépourvue  de  son  sceau  :  c'est  une  sentence 
arbitrale  de  Raoul  Berchard,  seigneur  de  la  Brouille 
(deBrullia),  sur  une  contestation  relative  au  bois  de 
Fours  et  Magny  entre  l'abbesse  de  Notre-Dame  de 
Nevers  et  Hugues  de  Verrières,  écuyer. 

II  fut  déclaré  que  l'abbesse  aurait  le  tiers  de  ce  bois 
dans  tout  ce  qu'il  pourrait  fournir,  pour  le  b&timent, 
le  chauffage  ou  tout  autre  besoin  ;  qu'elle  conduirait 
les  marchandises  dans  ses  maisons  de  Nevers  ou  par- 
tout ailleurs,  mais  qu'elle  ne  vendrait  rien  sans  l'auto- 
risation des  seigneurs  des  deux  autres  parts.  Hugues 

(i)  GiLLETi  Annuaire  de  Van  X, 

(2)  MiCHBL  GoTiONON,  CoUdoQue  des  KvSqttes^  p.  53. 

(^  Ibid. 

(4)  PARMEMnER,  dS9. 


-  Îi54  — 

de  Verrières  choisira  un  serviteur  fidèle^  lequel,  sur 
serment,  assignera  à  Tabbesse  la  part  qui  lui  re- 
viendra (1). 

m  * 

Il  ne  reste  aucun  document  cownnaat  les  supé- 
rieures du  monastère  primitif. 

Le  GcUUa  Christiana  donne  une  liste  qu'il  ne  garantit 
pas  complète  pour  le  commencement  au  moins. 

Les  douze  premières  abbesses  sont  inscrites  sans 
date  et  leur  ordre  de  classement  n'est  autre  que  celui 
fixé  par  le  nécrologe  du  monastère  ou  calendrier  sur 
lequel  leur  décès  était  simplement  inscrit  au  quantième 
du  mois  où  il  s'était  produit. 

I.  GuiBURGis,  de  bonne  mémoire,  le  IV  avant  les 
ides  de  février  (le  10). 

II.  NiTERiA,  la  veille  des  ides  de  févriei  (12  février). 

III.  Ambniardis,  le  XV  des  calendes  de  mars  (15  fé- 
vrier). 

.  IV.  Frédésindis,  appelée  du  monastère  de  Saint- 
Pierre  de  Reims  au  gouvernement  de  Tabbaye  de 
Nevers,  est  décédée  le  XIV  des  calendes  de  mars 
(16  février). 

V.  Jeanne  P®  de  Pesques,  le  IX  des  calendes  de 
mars  (21  février). 

VI.  Adeline,  aux  nones  de  mars  (7  mars). 

VII.  Odelinb^  le  VIII  des  ides  de  mars  (8  mars). 

VIII.  GIBELINE;  même  date. 

(i)  J'avaÎB  prié  If.  de  Lespinaase,  préaident  de  notre  Société  nivemaiae, 
de  chercher  8*il  ne  trouverait  pas  dans  ses  cartons  qaelques  chartes 
inédites  sur  l'abbaye.  Il  a  en  l'amabilité  de  me  fournir  Tanalyse  de  plus 
de  trente  pièces  provenant  des  Archives  de  la  Nièvre  ou  de  U  Bibliothèque 
nationale.  Qu'il  me  permette  de  lui  renouveler  ici  Texpreasion  de  toute 
ma  gratitude  -,  la  petite  charte  qui  vient  d'être  citée  (kit  partie  de  la 
çpUection. 


IX.  SiBiLLE,  le  IV  des  calendes  de  mai  (28  avril). 

X.  Aelis  la  Chaudronne,  la  veille  des  calendes  de 
juin  (31  mai). 

XI.  Marie  P*  de  CharençoiSi  même  date. 

XII.  Philippine  Sorina,  le  V  des  calendes  de  décem- 
bre (27  novembre). 

Toutes  ces  abbesses^  d'après  le  Gallia  Christiana, 
sont  antérieures  à  Tan  1300.  Ensuite  nous  arrivons  à 
celles  dont  l'administration  est  à  date  fixe . 

XIII.  Hersendb  gouvernait  le  monastère  en  1233  ;  il 
en  est  fait  mention  au  nécrologe  le  X  des  calendes  de 
mai  (22  avril)  (1). 

Les  quatre  chapelains  de  Notre-Dame  de  Nevers 
ont  acheté,  le  21  mars  1237,  à  Guillaume  de  la  Seeste 
et  Isabelle,  sa  femme,  pour  47  sols  de  forts  nivernais, 
un  cens  annuel  de  3  sols  établi  sur  des  vignes  situées 
à  Maler,  Priez,  Lagrange,  Boneyti,  Lachenau,  loca- 
lités de  la  paroisse  de  Pougues  que  les  vendeurs  décla- 
rent tenir  en  franc-alleu.  L'acte  est  passé  devant 
M«  Pierre,  oflScial  de  Nevers  (2). 

XIV.  Béatrix  de  la  Collangelle  fut  bénie  par 
Robert,  évéque  de  Nevers  ;  les  chroniques  du  monas- 
tère parlent  d'elle  en  1246.  En  1250,  elle  fit  quelques 
échanges  avec  le  chapitre  d'Autun  (3).  En  1251,  fonda- 
tion de  la  chapelle  de  Sainte-Catherine  dans  l'église 
de  Saint-Genès,  par  Simon  de  Bernay,  chapelain  de 
Notre-Dame,  qui  donnait  en  dot  deux  pièces  de  vigne 
aux  Fondreaux,  la  vigne  de  la  Pointe  en  Montapin,  et 
un  champ  sur  Brundicias,  près  le  champ  de  l'hôpital 

(1)  GaUia  Chrittiana,  Notices  des  abbeases.  Ces  notices  se  composent 
en  moyenne  de  sept  à  hait  lignes,  je  n'en  indiquerai  plus  la  source.  Je 
ferai  seulement  les  renvois  nécessaires  pour  les  autres  détails  qui  pro* 
viennent  d'ailleurs. 

(1)  Arch.  de  la  Nièvre. 

(3)  /d. 


-256  — 

Saint-Didier/ et  la  moitié  de  la  dlme  de  Séjan.  de  la 
paroisse  de  Saint-Jean  de  Lichy.  La  collation  de  la 
chapelle  appartiendra  à  Tabbesse;  trois  ou  quatre 
messes  des  morts  y  seront  dites  par  semaine,  mais  hors 
le  temps  de  la  messe  paroissiale.  Le  chapelain  prê- 
tera serment  entre  les  mains  du  curé  de  Saint-Genès 
d'acquitter  fidèlement  cette  charge  et  il  aura  pour  lui 
la  moitié  des  offrandes.  L'évêque  Robert  Cornu,  qui 
confirma  la  donation  en  y  apposant  son  sceau,  contribua 
lui-môme  à  la  fondation  en  abandonnant  aux  titulaires 
de  la  chapelle  certaines  places  désignées  en  l'acte  sous 
la  redevance  de  SO  sous,  payables  par  moitié  à  Tabbesse 
et  l'autre  moitié  au  couvent  (1). 

Dans  Tannée  1253,  l'abbesse  et  les  religieuses  achè- 
tent une  maison  sise  à  Nevers,  rue  du  Ch&teau,  pour 
4  livres  parisis  et  30  sols  nivernais  dont  le  produit  était 
destiné  au  service  des  anniversaires  (3). 

Des  chartes  de  1524  de  cette  abbesse  portaient  son 
sceau  avec  l'inscription  :  Sigillum  Beatricis  abbatissœ 
B,  Mariœ  Nivernensis. 

Cette  môme  année,  Hugues  de  Meauce  et  Isabelle 
de  Sully,  sa  femme,  accordèrent  à  Tabbaye  Notre- 
Dame  1  amortissement  des  bordelages  que  le  monas- 
tère possédait  dans  leur  seigneurie,  et  la  justice  à  eux 
spécialement  réservée.  C'est  le  premier  exemple 
d'amortissement  accordé  dans  cette  province  par  des 
seigneurs  particuliers.  Cet  Hugues  de  Meauce  mérite 
quelque  attention  :  il  accompagna  saint  Louis  à  sa 
première  croisade  ;  fait  prisonnier,  il  eut  les  yeux 
crevés  par  les  Sarrasins  a  parce  qu'il  était  homme  de 
sorte  de  qui  ils  pouvaient  avoir  du  déplaisir  à  l'ave- 
nir (3)  ».  Il  était  un  descendant  de  Philippe  de  Meauce.. 

(1)  D'après  Pannentier,  Arch.  de  la  ville  de  Nev.,  t  I«%  p.  8Sd-390. 

{%  Archivés  de  la  Nièvre. 

rS)  Parmemtier,  Arch.  de  la  ville  de  Nev,,  t.  l",  p.  390. 


—  257  — 

en  1000^  qui  vécut  cent  quarante  ans  et  trois  jours,  et 
de  Robert,  surnommé  Baisse-Porte,  fils  de  Philippe, . 
qui  avait  sept  pieds  de  haut.  Le  roi  saint  Louis  paya 
sa  rançon,  le  ramena  et  lui  fit  beaucoup  de  bien  et  en 
particulier  lui  fit  b&tir  la  maison  de  Rochefort  ou 
château  de  Meauce  (1). 

M.  Adrien  Bonvallet,  dans  sa  notice  sur  Saincaize- 
Meauce  (2),  donne  d'intéressants  détails  sur  le  domaine 
de  Meauce  appartenant  autrefois  aux  religieuses  de 
Notre-Dame;  on  l'appelait  autrefois  l'Abbaye  ou  le 
Domaine  de  Saint-Denis.  «  Différents  titres,  dit-il, 
nous  donnent  la  certitude  que  les  religieuses  avaient 
des  biens  en  cet  endroit  et  nous  ont  fait  supposer  que 
l'origine  pourrait  bien  remonter  à  l'année  1254,  date  de 
la  donation  à  l'abbaye  par  Hugues  de  Meauce  et 
Isabelle  v. 

On  retrouve  la  môme  Béatrix  en  1262. 

XV.  Une  autre  Béatrix,  dite  «  la  Chaudronne  », 
appartenait  à  la  noble  famille  de  la  Fer  té-Chaudron, 
paroisse  de  Chantenay.  Elle  reçut  la  crosse  abbatiale 
en  1266, 

Une  jolie  petite  charte,  datée  du  14  août  1266, 
témoigne  de  la  régularité  des  comptes  du  couvent. 
L'abbesse  Béatrix  déclare  qu'elle  doit  à  son  cher  fils 
en  Jésus-Christ,  Geoffroy  de  Verneuil,  prêtre  de  leur 
église,  la  forte  somme  {sic)  de  40  livres  pour  fourniture  de 
vin  vendu  et  livré.  Elle  promet  de  payer  dans  un  mois 
sur  simple  demande  de  Geoffroy  ou  de  son  mandataire. 
—  Au  bas  de  cette  reconnaissance  sont  portées  la  men- 
tion dû  sceau  et  les  formules  ordinaires  (3). 

A  Coulanges-les-Nevers,  les  religieuses  de  Notre- 


(1)  D'après  Parmentier,  Arch,  de  la  ville  de  Nev,,  t.  U,  p.  293. 

(2)  Bulletin  de  la  Société  Nivemaise,  p.  341,  2*  vol.,  4*  série. 

(3)  Archivée  de  Neven,  Pièce  communiquée  par  M.  de  LespinasBe. 
T.  IX,  3*  série.  17 


-258- 

Dame  possédaient  la  quatrième  partie  d'un  cens  assis  sur 
le  Bois-Dieu  et  commun  avec  plusieurs  laïques.  Nous 
le  savons  par  une  charte  de  mars  1267,  qui  relate  la 
vente  de  la  part  de  Pierre  Traxin,  de  Nevers,  l'un  des 
copartageants  (1). 
Béatrix  mourut  le  IV  des  nones  de  mars  (13  mars). 

XVI.  Agnès  de  Saint-Gigon.  Il  en  est  fait  men- 
tion en  1369,  le  mercredi  avant  l'Annonciation,  1370 
(19  mars),  dans  un  acte  portant  sentence  en  sa  faveur 
contre  Guy  de  Sury ,  chevalier,  relativement  à  10  quar- 
teaux  de  froment  ou  d'orge  qui  lui  étaient  dûs.  Le 
nécrologe  indique  sa  mort  au  VIII  des  ides  de  novembre 
(6  novembre)  (3). 

En  octobre  1370,  une  maison,  située  à  Nevers,  près 
la  porte  de  Ninchat,  est  achetée  par  Jehan  du  Puy ,  prêtre 
bénéficié  de  Téglise  Saint-Genès,  à  charge  d'acquitter 
chaque  année  aux  moniales  de  Notre-Dame  un  cens  de 
trois  oboles  (3) . 

XVII.  Reine,  abbesse  de  Notre-Dame  de  Nevers, 
avait  une  sœur  du  nom  d'Elisabeth,  prieure  du 
Montet  (4).  En  1373,  il  est  fait  mention  de  Reine  dans 
une  charte  de  donation  au  prieur  de  Saint-Ouen.  Le 
mardi  après  les  octaves  de  la  Purification  de  la 
B.  V.  Marie  de  l'année  1377  (15  février  1378), 
nous  voyons  reparaître  Geoffroy  de  Verneuil  muni 
de  pouvoirs  pour  faire  élire  une  abbesse  ;  voici 
la  charte  qui  l'investit  de  son  mandat  :  a  Viris  vene- 
rabilibus  et  discretis  Symoni  decano  et  capitule 
ecclesie  Nivernensis,  Aremburgis  monasterii  B.  Marie 
Nivemensis,  humilis  priorissa  totiusque  ejusdem  loci 

(i)  ArcJdves  de  Nevers,  Pièce  communiquée  par  M.  de  Lespinasse. 
(2)  Id. 
(?)  Id. 

(4)  Et  non  •  de  ^foril6U)  •  comme  on  lit  au  Gàllia  Chrittiana.  —  Voir 
ObUuaire. 


—  259  - 

conventus,  salutem  et  orationès  in  Domino  J.  Ch»  ; 
universitati  vestre,  tenorepresentium^intimamus  quod 
nos  petitionem  eligendi  et  providendi  nobis  et  monas- 
terio  nostro  vacanti  de  abbatissa,  per  discretum  virum 
Gaufridum  de  Vernolio,  curatum  ecclesie  S**  Genesii 
Nivern.,  procuratorem  vobis  super  hoc  specialiter  des- 
tinatum  ex  parte  nostra  et  nomine  nostro,  vobis  factam 
die  Jovis  ante  festum  b**  Vincentii,  ratificavimus  et 
adhuc  ratificamus  de  licentia  nobis  concessa,  vobis 
gratias  humiliter  referendo  ;  in  cujus  robore,  quia 
sigillum  proprium  non  habemus,  sigillum  curie  vene- 
rabilis  viri  archidiac.Niv.,  sede  vacante,  unacum...(l) 
presentibus  litteris  rogavimus  apponi  et  nos  officialis, 
archidiaconus  Niv.  et  curatus  predicti,  ad  preces 
priorissœ  et  conventus  predictorum  sigilla  nostra 
eisdem  presentibus  duximus  apponenda  ».  (Malheu- 
reusement ce  double  sceau  a  disparu)  (3). 

En  1281,  le  siège  abbatial  était  (encore  ou  de  nou- 
veau) vacant  ;  car  dans  un  acte  de  manumission,  c'est 
la  prieure  qui  est  en  nom  avec  le  couvent,  sans  qu'il 
soit  question  de  l'abbesse. 

XVIII.  Alis  ou  Aalipdis  paraît  la  môme  année  1281. 
On  comprend  qu'il  était  difficile  qu'une  religieuse  pût 
s'occuper  de  la  régie  des  biens  du  monastère  épars  sur 
différents  points  de  la  province  et  occasionnant  parfois 
des  contestations  et  des  procès.  Alis  voulut  remédier 
à  ces  inconvénients  en  nommant  un  mandataire  ad 
hoc  ;  elle  confia  ce  soin  à  un  nommé  Hubert  dit  Rave- 
neau,  «  lui  donnant  procuration  à  l'effet  de  traiter 
toutes  les  affaires  de  son  couvent,  soit  au  palais,  soit 
ailleurs,  tant  en  défendant  qu'en  demandant  (3)  ». 

(1)  Le  sens  indique  clairement  que  les  mots  à  suppléer  sont  :  SigiUo 
curoH  iSt'  Genesii. 

(2)  Charte  des  Archives  départementales. 

(3)  Inventaire  de  Vabbé  de  MaroUes,  p.  51» 


—  260  - 

L  abbesse  «  Alypde  »  afferma,  en  1290,  sur  le  terri- 
toire d'Oulon,  des  champarts,  terres  et  prés,  moyen- 
nant trente  quarteaux  de  grain  moitié  froment,  moitié 
avoine,  livrables  à  la  Purification  de  la  sainte  Vierge, 
rendus  conduits  à  Ne  vers  aux  frais  du  preneur,  Phi- 
lippe d'Oulon.  Ce  dernier  s'engageait  en  même  temps 
à  surveiller  les  droits  et  revenus  divers  appartenant  à 
l'abbaye  dans  la  paroisse  d'Oulon  (1), 

En  1290,  on  voit  la  vente,  par  Hugonin  Jobert  et 
Margaronne,  son  épouse,  paroissiens  de  Saint-Genès, 
à  Guillaume  Bocquin,  prêtre,  pour  4  livres  tournois, 
d'une  pièce  de  vigne  sise  au  Montet,  tenant  à  la  vigne 
de  labbesse  de  Notre-Dame  de  Nevers  (2). 

En  1293,  elle  traita  avec  Robert,  comte  de  Cler- 
mont,  dauphin  d'Auvergne,  tant  en  son  nom  qu'au 
nom  d'Isabelle,  prieure  de  Marseigne,  dépendance 
du  monastère  de  Nevers.  On  ne  dit  pas  en  quoi  consis- 
tait cet  arrangement. 

25  juin  1293,  les  moniales,  abbesse  et  couvent  de 
Notre-Dame  de  Nevers  donnent  à  cens  à  Regnaud  dit 
Potaz,  de  Plagny,  et  Bonne,  son  épouse,  de  Sermoise, 
un  pré  situé  dans  la  prairie  de  Raray,  ayant  appartenu 
à  feu  Geoffroy  de  Vemeuil,  prêtre,  à  tenir  de  leur 
vivant  seulement,  pour  une  pension  annuelle  de 
19  sols,  payables  à  la  Saint- André  apôtre,  réservé  au 
service  des  anniversaires  (3). 

En  1297,  le  chapitre  de  Nevers  acheta  d'Alix  Trous- 
sebois  un  clos  de  vigne  situé  près  des  vignes  de  l'ab- 
besse  et  du  couvent  de  Notre-Dame,  à  Conflans  et  & 
Cuffy  (4). 

En  1299,  l'abbesse  fit  une  transaction  avec  Louis  !•' 

•  (1)  Archives  de  la  Nièvre. 
i2)  Td. 
(3)  M. 
[i)  Bibliothèque  nationale,  2296,  n"  45. 


—  261  — 

de  Flandre,  comte  de  Nevers,  relativement  à  la  justice 
et  ik  la  juridiction  temporelle  de  Plagny.  Le  comte 
reconnut  qu'elles  appartenaient  à  Tabbesse  (1). 

En  1305,  un  chanoine,  Lucas  de  Brachessat,  demeu- 
rant dans  une  maison  à  lui,  située  paroisse  Saint- 
Genès,  fait  la  demande  à  M"'*  Tabbesse  de  lui  céder 
une  grange  appartenant  au  couvent.  Plusieurs  cha- 
noines de  Saint-Cyr  avaient  en  ville  des  celliers  à  vin 
et  des  granges,  où  ils  logeaient  les  blés  et  avoines 
livrés  par  leurs  tenanciers  de  la  campagne.  Le  cha- 
noine de  Brachessat  rendait-il  quelques  services  au 
couvent?  En  tout  cas,  l'abbesse  et  le  couvent  de  Notre- 
Dame  lui  accordent  cette  grange  sa  vie  durant,  à  la 
condition  qu'il  l'entretiendra  en  bon  état  et  la  rendra 
i  sa  mort  avec  toutes  les  modifications  faites  par  lui. 
Acte  fut  passé  de  cette  convention  devant  l'official  de 
Ne  vers  (2). 

En  1309,  devant  Jean  de  Moulins,  archidiacre  de 
Decize,  et  Jean  de  Villecot,  clerc  tonsuré,  Jean  de 
Chaumoy,  paroissien  de  Mornay-sur-AUier,  vend  à 
Mathilde  des  Bordes,  prieure  de  Coustiers,  diocèse  de 
Nevers,  pour  45  sols,  une  pièce  de  terre  contigué  audit 
prieuré  (3). 

XIX.  Isabelle  de  Valsecrète  (Vosgré,  commune 
de  Dun-sur-Grandry),  est  portée  en  1310,  l'année  môme 
de  sa  mort  que  le  nécrologe  fixe  au  X  des  calendes  de 
mai  (22  avril). 

1317.  On  pense  que  le  martyrologe  du  couvent  est 
de  cette  année  et  Parmentier  ajoute  que  les  archives 
de  l'abbaye  étaient  nombreuses  et  bien  conservées  (4). 


(1)  Inventaire  de  Vabbé  de  MarolleSf  p.  74. 

(2)  Archives  de  la  Nièvre. 
(B)  Jd. 

(4)  Parmentibr,  Archives  de  la  ville  de  Nevers,  t.  î*%  p.  381. 


—  262  — 

XX.  EloIse  de  La  Tournelle  parait  dans  une  charte 
de  1318. 

« 

Un  acte  du  20  mars,  mardi  après  Lœtare,  1319-20, 
règle  un  différend  avec  le  chapitre  de  Saint-Cyr  ; 
Tabbesse  et  le  couvent  des  moniales  de  Notre-Dame 
de  Nevers  avaient  vendu  un  pré  à  un  bourgeois  de  la 
ville,  Guillaume  Jocelin  ;  ce  pré  dépendait  de  la  cen- 
sive  du  chapitre,  et  le  doyen^  en  qualité  de  seigneur 
censier,  s'oppose  à  la  vente  et  retient  le  pré  pour  le 
prix  convenu,  usant  en  cela  du  droit  que  lui  donnait 
de  toute  antiquité  la  coutume  de  Nevers .  Guillaume  y 
consent  et  déclare  abandonner  les  droits  et  la  pro- 
priété du  pré. 

Nous  n'avons  pas  l'acte  de  vente  donnant  le  prix  et 
le  nom  du  pré,  mais  seulement  la  rétrocession  (1) 
passée  devant  l'official  et  son  clerc  juré,  Jean  de 
Segoules . 

L'abbesse  EloIse,  en  1320,  reconnaît  qu'elle  et  son 
couvent  et  ses  dépendances  sont  à  la  garde  spéciale  du 
comte  de  Nevers.  L'acte  est  passé  en  la  chambre  de 
ladite  EloIse  de  La  Tournelle,  en  présence  d'un  grand 
nombre  de  chevaliers,  parmi  lesquels  Pierre  de  La 
Tournelle,  abbé  de  Saint-Martin,  et  Hugues  et  Gode- 
froy  de  La  Tournelle,  ses  frères  (2). 

Des  lettres  de  cette  abbesse,  datées  de  1324,  décla- 
rent que  Philippe,  jadis  roi  de  France,  avait  donné  à 
Miles  d'Amort,  prêtre,  pour  la  chapelle  de  Chaligny, 
dépendant  de  ladite  abbesse,  une  chasuble  et  pare- 
ment d'autel  en  drap  d'or,  avec  certains  autres  orne- 
ments, lesquels  elle  veut  et  entend  demeurer  à  perpé- 
tuité en  ladite  chapelle  pour  l'usage  d'icelle  (3). 


(1)  Bibliothèqae  nationale,  lat.  2502,  n*  51. 

(2)  Inventaire  de  MarolleSt  p.  93. 

(3)  Id.,  p.  58. 


-263  - 

L'année  suivante,  elle  entra  en  contestation  avec 
Hérard  de  Thianges,  seigneur  de  Rosemond,  relative- 
ment à  la  justice  de  certains  domaines. 

Le  8  février  1328,  André  Garin,  du  port  de  Givry, 
vend  à  Arnould  Galien,  de  Magny,  paroisse  de  Marzy, 
pour  8  livres  10  sols,  une  ouche  contiguô  à  la  vigne  de 
l'abbesse  de  Notre-Dame,  à  la  charge  d'une  obole  de 
cens  à  payer  à  ladite  abbesse,  à  Marzy,  à  la  fête  de  la 
Purification  (1). 

L'abbesse  Eloïse  mourut  en  1331,  le  XIII  des  calen- 
des de  mai  (19 avril). 

XXI.  Jeanne  II  d'Arablay  (2),  était,  dit-on,  proche 
parente  du  cardinal  d'Arrablay .  On  n'a  aucun  détail 
sur  cette  religieuse  qui  vivait  encore  en  1337.  C'est 
elle  dont  il  est  question  dans  la  curieuse  pièce  qui  suit  : 

«  L'an  du  Seigneur  1337,  le  mercredi  fête  de  Saint- 
Eloy  d'été... 

»  En  présence  du  notaire  public  et  des  témoins  sous- 
signés, religieux  homme,  Frère  Guillaume  de  Decize, 
sous-prieur  des  Frères  Prêcheurs,  accompagné  de  Jean 
Grossi,  clerc,  citoyen  de  Nevers,  s'est  transporté 
auprès  de  l'abbesse  du  monastère  de  la  Bienheureuse 
Marie  de  Nevers...  » 

Ils  l'ont  trouvée  dans  une  chambre  basse  de  son 
abbaye. 

Le  sous-prieur  lui  a  exposé  que  lui  conjointement 
avec  ses  Frères  et  ledit  Jean  Grossi  ont  fait  l'échange 
d'une  maison,  appartenant  auxdits  Frères,  située  à 
Nevers.  près  du  marché  au  blé,  contre  la  maison 
dudit  Jean,  située  à  Nevers,  au-dessous  du  monastère 
des  Frères-Prêcheurs,  et  soumise  à  la  censive  de 
l'abbesse. 


(1)  Archives  de  la  Nièvre. 

(2)  Arrablay  (Loiret),  prés  Gien. 


—  264  -. 

En  conséquence  de  ce,  Jean  Grossi  offrit  à  Tabbesse 
de  se  dévêtir  de  sa  maison  susénoncée  pour  que  ladite 
abbesse,  comme  seigneuresse  par  son  droit  de  cen- 
sive,  en  investît  les  Frères-Prècheurs. 

A  son  tour,  Frère  Guillaume,  en  son  nom  et  au  nom 
de  ses  Frères,  requit  ladite  dame  abbesse  de  lui  accor- 
der  l'investiture,  et  se  montra  disposé  à  reconnaître 
la  censive  de  ladite  dame  abbesse  sur  la  maison  dési- 
gnée et  à  en  payer  et  remettre  la  taxe  dans  la  main 
de  la  dame  abbesse,  en  lui  offrant  4  deniers  qu'il 
tenait  en  sa  main. 

L'abbessene  les  voulut  pas  recevoir  et  accomplir 
les  formalités  que  de  droit  et  de  coutume  locale  elle 
était  tenue  selon  la  nature  dudit  cens,  contre  la  remise 
à  la  dame  abbesse  par  le  Frère  Guillaume  de  l'acte  de 
mutation  en  bonne  et  due  forme. 

Ladite  dame  abbesse  répondit  à  Frère  Guillaume 
qu'elle  entendait  bien  ce  qu'il  lui  disait,  qu'elle  en  par- 
lerait à  son  Conseil  et  que  sous  peu  elle  lui  rendrait 
réponse. 

Le  jeudi  suivant  (le  lendemain),  Frère  Guillaume 
se  rendit  de  nouveau,  en  compagnie  de  Jean  Grossi, 
auprès  de  M™«  l 'abbesse  pour  avoir  sa  réponse  ;  il  la 
trouva  dans  sa  chambre  haute  avec  plusieurs  de  ses 
religieuses,  et  bien  qu'il  fût  entré  dans  cette  chambre, 
elles  ne  permirent  pas  d'y  entrer  aux  témoins  nommés 
et  amenés  par  le  Frère  Guillaume  ;  mais  ils  se  tinrent 
près  de  la  porte  et  purent  entendre  la  requête  adressée 
derechef  à  M°*®  l'abbesse  par  Frère  Guillaume.  Elle 
ne  voulut  pas  l'entendre  et  se  retira  le  plus  vite  qu'il 
lui  fut  possible  dans  une  autre  chambre,  dont  elle 
ferma  la  porte  à  clé,  sans  faire  aucune  réponse  au  Frère. 

..."  ((  Sur  toutes  ces  tentatives.  Frère  Guillaume 
demanda  qu'il  lui  fût  donné  un  acte  public  par  moi, 
notaire  soussigné. 


-265  — 

»  J'en  ai  rédigé  le  détail  publiquement  à  Nevers  dans 
les  lieux  susdits,  le  mercredi  en  présence  de  Guillaume 
Barbier  de  La  Tartre,  Perreault  Pillaul  et  plusieurs 
autres  témoins  pour  ce  convoqués...,  et  le  jeudi  en 
présence,  devant  la  porte  de  la  chambre  haute,  de 
Jean  Grossi,  Minot  Grolier,  Jean,  gendre  de  Perrin 
Barbier,  et  plusieurs  autres. 

»  Et  moi,  Huet  de  Monte  Barro  (Montbar),  clerc, 
notaire  apostolique,  ai  été  également  présent  avec  les 
personnes  nommées  en  premier  lieu,  à  l'exception  des 
personnes  qui,  le  second  jour,  n'étaient  pas  dans  la 
chambre  haute. 

»  A  ce  présent  acte  public  que  j'ai  fait  rédiger,  j'ai 
apposé  mon  seing  accoutumé  en  témoignage  des  faits 
susénoncés  ». 

Le  seing  manuel  du  notaire  représente  une  mons- 
trance  (Saint-Sacrement  ou  reliquaire  de  même 
forme),  composée  de  douze  lobes  en  cintre  brisé,  ter- 
minés alternativement  par  des  croix  et  des  boules; 
dans  les  1,  3,  5,  7  desquels  on  lit  H.  D.  M.  B.  {Huetus 
de  Monte  de  Barro).  Au  centre  un  écu  parti  au 
l«'de...  plein,  au2^  bandé  de... et  de...  de  six  pièces  (1). 

Une  courte  explication  n'est  pas  superflue  : 
M"®  labbesse,  bien  que  extraordinaire  que  parût  sa 
conduite  dans  la  circonstance,  ne  doit  pas  être  regar- 
dée pourtant  comme  tombée  en  enfance  et  agissant  en 
personne  démente.  A  cette  époque,  les  seigneurs 
étaient  si  jaloux  de  leurs  droits  et  mettaient  tant  de 
soin  à  ne  pas  les  perdre  que  les  faits  de  ce  genre  ne 
sont  pas  rares  ;  ils  s'esquivaient  par  tous  les  moyens  en 
leur  pouvoir  pour  conserver  leurs  investitures  et 
refuser  des  rachats  de  cens  ou  autres  tributs.  — 
Néanmoins  la  déclaration  notariée  était  suivie  de  son 

(1)  Archives  de  la  Nièvre,  H.  369,  pièce  L 


—  aoo  — 

effet.  Dans  le  cas  présent,  la  dette  de  la  censive  de 
Jean  Grossi  était  transportée  légalement  aux  Frères- 
Prôcheurs  en  vertu  d'une  signification  subséquente  à 
adresser  à  M'b*  Tabbesse  qui,  cette  fois,  était  bien 
obligée  d'entendre  ce  qu'on  lui  disait  et  d'y  acquiescer. 
'  Le  nécrologe  porte  sa  mort  au  VIII  des  calendes 
d'octobre  (24  septembre). 

XXII.  Marguerite  de  Fontenay  était,  en  1342, 
prieure  de  Marseigne;  ce  fut  en  1345  qu'elle  devint 
abbesse  de  Ne  vers. 

En  1346,  Agnës^  femme  serve  des  religieuses  de 
Notre-Dame,  obtient  l'amortissement  d'un  droit  de 
cens  qui  leur  était  dû  sur  une  maison  sise  rue  de  la 
Tartre  (1). 

L'abbesse  Marguerite  eut  un  démêlé,  en  1347,  avec 
Guillaume  de  Thianges,  seigneur  d'Uxeloup^  au  sujet 
de  la  justice  d'une  dépendance  de  son  couvent. 

On  la  retrouve  en  1360.  Sa  mort  est  indiquée  dans 
le  martyrologe  au  III  des  calendes  de  juillet  (29  juin). 

XXIII.  Marguerite  II  de  Ternant  occupait  le  siège 
abbatial  en  1364. 

Sire  Mathieu  Coder,  prêtre,  demeurant  à  Nevers, 
teste  entre  les  mains  de  Perreau  Camuzat,  juré,  le  jour 
de  la  Saint-Clément  (23  nov.)  1369.  Il  considérait 
l'autel  des  morts  fondé  dans  l'église  Notre-Dame 
comme  trop  peu  doté  et  il  lègue  à  Hugues  Lamoleur, 
vicaire  de  cet  autel,  ainsi  qu'à  ses  successeurs,  une 
maison  lui  appartenant,  située  rue  Saint-Genès,  conti- 
gtie  aux  deux  maisons  des  moniales,  abbesse  et  couvent 
de  Notre-Dame-de-Nevers,  occupées  l'une  par  Jean 
Ëdeneau  et  l'autre  par  Jean  de  Luzy,  à  la  condition 
qu'il  sera  célébré  audit  autel  des  morts  ime  messe 
chaque  mois  à  perpétuité  pour  l'àme  dudit  Mathieu  (2). 

(1)  Archives  de  la  Nièvre. 

(3)  Bibliothèque  nationale,  lat.  9190,  n*  S9. 


-  267  - 

1387-88,  !•'  mars,  dimanche  Oculi  met,  Jeanne  de 
Pesque,  moniale  de  Notre-Dame  de  Nevers,  et  prieure 
de  Saint-Aignan,  fait  un  contrat  de  bordelage  à  Jean 
Calais,  du  Gravier,  consistant  en  deux  tennements 
situés  prope anianum  (1),  pour  un  quarteau  d'avoine  et 
5  sols  pendant  les  huit  premières  années  et  ensuite  le 
double,  payable  à  la  Saint-André.  Il  devra  bâtir  à  ses 
frais  une  maison  et  l'entretenir  en  bon  état.  L'acte 
fut  passé  devant  Jean  de  Moulins,  archidiacre,  garde 
de  la  prévôté  de  Decize,  et  son  clerc,  Jean  de 
Villecot  (2). 

En  1393,  Tabbesse  de  Notre-Dame  était  informée 
d'un  legs  de  110  sols  tournois,  donné  à  son  église, 
pour  le  service  des  anniversaires,  par  le  testament  de 
la  mère  de  Michel  Boyau.  Le  testament,  selon 
l'usage,  fut  reçu  par  l'ofRcial  et  transcrit  par  lui. 
Babelle,  l'héritière,  chargée  de  l'exécution  du  legs 
s'entend,  en  1398,  avec  l'official  pour  le  versement  des 
fonds  (3). 

Un  grand  nombre  d'actes  font  mention  de  cette 
abbesse  depuis  le  commencement  de  son  administra- 
tion jusqu'en  1395,  époque  où  elle  mourut,  la  veille 
de  Saint-Thomas  apôtre  (20  décembre) .  Les  auteurs 
du  Gallia  Christiana  pensent  qu  elle  s'était  démise 
de  ses  fonctions  ou  bien  avait  plusieurs  prénoms 
qu'elle  prenait  indistinctement  comme  permettent  de 
le  penser  les  actes  de  1388,  où  son  nom  se  lit  Câlina, 
Caliva,  Calma. 

Depuis  1389,  jusque  bien  avant  dans  le  xv**  siècle, 
le  droit  de  péage  par  terre,  appartenant  à  la  ville,  est 
chargé  d'une  redevance  annuelle  de  5  sols  qui  se  par- 


Ci)  Sans  doute  Prope  Sanctum  Anianum. 
(3)  Bibliothèque  nationale,  lat.  9190,  n«  33. 
(^  Archives   de  la  Nièvre. 


—  368  - 

tageait  par  moitié  entre  la  prieure  et  le  chantre  de 
l'église  (1). 

XXIV.  Jeanne  III  de  Brayb  était  prieure  de  la 
communauté  quand  elle  fut  élue  abbesse.  Son  élection 
fut  confirmée  le  XIV  des  calendes  de  février  (19  jan- 
vier) 1395.  François,  camérier  du  Saint-Siège,  lui  fit 
remise  des  Annates.  Jeanne  de  Braye  sanctionna  la 
transaction  passée  entre  la  prieure  de  Marseigne  et  la 
dame  de  Jaligny. 

En  1400,  les  échevins  firent  combler  le  fossé  de  la 
fontaine  Saint-Loup  que  Tabbesse  avait  fait  faire  au 
préjudice  des  habitants  (2). 

En  1402,  &  la  requête  de  l'abbesse  de  Notre-Dame, 
Symon  Crosnay,  sergent  royal,  se  transporte  à  Imphy, 
A  rhôtel  de  Huguenin  Gordon  pour  le  sommer  de  com- 
paraître devant  le  lieutenant  du  bourg  de  Saint- 
Etienne,  afin  de  s'expliquer  sur  une  somme  de  7  livres 
tournois  due  par  Robert  de  La  Garde,  jadis  seigneur 
d'Imphy,  et  dont  ses  hoirs  étaient  responsables,  pour 
le  payement  de  laquelle  somme  on  allait  saisir  les 
revenus  de  la  terre  (3). 

Le  9  mai  1404,  les  religieuses  de  Notre-Dame  assis- 
tèrent au  service  de  Philippe-le-Hardi,  duc  de  Bour- 
gogne, qui  fut  célébré  à  Saint-Cyr,  et  il  leur  fut  payé 
80  sous  (4). 

1404.  Dans  le  catalogue  des  abbesses  de  Notre- 
Dame-de-la-Pommeraye,  diocèse  de  Sens,  on  trouve 
entre  les  années  1404  et  1440  une  Isabelle  de  Castro 
(de  Château),  tirée  du  monastère  de  Notre-Dame  de 
Ne  vers  (5). 

(1)  Parmentier,  Archives  de  la  ville  de  Nevers,  t.  I«%  p.  391. 

(2)  Parmentier,  t.  l'%  p  3d2. 

(3)  Archives  de  la  Nièvre. 

(4)  Parmkntier,  Archives  de  la  ville  de  Nevers^  t.  I«%  p.  393. 

\b)  Gallia  Christiana^  XKlly  colonne  191,  liste  des  abbesses  de  La  Pom- 
meraye. 


1406.  Jeanne  de  Bray,  humble  abbessa  de  Notre-* 
Dame  et  son  couvent,  dans  Tintérôt  de  leur  prieuré 
d'Àpilly  (commime  de  Druy),  au  nom  de  la  prieure, 
donne,  à  titre  de  bordelage,  à  Guillaume  Lequin,  de 
Mortier,  et  à  ses  hoirs,  une  chaume,  une  terre,  trois 
boisselées  de  terre,  pour  10  sols  tournois  et  une  geline 
à  payer  à  la  prieure  d'Apilly  pour  la  Saint-André.  — 
L'acte  est  passé  par  Tabbesse  en  son  chapitre  (1). 

Le  28  août  1409,  aux  Jours  tenus  au  bourg  de  Saint- 
Etienne  deNevers  par  Philibert  de  Veauce,  lieute- 
nant de  Jean  de  Merlo,  seigneur  de  Saint-Parize-le- 
Chàtel,  chambellan  du  roi  et  bailli  de  Saint-Pierre-le- 
Moûtier,  on  prononce  la  main-levée  d'une  saisie  faite 
par  Guillaume  de  Luthenay,  prévôt  de  Saint-Pierre, 
sur  une  maison  à  Augy,  près  Coustiers,  au  profit  de 
dame  Gibaude  des  Barres,  prieure  de  Coustiers  (2). 

XXIV.  Les  auteurs  du  Gallia  Chrîstiana  disent  que 
l'abbesse  Jeanne  de  Braye  mourut  le  XV  des  calendes 
de  mai  1427  (13  avril)  ;  ils  nomment  Jeanne  de  Pesques 
dans  les  abbesses  antérieures  au  xiv®  siècle.  (Voir  la 
liste  des  abbesses  suivant  le  rang  du  nécrologe.) 

Mais  cette  Jeanne  de  Pesques,  inscrite  la  cinquième 
parmi  celles  dont  la  date  est  incertaine,  s'intercale  ici  ; 
dès  lors,  elle  devient  la  vingt-quatrième  par  rang 
d'ordre,  et  toutes  Iqs  abbesses  précédentes  remontent 
d'une  imité  jusqu'au  vide  qu'elle  laisse  dans  la  nomen- 
clature. 

A  la  date  du  1«'  mars  1387-88,  nous  avons  déjà  vu 
Jeanne  de  Pesques,  moniale  de  Notre-Dame  et  prieure 
de  Saint-Aignan.  Longtemps  après,  c'est-à-dire  vingt- 
six  ans  plus  tard,  elle  est  abbesse  de  Notre-Dame.  En 
cette  qualité,  le  29  septembre  1414,  elle  préside  à  la 

(i)  Archives  de  la  Nièvre. 


-270- 

tète  de  son  chapitre  réuni  au  son  de  la  cloche  à  la  ma- 
nière accoutumée,  pour  régler  une  affaire  d'intérêt 
concernant  les  quatre  curés  de  Saint-Genès.  —  C'est 
un  bail  à  bordelage  de  terrain  à  vigne  et  de  maison, 
appelés  le  Champ-de-Gévry,  situés  paroisse  de  Cou- 
langes-les-Nevers,  accordé  à  Hugues  Michot  et  Agnès, 
sa  femme^  pour  eux  et  leurs  successeurs,  moyennant  la 
somme  annuelle  de  20  sols  et  une  geline  aux  diverses 
conditions  portées  dans  l'autre  acte,  celui-ci  n'étant 
que  l'approbation  et  confirmation  nécessaire  du  cou- 
vent. 

Par  le  style  de  la  pièce,  nous  jugeons  ce  qu'était 
l'autorité  abbatiale. 

Le  texte  est  en  français  et  débute  par  ces  mots  : 

«  A  tous  ceux  qui  ces  présentes  lettres  verront, 
Jehanne  de  Pesques,  humble  abbesse...  » 

A  la  fin,  il  ne  comparait  aucune  autorité  laïque  ou 
ecclésiastique,  et  l'acte  se  termine  par  la  formule  ordi- 
naire :  «  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  mis  nostre 
scel,  duquel  nous  usons  par  commun,  à  ces  présentes 
lettres  faites  et  données  en  nostre  dict  chapitre...  (1).  » 

En  1415,  les  Bénédictines  se  rendent  «  en  proces- 
sion »  aux  obsèques  de  nosseigneurs  les  duc  «  de 
Berbant  »  et  Philippe  de  Bourgogne,  comte  de  Nevers, 
en  l'église  Saint-Cyr.  Vingt-cinq  sous,  sont  payés  à  la 
sacristine  et  aux  marguilliers  de  l'abbaye,  pour  avoir 
fait  sonner  les  cloches  pendant  la  cérémonie  et  vingt 
sous  aux  Dames  pour  leur  présence  (2). 

XXV.  Marguerite  III  de  Lugny  succéda  en  1428  à 
Jeanne  de  Pesques  et  non  à  Jeanne  de  Braye.  La  cour 
de  justice  du  monastère  de  Notre-Dame  était  sans  doute 
en  réparations,  car  en  1430,  l'abbé  de  MaroUes  fait 

• 

(i)  Bibl.  ni«,  lat.  n«  33* 

(2)  Parhentier,  Archiv.  de  la  vUle  de  Nevers,  tom.  I«%  page  998. 


mention  de  lettres  de  reconnaissance,  établissant  que 
la  Cour  des  comptes  de  Nevers  avait  été  prêtée  aux 
abbesse  et  couvent  de  Notre-Dame  de  Nevers,  pour 
trois  ans  seulement.  Marguerite  de  Lugny  supplia  Gui 
de  Jaucourt  et  Odard  de  Lespinasse,  seigneurs  de 
Champallement,  écuyers,  conseillers  et  chambellans  du 
duc  de  Bourgogne,  d'obtenir  pour  ladite  abbesse  et  son 
couvent  Tautorisation  de  faire  tenir  encore  leur  justice 
au  même  lieu  (1). 

Une  charte  du  22  janvier  1450,  donnée  par  Marguerite 
de  Lugny,  abbesse  de  Notre-Dame  de  Nevers,  contient 
la  nomination  de  Perronnette  de  Messiac  comme  prieure 
de  Coustiers,  à  la  suite  de  la  vacance  produite  par  le 
décès  de  Thomasse  Garclaude,  dernière  prieure.  Elle 
est  investie  de  tous  les  droits  et  possessions  du  prieuré 
sur  la  prestation  du  serment,  exigé  en  pareil  cas,  et 
Tabbesse  ordonne  à  tous  de  lui  obéir  désormais  pour  les 
affaires  du  couvent  (2). 

Marguerite  de  Lugny  fait  Tannée  suivante  (15  nov, 
1451)  un  échange  de  terres  appartenant  à  Catherine 
de  Digoine,  fille  de  Pierre  de  Digoine,  écuyer,  et  de 
feu  Jeanne  de  Grantchamp.  Pierre  donnait  toute  une 
série  de  parcelles  de  champs  et  prés  avec  justice  haute^ 
basse  et  moyenne,  et  Tabbesse,  en  retour,  donnait  un 
bordelage  de  30  sols  tournois,  un  boisseau  de  froment 
et  une  geline,  dû  par  Guiot  Dureaul,  paroissien  de 
«  Saint-Hoing  »,  avec  la  justice  des  terres  sur  lesquelles 
le  bordelage  était  assis  (3). 

Colas  Jussault,  était  chapelain,  en  1452,  de  la  cha- 
pelle de  Saint-Jean  TEvangéliste,  dans  Téglise  Notre- 
Dame.  Le  bail  à  bordelage  d  une  maison,  située  rue 
Saint-Genôs,  en  face  Téglise  Notre-Dame,  à  Pierre 

(1)  Inventaire  de  Fabbé  de  MaroUtt,  page  59. 
(â;  Archiv.  de  la  Nièvre. 
(3)  Id. 


^  272  - 

Bègue,  tisserand,  et  à  Thomasse,  sa  femme,  en  fait 
mention  par  acte  du  9  octobre  de  la  môme  année  (1). 

Marguerite  mourut  en  1466,  le  V  des  ides  de  mars 
(le  11).  Les  auteurs  du  Gallia  font  observer  qu'on 
trouve  son  nom  inscrit  au  nécrologe  à  quatre  dates 
différentes.  Elle  aurait  pu  établir  plusieurs  fondations 
pour  le  repos  de  son  &me.  Quoiqu'il  en  soit,  elle  aurait 
administré  le  monastère  pendant  trente-huit  ans. 

Les  mêmes  auteurs,  font  mention  d'une  Pétronille 
de  Beauvoir  de  Chatelux  (2),  qui  aurait  été  abbesse 
de  Notre-Dame  en  1468,  et  qui  serait  morte  au  monas- 
tère de  Saint-Julien  d'Auxerre,  en  1486.  Cependant, 
ils  ne  la  font  pas  entrer  dans  la  série  des  abbesses  de 
Ne  ver  s. 

XX VL  Catherine  de  Boutillat  avait  été  élevée 
dans  le  monastère  de  Notre-Dame  de  Consolation  ou  de 
Reconfort,  de  l'ordre  des  Citeaux;  elle  en  fut  tirée 
pour  occuper  le  siège  abbatial  de  Notre-Dame  de 
Ne  vers  en  1466.  Elle  ne  pouvait  changer  d'ordre  et 
d'habit  sans  le  consentement  de  l'abbé  de  Citeaux. 
Humbert,  qui  occupait  cette  charge,  donna  son  adhésion 
la  veille  des  calendes  d'avril  1467  (31  mars  1468). 

En  février  1470-71,  Robinet  de  Maisangarbe  achète 
de  Antoine  Porrat,  tous  deux  demeurant  à  Ne  vers, 
des  terrains  longeant  la  Loire  au  Bec-d' Allier,  tedus 
en  bordelage  de  l'abbaye  Notre-Dame  (3). 

(A  suivre}.  A.  SERY, 

Chanoine. 
(1)  Arch.  de  la  Nièvre. 

(3)  11  s'agit  de  Pétrouille  ou  Perrette  de  Beauvoir  Ghastellax,  fille  de 
Claude,  maréchal  de  France,  et  de  Marie  de  Savoisy,  sa  troisième  femme. 
Le  GaUia  CkruHana  dit  qu'elle  fut  d'abord  abbesse  de  Sainte-Marie  de 
Revers,  en  1468,  puis  élue  abbesse  de  Grisenon  en  1476;  enfin  abbesse,  en 
même  temps  que  de  Grisenon,  de  Saint-Julien,  au  moins  dès  1486;  décédée 
dans  l'abbaye  de  Grisenon  le  16  août  150S.  {Gallia  Christianoj  XII,  col.  426. 
^  Chanoine  Frappier,  Histoire  de  Vabbaye  de  Saint-Julien  d'Atucerre, 
p.  76.  Fuit  etiam  iimul  abbatissa  S,  JuUani  autissiodareMii). 

(3)  Ârch.  de  la  Nièvre. 


-  273  — 

En  Tannée  1473,  Catherine  eut  de  grandes  diflScultés 
avec  Pierre  de  Fontenay,  évoque  de  Nevers,  au  sujet 
d'une  procession  qu'elle  avait  faite. 

L'aflEaire  fut  portée  devant  le  bailly  de  Saint-Pierre- 
le-Moûtier,  qui  se  rendit  à  Nevers,  pour  faire  une 
enquête  à  ce  sujet.  Le  résultat  établit  que  ces  dames 
étaient  en  droit  de  faire  publier  leurs  processions  ordi- 
naires et  extraordinaires  par  le  préconiseur  de  la  ville, 
et  de  les  conduire  au  Montot  et  à  Saint-Antoine.  Les 
quatre  curés  de  Saint-Genès  y  assistaient,  ainsi  que  les 
chapelains  et  autres  officiers  de  Tabbaye.  Les  auteurs 
du  Gallia  Christiana,  assurent  que  Tévôque  fut  obligé 
de  reconnaître  les  droits  de  Tabbesse  et  de  ses  reli- 
gieuses. 

—  ((  En  1476,  dans  le  temps  que  la  ville  faisait  faire 
le  boulevard  de  Crouô,  la  môme  abbesse,  sous  prétexte 
que  cet  ouvrage  lui  causait  du  préjudice,  fit  planter  de 
grands  pallis  (pieux)  devant  la  porte  dudit  boulevard, 
et,  si  près,  que  les  charrettes  ne  pouvaient  plus  y  passer. 
Les  échevins  firent  constater  ce  trouble  par  un  procès- 
verbal  du  28  mars.  On  plaida  un  peu,  et  l'intérêt  public 
mit  les  religieuses  à  la  raison. 

—  »  Deux  ans  plus  tard,  en  1478,  un  incendie  général, 
détruisit  les  lieux  réguliers  ;  un  homme  périt  dans  les 
flammes.  L'abbesse  fut  obligée  d'aller  loger  chez  son 
receveur.  Elle  fit  refaire  le  cloître  et  une  partie  des 
bâtiments.  Mme  Françoise  d'Albret,  comtesse  de 
Nevers,  fit  la  dépense  de  la  boiserie  du  réfectoire  et  du 
vitrage,  où  Ton  mit  ses  armoiries  (1).  » 

—  En  1478,  eut  lieu  un  singulier  procès  entre  nos 
religieuses  et  Antoine  Le  Tort,  écuyer,  seigneur  de 
Menaton  (aujourd'hui  Mono  ton),  dans  la  paroisse  de 
Druy. 

(1)  Parmentier,  Arch.  de  Nevers,  lom.  !•%  page  393. 
T.  IX,  $•  série.  18 


—  274  — 

Le  Tort  prétendait  y  posséder  toute  justice,  haute, 
moyenne  et  basse,  le  droit  d'avoir  gibet  de  bois  pour 
y  faire  exécuter  les  malfaiteurs,  de  le  réparer  dans  son 
premier  et  ancien  état,  de  prendre  toutes  amendes  et 
confiscations. 

Cependant,  les  religieuses  et  Tristan  de  Grantchamp 
avaient  fait  dresser  un  autre  gibet  à  deux  piliers,  ce 
qui  troublait  ce  dernier  dans  sa  possession,  et  ce  dont 
il  avait  adressé  une  plainte  au  bailly  de  Saint-Pierre- 
le-Moûtier. 

Les  religieuses,  à  leur  tour,  prétendent  qu'elles 
«  sont  dames  et  seigneuresses,  ensemble  de  la  justice 
haulte.  moyenne  et  basse  d'icelle,  et  mesmement  du 
gibect  de  bois  à  deux  pilliers,  pour  faire  faire,  par  leurs 
officiers  et  juges,  attacher  et  exécuter  tous  malfaicteurs 
quant  le  cas  le  requert  ». 

Les  religieuses  avaient  pour  procureur  maître  Jehan 
Tenon;  Tristan  de  Grantchamp  était  représenté  par 
Jehan  Delamarche.  Pour  obvier  à  tous  débats,  les  parties 
se  mirent  d'accord,  et  convinrent  que  chacun  serait 
seigneur  sur  ses  terres,  prés,  bordelages,  etc.,  ainsi  que 
sur  les  hommes  subjets  et  demeurant  en  iceulx.  Le 
gibet  sera  «  un  et  comung  »  ;  chacun  aura  ses  sergents 
et  officiers,  et  aura  droit  à  la  justice  ou  aux  amendes 
qui  lui  reviendront. 

Ce  jugement,  fort  simple  d'ailleurs,  fut  rendu  à 
Saint-Pierre  le  13  juillet  1462,  et  confirmé  à  Ne  vers  le 
14  décembre  1478. 

—  Une  charte  du  17  mars  1479  (mercredi  après  Oculi), 
montre  l'abbesse  Catherine  Boutillat  dans  l'exercice  de 
son  droit  de  patronage  pour  la  chapellenie  ou  vicairie 
de  Sainte-Marie-Madeleine,  près  Oulon.  Lorsqu'il  y 
avait  vacance,  l'abbesse  de  Nevers  avait  la  collation, 
provision,  institution  et  toute  disposition  à  son  gré,  en 
vertu  de  sa  dignité  abbatiale.  Un  prêtre,  maître  ès-arts. 


—  275  — 

Jean  Forand,  en  avait  joui  par  procuration  de  Symon 
Povreaul,  clerc,  dernier  bénéficiaire,  et  l'avait  résignée 
entre  les  mains  de  Tabbesse,  pour  faire  échange  avec 
Jean  Povreaul,  également  clerc,  contre  la  chapellenie 
de  Soury,  paroisse  de  Champvoux.  —  Ce  Jean,  fils  de 
Pierre  Povreaul,  bourgeois  de  Nevers,  devait  être 
parent  tiu  précédent  bénéficiaire  ;  en  tous  cas,  présen- 
tant aux  yeux  de  Tabbesse  les  garanties  désirables  pour 
entrer  en  possession  des  droits  attachés  à  la  chapellenie, 
il  en  fut  solennellement  investi. 

—  A  cette  époque  déjà  avancée  dans  le  Moyen- Age, 
l'abbesse  instrumente  encore  elle-même  :  «  Katherina 
Boutillata,  humilis  abbatissa  monasterii  B.  M.  de 
Nivernis...  Salutem  in  Domino  ».  Toutefois,  l'acte, 
en  latin,  est  passé  devant  un  notaire,  nommé  Billard, 
dont  la  présence  est  signalée  et  qui  appose  sa  signa- 
ture, ainsi  que  le  sceau  de  l'abbesse,  pour  assurer  la 
validité  de  l'acte. 

—  L'évêque  Pierre  de  Fontenay,  voulait  faire  la  visite 
du  monastère  ;  l'abbesse  résista  et  maintint  énergi- 
quement  le  privilège  d'exemption  de  l'abbaye  ;  l'ex- 
communication, lancée  pour  refus  de  visite,  fut  déclarée 
nulle. 

—  1497.  Le  prieuré  de  Coustiers  fut  l'objet  d'une  série 
d'échanges  de  terrains  entre  dame  Antoinette  Bonne, 
prieure,  et  plusieurs  voisins,  sans  doute  pour  conve- 
nance de  jouissance,  par  acte  passé  sous  le  sceau  de  la 
prévôté  de  Sancoins,  le  18  octobre  1497  (1). 

—  Les  auteurs  ne  sont  pas  d'accord  sur  l'époque  de  la 
mort  de  Catherine  de  Boutillat  :  le  nécrologe  de  la 
maison  la  porte  au  VIII  des  calendes  de  mars  {22  février) 
1502;  ailleurs,  on  indique  son  décès  au  VIII  des 
calendes  de  juin  1488  (25  mai). 

(1)  Toute  cette  suite  de  pièces  provient  du  fonds  des  Archives  de  h 
Nièvre. 


—  27b  - 

Dans  tous  les  cas,  si  on  admet  la  date  du  nécrologe, 
il  faut  penser  que  cette  abbesse  se  serait  démise  de  sa 
charge  quelques  années  avant  sa  mort,  car  la  suivante 
se  trouve  comme  abbesse  dans  un  acte  de  1499. 

XXVII.  Jeanne  IV  Le  Bourgoing  (1),  quoique 
nommée  depuis  deux  ans,  ne  prit  possession  que  le 
6  septembre  1501. 

—  La  maison  de  Meauce,  appartenant  à  l'abbaye,  est 
mentionnée  dans  une  pièce  du  3  décembre  1507,  relative 
à  la  vente  de  plusieurs  terres  par  Guillaume  Gendrier 
à  Guiot  Coucrat,  d'Aspremont.  Ces  terres  sont  chargées 
de  cinq  deniers  tournois  et  d'un  boisseau  d'avoine  dûs 
chacun  an  «  à  nos  dames  les  abbesses  et  couvent  de  Notre- 
Dame  de  Nevers,  au  lieu  de  leur  maison  de  Meaulce  (2)», 
— 1513.  Regnault  Thoret,  charpentier,  se  rend  avec  ses 
gens,  à  la  forôt  des  Fours  (commune  de  Cessy-les- 
Bois),  appartenant  à  madame  l'abbesse  de  Nevers, 
pour  y  abattre  quinze  pieds  d'arbres  à  faire  des  solives, 
tant  pour  les  cintres  du  pont  de  Loire  que  pour 
«  atayer  l'ologe  qui  est  en  danger  de  cbeoir  (3)  ». 

—  L'abbesse  Le  Bourgoing  soutint  avec  énergie  les 
droits  de  son  monastère  contre  l'évoque  de  Nevers. 
Elle  institua  dans  sa  communauté  la  f été  de  la  Présen- 
tation de  la  Sainte- Vierge  en  1510,  et  en  1517  celle 
de  la  Visitation  et  de  la  Compassion.  Comme  on  le 
voit,  ces  religieuses  s'attribuaient  des  pouvoirs  bien 
étendus.  Elle  fonda,  en  1517,  avec  son  frère,  Philippe 
Le  Bourgoing,  chanoine  de  Nevers,  etc.,  l'autel  de 
Notre-Dame-de-Pitié  dans  l'église  de  l'abbaye.  L'acte 
de  fondation  sera  reproduit  intégralement,  vu  l'impor- 
tance des  détails  qu'il  contient  sur  d'anciens  usages  et 
le  personnel  du  monastère  : 

(1)  Le  sceau  de  cette  abbesse  est  repixxluit  à  la  fin  du  chapitre  premier  ; 
il  provient  des  Archives  de  la  Nièvre. 
12)  Archives  de  la  Nièvre. 
(B)  Archives  communales  de  la  ville  de  Nevers,  GC,  88. 


—  277  - 

«  A  tous  ceux  qui  ces  présentes  lettres  verront,  Pierre 
Baudereul ,  bourgeois  de  Saint-Pierre-le-Moustier  et 
garde  du  roy,  notre  sire  en  la  prevosté  dudit  lieu, 
salut,  scavoir  faisons  que  par  devant  Michel  Bour- 
bonnat,  notaire  du  roy,  nostre  sire...  noble  dame 
madame  Jehanne  Le  Bourgoing,  abbesse  de  Notre- 
Dame,  noble  vén.  et  dise,  personne  maistre  Philippe 
Le  Bourgoing,  licencié  es  lois,  chanoine  de  Nevers  et 
d'Auxerre  ,  curé  de  Saint-Jacques- la -Boucherie  de 
Paris,  et  seigneur  temporel  de  Maulevrier,  et  damoi- 
selle  Charlotte  Le  Bourgoing,  frère  et  sœur,  lesquels 
et  chacun  d'eulx,  meus  de  dévocion,  et  afl5n  que  le 
divin  service  soit  chacun  jour  continué  et  augmenté 
audict  monastère  Notre-Dame  de  Nevers  et  qu'il  plaise 
à  Notre-Seigneur  et  à  sa  glorieuse  Mère  avoir  pitié 
de  leurs  pauvres  âmes  et  de  leur  père  et  mère  et  aussi 
de  faire  bonne  mémoire  madame  Katherine  Boutillat, 
leur  tante ,  en  son  vivant  abbesse  dudict  monastère, 
laquelle  à  chacun  d'eulx  a  fait  plusieurs  biens  en 
général  et  en  particulier  et  autres  leurs  parents  et 
amy  s,  et  affin  que  audict  monastère  la  glorieuse  Vierge, 
patron  d'icelluy  monastère ,  soit  chacun  jour  ample- 
ment servie;  pour  ces  causes...  de  leur  plein ^ gré:., 
ont  cogneu  et  confessé  et  par  ces  présentes  cognoisi- 
sent  et  confessent  avoir  perpétuellement  fondé  et  ins- 
titué la  feste  et  solennité  Nostre-Dame-de-Pitié  qui 
se  célébrera  chacun  an  par  les  religieuses...  les  quatre 
curés ,  diacre ,  sous-diacre  et  autres  officiers  dudit 
monastère  en  la  manière  que  s'ensuict.  C'est  à  scavoir: 
la  veille  de  laditte  feste,  vespres  solennelles  ;  le  jour 
matines,  grant  messe ,  procession  avant  icelle  grant 
messe  et  vespres,  ensemble  les  aultres  heures,  come 
prime,  tierce,  sexte,  nonne  et  compiles,  le  tout  solennel 
comme  on  a  coustume  la  veille  du  jour  de  la  Nativité 
d'icelle  glorieuse  vierge  Marie^  fondé  audict  menas- 


-  278  — 

tère;  en  laquelle  procession  seront  tenus  tous  les  curés, 
diacre  et  sous-diacre,  vicaires  de  mors  et  autres  offi- 
ciers assister.  Auxquels  sera  distribué  par  le  recep- 
veur,  le  service  faict  et  accompli,  à  scavoir  à  chacune 
religieuse  beniste  et  professe  et  à  chacun  des  quatre 
curés  et  officiers,  la  somme  de  deux  sols  six  deniers 
tournoys  ;  à  chacune  écoUière  novice  vingt  deniers  et 
à  la  prieuse  chantre ,  aux  procuraresse  et  recepveur 
dudict  couvent  à  chacun  vingt  deniers  ;  et  oultre  leur 
dict  distribut,  à  la  saçreste  (sacristine)  pour  son  can- 
délabre et  luminaire  qu'elle  sera  tenue  faire  à  ses 
dépens,  cinq  sols  tournoys  oultre  son  distribut  ordi- 
naire; au  diacre  et  sous-diacre  douze  deniers,  pour 
parer  et  déparer  le  grant  aultel  des  reliques  ;  au  maril- 
lier  pour  sonner  les  cloches...  et  fournir  tous  sonneurs 
adce  nécessaires,  cinq  sols  oultre  son  dis  tribut  ordi- 
naire; et  pour  faire  et  accomplir  les  chouses  dessus 
ont  réaniment  baillé,  ceddé  et  perpétuellement  trans- 
pourté  à  icelle  madame  labbesse  et  ses  religieuses... 
la  somme  de  soixante-cinq  livres  tournoys  en  douzains, 
laquelle  somme  icelles  religieuses  avoient  prise  en 
leur  coffre  et  trésor  pour  lachast  de  quatre  livres  tour- 
noys et  un  boisseau  froment  qu'elles  ont  acquis  de 
noble  homme  Jehan  de  la  Perrière  et  ses  personniers, 
escuyer,  seigneur  de  Chuffort.  Laquelle  somme  de 
quatre  livres  tournoys  et  ung  boisseau  de  froment, 
mesure  dudit  Nevers,  sera  et  demourra  perpétuellement 
aux  religieuses  au  prouffit  de  ceste  présente  fondation 
et  par  ces  présentes,  les  maistre  Philippe  Le  Bour- 
going  et  damoiselle  Charlotte  Le  Bourgoing  ont  dès  à 
présent  aussi  baillé,  ceddé  et  perpétuellement  trans- 
porté auxdictes  religieuses...  trente-cinq  sols  tournoys 
et  une  geline  de  bourdelaige  qu'ils  ont  acquis  de 
George  Renche,  dit  Pinchard,  et  que  icelluy  George 
Renche  est  tenu  payer  perpétuellement,  par  chacun 


—  279  — 

an,  auxdits  maistre  Philippe  et  sa  dicte  sœur  et  sur 
certains  héritaiges  déclairés  es  lettres  sur  ce  faictes  et 
receues  par  messire  Jehan  Perrot,  à  la  faculté  toute- 
fois de  pouvoir  racheter  lesdicts  trente-cinq  sols  et 
geline...;  lesdictes  religieuses  seront  tenues  employer 
l'argent,  qu'elles  en  recepvrontetquijviendrontdesdicts 
rachatz,  en  aultre  héritaige  au  prouffit  d'icelle  fonda- 
tion et  non  d'aultre.  Dame  Gabrielle  Pitoyse,  grand 
prieuse;  Roberte du Chaillo,  chantre;  Katerine  Talon, 
sous-prieuse  ;  Perronnette  Breschard,  sous-chantre  ; 
Katerine  Terrière ,  prieuse   du  Montot  ;  Marguerite 
Terrie,  pensionnaire  du  prioré  de  Marcaigne,  dépen- 
dant  dudict  monastère  ;  Isabeau  Franc ,    Loyse   de 
Torcy,  Jehanne  de  Chasteaulx,  Huguete  du  Pontot, 
prieuse     d'Appilly  ;    Françoise    Botillat ,    secreste  ; 
Jehanne  Babute ,   prieuse   de    Lichy  ;  Marié"  de   la 
Platière ,   Jehanne  Pitoyse ,    Susanne  de  la   Cour , 
Jehanne  de  Rosnay ,    Anne  Sellière  et  Jehanne  du 
Pré,  toutes  religieuses  et  professes  faisant  et  repré- 
sentant la   plus   grande  et  saine  partie  du  couvent 
dudict  monastère  adce  présentes  et  capitulairement 
en  leur  chappitre  en  la  manière  accoutumée  et  pour 
ce  au  son  de  la  cloche...  promettent  chacun  an  audict 

jour  faire  célébrer  ledict  service Faict  et  donné  à 

Nevers,  le  premier  jour  de  feuburier  1517.  Tesmoings 
Messire  Jehan  Perrot,  curé  d'OUon,  et  Jean  Massi- 
gnors,  presbtres,  demeurant  audict  Nevers  (1).  » 

1523.  Rapport  de  M«  Jean  Rondeau,-  commis  à  rece- 
voir les  deniers  de  l'aide  de  la  subvention  que  le  roy  a 
fait  demander  aux  évêque,  chapitre  et  clergé  du  dio- 
cèse de  Nevers,  pour  la  tuition  de  son  royaume...  La 
part  de  contribution  de  l'abbaye  est  de  2.104  livres, 
10  sols,  6  deniers  (2). 

|i)  Arch.  préfecture,  H.  364,  n"  5. 
(2)  Id. 


—  2H)  — 

— 1531.  Echange  d'héritages  situés  à  Nevers,  au  champ 
de  La  Motte,  entre  Guillaume  Le  Tort,  écuyer,  sei- 
gneur du  Marais,  et  Jean  Dumarest  et  sa  femme  Jeanne 
Des  Granges,  sous  la  charge  de  50  sols  tournois  et  une 
geline  de  bordelage  aux  religieuses  de  Notre-Dame  (1). 
Jeanne  Le  Bourgoing  mourut  au  mois  de  septem- 
bre 1533. 

XXVIIL  Jeanne  V  d'Albret  était  fille  de  Jean 
d'Albret,  comte  de  Dreux  et  de  Rethel,  et  sœur  de 
Jacques  d'Albret,  évêque  de  Nevers.  Elle  fit  profession 
au  monastère  de  Charenton,  diocèse  de  Bourges,  et 
entrait  dans  sa  vingt-neuvième  année,  quand  elle  fut 
nommée  abbesse  de  Nevers.  Elle  obtint  ses  bulles  du 
pape  Clément  VII,  en  1533,  mais  elle  ne  prit  posses- 
sion que  Tannée  suivante  ;  car  en  cette  même  année, 
Françoise  Boutillac,  prieure,  conféra  l'office  de  la 
sacristie,  le  siège  étant  vacant. 

L'abbaye  de  Nevers  avait  besoin  de  réforme.  Jeanne 
d'Albret  était  l'abbesse  sainte  et  courageuse,  capable 
de  commencer  et  d'entreprendre  une  œuvre  si  néces- 
saire. L'église  de  Saint-Genès  a  été  tout  à  la  fois 
paroissiale  et  monacale,  ce  qui  ne  devait  pas  ôtre  sans 
inconvénient  pour  une  communauté  de  femmes.  Cepen- 
dant le  monastère  avait  à  part  la  chapelle  de  l'abbesse, 
qui  devait  servir  à  la  communauté  pour  les  offices 
ordinaires,  mais  qui  semble  ôtre  devenue  alors  église 
abbatiale.  En  dehors  du  chapelain  du  couvent,  quatre 
prêtres  étaient  simultanément  curés  de  Saint-Genès  ; 
pour  diminuer  les  conflits  aussi  bien  que  pour  alléger 
les  charges  des  religieuses,  l'évoque,  frère  de  l'abbesse, 
réduisit  à  deux  les  curés  de  Saint-Genès. 

C'était  une  réforme  sérieuse  que  se  proposaient,  d'un 

(t)  Archives  de  la  préfecture. 


—  281  — 

commun  accord,  le  pieux   évêque  et  la  courageuse 
abbesse  : 

En  1535,  5  février,  nous  voyons  Tévéque  de  Nevers 
appeler  les  Pères  réformateurs  de  Fontevrault  pour 
avoir  leur  conseil  et  avis,  afin  de  mettre  en  vigueur 
lesdits  statuts,  lus  et  approuvés  au  chapitre  de  ladite 
abbaye,  en  présence  de  la  mère  abbesse  et  des  reli- 
gieuses ,  lesquelles  les  avaient  acceptés  ;  lesdites 
religieuses  se  dédirent  ensuite  de  cette  acceptation. 
Sur  quoi  nouvelle  ordonnance,  et  pour  cela  furent 
appelés  M.  le  grand  prieur  de  Cluny  et  de  La  Charité 
et  dom  Christophe  Coquille,  docteur  en  théologie,  les- 
quels établirent  la  réformation,  qui  fut  homologuée 
devant  Olivier  Millet,  écuyer,  conseiller  du  roi, 
lieutenant-général  au  bailliage  de  Saint-Pierre-le- 
Moûtier  (1). 

1535.  Commission  donnée  par  Jacques  d'Albret, 
évêque  de  Nevers,  aux  abbés  de  Saint-Sulpice  de 
Bourges  et  de  Chezal-Benoit,  pour  réformer  le  monas- 
tère des  filles  de  Notre-Dame  de  Nevers  (2).  Cette 
dernière  tentative  eut  plus  de  succès. 

Toutefois  ce  n'est  qu'en  1540  que  l'abbaye  fut  défi- 
nitivement unie  à  la  congrégation  de  Chezal-Benoit  (3). 

Les  abbayes  dépendant  de  Chezal-Benoit  étaient 
exemptes  de  la  nomination  royale  ;  ce  qui  leur  assurait 
des  supérieurs  réguliers  et  non  de  commende.  Ces 
privilèges,  reconnus  par  lettres  du  19  mai  1517,  véri- 
fiées au  grand  conseil,  le  15  février  1518,  furent  encore 
confirmés  par  lettres  du  15  novembre  1601. 

La  congrégation  de  Chezal-Benoit  avait  un  bréviaire 
particulier  imprimé  ;  en  1513  fut  publié  son  missel  et 


(i.)  Inventaire  de  Vabbé  de  Marolles^  pages  428  et  429. 

(V  Id.,  page  81. 

(3)  M0'  Crosnier,  Congrég,  reUg,  de  femmes^  page  23. 


-  282  — 

en  1534  son  diurnal  (1).  Dès  lors,  ces  différents  livres 
furent  en  usage  à  Tabbaye  de  Nevers. 
—  Le  5  février  1541,  lin  immeuble  situé  hors  des  murs 
de  Nevers,  paroisse  de  Saint-Sauveur,  est  acheté  par 
la  veuve  Steuf  de  Luxembourg,  seigneur  des  Trappes, 
à  des  marchands  de  Nevers,  Jean  et  Guillaume  Brosse, 
pour  27  livres  tournois.  Cet  enclos  était  chargé  d'un 
bordelage  annuel  de  20  sols  et  une  géhne  au  profit  de 
l'abbaye  de  Notre-Dame  (2). 

— 1546.  Compte  des  dépenses  de  la  ville,  pour  le  service 
à  l'abbaye,  de  feu  Mgr  le  dauphin  François,  fils  du  roi 
François  I"  : 

((  A  Philibert  Conté,  menuisier,  7  livres  10  sols 
tournois,  pour  une  chapelle  ardente  mise  sur  le  corps 
dudit  feu  seigneur,  en  l'église  du  monastère  Notre- 
Dame. 

»  Cent  cierges,  chacun  du  poids  d'un  quarteron,  sont 
mis  dessus  ladite  chapelle  que  Philibert  Dupleix, 
peintre,  met  en  noir  (3)  » . 

Le  Gallia  Christiana  clôt  la  notice  de  Jeanne 
d'Albret,  en  disant  «  qu'elle  gouverna  très  saintement 
le  monastère  de  Notre-Dame,  jusqu'à  l'année  1560,  où, 
d'après  un  acte,  on  voit  qu'elle  était  toujours  à  la  tête 
de  la  communauté  ». 

XXIX.  Marie  II  d'Albret  se  démit,  en  1561,  en 
faveur  de  la  suivante  abbesse.  li  est  à  remarquer 
qu'elle  porte  ordinairement,  dans  les  actes,  le  nom  de 
Françoise  ;  sa  mort  arriva  en  1563,  le  28  décembre  (4). 

A  partir  de  1553  à  1564,  les  dates  et  les  noms,  d'après 


(1)  Catherinot,   Annales  typographiques  de  Bourges,  pages  2  et  3, 
année  1683. 

(2)  Ârch.  de  la  Nièvre. 

(3)  Ârch.  communaJes,  CG  121. 

(4)  Crollia  Christiana, 


-  283  - 

les  actes  authentiques,  ne  concordent  pas  avec  le 
Gallia  ;  une  autre  remarque  sera  faite  à  la  suite  du 
dernier  acte  de  Tannée  1564. 

—  Acte  de  présentation  par  Tabbesse  à  la  cure  de 
Fleury-sur-Loire. 

((  Françoise  d'Alebret,  humble  abbesse  de  Notre- 
Dame  de  Nevers,  faict  scavoir  à  Révérend  Père  et 
seigneur  en  Jésus-Christ,  Jacques  Spifame,  évesque  de 
Nevers,  que  l'esglise  paroissiale  de  Saint-Julien  de 
Fleury,  dont  la  présentation  lui  appartient  en  raison 
de  ladite  abbaye,  mais  la  collation,  la  provision  ou  toute 
autre  disposition  appartient  à  Monseigneur  en  raison 
de  la  dignité  épiscopale,  étant  vacante  par  la  mort  de 
Philibert  PoUogne,  elle  a  cru  bon  lui  présenter  Garnier 
Guillin  et  prie  sa  Révérende  Paternité  vouloir  lui 
conférer  ladite  cure  (1)  ». 

—  «  Le  21  août  1553,  révérende  dame  Françoise 
d'Alebret,  abbesse  de  Notre-Dame  de  Nevers,  préten- 
dait avoir  des  bordelages  sur  les  limites  de  la  terre  et 
seigneurie  de  Dornes  et  Saint-Parize-en-Viry  pour 
un  héritage  appelé  la  Grande  place  ».  Plusieurs  person- 
nages parurent  dans  cet  arrangement  amiable  :  Flo- 
rimond,  écuyer,  seigneur  de  Dornes  et  Saint-Parize, 
conseiller  secrétaire  du  roy  et  contrôleur  de  l'ordinaire 
de  France  ;  maître  Liénard  Baulderon,  licencié  es  lois, 
juge  et  garde  de  la  prévôté  de  Saint -Pierre  ;  messire 
Sébastien  Guyot,  prêtre,  chanoine  de  Dornes  (2). 

—  26  avril  1564.  Révérende  dame  Françoise  d'Al- 
bret,  abbesse  de  l'abbaye  Notre-Dame  de  Nevers, 
Gabrielle  Le  Tort,  Charlotte  Galoppe,  Loyse  de 
Rivière,  Catherine  Olivier,  Marie  de  Roffignac... 
toutes  religieuses  en  ladite  abbaye,  assemblées  en  la 
maison  de  SardoUes,  où  elles  se  sont  retirées  par  le 

(1)  Ârch.  de  la  Nièvre. 

(2)  W., 


—  284  - 

danger  de  peste  de  présent  régnant  en  la  ville  de 
Nevers;  attendu  que  la  maison,  en  laquelle  est  décédé 
feu  messire  Ymbert  Lepère,  assise  en  la  rue  Saint- 
Genys,  est  de  leur  directe  bordelière,  ce  que  vauldrait 
icelle  maison  appartient  par  droit  de  réversion  à 
icelles  religieuses  ;  Jacques  Lepère,  frère  et  héritier 
dudit  feu  messire,  prétendant  d'aultrepart  lui  être 
dû  par  les  religieuses  certaine  quantité  de  bled,  vin  et 
argent,  tant  à  cause  de  l'office  de  «  marillier  »  que  le 
défunt  exerçait  en  l'église  Notre-Dame  que  aultrement  ; 
les  parties  ont  convenu  entre  elles  ce  qui  s'en  suit  : 
Jacques  Lepère  a  remis  et  délaisse  auxdites  religieuses 
tout  le  bled,  vin  et  autres  choses  auxquelles  elles  pour- 
raient être  tenues  aud.  défunt,  et  moyennant  encore 
deux  écus  d'or  soleil,  que  led.  Lepère  promet  et  sera 
tenu  de  payer  auxd.  religieuses,  à  leur  simple  requeste, 
icelles  religieuses  ont  remis  et  quitté,  remettent  et 
quittent  audit  Lepère  tout  le  droit  appartenant  sur 
lad.  maison  (1). 

—  1«'  octobre  1564.  Nouvel  acte  fait  à  Sardolles. 
Honorable  homme  et  sage  messire  Jacques  Bolacre, 
licencié  es  droits,  procureur  général  du  Nivernois, 
délirant  récompenser  révérente  dame,  dame  Françoise 
d'Alebret,  abbesse  de  l'abbaye  et  monastère  du  dévost 
couvent  réformé  de  Notre-Dame  de  Nevers,  de  l'ordre 
de  saint  Benoit,  de  plusieurs  bienfaits  que  les  prédé- 
cesseurs dudit  Bolacre  et  lui,  ont  reçus  de  lad.  dame  et 
aussi  afin  que  le  service  divin,  accoustumé être  célébré 
en  ladite  abbaye,  soit  entretenu  et  que  aux  prières 
publiques  et  particulières,  qui  se  font  en  lad.  église 
ledit  Bolacre  y  soit  compris  et^  pour  le  soustènement 
de  lad.  abbaye,  constitue  à  lad.  dame  d'Alebret,  à  sa 
vie,    et   en    faveur    d'elle    seulement,   la  somme  de 

fi)  Minutes  Taillandier. 


—  285  - 

250  livres  t.  de  pension  sur  tous  et  chacun  de  ses  biens, 
de  lui  Bolacre  (1). 

D'après  ces  quatre  pièces  citées,  qui  sont  en 
contradiction  avec  le  Gàllia  Christr'ana,  il  faudrait 
admettre  que  Marie  II  d'Albret  serait  la  même  que 
Françoise  d'Alebret  et  qu'elle  aurait  commencé  de 
gouverner  le  monastère  en  1553,  au  lieu  de  1560,  et 
et  qu'elle  mourut,  non  en  1563,  mais  au  moins  après 
le  mois  d'octobre  1564. 

Voici  le  résumé  de  quelques  autres  pièces  : 

—  A  Coulonges,  prèsCercy,  le  couvent  de  Notre-Dame 
de  Nevers  avait  «  entre  aultres  beaux  droits  »  la 
redevance  annuelle  de  douze  quartaux  de  seigle  dûs 
par  le  prieur  de  Notre-Dame  de  Coulonges,  à  la  Tous- 
saint «  sur  le  plus  beau  et  cler  revenu  dudit prieuré  ». 
Dans  les  années  1553  et  1566,  le  prieur  ne  «'acquittant 
pas,  l'abbesse  fut  dans  l'obligation  de  le  contraindre 
par  l'entremise  de  François  du  Pontot,  chevalier,  et  du 
bailli  du  Nivernois  (2). 

—  L'abbaye  avait  une  rente  de  bordelage  à  Sainte- 
Solange  en  Berry.  Un  acte  du  26  mars  1555-56,  passé 
devant  François  de  Lospital,  lieutenant  au  bailliage  de 
Bourges,  constate,  à  cause  de  la  fondation  et  dotation 
de  leur  église,  que  les  religieuses  et  abbesse  de  Nevers 
ont  droit  de  prendre  chacun  an,  selon  la  coutume  du 
pays  et  duché  de  Nivernois,  à  chacune  fôte  de  la 
Nativité  de  Notre-Dame,  un  demi  cars  de  chanvre  et 
une  moitié  de  géline,  sur  une  pièce  de  vigne  assise  au 
vignoble  de  Sainte-Solange  (3). 

—  10  mai  1556.  Jean  Debyot,  de  la  paroisse  de 
Gimouille,  au  village  des  Noues,  commune  de  Sain- 
caize,  vend  une  vigne  à  Etienne  Babise,  du  village 

(1)  Minutes  Taillandier. 

(2)  Arch.  de  la  Nièvre. 

(3)  Id, 


—  286  — 

des  Forges,  paroisse  de  Sauvigny-les-Chanoines,  avec 
la  charge  et  condition  de  rendre  «  deux  boisseaux  et 
demy  froment  mesure  de  Ne  vers,  et  une  geline  de 
bourdelage  dû,  chacun  an,  aux  vénérables  religieuses, 
abbesse  et  couvent  Nostre-Dame  de  Ne  vers,  au  prou- 
fit  de  la  prieure  du  Montot,  à  la  Saint -Martin 
d'hiver  (1)  ». 

—  Aux  alarmes  de  la  peste,  que  les  religieuses  cher- 
chèrent à  éviter,  en  se  réfugiant  dans  leur  propriété 
de  Sardolles,  succédèrent,  pendant  une  dizaine  d'an- 
nées les  transes  perpétuelles  des  bandes  huguenotes 
qui  menaçaient  la  ville.  Aussi,  dans  plusieurs  de  ses 
séances,  le  conseil  des  échevins  prend-il  des  mesures 
de  précaution  et  de  défense  : 

29  mars  1562.  «  Nous  prions  Monsieur  de  Chas- 
tillon  de  faire  démolir  l'église  Saint-Gildal...,  le  mou- 
lin de  Ninchat  et  l'appentis  proche  des  murs  de  la 
ville...  comme  étant  périssables  pour  cette  ville  ». 

12  novembre  1567.  «  Le  moulin  de  Madame 
l'Abbesse,  nommé  Ninchat,  sera  rasé,  et  sera  récom- 
pensée ladite  Abbesse  au  moins  mal  que  possible  ». 

2  février  1568.  «  On  fera  abattre  le  moulin  de 
Nynchat,  assis  près  les  murailles  de  cette  ville,  appar- 
tenant aux  religieuses,  abbesse  et  couvent  de  Notre- 
Dame,  et  autres  édifices  nuisant  à  la  défense  de  la 
ville,  sauf  à  donner  récompense,  après  les  troubles 
passés  (2)  », 

XXX.  Au  sujet  de  labbesse  Françoise  de 
FoNTENAY,  au  moius  pour  les  premières  années  de 
son  administration,  il  y  a  désaccord  entre  Le  Gallia  et 
Parmentier.  Le  Gallia  prétend  qu'elle  fut  solennel- 
lement bénie  le  XIV  des  calendes  de  décembre  1554 

(1)  Archives  de  la  Nièvre. 

(2)  Délibérations  du  conseil  des  échevins. 


—  287  - 

(18  novembre),  et  notre  chroniqueur  nivernais  reporte 
cette  cérémonie  au  18  mars  1568.  C'est  en  cette  même 
année  qu'elle  obtint  de  l'évêque  Giles  Spifame  la 
réunion  des  deux  cures  de  Saint-Genès  sous  l'admi- 
nistration d'un  seul  curé  (1). 

—  En  1572,  le  14  janvier,  un  arrangement  a  lieu  entre 
le  couvent,  représenté  par  dame  Françoise  de  Fon- 
tenay,  abbesse  du  «  couvent  réformé  de  Notre-Dame 
de  Nevers  » ,  dames  Jehanne  Dunryage ,  Charlotte 
du  Pontot,  Anne  Vinet  dicte  de  Tours,  Claude  de 
Lange,  toutes  religieuses  «  dudict  monastaire  et  les 
senieures  en  icelluy  ))...,  et  Jean  Des  trappes,  contrô- 
leur des  deniers  communs  de  la  ville  de  Nevers. 

Les  religieuses  avaient  fait  à  Jean  Destrappes  un 
bail  à  bordelage  de  plusieurs  héritages  situés  à  Saint- 
Baudière,  près  Marzy,  pour  60  sols  et  une  géline, 
provenant  de  Jean  Giraut,  décédé  sans  hoirs.  Il  y  avait, 
en  plus,  une  rente  de  quatre  boisseaux  de  froment, 
due  aux  quatre  curés  de  Saint-Genest,  laquelle  rente 
Destrappes  contestait,  comme  non  portée  dans  son 
bail.  D'où  procès  et  grands  frais  pour  les  deux  par- 
ties, qui  conclurent  à  l'amiable  un  autre  arrangement. 

Les  religieuses  cèdent  à  Destrappes  et  à  sa  femme, 
Catherine  Pernin,  veuve  auparavant  de  '  Jean  de  Sau- 
lieu,  un  bordelage  de  60  sols  et  une  géline,  assis  à 
Saint-Baudière  ;  un  autre,  de  5  sols  et  une  géline,  à 
Chaluzy  ;  un  autre,  de  45  sols  et  une  oie  grasse,  sur 
une  maison  sise  à  Nevers,  rue  de  la  Parcheminerie  ; 
un  autre,  de  45  sols  et  une  géline,  sur  une  autre 
maison,  rue  de  la  Coutellerie,  occupée  par  feu  Antoine 
Pinot ,  armurier  ;  les  religieuses  faisant  complet 
abandon  de  ces  redevances  et  constituant  Des  trappes 
comme  vrai  seigneur  et  maître,  comme  en  sa  propre 
chose  loyalement  acquise. 

(1)  Parmentier,  Archives  de  Nevers,  t.  !•',  p.  394. 


—  288  — 

En  contre  échange  et  récompense,  Destrappes  cède 
à  Tabbesse  et  a  au  profâct  de  la  crosse  du  menas- 
taire  »  :  1®  sept  livres  tournois  et  une  géline  dûs  par 
Louis  Chappuz,  marchand  à  Nevers,  sur  une  maison, 
jardin,  terres  et  prés  ;  2®  15  sols  tournois  par  le  môme, 
sur  une  vigne,  située  aux  Montapins  ;  3°  20  sols  dus 
par  Nicolas  Durant,  sur  des  terres  sises  à  Pinay,  près 
Parigny -les- Vaux . 

L'acte  contient  d'autres  conditions  de  minime 
importance  et  reste  muet  sur  la  redevance  aux  quatre 
curés  de  Saint-Genest  (1). 

—  Suit  un  autre  litige,  cette  fois  avec  un  chanoine. 
La  charte  du  bailli  de  Saint-Pierre  en  signale  seule- 
ment la  cause,  mais  nous  n'en  connaissons  pas  Tissue. 

Le  10  novembre  1581,  Sébastien  Frenillot,  cha- 
noine de  Nevers,  se  plaint  de  ce  que  en  Tannée  1574 
l'abbesse  de  Notre-Dame ,  Françoise  de  Fontenay, 
((  Tauroit,  soubs  beau  langage  et  promesse,  attiré  à 
son  service,  pour  faire  sa  recepte  et  vacquer  à  ses 
affaires  ».  Il  expose  que  lui,  simple  et  peu  expert,  il 
s'est  lancé  dans  des  livraisons  de  grains  importantes 
et  qu'on  a  abusé  de  son  inexpérience.  En  fin  de 
compte,  il  s'est  engagé  à  la  somme  de  six  cent  quatre- 
vingt-une  livres,  qu'il  réclame  à  l'abbesse  (2). 

—  En  1601 ,  Madelaine  de  La  Rivière,  femme  de 
Hubert  de  La  Rivière ,  s'engage  à  une  pension 
annuelle  de  20  écus,  envers  l'abbaye  Notre-Dame,  pour 
chacune  de  ses  deux  filles,  Marie  et  Louise  de  La 
Rivière,  qui  ont  fait  profession  cette  même  année  (3). 

Françoise  de  Fontenay  parvint  à  un  âge  avancé  et 
se  vit  dans  la  nécessité  de  demander  une  coadju- 


(i)  Archives  de  la  Nièvre. 

(2)  Id. 

(3)  Inventaire  de  MaroUes^  p.  760. 


J 


—  289  — 

trice,  ce  qui  lui  fut  accordé.  Elle  mourut  le  21  août 
1607  (1). 

XXXI.  Claudine  de  Gamaches,  fille  de  Georges  de  Ga- 
*  mâches,  seigneur  de  Jussy  et  de  Quinquempoix,  vicomte 
de  Rémon,  baron  de  ChâteaumeîUant,  et  d'Anne  des 
Guerres,  fut  placée  dès  l'âge  de  sept  ans,  dans  le  mo- 
nastère de  Notre-Dame  de  Nevers.  Cette  enfant,  qui 
avait  sucé  la  piété  avec  le  lait,  fit  de  rapides  progrès 
dans  la  vertu.  Etant  parvenue  à  l'âge  fixé  par  les  saints 
Canons,  elle  fit  sa  profession  religieuse,  et  du  consen- 
tement unanime  des  sœurs,  qui  avaient  su  apprécier 
son  mérite,  elle  fut  immédiatement  instituée  prieure . 
Elle  continua  par  son  humilité,  sa  piété  et  sa  régula- 
rité, d'être  le  modèle  du  monastère,  et  les  sœurs  l'en- 
touraient d'estime  et  d'affection.  Ce  fut  elle  que 
Françoise  de  Fontenay  demanda  pour  coadjutrice. 
L'acte  fut  signé  en  1591,  par  Henri  IV,  qui  était  alors 
au  siège  de  Chartres.  Jusqu'en  1606,  Claudine  refusa  de 
prendre  le  titre  d'abbesse,  car  n'ayant  pas  encore 
trente  ans,  elle  n'avait  pas  voulu  solliciter  ses  bulles 
en  cour  de  Rome  ;  elle  les  obtint  de  Paul  V,  aux 
calendes  de  février  1606,  et  désira  attendre  la  mort 
de  Françoise,  pour  se  faire  bénir.  Ce  fut  Eustache  du 
Lys  qui  la  bénit  solennellement,  le  IX  des  calendes 
d'octobre. 

Une  telle  abbesse  ne  pouvait  manquer  de  veiller  à 
l'observation  des  saintes  règles  de  la  discipline,  et 
d'exercer,  sur  les  points  défectueux,  une  sérieuse 
réforme  dans  sa  communauté.  La  clôture  fut  l'objet 
principal  de  sa  sollicitude  :  elle  fit  placer  des  grilles 
aux  parloirs,  répara  les  murs  du  monastère;  elle 
renouvela  le  mobilier  de  l'église,  sollicita  et  obtint  des 

(1)  Au  chapitre  second,  son  extrait  mortuaire  est  reproduit,  à  cause  des 
noms  de  religieuses  qui  sont  citées^ 

T.  TZ,  9*  série.  19 


-«0  - 

i  moines  de  Sainte-Colombe,  au  diocèse  de  Sens,  des 

reliques  de  saint  Loup.  Par  ses  exemples,  plus  que 
par  ses  paroles,  elle  portait  ses  sœurs  à  la  piété  la  plus 
solide  ;  en  secret,  elle  se  livrait  aux  austérités  et  aux 
exercices  de  la  pénitence.  Sous  son  administration, 
a  la  congrégation  de  Chezai -Benoit,  ayant  été  unie 
à  la  réforme  de  Saint-Maur,  par  arrêt  du  Conseil  du 
2  mai  1636,  Tabbaye  de  Notre-Dame  suivit  son  chef 
d  ordre (1)  ». 

Après  avoir  gouverné  son  monastère  pendant  trente- 
six  ans,  avec  zèle  et  sagesse,  elle  mourut  en  odeur  de 
sainteté,  la  veille  des  ides  (12)  de  novembre  1642  Les 
sœurs  avaient  recueilli  avec»  soin  les  actes  d'une  vie 
si  bien  remplie;  malheureusement  le  manuscrit  ne 
nous  est  pas  parvenu  (2)  ;  nous  y  perdons  des  leçons 
d'édification  en  même  temps  que  de  précieux  rensei- 
gnements d'histoire. 

—  20  avril  i62ï.  Note  du  Roy.  A  esté  présente  noble 
révérente  dame  Madame  Claude  de  Gamaches,  abbesse, 
laquelle  tant  pour  elle  que  pour  la  communauté,  baille 
et  délaisse  par  ces  présentes,  à  tiltre  d'accense  pour 
cinq  années  continuelles  et  consécutives,  commençant 
au  jour  et  feste  de  Nativité  de  sainct  Jehan-Baptiste 
prochain,  à  hon^  homme  Nicolas  Bataille,  marchand, 
demeurant  en  la  ville  de  Desize,  présent,  stipulant  et 
acceptant  la  dicte  accense  la  dix  me  de  bled  de  Mar- 
co nx,  sise  en  la  paroisse  de  Champ  ver,  appartenant 
aux  Dames  religieuses,  abbesse  et  couvent  Nostre- 
Dame  de  Nevers...  tout  ainsy  que  les  précédents  dix- 
meurs  en  ont  cy  devant  joy  à  tiltre  d  accense....  Soubz 
Taccense  de  la  quantité  de  20  quartaux  de  bled, 
mesure  de  Verneuil,  par  tiers  froment,  seigle  et  aveime 

(i)  Archives  de  Nevers,  t.  £•%  p.  801. 

(2)  D'après  Mv  Crosnier,  Congrég^Ham  n/Ugimmmde  fmifne$tp.  84, 


—  291  - 

et  encore  2  quartaux  de  froment,  huict  aulnes  de 
thoile,  le  tout  pour  chacun  an,  de  bon  bled  de  dixme 
raisonnable  et  bien  vanné  que  le  dict  Bataille  a  promis 
et  s'est  obligé  payer,  par  chacun  an,  auxdictes 
Dames  ou  à  leur  recepveur...  au  lieu  du  port  de 
Champver  ou  aultre  port  plus  commode  du  costé  de 
la  ville  de  Desize,  à  chacun  jour  de  sainct  Martin 
d'y  ver... 

A  Nevers,  au  parlouer  de  ladicte  abbaye,  après 
midy,  le  21*  JQur  d'Apvril  1621;  présents:  Jean 
Durand,  laboureur,  demeurant  à  Sardolles,  et  M'®  Jean 
Durand,  recepveur  de  ladicte  abbaye,  demeurant  à 
Nevers  ;  led.  Durand,  laboureur,  a  déclaré  ne  scavoir 
signer  ;  oultre  ce,  unq  sol  pour  chacun  quartaul  pour 
les  droitz  du  recepveur. 

Ont  signé  :  C.  de  Gamaghes,  Bataille,  Durand, 

et  Pelle,  notaire.  (1). 

—  3  jutn  1624.  Marché  entre  madame  la  prieure 
Ozanne  de  Bonny  (au  nom  de  Madame  l'abbesse),  et 
Léonard  de  Marizy,  jardinier,  qui  devra,  «  pendant  un 
an  continuel  et  consécutif,  faire  et  nettoyer  bien  et 
bonnement  tous  les  jardins  qui  sont  dans  Tenclos,  y 
compris  le  vergier  et  la  vigne,  de  la  contenue  d'envi- 
ron 4  hommes . . .  Devra  item  ayder  à  porter  le  bled 
de  lad.  abbaye,  lorsqu'il  en  viendra  aux  greniers 
d'icelle,  aussi  accomoder  et  embûcher  tout  le  bois  à 
chauffer,  porter  les  graisses  et  fumiers  aux  jardins, 
moyennant  la  somme  de  24  livres  et  4  quartauts  bled 
moitié  froment  et  seigle.  Lad.  dame  prieure  devra 
nourrir  led.  de  Marizi  et  les  ouvriers  qui  seront  avec 
luy  pour  luy  ayder  à  faire  les  jardins  et  vignes  seuUe- 

(1)  Minutes  PeUé. 


—  29a  — 

ment  ;  comme  aussy  il  sera  nourry  lorsqu'il  aydera  i 
porter  les  bleds  et  bois  (1).  » 

1624.  Prieuré  de  Marseigne.  —  Je  ne  puis  me 
borner  à  citer  la  date  et  le  titre  de  la  pièce  concernant 
ce  prieuré,  qui  a  été  mentionné  tant  de  fois  parmi  les 
maisons  dépendant  de  Tabbaye  Notre-Dame  ;  il  s'agit 
d'une  visite,  dont  il  fut  l'objet,  entourée  de  circons- 
tances et  de  détails  qui  ont  tour  à  tour  leur  côté 
drolatique  et  fort  intéressant.  Elle  n'avait  pas  été 
annoncée  et  la  prieure  se  trouve  absente  ;  le  serviteur, 
devant  l'appareil  d'un  religieux  accompagné  d'un 
avocat,  de  deux  notaires  royaux,  voudrait  voir  tous  ces 
personnages  à  cent  lieues,  a  peur  de  se  compromettre 
en  laissant  visiter  la  maison,  refuse  de  parler  et, 
ensuite,  fait  des  réponses  qui  seront  de  tout  point 
contredites  par  le  curé  de  Marseigne,  chapelain  du 
prieuré.  De  tout  cela,  il  résulte  un  compte  rendu  de 
visite  un  peu  décousu  et  sans  ordre,  mais  qui  ne 
laisse  pas  que  d'être  complet.  Je  reproduis  donc  in 
extenso  les  trois  procès- verbaux  qui  furent  rédigés  en 
cette  occasion  : 

«  Le  lundy,  22*  jour  du  mois  de  juillet  1624,  au 
lieu  du  prioré  de  Marseigne-les-Jalligni  (2),  diocèse 
de  Clermont,  nous  frère  Jacques  Aubert,  presbtre  et 
religieux  profès  de  l'abbaye  de  Saint- Vincent  du 
Mans,  ordre  réformé  de  Chezault-Benoist,  commissaire 
députté  par  révérende  dame  Claude  de  Gamaches, 
abbesse  du  dévost  couvent  réformé  de  Notre-Dame  de 
Nevers,  ordre  dud.  couvent,  dont  nous  sommes  à 
présent  Père  confesseur,  et  en  vertu  de  la  commis- 
sion du  19*  jour  du  présent  moys  de  juillet  et    an 

(1)  Minutes  Pelle. 

(2)  Marseigne,  en  Bourbonnais,  diocèse  de  Clermont,  en  Télection  de 
Moulins;  on  y  compte  22  feux.  {Dictionnaire  géographique^  d*Ezpilly, 
1722). 


—  293  — 

susdict,  signée  de  Gamaches,  abbesse,  Durand,  Poisson 
et  Brisson,  notaire  royale  comme  secrétaire  de  lad. 
abbaye  ;  où  estant  arrivez  environ  les  troys  à  quatre 
heures  de  Taprès-midy,  en  présence  du  not®  royal  au 
bailliage  et  siège  présidial  de  Saint-Pierre  le-Mous- 
tier,  soubz^ez^  ^t  (j^g  témoingts  cy-après  nommez. 
Avons  trouvé  aud.  prioré  de  Marseigne-les-Jalligni, 
ung  jeune  homme,  âgé  d'environ  25  ans,  auquel  avons 
faict  demander  quel  il  estoit  et  enquis  de  son  nom  ;  a 
dict  estre  serviteur  domestique  de  ceste  maison,  soubz 
dame  sœur  Perronne  de  La  Guiche,  religieuse  et 
prieure  du  présent  prioré  de  Marseigne  et  aulcune- 
ment  ne  nous  a  voulu  dire  son  nom,  quoique  interpellé 
à  plusieurs  fois,  et  nous  a  dict  que  lad.  dame  Perronne 
de  La  Guiche  est  à  présent  en  Bourgongne,  en  la  maison 
du  S'  de  Chitain,  son  frère,  et  déclarant,  en  outre, 
qu'il  n'y  a  aultres  religieuses  demeurant  en  ce  lieu 
depuis  la  feste  Nativité  sainct  Jehan-Baptiste  dernier, 
et  qu'il  ne  se  faict  aucun  service  en  l'église  du  prioré, 
que  faict  un  presbtre  qui  célèbre  la  messe  quelques  fois 
et  toutesfois  ne  demeure  pas  en  ce  lieu,  mais  au  lieu 
de  Boussier^  distant  de  ce  lieu  d'une  lieue. 

»  Ce  faict  avec  led.  serviteur,  nous  nous  sommes 
transportez  au  dedans  de  l'esglise  dud.  prioré  et,  pour  ce 
faire,  passez  par  le  cloistre  ;  et  estant  dans  lad.  esglise, 
avons  veu  le  grand  aultel  assez  honnestement  orné  de 
parements  et  nappes  et  ung  tabernacle  à  mettre  le  corps 
de  Dieu,  lequel  toutesfois  n'avons  ouvert,  pour  n'avoir 
la  clef.  Comme  aussy  avons  veu  deux  aultels  auxcostez 
du  grand  aultel  en  assez  bon  estât  et  parez  d'honnestes 
ornements,  et  quant  à  la  voulte  couvrant  le  grand 
aultel,  elle  est  crevassée,  fendue  et  entre  ouverte, 
menassant  ruyne  ;  et  quant  à  deux  petites  voultes, 
estant  à  l'entrée  du  chœur  de  lad.  esglise,  avons  veu 
qu'elles  ont  esté  puis  naguères  refaictes  à  neuf  et  ne 


—  294  — 

sont  encore  les  saintres  ostés  ;  et  quant  à  la  nef  de  lad. 
esglise,  il  n'y  a  aucune  charpenterye  ni  couverture  ;  et 
à  l'esgard  de  la  charpenterye  et  couverture  estant  sur 
lesd.  aultels,  avons  recogneu  qu'elle  estoit  de  bonne 
nature  ;  comme  aussy  avons  veu  que  sur  lesd.  deux 
petites  voultes  il  y  a  de  la  charpenterye  faicte  à  neuf, 
lattée  et  à  demy  couverte  d'un  cousté.  Et  d'illec  nous 
nous  sommes  transportez  au  dedans  le  cloistre  dud. 
prioré,  dont  avons  trouvé  troys  des  allées  d'icelluy 
garnies  de  charpenterye  et  couverture  en  thuille,  à  la 
réserve  de  qque  peu  d'essaulne  ;  et  quand  à  l'aultre 
allée,  avons  recongneu  estre  sans  couverture,  lad. 
charpenterye  estant  renversée.  Et  ne  sont  lesd.  allées 
du  cloistre  pavées  ni  carrelées,  sinon  en  qques  endroicts 
où  il  y  peut  avoir  troys  cens  de  carreau. 

))  Et  vouUans  nous  transporter  au  dedans  les  cham- 
bres dud.  prioré,  avons  icelles  trouvées  fermées,  et 
nous  a  raporté  led.  serviteur  avoir  esté  partye  d'icelles 
fermées  par  lad.  dame  prieure  lorsqu'elle  s'en  est  allée  ; 
et  à  l'esgard  des  aultres  chambres,  présentement 
fermées  par  les  servantes.  Et  ce  faict  ainsy,  nous 
sommes  entrez  dans  led.  cloistre,  pour  entrer  dans  lad. 
esglise.  Avons  veu  deux  femmes  dans  une  chambre 
dud.  prioré.  Avons  néantmoingtz  recongneu  et  veu  la 
bonne  tenue  d'icelles  chambres,  estant  en  bon  estât  et 
nature,  mesme  la  couverture  d'une  grange  estant  au 
devant  led.  cloistre.  Enquis  led.  serviteur  es  quelles 
valleurs  estoit  le  revenu  dud.  prioré,  a  dict  qu'il  ne 
scait,  pour  y  avoir  trop  peu  de  temps  qu'il  y  demeure. 
Dont  et  de  tout  ce  que  dessus  avons  dressé  nostre 
présent  procès-verbal,  en  présence  de  honorable  homme 
et  sage  maistre  François  Moquot,  ad»*  au  bailliage  et 
pairie  de  Nivernois,  Léonard  Saultereault,  not'«  et 
procureur  aud.  bailliage,  demeurant  à  Nevers,  estant 
de  présent  en  ce  lieu  dud.  prioré  de  Marseigne,  tes- 


—  39B  — 

moingtz  et  deux  jeunes  aultres  hommes  qui  n'ont 
voulu  dire  leur  nom  ;  en  présence  desquels  avons 
interpellé  lad.  dame  de  la  Guiche,  prieure  dud.  prioré, 
parlant  aud.  serviteur,  de  délivrera  lad.  dame  abbesse 
de  Nevers  le  marc  d'argent  pour  le  droict  de  lad.  visitte, 
ensemble  les  frais  d'icelle,  et  nous  représenter  la  liève 
du  revenu  dud.  prioré  et  les  comptes  qui  ont  esté 
rendus  ;  lequel  a  dict  qu'il  ne  scait  que  c'est.  Et  voul- 
ions faire  lecture  du  présent  procès-verbal  et  faire 
signer  led^  serviteur  et  lesd.  hommes  tesmoingtz, 
ensemble  faire  délivrer  ce  présent,  lesd,  serviteur  et 
jeunes  hommes  se  sont  retirez  ;  et  au  mesme  instant 
nous  avons  veu  et  visitté  une  grande  salle,  estant  à 
Tune  des  costières  dud.  cloistre  et  proche  de  lad. 
esglise,  de  la  longueur  de  neuf  toises  ;  laquelle  salle  il 
a  aparu  avoir  anciennement  servi  de  réfectouer,  et  le 
dessus  de  dortouer^  comme  il  paraist  par  les  entrées 
et  anciennes  marques;  laquelle  salle  est  à  présent 
divisée  en  deux.  En  la  party  e  la  plus  proche  de  Tesglise, 
il  y  a  une  crèche  à  chevaulx  et  présentement  un  che- 
val attaché  ;  et  Taultre  partye  aparoist  servir  d'estable 
ft  bestiaulx^  pour  y  avoir  quantité  de  fumier  et  de 
f  oing  par  dessus.  Faict,  les  tesmoingtz  présents,  en  pré- 
sence desd.  sieurs  Moquot  et  Saultereault  auxquels 
avons  faict  signer  le  présent  procès-verbal,  avec  nous 
et  avec  Fço»s  Pellé,  n"  royal  susdict.  Par  lequel  Pelle 
avons  faict  faire  une  copie  de  notre  pouvoir  et  des 
présentes  et  icelle  attachée  à  la  porte  par  laquelle  on 
entre  au  cloistre. 

»  AuBERT,  Moquot,  Saultbreault,  Pelle  ». 

«  Et  led,  jour,  environ  les  7  heures  du  soir,  au  lieu 
de  Jalligni,  au  logis  de  Nostre-Dame,  s'est  comparu 
par  devaat  nous,  commksaire  sisisâict,  Messire  Jehan 


-  296  — 

Tungnaud,  presbtre,  lequel  nous  a  dict  que,  à  la  nomi- 
nation de  lad.  dame  prieure  de  Marseigne,  il  a  esté 
pourveu^  par  le  g^  vicaire  de  Clermont,  de  la  cure  de 
Marseigne  drez  la  feste  de  Pentecoste  dernière,  depuis 
lequel  temps  a  faict  actuelle  résidence  à  une  des 
chambres  dud.  prioré  de  Marseigne,  d'aultant  que  à 
présent  il  n'y  a  aucune  maison  presbiteralle,  estant 
ruynée  de  long  temps  et  les  parochiens  si  pauvres 
qu'ils  n'ont  moyen  de  la  faire  rebastir  ;  demande  acte  de 
sa  présente  déclaration,  prétendant  que  celle,  faicte  par 
le  serviteur  de  lad.  dame  prieure  de  Marseigne  par  le 
procès-verbal  cy-dessus,  dont  il  nous  a  représenté  la 
copie  qui  auroit  esté  deslaissée  à  la  porte,  ne  luy  pourra 
nuyre  ni  préjudicier,  déclarant  en  oultre  qu'il  faict  le 
service  divin  et  célèbre  la  sainte  Messe  de  deux  jours 
lung  au  moins,  en  l'esglise  dud.  prioré;  mesme  il 
célèbre  les  sainctes  vespres,  les  jours  de  dimanches  et 
festes  de  Nostre-Dame  et  d'apostres  ;  et  à  l'esgard  des 
interpellations  faictes  à  lad.  dame  prieure,  en  parlant 
aud.  serviteur,  a  dict  qu'elle  est  de  présent  à  Persy 
en  CharoUois  en  la  maison  du  s' de  Chitain,  son  frère, 
depuis  XV  jours,  l'en  advertira  pour  y  pourvoir  par 
elle,  ainsi  qu'elle  advisera,  nous  requérant  nous  vouloir 
transporter  au  prioré,  pour  faire  visitte  des  chambres 
d'icelluy  et  voir  les  papiers  qu'il  nous  représentera. 
Dont  et  de  tout  ce  que  dessus,  avons  aud.  curé  octroyé 
acte  et  déclaré  que  demain,  heure  de  5  heures  du  ma- 
tin, nous  nous  transporterions  au  prioré  pour  faire 
visitte  desd.  chambres.  Faict  en  présence  desd.  Moquot 
et  Saultereaul,  proc'  au  bailliage  et  pairie  du  Niver- 
nois,  demeurant  à  Nevers. 

»  AuBERT,  Tungnaud,  Saultereault, 
Moquot,  Pelle  ». 

«  Et  le  mardy,  23«  jour  dud.  moys  de  juillet  1624, 


—  297  — 

nous  commissaire  soubz'*^,  nous  sommes  transportez 
audedans  dud.  prioré,  où  estant  led.  Tungnaud  nous 
a  f  aict  voir  une  grande  chambre  planchée  à  neuf  et  une 
des  salles  attenantes  et  une  cuisine,  deux  aultres 
petites  chambres  ;  toutes  lesquelles  chambres,  salles  et 
cuisine,  avons  trouvé  en  bon  estât  et  suflBsamment  gar- 
nies de  meubles. 

))  Item  nous  a  dict  qu'aud.  prioré  apartientung  molin 
à  bled,  assis  proche  et  au-dessus  de  Jalligni,  sur  la 
rivière  de  Besbre,  justice  dud.  prioré,  qui  s'accense 
communément  50  quartes  froment  et  seigle . 

))  Item  un  domaine  consistant  en  bastiment,  prés, 
terres,  pastouraux  et  bois  et  buissons,  garni  de  bestial, 
déclarant  que,  depuis  20  ans,  lad.  dame  prieure  a  faict 
planter  l'œuvre  de  15  hommes  de  vigne  proche  le  jar- 
din. Oultre  qu'il  y  a  un  pré  de  10  chartées  de  foing, 
proche  led.  prioré,  pour  la  commodité  et  mesnage  de 
la  maison. 

»  Item  que  aud.  prioré  sont  dubz  plusieurs  articles 
de  cens,  rentes  et  beaux  deniers,  debvoirs  ;  et  de  faict 
nous  a  représenté  deux  vielz  terriers,  receux  par  Pico- 
rin,  contenant  l'ung  112  feuillets  escripts,  et  Taultre 
par  Turrier,  notaire,  66  feuillets  escripts. 

»  Item,  un  aultre  dud.  Picorin,  contenant  80  feuillets 
escripts  et  ung  aultre,  où  il  y  a  le  disme  de  Marseigne, 
qui  se  lève  en  l'estendue  de  lad.  paroisse  et  justice  de 
Marseigne,  auquel  disme  elle  a  la  moictié,  estant  avec 
luy  curé  et  le  s'  Couzin,  cons'  à  Molins. 

))Item,  a  lad.  prieure  droict  de  disme  es  paroisses  de 
Salligni,  CoUanges  et  les  Fougès,  paroisse  deThionne. 

»  Oultre  ce,  a  la  totalle  justice,  haulte,  moyenne  et 
basse  au  dedans  l'enclos  et  pourpris  de  la  paroisse  de 
Marseigne >  cimetière  et  deux  maisons  devant  lad. 
esglise,  et  encore  en  la  maison  du  jardinier,  et  au  sur- 
plus, en  led.  disme  de  Marseigne. 


-«8- 

)»^  Et  a  lad.  dame  la  nomination  et  provision  des  offi* 
ces,  ea  pergoit  les  esmoluments.  Et  peut  valoir  le 
revenu  dud.  prioré  la  somme  de  400  livres. 

»  Et  en  rinstant,  nous  a  led.  Tungnaud  conduict  en 
Tesglise  dud.  prioré,  où  estant  il  nous  a  faict  voir  dans 
le  tabernacle,  estant  sur  le  grand  aultel,  ung  calice 
d'argent,  ung  reliquaire  aussi  d'argent,  le  dessus  estant 
doré  ;  item  3  chasubles,  l'une  de  velloux  bleuf ,  l'autre 
de  damas  blanc  et  laultre  de  satin  noir  avec  deux 
courtibaults  (1)  d'O^tade  (2)  noirs,  avec  marques  blan- 
ches et  une  chappe  de  camellot  incarnat  ;  item  4  aulbes 
avec  amicts  et  saintures»  un  messel  neuf  à  l'usage 
romain,  selon  la  réformation  du  Concilie,  et  ung  autre 
à  l'usage  romain  et  deux  vieux  livres  de  plain  cham  ; 
déclarant  en  oultre  led .  Tungnaud  que,  par  le  peu  de 
temps  qu'il  est  en  ce  lieu,  il  ne  peut  déclarer  s'il  y  a 
plus  grand  revenu.  Dont  et  de  tout  ce  que  dessus  avons 
dressé  nostre  présent  procès-verbal  de  visitte,  pour 
servir  à  Madame  l'abbesse  de  Ne  vers  ce  que  de  raison . 

»  Faict  en  présence  des  susdicts  F^*^^  Moquot,  ad»*  au 
bailliage  et  pairie  de  Nivernois,  et  Bernard  Saulte- 
reault,  proc'  aud.  bailliage,  demeurant  à  Nevers,  tes- 
moingtz,  en  présence  desquels  a  esté  délaissé  copie 
des  deux  procès-verbaux  cy-dessus  et  derniers  escripts, 
pour  luy  représenter,  et  faict  signer  icelle  copie  par 
Fçois  Pelle,  no^  royal  au  bailliage  et  siège  présidial  de 
Sainct-Pier  re-le-Mo  us  tier . 

^)  AuBERT^  Tungnaud,  Moquot,  Saultereault. 
Pbllé(3)  )►• 

Après  cette  bonne  trouvaille  de  la  visite  du  prtoré, 
je  m'adressai  à  M.  l'abbé  Nicolas,   doyen  de  Jaligny, 

(i)  Caintibaolty   vêtement  (l*ëg)iBe<  sort«  de  dslmttique.  Cwriiiikb9iduê 
(DU  Canqe> 
(â)  Oatade,  «orte  d'étoffe,  estame.  Ostada  (d0  Gangs). 
(S)  Minutes  Pelle. 


-  299  - 

en  le  priant  de  me  renseigner  sur  l'état  actuel  de 
l'église,  du  couvent,  etc.  M.  le  doyen  s'empressa  de 
satisfaire  à  mes  désirs  avec  autant  d'amabilité  que  de 
compétence  ;  je  résume  ses  notes. 

L'église  n'existe  plus  ;  elle  a  été  démolie  dans  le 
courant  du  siècle  dernier.  Elle  servait  à  la  fois  pour 
les  offices  du  couvent  et  de  la  paroisse  de  Mar- 
seigne. 

L'origine  du  prieuré  est  très  ancienne  ;  au  xiii®  siè- 
cle, le  prieuré  de  Coulanges  en  dépendait.  En  1293,  un 
différend  s'éleva  entre  Robert  III,  comte  de  Clerraont, 
seigneur  de  Jaligny,  et  Isabelle,  prieure  de  Marseigne, 
au  sujet  de  la  justice  haute  et  petite  du  prieuré,  et 
des  amendes  qu'elle  devait  toucher  pour  les  délits 
commis  dans  la  ville  de  Marseigne.  L'affaire  s'arrangea 
à  l'amiable  par  devant  Alix,  abbesse  de  Sainte-Marie 
de  Ne  vers. 

L'abbesse  de  Nevers  .était  dame  de  Marseigne  à 
cause  du  prieuré,  membre  de  l'abbaye  de  Nevers. 

En  1686,  le  prieuré  valait  800  livres  de  revenu.  Les 
domaines  voisins,  de  Trafes  et  des  Ardilliers,  en 
dépendaient. 

Marseigne  semble  avoir  été  bâti  sur  l'emplacement 
d'un  camp  romain,  comme  donnent  lieu  de  le  croire 
sa  position  topographique  sur  la  voie  romaine  de 
Roanne  à  Clermont,  la  découverte  d'objets  d'or  et  de 
bronze  et  d'un  petit  moulin  à  main,  en  pierre  ;  non 
moins  que  le  nom  de  Marsinha  des  anciennes  chartes 
{Mariis  signa,  périphrase  pour  désigner  un  camp).  A 
l'opposition  de  la  Renommée^  l'importance  de  la  ville 
de  Marseigne  est  allée  en  décroissant  ;  en  1569,  la 
paroisse  de  Marseigne  ne  comptait  plus  que  28  feux. 

Dans  un  temps  de  peste,  à  une  époque  que  nous  ne 
saurions  préciser,  la  vénérable  abbesse   se   retira  & 


-  300  -- 

SardoUes,  avec  la  majeure  partie  de  ses  religieuses.  Là, 
à  la  tête  de  ses  compagnes,  elle  récitait  loffice  dans 
l'église  paroissiale  (1). 

A  simple  titre  d'étiage  de  la  peste  au  xvii*  siècle, 
l'année  1627  est  citée  comme  celle  où  ses  ravages 
furent  le  plus  terribles  à  Nevers(2). 

XXXII.  Gabrielle  Andrault  de  Maulevrier- 
Langeron  fut  nommée  par  le  roi  abbesse  de  Notre- 
Dame  le  XIV  des  calendes  de  novembre  (19  octobre) 
1642  ;  ses  bulles  sont  datées  du  VI  des  calendes  de 
janvier  (26  décembre)  de  la  môme  année,  mais  elle  ne 
prit  possession  que  la  veille  des  nones  d'avril  1643(3). 

—  Des  démêlés  eurent  lieu  entre  l'évoque  Eustache  de 
Chéry  et  le  couvent.  Il  en  sera  question  plus  en  détail 
au  chapire  second. 

—  L'abbesse  Gabrielle  réunit  dans  un  beau  reliquaire 
les  nombreuses  reliques  du  couvent,  le  12  août  1667. 

—  En  1663,  au  refus  des  Pères  de  Saint-Maur  de 
continuer  la  direction  de  labbaye  Notre-Dame, 
Madeleine-Gabrielle  Andrault  de  Langeron,  abbesse, 
présenta  une  requête  à  la  voûte  de  Cluny  et  se  fit  unir 
à  cette  congrégation  par  acte  d'Etienne  Dubois,  secré- 
taire, du  27  avril  1668  ;  Dom  Pierre  Dulaurent,  grand 
prieur,  ensuite  évêque  de  Belley,  président. 

A  la  suite  de  cette  démarche,  qui  fut  favorablement 
accueillie,  elle  résolut  de  ne  plus  s'occuper  que  de 
l'affaire  de  son  salut  et  elle  se  démit  en  faveur  de  la 
suivante.  Elle  mourut  à  im  âge  fort  avancé,  le  17  mars 
1698. 

XXXIII.  Marie-Louise  Andrault  de  Langeron 
devint  abbesse  de  Notre-Dame  par  la  résignation  de 


(i)  Notes  manuscrites  de  l'abbé  Trouflaut. 

(2)  Mff'  Crosnier,  Tableau  chronologique  de  Vhistoire  du  Nivernais, 

(3)  M0r  Gro9NI£R,  Congrégations  religieuses  de  femmes,  p.  24. 


—  301  — 

Gabrielle,  sa  parente  ;  elle  obtint  de  Clément  X  ses 
bulles,  datées  de  la  veille  des  ides  de  décembre  1670 
(12  décembre). 

Le  21  novembre  1703,  elle  se  fait  associer  pour  tou- 
jours avec  sa  communauté  aux  religieuses  du  Saint- 
Sacrement  de  Paris,  pour  être  en  adoration  chaque 
jour,  de  deux  heures  jusqu'à  trois  heures  de  l'après- 
midi,  à  l'intention  de  la  première  sœur  qui  doit  mou- 
rir (1).  Elle  gouverna  le  monastère  jusqu'en  1704  ;  son 
épitaphe  couvrait  une  grande  dalle  du  chœur  de 
Téglise  abbatiale.  Plusieurs  personnes  de  sa  famille  y 
avaient  aussi  leur  sépulture  (2). 

XXXIV.  Marie-Charlottb  de  Lévis,  fille  de 
Charles- Antoine  de  Lévis,  comte  de  Charlus,  et  de 
Marie-Françoise  de  Paule  de  Béthisy,  fille  du  marquis 
de  Mézières,  était  religieuse  du  monastère  de  Saint- 
Menoux  (dans  l'Allier),  quand  elle  fut  nommée  par 
Louis  XIV  abbesse  de  Notre-Dame  de  Nevers,  aux 
calendes  de  novembre  (1^'  novembre)  1704.  Au  chapitre 
second  «  du  Personnel  »,  paragraphe  des  Religieuses, 
son  brevet  est  analysé,  et  le  consentement  de  la  com- 
munauté est  reproduit  en  entier.  Après  avoir  reçu  ses 
bulles,  elle  prit  possession  le  III  des  nones  de  novembre 
(3  novembre  1705).  Le  24  décembre  1714,  Madame 
Marie-Charlotte  de  Lévy  (3),  abbessede  Notre-Dame  de 
Nevers,  se  fait  associer  et  sa  communauté  à  la  confré- 
rie des  Agonisants,  établie  dans  l'église  Saint-Martin  ; 
on  dira  tous  les  vendredis  le  Miserere  et  cinq  Pater 
et  cinq  Ave  Maria,  et  on  aura  soin  de  faire  avertir 


(\)  Dernier  obitaaire  de  Notre-Dame.  Bulletin  de   la  Société  Niver^ 
ntûse,  t.  XIII,  p.  193. 

(3  Les  épitaphes  de   la    famille  de    Langeron   sont   reprodaitai  an 
troisième  chapitre,  description  de  Tégliae  abbatiale. 
{d)  Elle  signe  toujours  M,-^h,  de  Lévy-CkarluSf  abbesse. 


—  302  ^ 

les  Pères  de  Saint-Martin  quand  une  sœur  sera  à 
ragoniO;  afin  qu'ils  fassent  les  prières  des  associés  (1). 
Le  4  juin  1719,  elle  vériflBie  {sic)  les  reliques  de  saint 
Révérien  et  de  saint  Genoux,  conservées  dans  trois 
châsses...  et  ordonne  que  la  fôte  de  Saint-Révérien  se 
célébrera  solennelle  majeure,  avec  octave,  le  V^  juin 
de  chaque  année,  et  la  fôte  de  saint  Genoux  solennelle 
mineure  de  seconde  classe,  le  17  janvier  de  chaque 
année  (2).  Elle  mourut  à  Bourbon-rArchambault,  le 
10  février  1719,  et  fut  inhumée  dans  l'abbaye  de 
Saint-Menoux. 

XXXV.  Marie-Henriette  de  Lé  vis,  sœur  de  la 
précédente,  avait  fait  profession  au  monastère  de 
Provins,  où  elle  résidait,  quand  elle  fut  nommée,  le 
16  février  1719,  par  le  roi  pour  remplacer  Marie- 
Charlotte  ;  elle  obtint  ses  bulles  le  9  mars  suivant.  Le 
18  mai  de  la  m^me  année,  elle  fut  bénie  solennelle- 
ment par  M^  Edouard  Bargedé,  évêque  de  Nevers  (3), 
et  le  25  du  même  mois  elle  prit  possession.  Elle  mourut 
à  Paris,  le  IV  des  ides  de  mai  (4  mai)  1731,  à  l'âge  de 
quarante-quatre  ans. 

—  1720,  26  septembre.  A  la  grille  et  au  parloir  de 
l'abbaye,  ramboursement  de  1,471  livres  pour  extinc- 
tion, rachapt  et  amortissement  de  la  rante  de  parcelle 
somme  constituée  par  M'®  Hector  Andrault  de  Lan- 
geron,  marquis  de  Maulevrier,  et  dame  Anne  du 
Maine,  le  7  janvier  1664,  en  plus  de  la  dette  de 
dame  Gabrielle  Andrault    de    Langeron,    leur  fille, 

(1)  Dernier  obitaaire  de  Notre-Dame.  Bulletin  de  ta  Société  Niver^ 
nai9ê,  t  XIU,  p.  193. 

(S)  Dernier  obituaire  de  Notre-Dame.  Bulletin  de  la  Société  Niver^ 
naUe,  t.  XIU,  p.  193. 

(3)  Parmentier  dans  ion  Histoire  manuscrite  des  Evêques  de  Nevers^ 
n'admet  pas  la  date  du  GfaUia,  mais  porte  la  bénédiction  solennelle  au 
landi  de  la  Pentecôte,  ^  mai. 


-908  — 

religieuse  de  lad.  abbaye,  laquelle  somme  a  été  payée 
en  billets  de  la  Banque  royale  et  monnoie  ayant  cours, 
au  nom  d'hault  et  puissant  seigneur  Messire  Jean- 
Baptiste-Louis  Andrault  de  Langeron,  chevallier, 
comte  de  Chevrières,  baron  d'Ogé  et  autres  places, 
lieutenant-général  des  armées  du  roy,  et  de  dame 
Elisabeth  Le  Camus,  son  épouse,  demeurants  ordi- 
nairement à  Montlevrier,  paroisse  de  Nolay  en  Bour- 
gogne (1). 

—  1728,  31  mars.  Bail  par  dame  F^^^  Ollîvier, 
prieure,  pour  l'absence  de  dame  dame  Marie-Henriette 
de  Levy  Charlus,  abbesse,  pour  9  années,  à  Messire 
Gaspard  Despaillards,  prestre,  curé  de  Luthenay,  de 
la  part  des  dixmes  de  bled  des  dames  religieuses  dans 
la  paroisse  de  Lutheaay,  moyennant  la  somme  de 
13  livres  10  sols  par  chacun  an  (2) . 

—  20  may.  Bail  idem,  pour  6  années,  à  Messire  Michel 
Maillot,  archiprôtre  et  curé  de  S^Benin  et  S^Christo- 
phe  d'Azy,  du  dixmede  bleds  appelé  Cherault,  moyen- 
nant 5  quartaux  de  froment  par  an  et  le  sol  par 
quartau  pour  le  receveur  (3). 

—  17  juin.  Bail  idem,  pour  3  années,  à  Jean  L^er, 
charpentier,  dem*  à  Beeumont-sur-SardoUes,  du  dixme 
de  bleds  en  l'étendue  de  lad.  paroisse,  moyennant 
18  quartaux  froment  par  an  et  le  sol  par  quartau 
pour  le  receveur.  Est  intervenu  Michel-Jean  de 
Meung,  ch'  sr  de  la  Ferté,  Beaumont  et  autres  lieux, 
demeurant  en  son  château  de  la  Cave,  qui  se  porte 
caution  pour  led.  Léger  {4). 

—  26  juin.  Bail  par  dame  Fço"««  Ollivier,  pour  et  au 
nom  de  dame  dame  Marie-Henriette  de  Levy  Cfaarlui, 

(1)  Minâtes  Pierre  Rondeau. 

(2)  Minutes  Frebtult. 

(3)  Idem. 

(4)  Idem. 


V 


—  304  — 

pour  le  temps  de  4  années,  à  Hervé  La  Ramée,  labou- 
reur au  bourg  d'Imphy,  du  droit  de  dixme  de  bleds 
desd.  dames,  moyennant  14  quartaux  froment  et'le  sol 
par  quartau  pour  le  receveur  (1). 

1730,  1"  juillet.  Aux  sieurs  Louis  Reux,  tixeran, 
Jean  Hué,  vigneron,  et  Maurice  Briady,  blastier, 
demeurants  au  bourg  de  CuJBEy,  a  été  adjugé  à  l'issue 
des  vespres  de  Cuffy,  le  29  juin  dernier,  pour  un  an 
seuUement,  le  dixme  de  la  paroisse  de  Beaulne-les- 
Cuflfy,  moyennant  la  somme  de  62  liv.  5  sols,  dont  ils 
payeront  30  liv.  au  s'  curé  du  Veuillin,  qui  fait  la 
desserte  de  Beaulne,  et  le  surplus  à  l'abbaye  Notre- 
Dame  (2). 

XXX VL  N.  Le  Maistre  fut  nommée  par  le  roi 
abbessedeNevers,  le  Vil  des  calendes  d'août  (26  juillet) 
1731.  C'est  le  seul  renseignement  que  nous  donnent 
les  auteurs  du  Gallta  Christiana  sur  cette  abbesse, 
dont  ils  ignoraient  le  prénom. 

Parmentier,  qui  écrivait  ses  chroniques  sur  Nevers 
peu  d'années  après  la  mort  de  cette  abbesse,  ne  cite  que 
son  nom  et  ajoute  ce  simple  détail  que,  de  son  temps, 
l'abbaye  était  réduite  à  13  religieuses,  tandis  qu'à  la  fin 
du  xvi«  siècle,  on  comptait  jusqu'à  80  professes  ;  plus 
loin,  au  deuxième  chapitre,  «  du  Personnel  de  l'abbaye  », 
paragraphe  des  Religieuses,  nous  verrons  que  ces  deux 
chijBres  ne  sont  pas  exacts.  Elles  étaient  plus  de  13  reli- 
gieuses du  temps  de  l'abbesse  Le  Maistre  et  beaucoup 
moins  de  80  professes  à  la  fin  du  xvp  siècle. 

1731,  6  octobre.  Marie-Marguerite  Le  Maistre 
n'avait  pas  encore  reçu  ses  bulles,  car  à  cette  date, 
sœur  Françoise  OUivier,  prieure,  demeurant  à  l'abbaye 
«  dont  le  siège  est  vacant  par  le  déceds  de  Madame  de 

(i;  Minutes  Frebault. 
(2)  Idem. 


—  305  — 

Lévy-Charlus  »,  vend  à  Aray  (Are)  Pernet,  voiturier 
par  eau,  demeurant  à  Nevers,  la  coupe  et  superficie 
de  deux  cantons  du  bois  Railly,  dépendant  de  la  terre 
et  seigneurie  de  SardoUes,  l'un  appelé  le  bois  du  Boula 
et  l'autre  le  bois  du  Brouille,  moyennant  la  somme  de 
372  livres. 

Ont  signé  :  S'  Olivier,  prieure  ;  s'  Pérude,  s'  Brisson, 

s'  DUGUÉ,    s'   DE    SeLINES    —   TlXIER, 

Frébault,  notaires  (1). 

13  décembre.  Sœur  Olivier,  prieure,  le  siège  vacant 
par  le  déceds  de  Mad"  de  Lévy,  abbesse,  baille  à  titre 
de  ferme  pour  3  années  venant  à  6,  à  Jean  et  Pierre 
Cliquet  frères,  meuniers  à  Asnan,  le  terrier  d'Asnan, 
consistant  en  cens  et  droits  de  livrages  ou  champarts, 
moyennant  la  somme  de  17  livres  par  an  (2). 
— 1732,  21  juin.  Dame  Madame  Marie-Marguerite  Le 
Maistre,  abbesse  de  l'abbaye  royale  de  Notre-Dame, 
baille  à  titre  de  ferme  pour  3  années,  à  Pierre  et  Jean 
Decourt  frères,  laboureurs  et  communs  personniers, 
demeurants  ensemble  au  lieu  de  Chevigny,  justice 
desd.  dames,  les  dixmes  de  bleds  du  territoire  et  jus- 
tice de  Chevigny  et  es  environs,  y  compris  les  novalles 
apartenant  auxd.  dames,  à  cause  de  l'ordre  de  Cluny, 
moyennant  39  quartaux  de  bled,  2  tiers  froment  et 
l'autre  tiers  moitié  orge  et  avoine  chacun  an  (3). 

21  juin,  Mad'  l'abbesse  baille  à  titre  de  ferme  pour 
3  années  à  Louis  Porche,  vigneron,  dem*  à  Nevers, 
les  dixmes  de  bleds  de  la  paroisse  de  Gimouille, 
compris  les  novalles,  moyennant  6  quartaux  de  bled 
moitié  seigle  et  froment  par  an  (4). 

(1>  Minutes  Frebault. 

(2)  /ci. 

(3)  Id. 

(4)  Jd. 

T»  IX,  9*  série,  ^ 


—  306  - 

6  juillet.  Madame  Tabbesse  baille  pour  6  années  A 
Jacques  Bernard,  Pierre  Guinot  et  Jean  Carré,  jar- 
diniers au  faubourg  de  Mouesse,  le  dixme  de  bled  de 
laparoissse  de  Chaluzy,  moyennant  12  quartaux  de 
bled  moitié  froment  et  moitié  seigle  (1). 

3  décembre.  Marie-Marguerite  Le  Maistre,  humble 
abbesse  de  l'abbaye  de  Notre-Dame  de  Nevers,  à  notre 
cher  en  J.-C.  Pierre  Bureau,  clerc  de  ce  diocèse, 
salut.  Comme  la  chapelle  de  S'«  Marie-Magdelaine... 
est  de  notre  nomination  et  collation  de  plein  droit, 
comme  de  notre  dignité  abbatiale,  laditte  chapelle 
étant  venue  à  vaquer  par  la  mort  de  M'«  Claude  de 
Malville...,  nous  étant  assurée  de  votre  capacité, 
bonne  vie  et  religion,  nous  vous  avons  nommé  et 
conféré  laditte  chapelle...,  avec  tous  ses  droits,  fruits 
et  revenus. 

Donné  à  la  grille  de  notre  abbaye  en  présence  du 
notaire  royal,  secrétaire  de  notre  abbaye,  en  présence 
de  M"  Philibert  Bigarné,  prestre,  sacristain  de  l'église 
de  Nevers,  et  du  sieur  Claude  Olivier,  marchand. 

S'  Le  Maistre,  abbesse  ;  Bureau,  Bigarné, 
Ollivier,  Frebault,  notaire  (2). 

li  décembre,  avant  midy...  Je,  notaire  royal,  secré- 
taire de  l'abbaye,  en  présence  des  témoins  ci-après 
nommés,  me  suis  transporté  à  la  chapelle  de  S^'-Mag- 
delaine,  où  estant  avec  ledit  sieur  Bureau,  assisté  de 
M®  Bigarné,  prestre...,  je  l'ai  mis  en  possession  réelle 
actuelle  et  corporelle  de  la  chapelle,  par  la  libre  entrée 
en  lad.  église  Notre-Dame,  prise  d'eau  bénite,  prière 
à  Dieu  devant  l'autel  de  la  chapelle,  baiser  de  l'autel, 
son  des  cloches  et  exibition  des  lettres  de  provision  et 

(1)  Minutes  Frebault. 

(2)  Id. 


-  307  - 

par  les  autres  cérémonies  en  tel  cas  requises  et  accour 
tumées  ;  à  laquelle  prise  de  possession  lue  et  publiée  à 
haute  et  intelligible  voix  par  moi,  not*  royal.. .  en  pré- 
sence du  s'  Claude  Olivier,  m^^  dud.  s^  Bigarné, 
M'^  Pierre  Barbier,  receveur  de  l'abbaye,  et  autres 
personnes,  ont  signé  : 

P.  Bureau,  Bigarné,  Ollivjbr,  Darnoux, 
Bai^bier,  Frebaux-t  (l). 

— 1733,  8  avril.  Dame  Mad*  Marie-Marguerite  Le 
Maistre,  abbesse,  a  requis  Frebault,  not'®,  de  recevoir 
en  dépôt  up  acte  capitulaire  fait  entre  elle  et  ses  reli- 
gieuseSf  du  4  de  ce  mois,  signé  de  lad.  dame  et  des 
dames  Olivier,  Pérude,  Dugué,  Brisson,  de  Sélines, 
de  Montrenaud,  du  Vidal,  de  Cpurcelles  et  de  Durât. 

Signé  :  S'  Lb  Maistre,  abbesse  ;  Frebault. 

Voici  la  copie  de  1  acte  annexé  : 

Ce  jourd'huy  4°*'^  avril  1733,  après  midy,  les  dames 
abbesse  et  religieuses...  de  Notre-Dame  de  Nevers, 
assemblées  en  chapitre...  où  il  a  été  exposé  par 
Mad«  Le  Maistre,  abbesse,  que  s"^  Marguerite  de  Bèze 
de  Vaisvre,  prieure  cy  devant  du  prieuré  de  N.-Dame 
de  Marseigne-les-Jaligni,  membre  dépendant  de  lad. 
abbaye,  seroit  décédée  le  1*'  de  ce  mois,  après  une 
attaque  d'apoplexie  et  inhumée  ensuite  le  jour  suivant 
en  présence  de  toute  la  communauté,  et  que  led. 
prieuré  étoit  de  sa  collation  de  plein  droit  par  sa 
dignité  abbatiale,  et  qu'avant  la  mort  de  lad.  de  Bèze 
de  Vaisvre,  de  son  consentement  verbal,  elle  auroit 
donné  requeste  au  Roy  pour  le  supplier  tant  de  sa  part 
que  de  celle  de  toute  la  communauté  à  ce  que  led. 

(1)  Minutes  Frebault. 


-  308  — 

prieuré  de  Marseigne  fût  réuni,  après  la  mort  de  lad. 
de  Bèze  de  Vaisvre,  au  profit  de  lad.  communauté, 
comme  les  autres  prieurés  membres  de  mesme,  de 
lad.  abbaye  l'avoient  estes  en  1534,  par  arrest  de  la 
Cour  de  Parlement  tenant  les  grands  jours  à  Moulins, 
sur    laquelle    requeste    seroit   intervenu   arrest,    le 
28  février  dernier,    le  Roy  étant  en  son  Conseil  qui  a 
ordonné  que  lad.  requeste  seroit  communiquée  à  lad. 
de  Bèze  de  Vaisvre,  prieure  dud.  Marseigne,  pour  y 
répondre  juridiquement,  qui  par  son  accident  n'a  esté 
en  estât  de  donner  par  écrit  son  consentement  ;  les- 
quelles religieuses  assemblées,    après  avoir  pris  com- 
munication dud.  arrest  du   Conseil  du    28    février 
dernier,  consentent  toutes  d'une  voix   que   le  tiltre 
dud.  prieuré    de    Marseigne    demeure    entièrement 
éteint  et  supprimé  et  que  tous  les  droits,   fruits  et 
revenus  en  dépendans,  soient  réunis  à  la  manse  com- 
mune et  conventuelle,  aux  charges  du  service  accous- 
tumé,  continuant  à    supplier  très    humblement   Sa 
Majesté  à  accorder  la  grâce   qui   lui  est  demandée, 
approuvant  par  ce  présent  acte  et  aflSrmant  véritables 
les  raisons  contenues  dans  la  requeste,  sur  laquelle  est 
intervenu  led.  arrest  appuyé  de  ses  pièces  justificatives, 
consentant  en  outre  que  la  présente  délibération  serve 
à  Madame  notre  Abbesse  ou  à  ses  agens,  de  procura- 
tion pour   poursuivre  auprès    de   Sa    Majesté    lad. 
réunion,  et  qu'elle  soit  déposée  chez  un  notaire  royal 
pour  en  délivrer  toutes  les  expéditions  nécessaires  à 
lad.  dame  Abbesse  pour  luy  valoir  ce  que  de  raison. 

S'  Le  Maistre,  abbesse  ;  s'  Olivier,  prieure  ; 
s'  Marie  Pérude,  s'f  Dugué,  s'  Brisson, 
s'  Pérude,  s'  de  Selines,  s'  de  Montre- 
NAULT,  s'  DU  Vidal,  s'  de  Courcelles, 
s'  DE  Durât  (1). 

(i)  Minutes  Frebault 


-  309  -• 

6  juin .  Bail . . .  pour  6  années  venant  à  9,  à  sieur  Jacques 
Vyau  de  Baudreuille,  étudS  dem'  à  S*-Pierre-le- 
Moûtier,  du  dixme  de  bled  en  la  paroisse  de  S*-Babille, 
appelé  dixme  de  Buy  et  Verrière,  moyennant  la 
somme  de  40  livres  par  an  (1). 

16  juin.  Bail  à  ferme  pour  9  années,  à  M'"  Claude 
Dubois,  procureur  au  bailliage  et  siège  présidial  de 
S*-Pierre-le-Moûtier,  du  revenu  des  terriers  des  sei- 
gneuries de  Buy  et  Verrière,  et  Coutière...  consistant 
lesd.  terriers  en  cens,  rentes,  bordelages  et  corvées, 
moyennant  100  liv.  par  an  (2). 

24  octobre.  Vente  de  coupes  de  bois  à  Etienne  Cor- 
nillon,  m<*  voiturier  par  eau  àNevers,  et  Robert  Duret, 
m^  et  meunier  du  moulin  de  SardoUes  desd.  dames. 
Coupe  consistant  en  quatre  quantons  de  bois  taillys, 
l'un  appelé  le  Gros-Bois  de  SardoUes,  le  2«  la  Queue- 
de-Vaux,  le  3®  les  Cornes-de-Druy,  et  le  4«  les  Gfi^^- 
Mouilles  —  et  un  autre  quanton  de  4  à  5  arpens  appelé 
la  Fontaine-Bernard,  en  la  paroisse  de  Trois- Vesvres, 
moyennant  1.000  livres  (3). 

25  novembre.  Par  devant  Jacques  Frebault,  not'* 
royal,  assisté  de  son  confrère,  qui  se  sont  transportés 
à  l'abbaye,  fut  présente  sœur  Magdelaine  de  Bèze  de 
Vaivre,  fille  de  defifunct  M'®  Jacques  de  Bèze,  ss^  de 
Vaivre,  et  de  dame  Jeanne  Marchand  Dugué,  autorisée 
par  M'«  Joseph  de  Bèze,  éc'.,  s»?'  de  la  Belouze,  cons»^' 
du  Roy,  controUeur  en  la  Chambre  des  Comptes  et 
Cour  des  aydes  de  DoUe,  demeurant  en  cette  ville, 
son  curateur  —  laquelle  s'  Magdelaine  de  Bèze  de 
Vaivre,  ayant  fait  son  noviciat,  a  requis  être  reçue 
professe,  ce  qui  lui  fut  accordé.  Ce  fait,  ont  comparus 
M'«  Claude  de  Bèze  de  Vaivre,  docteur  en  théologie, 

(1)  Minutes  Frebault. 

(2)  Id. 

(3)  Id. 


-  310  — 

chanoine  de  NeVers,  y  demS  prôvost  du  chèipitre  de 
Tannay,  M'**  Jacques  de  Bèze,  s»?'  du  Gué,  mousque- 
taire de  la  garde  du  Roy,  et  M'  F^^^  FHogenne  de 
Bèze  de  S*-Didier,  lesd.  sieurs  derniers  nommés 
émancipez  d'&ge,  néanmoins  à  cause  de  )eur  minorité 
autorisés  par  led.  sieur  de  la  Belouze;  lesquels  pour 
éviter  que  leur  dite  sœur  Magdelaine  ne  soit  à  charge 
à  lad.  abbaye,  pour  hayder  et  subvenir  &  ses  besoins... 
lui  créent  et  constituent  une  pension  viagère  de 
âOO  liv.  par  an. 

S'  Olivier,  prieure,  de  Bèze  de  la  Belouze, 

S'  Marie  t^érude,  de  Bèze  de  Vaivre, 

S'  Brisson,  Ch'''  de  Bèze, 

S'  de  Bèze  de  Vaivre,      de  Bèze  de  Saint-Didier. 
S'  Le  Maistre,  abbesse  ;  Frebault  (1). 

26  novembre.  S'  Magdelaine  de  Bèze  de  Vaivre, 
étant  proche  la  grande  grille  de  fert  qui  sépare  les 
dames  religieuses  des  séculiers,  se  présente  à  Madame 
l'abbesse  pour  faire  profession  ;  à  haute  et  intelligible 
voix  elle  prononce  les  mots  de  lad.  profession  :  «  In 
nomîhè  b.  M  J.-C.  Amen,  L'an  de  N.-S.  1733,  le 
26nov%  je,  sœur  Magdelaine  de  Bèze  de  Vaivre,  native 
de  la  paroisse  de  S^-Léger-de-Tannay,  dîocèze  de 
Nevers,  âgée  de  20  ans,  promets  ma  stabilité  et 
conversion  de  mes  mœurs  et  obéissance  selon  la  règle 
de  s*  Benoist,  devant  Dieu  et  tous  les  saints  desquels 
les  reliques  sont  dans  ce  monastère,  fondé  en  l'honneur 
de  la  très  glorieuse  Vierge  Marie,  au  diocèze  de  Nevers, 
en  présence  de  lad.  dame  abbesse,  sous  la  congrégation 
àe  Clùny  à  laquelle  lad  abbaye  est  agrégée  et  de  Dom 
Charles  Verniér,  prestre  religieux  de  l'ordre  de  Cluny, 
officiant  en  lad.  esglise  et  confesseur  ordinaire  des 

(1)  Minutes  Frebault. 


-  311  — 

dames,  en  foy  de  quoy  j'ay  fait  écrire  cette  demande 
que  j'ay  signée  de  ma  main  ».  Lequel  écrit  lad.  s'  Mag- 
delaine  a  remis  es  mains  de  lad.  dame  abbesse.  Après 
quoy  le  Veni  Creator  a  été  chanté,  ensuitte  les  prières 
accoutumées,  et  a  été  baillé  par  lad.  dame  abbesse 
l'habit  de  religieuse  professe  à  lad.  s'  de  Vaivre.  Et  ont 
été  fait  en  outre  touttes  les  autres  cérémonies  en  pareil 
cas  requises  ;  et  en  signe  d'amitié  et  confraternité  en 
N.-S.,  a  été  lad.  sœur  de  Vaivre  baisée  tant  par  lad. 
dame  abbesse  que  par  les  autres  religieuses  assistantes 
à  lad.  profession,  après  quoy  a  été  mise  sous  le  drap 
de  mort  pendant  le  parachèvement  de  la  grande  messe 
en  la  présence  de  tous  les  assistants. 

S'  Le  Maistre,  abbesse,        de  Bèze  de  Vaivre, 
S'  de  Bèze  de  Vaivre,  Ch«'  de  Bèze, 

De  Bèze  de  la  Belouze,  de  Bèze  de  S*-Didier, 

De  Bèze,  de  Bèze  du  Cholet, 

Marchant,  Sallonnier  d'Avrilly, 

Vyau  de  Baudreuille,  de  Bèze  de  la  Belouze, 

De  Bèze,  Rapine  de  S**-Marie, 

De  Faye,  de  Bèze,  ' 

S'  Olivier,  prieure,  s'  Marie  Pérude, 

S'  Brisson,  s'  Pérude, 

S'  de  Bèze  de  Vaivre,  Dom  Vernier, 

Jaubert,  Frebault,  notaires  (1). 

— 1734  27  avril.  ...  Fut  présente  dame  Mad®  Marie- 
Marg*®  Le  Maistre,  abbesse...  laquelle  baille  et  délaisse 
à  titre  de  ferme  pour  6  années  : 

A  Claude  Tors,  vigneron,   et  Claude  Balat,   lab', 
dem*  à  Neuvy-le-Barrois, 
Les  ,dixmes  de  bleds,  vin  et  {charnage  que  lesd. 

(1)  Minutes  Frebault 


—  312  ^ 

abbesse  et  religieuses  ont  droit  de  lever  en  lad.  paroisse 
tant  de  leur  chef  que  à  cause  de  leur  prieuré  de  Cou- 
tière,  que  comme  estants  aux  droits  du  s'  Gentil,  curé 
dud.  Neuvy  qui  a  opté  sa  portion  congrue  ; 

Compris  aud.  bail  la  grange  destinée  à  lever  les 
dixmes  et  foins  ;  compris  aussy  les  prés  de  lad.  cure 
sujets  à  abandon  et  la  vigne  joignant  le  jardin  de  la 
cure.  A  laquelle  grange  lesd.  dames  feront  les  répara- 
tions nécessaires... 

Demeurant  réservé  auxd.  dames  leur  domaine  de 
Coutière,  terrier,  et  le  terrier  de  lad.  cure. 

Ledit  bail  moyennant  370  liv.  par  an,  sur  lesquels 
300  liv.  seront  payées,  à  la  décharge  desd.  dames, 
300  livres  pour  la  portion  congrue  du  sieur  curé,  et  les 
autres  70  liv.  seront  payées  auxd.  dames  ou  leurs  rece- 
veurs, à  la  S'-Martin  d'hiver  (1). 

30  avril.  ...Dame  Mad®  Marie-Marg*®  Le  Maistre, 
tant  en  son  nom  qu'au  nom  des  religieuses  de  l'abbaye. . . 
baille  à  titre  de  ferme  pour  9  années  : 

A  F^'^  Suard,  vigneron  à  Vauzelles, 

Un  pré  situé  au  lieu  de  Vauzelle,  de  4  à  5  charrettes 
de  foin,  moyennant  15  liv.  par  an  payables  au  jour  de 
S^-Martin  d'hiver  (2). 

11  may.  Dame  Mad®  Marie- Marg*«  Le  Maistre, 
baille  à  titre  de  ferme  : 

A  M"  Philibert  JoUy  de  la  Vernelle,  prestre,  prieur 
et  curé  de  Saligny  en  Bourbonnois, 

Les  dixmes  que  lad.  dame  abbesse  a  droit  de  lever 
en  la  paroisse  de  Saligny,  accense  du  prioré  de  Mar- 
seigne,  comme  membre  indépendant,  consistant  en 
sept  portions  et  demye,  moyennant  90  liv.  par  an, 

(1)  Minutes  Frebault. 


—  313  — 

payables  auxd.  dames  ou  leur  préposé  à  Marseigne, 
pour  la  feste  de  S*-Martin  d'hiver  (1). 

11  may.  ...  Dame  Mad*  Marie-Marg*»  Le  Maistre, 
abbesse,  baille  pour  9  années  le  tiers  du  dixme  de  la 
paroisse  d'Uxeloup  (une  partie  appartient  au  curé  de 
S*-Genest  et  une  autre  au  curé  d'Uxeloup): 

A  M"  Etienne  Sionnest,  prestre,  curé  de  la  paroisse 
d'Uxeloup,  moyennant  5  quartaux  de  froment  et  9  de 
seigle,  payables  à  la  feste  de  S*-Martin  d'hiver. 

19  septembre.  Dame  Mad^  Marie-Marg*®  Le  Maistre 
et  dame  Fç^'^e  Olivier,  prieure  ;  Claude  Brisson,  Marie 
Pérude  et  Claude  Bouzitat  de  Selines,  religieuses 
anciennes  et  sénieures,  baillent  et  délaissent  à  titre  de 
bail  emphitéotique  pour  29  années  : 

Aux  sieurs  Pierre-AUexix  et  Ambroise  Louvrier 
frères,  maistres  de  forges,  natifs  de  Franche-Comté  : 

Le  fourneau  de  Sardolle,  étang,  pavillon,  bastimens 
à  loger  les  ouvriers  du  fourneau,  écurie,  grange  et 
appartenances  dud.  fourneau  et  bastimens,  les  champs 
des  Crais  et  des  Hastes,  scitués  près  led.  fourneau  et 
bastimens,  la  faculté  de  faire  tirer  des  mines  dans  les 
bois  et  héritages  desd.  dames,  s'il  s'y  en  trouve,  et  les 
castinières  et  perrières  qui  sont  auxd.  lieux,  appar- 
tenant auxd.  dames  ;  pour  jouir  et  user  du  tout  à  la 
manière  accoutumée  comme  ont  fait  les  précédents  fer- 
miers. Les  réparations  nécessaires  seront  faittes  sur 
un  devis  dressé  par  un  archictecte  choisi  par  lesd. 
dames  (2)  ;  lesd.  dames  permettent  que  les  preneurs 
faissent  couper,  dans  les  bois  dépendans  de  leurs  terres 
de  Sardolles  et  Trois- Vevre,  les  bois  qui  se  trouveront 
propres  pour  les  réparations...  jouiront  les  preneurs 
du  droit  de  pesche  et  pourront  chasser  par  eux  mesmes 

(1)  Minâtes  Frebaalt. 

(2)  U  s'âère  i  6.660  Uyres. 


^  314  - 

6t  leurs  commis  dans  Testandue  des  justices  de  Sardolle, 
Trois- Vevre  et  le  Port-des-Bois.  Si  les  preneurs  trou- 
vent, dans  les  dépendances  des  choses  affermées,  un  lieu 
convenable  à  faire  de  nouveaux  édifices,  ils  le  pourront 
à  leurs  frais,  sans  augmentation  de  ferme  et  à  la  charge 
par  eux  de  laisser  lesd.  édifices,  à  l'expiration  de  leur 
feripe.  Pour  ce,  ils  pourront  prendre  des  bois  des 
dames  et  dans  les  conditions  cy  dessus.  Les  preneurs 
auront  le  droit  de  pacage  pour  les  bœufs  et  chevaux 
d'harnois  et  équipages  dans  les  bois  taillys,  après 
néanmoins  qu'ils  seront  hors  de  garde  et  deffences . 
Moyennant  le  prix  de  500  liv.  par  an  (1). 

19  septembre.  ...Dame  Mad*  Marie-Marg'« Le Mais- 
tre  et  les  anciennes  religieuses  et  sénieures,  capitulai- 
rement  assemblées  a^u  son  de  la  cloche  au  parloir  et 
grille  de  lad.  abbaye  pour  traitter  de  l'affaire  qui  suit, 
tant  pour  elles  que  pour  les  autres  religieuses,  ont 
vendu,  ceddé  et  délaissé  par  ces  présentes  : 

A  sieurs  Pierre  Allexix  et  Ambroise  Louvrier  frères. . . 

La  coupe  et  superficie  des  tous  les  bois  taillys  desd. 
dames,  dépendant  de  leurs  terres  et  seigneuries  de 
SardoUe  et  Trois- Vèvre...  en  tout  971  arpents,  moyen-  ' 
nant  18.400  livres  (2). 

8  septembre.  ...  Madame  l'abbesse  et  anciennes  reli- 
gieuses et  sénieures  baillent  à  titre  de  bail  emphitéo- 
tique,  pour  le  temps  et  espace  de  29  années  : 

A  Robert  Duret,  meunier,  dem^  en  la  paroisse  de 
SardoUes, 

Un  moulin  à  bled  à  une  roue,  au-dessous  de  l'église, 
aisances  et  appartenances  avec  le  bied,  chaussée,  eau, 
cours  d'eau,  prés,  terres  en  dépendans. 

(1)  Minutes  Frebaolt. 

(2)  Id. 


Moyennant  la  quantité  de  18  quartaux  de  bled  fro- 
ment, mesure  de  Nevers,  par  chacun  an,  bon  bled  de 
rente  et  moison  bien  vanné,  étape,  non  fraudé  ny 
vicié,  rendu  conduit  par  les  preneurs  sur  les  greniers 
de  la  maison  seigneuriale  desd.  dames  en  la  paroisse 
de  SardoUes,  le  jour  et  feste  des  Trespasses  (1). 

13  novembre.  Cejourd'hui,  à  quatre  heures  de  rele- 
vée, a  comparu  sieur  Pierre  Barbier,  receveur  des 
dames  abbesse  et  religieuses,  lequel  nous  a  dit  qu'en 
l'année  1715,  que  le  sieur  Desprez,  cy -devant  curé  de 
S*-Genest>  opta  pour  la  portion  congrue  et  remit  quel- 
ques anciens  terriers  à  madame  de  Lévy,  lors  abbesse, 
concernant  lad.  cure  de  S*-Genest  qui  ne  sont  plus 
d'aucune  utilité  auxd.  dames,  attendu  que  le  sieur 
Hierosme  de  Paris  a  opté  les  revenus  de  sa  cure,  les- 
quels terriers  sont  restés  es  mains  de  nous  Frebault, 
notaire  desd.  dames...  AflFin  que  led.  sieur  de  Paris  ne 
puisse  rien  imputter  auxd.  dames,  elles  lui  ont  déclaré 
par  exploit  d'huissier  qu'elles  consentaient  que  remise 
lui  fust  faitte  des  terriers  et  pièces  à  elles  remises  par 
led.  sieur  Desprez.  Led.  sieur  de  Paris  a  répondu  que 
mal  à  propos  il  est  assigné  pour  recevoir  les  tiltres  de 
la  cure  de  S*-Genest  en  l'étude  dud.  Frebault,  parce 
que  led.  Frebault  (comme  notaire  de  l'abbaye)  est 
par tye intéressée...  De  Paris. 

...  Sy  led.  sieur  curé  a  quelques  prétentions  et 
actions  à  former  contre  nous  Frebault,  cela  ne  regarde 
en  aucune  manière  lesd.  dames  qui  soutiennent  qu'au 
moyen  de  leurs  ofiEres  et  du  refus  d'acceptation  du 
sieur  curé,  elles  sont  en  reigle  et  font  toutes  les  protes- 
tations contraires  à  celles  dud.  curé. 

Barbier,  receveur. 

BouRT,  Frebault  (2). 

(1)  Minutes  Frebault. 


-  316  - 

—  1736, 13  avril.  ...  Dame  Madame  Marie-Marguerite 
Le  Maistre,  abbesse  de  l'abbaye  Notre-Dame...  baille 
et  délaisse,  à  titre  de  ferme  et  abonnement  pour  la  vie 
curiale  du  sieur  preneur,  M'«  Gilbert  Bruslaut,  prestre, 
curé  d'OuUon,  le  grand  dixme  d'Oullon  appartenant 
aux  dames  de  l'abbaye...  moyennant  le  prix  et  somme 
de  120  livres  argent  et  15  boisseaux  de  poix  verts, 
mesure  de  cette  ville,  par  chacun  an  ;  le  tout  payable 
et  rendu  en  lad  abbaye  à  chacun  jour  de  la  feste  de 
S^-Martin  d'hiver...  Tant  que  led.  sieur  curé  sera 
titulaire  de  lad.  cure  d'Oullon,  est  convenu  que  les 
droits  cazuels  du  terrier,  lots,  ventes  et  reversions 
seront  partagés  par  moitié  entre  lesd.  dames  et  led. 
sieur  Bruslaut. 

Signé  :  S'  Le  Maistre,  abbesse  ;  Bruslault,  Jau- 

BERT,  FrEBAULT  (1). 

—  1737,  30  avril.  ...  Dame  Madame  Marie-Marg*«  Le 
Maistre,  abbesse  de  Notre-Dame,  et  M'®  Louis  Perreney 
de  Grosbois,  supérieur  de  l'Oratoire  de  Nevers,  et 
en  cette  qualité  doyen  né  du  chapitre  de  Frasnay, 
M'«  Charles-Adrien  Le  Forestier,  prestre  de  l'Oratoire, 
chanoine  dud.  Frasnay,  baillent  et  délaissent  à  titre 
déforme  pour  9  années,  sy  tant  est  que  le  sieur  Phi- 
libert Million,  prestre,  curé  de  la  paroisse  de  Parigny- 
les-Vaux,  soit  titulaire  ou  que  son  successeur  accepte 
la  portion  congrue,  lesd.  9  années  commencées  au  jour 
de  S*-Martin  d'hiver  dernier, 

A  M"  Louis  Custode,  m^  manufacturier  de  fayance, 
et  sieur  Julien  Sionest,  bourgeois  de  cette  ville, 

La  vigne  dépendante  de  lad.  cure  de  Parigny,  de 
47  œuvres  environ  ;  une  petite  ouche  dans  laquelle  il 
y  a  un  puis,  à  la  charge  de  laisser  le  passage  libre  pour 

(1)  Minutes  Frabaolt. 


—  347  - 

aller  au  puis  et  à  la  grange  ;  plus  une  petite  ouche 
d'une  boisselée  près  Tesglise  ;  plus  deux  pièces  de 
prés...  contenant  ensemble  environ  cinq  chartées  de 
foin. 

Lesquels  preneurs  auront  la  jouissance  du  pressoir 
et  des  cuves  appartenant  à  lad.  cure  de  Parigny.  Et 
seront  les  réparations  à  faire  aud.  pressoir  et  cuves 
aussy  bien  qu'à  la  vigne,  faittes  par  les  bailleurs  et  à 
leur  diligence.  Lesquelles  sont  à  la  charge  dud.  sieur 
Millien,  curé,  suivant  qu'elles  sont  constatées  par 
procès-verbal. 

Moyennant  la  somme  de  180  livres,  payables  par 
moitié  à  Madame  l'abbesse  et  aux  sieurs  prestres  de 
l'Oratoire... 

Ont  signé  :  S'  Le  Maistrf,  abbesse;  L. 
Perreney  de  Grosbois,  C.  Le  Forestier, 
Louis  Custode,  Sionest,  Jaubert,  Fre- 

BAULT  (1). 

7  juillet.  DameMad®  Marie-Marg*®  LeMaistre  baille 
pour  la  présente  année  seullement  : 

A  Jean  Leblanc,  vigneron,  dem*  au  faubourg  de  la 
Chaussée,  la  récolte  de  la  dixme  appartenant  à  l'abbaye 
en  la  justice  des  dames  appellée  Lhospitot,  en  la  paroisse 
de  Gimouille, 

Moyennant 30 liv. payables  à  la  S*-Martin  d'hiver(2). 
—  14  juillet.  Procuration.  —  Sœur  Fç^îse-Uenriette 
Bonnet  du  Vidal,  sénieure  prieure  de  S*-Caprus  delà 
Brouille-Noire,  religieuse  professe  de  Notre-Dame,  a 
cy  devant  résigné  son  prioré  à  dame  Catherine  de  la 
Coste,  entre  les  mains  de  N.  S.  P.  le  Pape,  sous  la 
condition  d'une  pension  de  300  livres  ;  ce  que  le  S.-P. 

(1)  Minutes  Frebault. 

(2)  Id. 


—  348  - 

a  accordé  et  aprouvé  sous  la  condition  que  la  somme 
deSOOliy.  n'excéderoit  pas  la  moitié  du  revenu  du 
prioré.  Lad.  s'  de  la  Coste,  ayant  pris  en  main  Tobco- 
nomat  dud.  prioré,  déclare  que  la  moitié  du  revenu 
peut  s'évalluer  à  la  somme  de  230  à  330  livres.  —  La 
sœur  du  Vidal  consent  à  la  réduction  de  sa  pension  à 
la  somme  de  220  à  230  livres  annuelles. 

S'  DuviDAL,  GoussoT,  Frebault  (1). 

— 1738  11  juin.  Bail  de  la  dixme  de  Parigny,  par 
Madame  l'abbesse  et  les  Pères  de  l'Oratoire,  pour 
6  années, 

A  Louis  Ternant  et  Jean  Prémillon,  vignerons, 
dem*'  à  Par igny-les- Vaux. 

C'est  à  scavoir  la  dixme...  que  le  s' Millin,  curé  dud. 
Parigny  avait  coutume  de  lever  dans  l'étendue  de  la 
paroisse  comme  curé,  môme  la  dixme  de  Bizy^ 
Neuve  (2),  La  More  et  le  quart  de  Pinay,  desquels 
dixmes  il  a  fait  abandon  de  partage  à  lad.  dame 
abbesse  et  auxd.  sieurs  de  l'Oratoire  pour  la  portion 
congrue  en  leur  qualité  de  coseigneurs  décimateurs... 
moyennant  le  prix  de  230  liv.,  moitié  à  lad.  abbesse, 
et  l'autre  moitié  aud.  sieurs  prêtres  de  l'Oratoire  (3). 

21  juillet.  Bail  des  dixmes  de  Niou,  en  la  paroisse 
de  Rosiers  annexée  à  celle  de  Magny ,  pour  trois  années, 

A  Louis  Pascaud,  manœuvre,  dem^  au  village  de 
Noulot,  paroisse  de  Magny. 

Les  limites  de  la  dixmerie  sont  détaillées  tout  au  long 
et  comprenpent  «  toutes  les  granges,  ipaisons  et 
domaines  sur  Niou,  tant  des  La  Baze,  Roy,  Bontemps, 
du  s'  de  Saulieu,  des  Marigots,  Gourn^uU  ditGayous, 

(1)  Minutes  Frebault. 

(2)  Neurre^  lieu  détruit  près  de  Parigny-les-Vaux.  DifitUmnaire  (<)po- 
graphique  de  la  Nièvre,  de  Soultrait. 

(S)  Minutes  Frebault 


-  31»  - 

Durets,  Jourdin,  Rouinot  dit  de  la  Croix,  Pierre  Breton, 
Guyon,  des  Noyers  et  Sarreaii,  et  ce  tant  de  ce  qui  est 
des  paroisses  de  Magny,  Rouzier  que  S^-Caize,  moyen- 
nant 15  quartaux  de  bled,  scavoir  15  boisseaux  fro- 
ment, 15  seigle,  15  orge,  15  avoine,  rendus  conduits 
sur  les  greniers  de  lad.  abbaye  à  chacun  jour  etfestede 
S*-Martin  d'hiver,  —  ensemble  le  sol  par  quartau  qui 
est  15  sols  par  an  payables  le  même  jour  de  Saint- 
Martin  (1). 

26  août.  Vente  par  Mad*  Tabbesse, 

A  M"  J«-B«  Gascoing,  ch^  seigneur  de  Lavault  et 
Trangy,  cons'  du  Roy,  président  lieut*  général  au 
bailliage  de  S*-Pierre-le-Moustier,  gentilhomme  ser- 
vant ord«  du  Roy,  chevalier  des  ordres  royaux,  mili- 
taires et  hospitalliers  de  N.-Dame  de  Mont-Carmel 
et  de  S^-Lazare  de  Hiérusalem,  demeurant  en  son 
hostel  de  S*-Pierre-le-Moustier, 

De  la  coupe  et  superficie  d'un  quanton  de  bois  taillys 
scitué  près  le  village  de  Mussy,  par®  de  Parigny-les- 
Vaux,  apellé  Bois-de-la- Faye,  de  44  arpens,  33perches. 

Moyennant  la  somme  de  22  liv.  par  arpent,  reve- 
nant à  968  liv.  (2). 

—  1739, 18  juin.  Bail  par  Mad®  l'abbesse  pour  3  années, 
A  Charles  Fonferrier,  vigneron,  dem*  en  la  paroisse 
S*-Laurent, 

De  la  dixme  de  Message,  paroisse  Challuy,  qui  est 
un  quart  au  seigneur  de  Sermoise,  MM.  les  religieux 
de  S*-Etienne  et  les  religieux  de  S*-Sauveur, 

Moyennant  2  quartaux  et  2  boisseaux  de  bled, 
moitié  froment  et  seigle,  rendus  conduits  sur  les  gre- 
niers de  l'abbaye  à  chacun  jour  de  S*-Martin  d'hiver  (3). 


(1)  Minutes  Frebault. 


-320    - 

— 1742, 16  avril.  M'^  François  Fautras,  notaire  royal 
en  cette  ville,  et  dame  Marie-Mag(delaine  de  Villars, 
son  épouse,  font  à  leur  fille  Marie  Fautras,  novice  à 
l'abbaye,  une  pension  viagère  de  50  livres  à  payer  en 
deux  termes  égaux,  de  six  mois  en  six  mois,  le  pre- 
mier terme  commençant  au  jour  qu'elle  prononcera 
ses  vœux  de  religion  (1). 

— 1744,  27  août.  Madame  l'abbesse  baille  à  ferme 
pour  un  an  à  M'®  Louis  Batailler,  curé  de  Fougues,  le 
dixme  que  les  dames  religieuses  ont  le  droit  de  lever 
dans  le  gros  dixme  de  Fougues,  moyennant  la  quan- 
tité de  12  quartaux  de  bled,  scavoir  3  quartaux  fro- 
ment, 3  quartaux  seigle,  3  quartaux  orge  et  3  quartaux 
avoine,  à  rendre  conduits  sur  les  greniers  desdites 
dames,  le  jour  de  S'-Martin  d'hiver  prochain  (2). 

—  1749,  13  mars.  Mme  l'abbesse  baille  à  ferme,  pour 
9  années,  à  sieur  François  Chevrier,  marchand,  demeu- 
rant au  bourg  de  Mornay,  le  dixme  établi  dans  les 
limites  de  la  paroisse  et  consistant  en  bled,  vin  et 
charnage,  moyennant  30  livres  par  chacun  an  (3). 

— 1751,3  mars.  Madame  l'abbesse  baille  à  ferme,  pour 
9  ans,  à  M'*  Gabriel  Farent,  agent  des  affaires  de 
M*"*»  Anne-Achille  de  Mun  de  la  Ferté,  demeurant  en 
la  paroisse  de  Beauraont-sur-Sardolles,  le  dixme  de  la 
paroisse  de  Beaumont,  moyennant  18  quartaux  de 
bled  froment,  livrables  chacun  an  au  lieu  du  Fort- 
des-Bois,  au  jour  et  fôte  de  S*-Martin  d'hiver  (4). 

4  mars.  Madame   l'abbesse    baille  à  ferme,  pour 
9  années,  à  M"  Anne-François   Geoffroy,  curé   de  la 


(1)  Minutes  Batailler. 

(2)  Id. 

(3)  Minutes  Goussot. 

(4)  Minutes  Batailler. 

(5;  M. 


-  321  - 

paroisse  du  Nolay,  le  dixme  de  bled  appelé  dixme 
d'Orbeq  (Orbec),  moyennant  60  livres  par  an  (1). 

— 1752,  13  mai.  Madame  l'abbesse  délaisse  à  titre 
d'accense,  pour  9  années,  à  M"  Joseph  Perraudin, 
curé  des  paroisses  de  Druy  et  Marnay,  le  dixme  de 
bled  que  les  religieuses  ont  droit  de  lever,  à  cause  de 
leur  prieuré  d'Apilly  en  lad.  paroisse  de  Marnay, 
annexe  de  Druy,  au  village  dud.  Apilly  et  es  envi- 
rons, moyennant  le  prix  et  somme  de  24  livres  par 
chacun  an  (2). 

— 1757,  20  juin.  Bail  pour  3  ans,  venant  à  6  et  9, 
à  Nicolas  Regnault,  laboureur  en  la  paroisse  de 
Verneuil,  maître  et  chef  de  sa  communauté...  qui 
promet  de  lever  les  dixmes,  les  engranger,  battre  et 
vanner.  Madame  Tabbesse  lui  délaissera  le  cinquième 
de  tous  les  grains,  ensemble  toutes  les  revannes  et 
pailles.  Le  preneur  promet  conduire  le  reste  et  le 
livrer  au  port  d'Aron  ou  de  Chanvert  et  d'avertir 
Mme  l'abbesse  ou  ses  préposés,  de  lui  rendre  du  tout 
bon  compte,  tant  en  gerbes  qu'en  grains,  en  son  hon- 
neur et  conscience  et  payer  aussi  le  sol  par  quartau, 
pour  le  droit  du  receveur  (3). 

— 1765,  5  août.  Dame  Mad«  Marie-Marguerite  Le 
Maistre,  abbesse,  baille  à  titre  de  ferme,  pour  9  années, 
au  sieur  Henry-Clément-Eléonore  Lebrun,  marchand, 
demeurant  en  la  paroisse  de  Marseigne,  le  revenu  du 
prieuré  de  Notre-Dame  de  Marseigne  et  toutes  ses 
consistances  et  dépendances  et  du  membre  de  Cou- 
langes-sur-Loire  du  diocèse  d'Autun,  et  le  dixme  de 
Paray,  pour  ce  qui  en  appartient  à  Mad*  dame  abbesse, 


(1)  Minutes  Batailler. 

(2)  W. 

(3)  Minâtes  Ch.  Bourgoing. 

T.  IX,  3*  série.  21 


—  322  -^ 

situé  aussi  dans  le  diocèse  d'Autun,  moyenaant  le  prix 
et  somme  de  1.050  livres,  scavoir  : 

Pour  le  prieuré  de  Marseigne 862  liv. 

Pour  le  membre  de  Coulanges 88 

Pour  le  dixme  de  Paray,  paroisse  de  Saligny.  100 

Le  Maistre,  abbesse  ;  Lebrun,  Rondeau, 
Batailler  (1). 

XXXVII.  Marie-Claire  de  Saillans  naquit  & 
Verbigny  (Haute-Marne),  de  Pierre  de  Saillans  et  de 
Marguerite  de  Beuvry,  le  7  août  1737.  Elle  reçut  la 
crosse  le  7  août  1769. 

— 1769,  22  octobre.  En  présence  et  en  compagnie  du 
notaire  royal  soussigné  et  des  témoins  cy-après  nom- 
més, M.  Claude-François  Bougarel,  intendant  et 
receveur  de  dame  Madame  Susanne-Françoise  de 
Saillans,  abbesse,  et  fondé  de  la  procuration  géné- 
ralle  de  lad.  dame...  s'est  transporté  au  chasteau 
seigneurial  de  la  terre  et  comté  de  Druy,  appartenant 
à  Louis-François  de  Paul  de  Soudeilles,  marquis  dud. 
lieu,  comte  de  Druy,  seigneur  de  Lientray,  Marcillac, 
Lagane,  de  Bazané,  Mingot  et  autres  lieux,  et  dame 
Dame  Jeanne-Geneviève  de  Coste  de  Champron,  mar- 
quise de  Soudeilles  et  comtesse  de  Druy,  au  devant  de 
la  principalle  porte  et  entrée  dud.  chasteau  ;  où  estant 
led.  sieur  Bougarel,  ayant  frappé  à  la  porte,  seroit 
venu  le  sieur  François  Barault  de  la  Motte,  agent 
des  affaires  des  mesd.  seigneur  et  dame,  auquel  led. 
sieur  Bougarel  auroit  demandé  sy  lesd.  seigneur  et 
dame  y  estoient,  ou  autres  personnes  ayant  charge  de 
recevoir  les  vassaux  à  foy  et  hommage;  à  quoy  led. 
sieur  de  La  Motte  a  répondu  que  lesd.  seigneur  et 
dame  y  estoient  ;  et  estant  survenus,  led.  sieur  Bou- 

(1)  Minutes  Batailler. 


—  323  — 

garel,  en  devoir  de  vassal,  sans  bottes,  espée  ny 
espérons,  teste  nûe  et  un  genouil  en  terre  a  dit  auxd. 
seigneur  et  dame  que,  pour  et  au  nom  de  lad.  dame 
abbesse,  il  leur  faisoit  foy  et  hommage  du  fief  appar- 
tenant à  mad.  Dame  abbesse,  à  cause  de  son  prieuré 
d'Apilly,  pour  tout  ce  qui  est  mouvant  de  lad.  terre  de 
Druy  et  relevant  en  plain  fief,  foy  et  hommage 
d'icelle  ;  à  laquelle  foy  et  hommage  lesd.  seigneur  et 
dame,  comte  et  comtesse  de  Druy  ont  reçu  led.  Bou- 
garel  pour  lad.  dame,  à  la  charge  par  lad.  dame  de 
donner  son  dénombrement  dans  le  temps  de  la  cou- 
tume. 

Ont  signé  :  Soudeilles,  Champeron  de  Soudeilles, 

BouGAREL,  Perraudin,  archip'^^,  curé 
de  Druy,  et  Joly,  m**  manufacturier 
defayance  àNevers,  témoins;  Lamotte, 
Batailler,  notaire  (1). 

— 1770, 31  juillet.  M»"» François-Claude  Bougarel,  inten- 
dant desaffaires  des  dames  abbesse  et  religieuses. . .  baille 
à  titre  d'accense  pour  6  années  venant  à  9,  à  M^®  Antoine 
Herbuté,  prestre  curé  de  la  paroisse  de  S*-Benin- 
d'Azy,  la  dixme  de  bled  appelée  Cherault,  en  la 
paroisse  d'Azy  et  es  environs,  moyennant  5  quartaux 
froment  par  chacun  an  à  rendre  conduits  sur  les  gre- 
niers de  l'abbaye  au  jour  et  feste  de  S^-Martin  d'hiver. 

Bougarel,  Herbuté,  curé  d'Azy  ;  Picquet, 
bourgeois  de  S^-Pierre-le-Moûtier,  témoin  ; 
Bidault,  curé  de  Cigogne,  témoin;  Ba- 
tailler (8). 


(i)  Minutes  Batailler. 
(2)  Id, 


—  324  — 

— 1771,  15  septembre.  Dame  Madame  Marie-Claire 
de  Saillans,  abbesse..  .>  baille  à  ferme  pour  3  années 
venant  à  6,  à  François  Goimbault,  jardinier  au  fau- 
bourg de  Mouêsse  : 

Une  pièce  de  terre  labourable,  où  il  y  avait  autrefois 
des  b&timents  dépendants  du  prieuré  du  Montot^  et 
située  près  la  chapelle  dud.  Montot,  de  5  quartellées 
environ,  tenant  au  territoire  de  lad.  chapelle,  qui  était 
autrefois  une  paroisse... 

Plus  ime  pièce  de  pré,  en  la  prairie  de  la  Baratte, 
contenant  ime  charretée  de  foin  ou  environ  ; 

Plus  un  autre  pré  situé  au  finage  du  Montot,  conte- 
nant environ  quatre  charretées  de  foin,  et  appelé  le 
pré  du  Brignon  ; 

Plus  ime  pièce  de  pré,  en  la  prairie  de  Nièvre, 
d'une  demi-charretée  de  foin  environ  ; 

Plus  un  pré  en  la  prairie  de  Fontenotte,  contenant 

une  charretée  de  foin  environ  ; 

Moyennant  le  prix  et  somme  de  20  livres  par  chacun 
an. 

Ont  signé  :  S'  Saillans,  abbesse  ;  de  La 
Tour  de  La  Pommeraye,  Batailler  (1). 

— 1772,  18  janvier.  Dame  Madame  Marie-Claire  de 
Saillans,  abbesse,...  sur  la  représentation  à  elle  faite 
par  François  RoUet,  propriétaire,  demeurant  aud.  lieu 
d'Appilly,  paroisse  de  Druy,  qu'il  lui  appartient  une 
pièce  de  terre  et  autres  héritages,  situés  aud.  lieu 
d'Appilly,  justice  desd.  dames  religieuses,  et  portés 
dans  différentes  charges  de  lad.  abbaye,  à  cause  de 
leur  prieuré  d'Apilly  et  que  la  superficie  en  appartient 
aud.  RoUet,  qui,  après  avoir  fouillé  lesd.  héritages  à 
lui  appartenants,  croit  que  dans  le  fond  d'iceux  héri- 

(1)  Minutes  Batailler. 


—  325  — 

tages  il  peut  y  avoir  du  sable  propre  à  faire  f ayence  ; 
pourquoy  led.  RoUet,  ne  pouvant  détérieurer  lesd. 
héritages  sans  le  consentement  de  lad.  dame,  il  Ta 
priée  et  requise  de  vouloir  bien  lui  permettre  de  faire 
des  fouilles...  C'est  à  scavoir  de  tirer  du  sable  dans  la 
montagne  d'Appilly,  à  l'exclusion  de  tous  autres,  led. 
bail  fait  sous  la  rente  foncière  et  non  rachetable  de 
24  livres  par  chacun  an. 

Par  les  mômes  présentes,  lad.  dame  abbesse  délivre 
à  titre  de  bordelage,  suivant  la  coutume  du  Nivernois, 
c'est  à  scavoir  un  terrain  vain  et  vague,  où  sont  actuel- 
lement les  débris  de  la  chapelle  d'Apilly,  appartenant 
aux  dames  religieuses,  de  la  contenue  d'environ 
12  boisselées  ;  sous  l'annuel  et  perpétuel  bordelage  de 
10  sols  et  ime  poule  à  la  Saint-Martin  d'hiver.  Et  pour 
le  droit  d'entrée  du  présent  bail,  lad.  dame  en  a 
composé  avec  led.  Rollet  à  la  somme  de  30  livres, 
laquelle  somme  led.  Rollet  a  promis  de  payer  à  lad. 
dame  le  jour  de  Saint-Martin  d'hiver  prochain. 

Signé  :  S'  Saillans,  abbesse  ;  Rollet,  de 
La  Tour  de  La  Pommeraye,  Batailler, 
notaire  (1). 

— 1783,  24  avril.  Minutes  Haly,  notaire  à  Nevers.  Foi 
et  hommage  du  fief  simple  de  NifiEond,  paroisse 
d'Urzy,  consistant  en  pré,  terres  et  bois,  faite  (sic) 
par  les  Révérends  Pères  Carmes  de  Nevers  aux  dames 
abbesse  et  religieuses  de  Notre-Dame  (2). 

Si  les  débuts  de  l'administration  de  labbesse  de 
Saillans  furent  assez  calmes  et  paisibles,  sur  la  fin,  les 
épreuves  les  plus  amères,  les  plus  terribles  angoisses, 
les  déchirements  les  plus  cruels  lui  étaient  réservés. 

(1)  Minutes  Batailler. 

(2)  Registre  du  contrôle  de  Nevers,  aux  Archives  de  la  Nièvre. 


—  326  — 

Quel  martyre  pour  cette  sainte  femme  d'être  témoin 
de  l'expulsion  et  de  la  dispersion  de  sa  famille  reli- 
gieuse et  ensuite  de  la  profanation  et  de  la  vente  de  son 
cher  couvent  1 

Elle  resta  à  Nevers  et  y  termina  ses  jours  au  mois 
de  décembre  1806,  en  son  domicile,  rue  du  Charnier  (1), 
près  de  l'église  Saint-Etienne. 

Voici  la  copie  de  son  acte  de  sépulture  : 

«  Ce  jourd'hui,  23  décembre  1806,  madame  Marie- 
Claire  de  Saillans,  ex-abbesse  de  Nevers,  décédée 
hier,  âgée  de  soixante-neuf  ans,  a  été  inhumée  en 
présence  de  MM.  Claude-Philibert  Groult  et  Henri- 
Gabriel  de  Montrichard,  vicaires  généraux  du  diocèse, 
et  de  MM.  les  ecclésiastiques  (et  notables)  soussignés  ». 
Ont  signé  :  l'abbé  de  Montrichard,  Groult,  vicaire 
général  ;  Morizot ,  AUoury,  chanoine  ;  Bruandet , 
prêtre  ;  Rondeau,  ancien  curé  de  Saint-Trohé  ;  Martin, 
vicaire  de  Saint-Etienne;  Pinet  des  Ecots  père, 
Martin,  Garilland,  Syrot,  curé  de  Saint-Etienne  (2). 

Ses  obsèques  solennelles  furent  un  éclatant  témoi- 
gnage rendu  à  sa  mémoire.  Les  deux  vicaires  généraux 
résidant  à  Nevers,  l'évôché  étant  alors  rattaché  à  celui 
d'Autun.  présidèrent  la  cérémonie,  au  milieu  d'un 
nombreux  concours  de  clergé  et  de  fidèles  de  toute  la 
ville.  La  foule  qui  emplissait  les  nefs  saluait  avec  un 
égal  respect  la  dépouille  mortelle  de  l'ancienne 
abbesse  de  Notre-Dame  et  les  vénérables  prêtres  vic- 
times et  survivants  de  la  Révolution,  et,  à  ce  double 
spectacle,  dans  les  esprits  se  déroulait,  se  mêlant  aux 
prières,  toute  une  suite  de  souvenirs  tragiques  dont  la 
frayeur  était  à  peine  calmée. 

(4)  Extrait  mortuaire  des  actes  civils  de  la  mairie  de  Nevers. 
(2)  Extrait  des  actes  religieux  de  la  paroisse  Saint-Etienne. 


-  :i27  — 


§  !•'.  —  PRIEURÉS  DE  BÉNÉDICTINS  ET  BÉNÉFICES 
ECCLÉSIASTIQUES  DÉPENDANTS  DE  l'ABBAYE  NOTRE- 
DAME. 

PRIEURÉS 

Dans  les  actes  concernant  les  abbesses,  nous  avons 
rencontré  le  nom  de  plusieurs  prieurés  dépendant  de 
l'abbaye  Notre  Dame;  il  faut  y  ajouter  celui  de 
Beffes,  non  encore  cité.  En  voici  la  nomenclature 
réunie  : 

Prieuré  d'Appilly,  commune  deDruy,  prèsDecize; 

—  de  Beffes,  dans  le  Berry  ; 

—  de  Coustiers,  dans  Je  Berry  ; 

—  de  Marseigne,  dans  le  Bourbonnais  ; 

—  du  Montot,  commune  de  Saint-Eloy,  près 

Nevers  ; 

—  de  Lichy,  aux  Amognes. 

BÉNÉFICES  ECCLÉSIASTIQUES 

L'ancien  pouillé  des  bénéfices  de  l'insigne  église  de 
Nevers  porte  à  la  collation  ou  présentation  de  madame 
l'abbesse  un  certain  nombre  de  vicairies,  chapelles  et 
cures,  qui  sont  ; 

A  la  collation  : 

Les  vicairies  de  Saint-Fiacre,  de  Sainte-Madeleine, 
de  Sainte-Catherine,  à  l'église  Saint-Genès,  et  l'autel 
du  Saint-Sépulcre,  dans  la  môme  église,  ainsi  que  le^ 
fonctions  de  diacre  et  de  sous-diacre  du  monastère.; 


—  328  — 
A  la  présentation  : 

Les  chapelles  de  Chaligny  (1)  et  de  Montigny-aux- 
Amognes  ; 
Les  quatre  cures  de  Saînt-Genès  ; 
La  cure  de  Beaune,  dans  le  Berry  ; 

—  de  Beffes,  dans  le  Berry  ; 

—  de  Chaluzy, 

—  de  Dun-sur-Grandry, 

—  de  Fleury-sur-Loire, 

—  de  Lichy, 

—  de    Marnay,    commune    de    Druy,    près 

Decize  ; 

—  de  Monceaux-sur-Azy, 

—  du  Montot  et  du  prieuré, 

—  d'Omery,  dans  le  Berry  ; 

—  d'Oulon, 

—  de  Parigny-sur-SardoUes, 

—  de  Plain-Pois,  paroisse  d'Aunay  ; 

—  de  SardoUes, 

—  de  Trois- Vôvres, 

—  de  Verneuil. 


§  II.   —   TEMPOREL  DE  L'ABBAYE 

L'abbaye  possédait  de  nombreuses  propriétés, 
consistant  en  seigneuries,  maisons,  moulins,  terres, 
prés,  vignes,  bois,  dîmes,  champarts,  directes,  cen- 
sives  et  rentes,  dont  le  dénombrement  suivi  serait 
assez  difficile  ;  mais  les  nombreuses  chartes,  repro- 


(1)  Â  la  place  de  l'étang  de  Chaligny,  commune  de  Chevenon,  s'élevait 
cette  chapelle  dédiée  à  sainte  Geneviève.  (De  Soultratt,  DictUmnaire 
topographique  de  la  I^ièuré), 


—  329  - 

duites  en  la  présente  étude,  donnent  une  idée  suffisante 
des  biens  et  revenus  du  couvent,  qui  étaient  épars  dans 
un  rayon  assez  étendu. 

Par  suite  des  donations  successives,  la  gestion  du 
temporel  nécessita  la  nomination  d'un  receveur  spé- 
cial, dès  l'abbesse  Alis  (1281;,  qui  établit  pour  man- 
dataire Hubert^  dit  Raveneau. 

Les  principales  propriétés  de  Tabbaye,  avec  droits 
seigneuriaux,  étaient  sur  Sardolles,  Plagny ,  Chavigny, 
près  Germigny-sur-Loire  ;  Parigny-les-Vaux,  Moussy, 
Meauce,  Druy,  près  Decize...  (1). 

Pour  l'exercice  des  droits  de  seigneurie,  il  fallut 
aussi  établir  une  cour  de  justice,  qui  existait  dès  avant 
l'abbesse  de  Lugny  (3).  Jusqu'à  la  Révolution,  nous 
voyons  la  justice  rendue,  au  nom  de  l'abbesse,  sur  les 
terres  où  ce  privilège  lui  appartenait  ;  ainsi,  i  l'année 
1775^  les  archives  municipales  nous  en  donnent  un 
exemple  : 

«  Renvoi  devant  Mesdames  les  Abbesse,  prieure  et 
religieuses  de  l'abbaye  royale  de  Nevers,  Dames  hautes, 
moyennes  et  basses  de  la  justice  de  ladite  abbaye  i 
Nevers,  Plagny  et  autres  lieux,  en  qualité  de  juges  du 
lieu,  d'un  nommé  Gilbert  fiordet,  accusé  de  vol  dans 
un  cabaret  de  Plagny  ;  ledit  individu  arrêté  le  11  juin, 
jour  de  l'assemblée  de  La  Fermeté,  alors  qu'il  revenait 
de  la  paroisse  de  Prie,  où  il  avait  voulu  vendre  une 
tasse  d'argent,  n'ayant  du  reste  aucun  passeport,  et 


(1)  Singularité  de  droits  seigneuriaux  :  les  possesseurs  du  fief  de  Ver- 
neuil  étaient  seigneurs  du  chœur  de  l'église  et  l'abbesse  était  dame  du 
clocher.  (De  Soultrait,  Statistique  du  départenierU  de  la  Nièvre,  canton 
de  Decize). 

(3)  Se  reporter  à  la  notice  de  cette  abbease,  en  1428. 


—  330- 

après  avoir  été  mis  dans  les  prisons  des  Dames  de  La 
Fermeté,  jusqu'à  la  fin  de  l'assemblée,  ayant  été 
conduit  dans  les  prisons  de  Nevers  (1)  n. 


§111.   —  IMPORTANCE  DU  RÔLE  ET  DE  l'iNFLUENCE 

DE  l'aBBESSE 

Madame  Tabbesse,  dans  son  couvent,  est  pour  la 
communauté  des  religieuses  une  mère  bien-aimée  ;  une 
supérieure  vénérée  pour  les  pensionnaires  ;  une  maî- 
tresse entourée  de  respect  et  de  dévouement  de  la 
part  des  personnes  séculières  de  la  maison  :  officiers, 
employés,  serviteurs  ;  une  autorité  spirituelle  qui 
embrasse  en  dehors  de  Tabbaye  plusieurs  prieurés, 
petits  groupes  de  la  famille  bénédictine  de  Nevers  ;  un 
personnage  ayant  droit  de  collation  ou  de  présentation 
à  un  certain  nombre  de  bénéfices  ecclésiastiques  cités 
plus  haut  ; 

Dans  la  ville,  une  providence  des  pauvres  ;  un  per- 
sonnage comptant  entre  les  principaux  par  ses  rela- 
tions et  son  influence  sur  la  multitude  de  gens  de 
commerce  et  de  métiers  qu'elle  emploie  ; 

Dans  la  province,  une  riche  propriétaire,  une  puis- 
sante dame  marchant  de  pair  avec  la  noblesse,  une 
vassale  et  suzeraine  à  la  fois  pour  ses  terres  seigneu- 
riales, une  quasi  princesse  avec  une  administration  de 
receveur,  de  cour  de  justice,  d'employés... 

Faut-il,  après  cela,  s'étonner  du  rôle  important  de 
l'abbesse  de  Notre-Dame  et  de  la  place  qu'elle  occupe 
dans  Thistoire  du  Nivernais  ? 

(1)  Archiv.  comm.  de  Nevers,  FF,  25. 


—  331  - 


§  IV.  —  DU  CHOIX  DE  l'aBBESSE  ET  DES  INSIGNES 

DE  SA  DIGNITÉ 

Le  deuxième  chapitre  de  la  Règle  de  saint  Benoît, 
intitulé  :  Quel  dott  être  Vabbé  ?  indique  l'ensemble 
des  qualités  requises  :  bonté,  fermeté,  doctrine, 
discernement  des  caractères  dans  «  celui  ou  celle  qui, 
pour  être  digne  de  présider,  doit  constamment  se 
souvenir  comme  on  l'appelle  :  a66a,  et  réaliser  par  ses 
actes  son  nom  de  chef  (1)  ». 

Le  résumé  des  faits  accomplis  pendant  l'administra- 
tion de  chaque  abbesse  dépose  en  faveur  de  l'heureux 
choix,  issu  des  suffrages  de  la  communauté  et,  plus 
tard,  môme  des  nominations  royales. 

Les  abbesses  bénédictines,  outre  la  crosse,  jouis- 
saient-elles du  privilège  de  porter  l'anneau  et  la  croix 
pectorale  ? 

Le  seul  portrait  d'une  abbesse  de  Nevers,  M°^«  Claire 
de  Saillans,  signalé  par  M.  l'abbé  Boutillier,  se  trouve 
malheureusement  égaré  (2)  ;  de  sorte  que  tout  rensei- 
gnement local  fait  défaut  sur  les  insignes  de  l'abbesse 
de  Nevers,  en  dehors  de  la  crosse. 

Dans  d'autres  monastères  du  môme  ordre,  des 
recherches  sur  le  sujet  qui  nous  occupe  nous  amènent 
à  croire  que  l'anneau  et  la  croix  pectorale  étaient  les 
insignes  ordinaires  de  la  dignité  abbatiale. 
—  Dans  le  Miroir  des  Ames  religieuses,  —  Poitiers, 
1653,  —  est  représenté  le  portrait  de  M"«  Charlotte- 
Flandrine  de  Nassau,  abbesse  de  Sainte-Croix  de 
Poitiers  ;  elle  porte  le  costume  de  chœur  des  simples 

(1)  Règle  de  saint  Benoît,  2«  chapitre. 

(2)  Abbé  Boutillier,  la  Verrerie  de  Nevers,  p.  103.  Ce  portrait  appar- 
tient ou  appartenait  à  M.  le  docteur  Robert  Saint-Gyr  fils. 


—  332  — 

religieuses  ;  de  la  main  droite  elle  tient  la  crosse,  de 
la  main  gauche  un  livre  ;  et  à  l'index  de  cette  môme 
main,  on  voit  Tanneau  abbatial.  Cependant  elle  n'a 
pas  la  croix  pectorale. 

—  A  l'abbaye  de  La  Ferté-sous-Jouarre,  la  dernière 
abbesse  d'avant  la  Révolution,  M"^«  de  Montmorin  de 
Saint-Hérem,  est  représentée  en  costume  de  chœur, 
avec  la  crosse  et  la  croix  pectorale  ;  on  ne  lui  voit  pas 
d'anneau.  Sur  les  portraits,  d'autres  abbesses  figurent 
la  crosse  et  la  croix  ;  les  mains  ne  sont  pas  visibles. 
Un  anneau  d'or  délicatement  ciselé  a  été  trouvé  au 
doigt  annulaire  de  la  main  droite  de  l'abbesse  Louise 
de  Bourbon,  trente-cinquième  abbesse,  de  1586  à  1593, 
lors  de  Touverture  de  son  tombeau  (1). 

—  Au  parloir  actuel  des  Bénédictines  de  Saint-Lau- 
rent de  Bourges,  il  existe  deux  beaux  portraits  peints 
d'abbesses  de  l'ancienne  abbaye  Saint-Laurent  ;  elles 
sont  en  costume  de  chœur  régulier  avec  croix  pectorale  ; 
l'une  porte  la  crosse  et  l'anneau  ;  l'autre  n'a  pas  de 
croix  et  ses  mains  ne  sont  pas  apparentes. 

— Dans  le  Recueil  des  Archevêchés,  Evêchés,  Abbayes 
et  Prieurés,  par  Dom  Beaunier,  Bénédictin,  —  Paris, 
Mesnier,  1726,  —  ce  savant  Bénédictin  dit  que  la 
croix  pectorale  est  un  des  insignes  de  la  dignité  abba- 
tiale des  abbayes  bénédictines  ;  il  était  bien  en  situa- 
tion pour  parler  en  connaissance  de  cause.  A  propos 
des  abbesses  de  la  Pommeraye  (ordre  de  saint  Benoit), 
au  diocèse  de  Sens,  qui  ne  portent  pas  de  croix,  il  a 
soin  de  dire  que  c'est  «  contre  la  coutume  des  autres 
abbayes  et  par  un  ejfet  d'humilité  (2)  ». 


(1)  Détails  fournis  par  Madame  TÀbbesse  de  Joaarrti,  dans  une  lettre  du 
25  septembre  1900. 

(2)  Tomell,  page  813. 


SCEAU  ET  COHTRZ  SCEAU  Dr  L'ABBESSE  JEANNE  IV  LEBOURCOIHG 


Les  armes  de  ta  famiUe  Le  Bourgoing  de  Folin, 
d'aprèsM.de  SoaitT&it,  Armoriai  du  Nioernais,BOiit  : 
«  D'argeat  à  trois  tourteaux  de  gueules.  » 

II 
Le  Personnel  de  l'Abbaye* 

On  appelle  abbaye  une  réuDion  d'hommes  ou  de 
femmes  soumis  à.  une  règle  religieuse  et  gouvernés  par 
un  abbé  ou  une  abbesse. 

Le  second  monastère,  —  après  celui  détruit  de 
l'évéque  Rauracus,  —  qui  fut  celui  repeuplé  par  le  pieux 
évoque  Hériman,  —  semble  avoir  réuni  dès  l'origine 
une  communauté  aussi  nombreuse  que  fervente.  Dans 
ces  siècles  de  foi,  de  pieuses  personnes  vinrent  avec 
empressement  se  ranger  «  sous  la  direction  de  la  supé- 


-  334  — 

rieure,  qui  devait  leur  montrer  tout  ce  qui  est  bon, 
plus  par  des  actes  que  par  des  paroles  (1)  ». 

L'étendue  et  Timportance  des  terrains  et  des 
constructions  sont  une  preuve  du  mouvement  qui 
poussait  les  âmes  vers  ce  saint  asile. 

La  règle  de  saint  Benoit  est  composée  d'observances 
sévères  :  l'obéissance,  la  pénitence,  le  renoncement  ; 
mais  les  personnes  qui  venaient  du  milieu  du  monde  et 
disaient  un  irrévocable  adieu  à  ses  joies,  ses  plaisirs 
et  ses  vanités,  n'ignoraient  pas  qu'elles  se  plongeaient 
pour  le  reste  de  leurs  jours  dans  la  solitude,  le  silence, 
les  austérités,  l'abnégation  de  tous  les  instants. 

L'esprit  de  discipline  et  de  régularité  assura  pendant 
dix  siècles  la  longévité  du  monp,stère,  qui  fut  brusque- 
ment interrompue  par  la  plus  terrible  des  tempêtes,  en 
dispersant  ses  membres  et  les  empêchant  de  se  réunir 
à  nouveau . 

Il  convient,  pour  plus  de  clarté  dans  la  suite  de 
cette  étude,  d'établir  une  division  qui  nous  sera  fournie 
naturellement  par  la  classification  en  deux  catégories 
des  personnes  dont  il  nous  reste  à  parler. 

Le  chapitre  premier  a  été  principalement  consacré 
à  Tabbesse,  qui  est  la  tête  de  la  communauté  ;  le  cha- 
pitre deuxième,  dans  un  premier  paragraphe,  aura 
trait  à  la  communauté  proprement  dite,  ou  les  reli- 
gieuses ;  puis  les  pensionnaires  admises  dans  le  couvent 
formeront  la  matière  du  paragraphe  second. 

§   I.  —  LES  RELIGIEUSES 

Nous  savons  que  la  règle  du  monastère  primitif,  ou 
du  vii«  siècle,  était  celle  de  saint  Colomban  :  «  Item- 
que  aliud  Christi  virginum  juxta  Nivernense  oppi- 

(1)  Règle  de  saint  Benoit,  chap.  II. 


—  336  — 

dum  sub   Ciidem  régula,  nempe  Columbanij    cons* 
truxit  (1)  ». 

Celui  que  l'évèque  Hériman  (840-860)  repeupla  de 
moniales,  au  moment  où  Tordre  bénédictin  était  si 
prospère,  dut  suivre,  dès  son  relèvement,  la  règle  de 
saint  Benoit. 

Toutefois,  malgré  la  disposition  du  Concile  d'Epaone, 
en  517,  qui  en  faisait  un  précepte,  et  malgré  aussi  les 
prescriptions  formelles  de  la  règle  bénédictine,  la 
clôture  n'était  pas  stricte.  Boniface  VIII  fut  le  premier 
qui,  par  une  constitution,  en  établit  la  nécessité;  ce 
règlement  a  été  renouvelé  par  le  Concile  de  Trente, 
session  25,  chapitre  5,  et  par  l'Ordonnance  de  Blois. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  religieuses  de  Notre-Dame  de 
Nevers,  en  plusieurs  circonstances,  jusqu'au  xv®  siècle, 
sortaient  de  leur  couvent. 

Parmentier  cite  une  charte  de  l'épiscopat  de 
Hugues  II  où,  au  Synode  tenu  par  l'évèque,  assistent 
des  nobles,  l'abbesse  et  trois  de  ses  religieuses  (2)  ; 
il  ajoute  :  «  Elles  n'ont  été  cloîtrées  que  bien  avant 
dans  le  xv»  siècle,  et  elles  assistaient,  comme  faisant 
partie  du  clergé,  aux  processions  générales  et  tenaient 
leur  rang  aux  services  funèbres  des  comtes  et  com- 
tesses (3)  D. 

Nous  rappelons  qu'aux  années  1404  et  1415,  nous 
avons  signalé  la  présence  de?  Bénédictines  au  service 
de  Philippe  le  Hardi  et  aux  obsèques  du  duc  de 
Brabant,  Philippe  de  Bourgogne. 

En  l'année  1473,  l'abbesse  Catherine  de  Boutillat 
eut  des  difficultés  avec  Ma'  de  Fontenay  au  sujet  d'une 
procession  qu'elle  avait  faite.  Une  enquête  du  10  mars, 

(1)  Jonas,  invitis  abholuni  Columhani  et  Ettstasiif  livre  10,  p.  297. 

(2)  Histoire  nianusa^ite   des  Evêques  de  Nevers.  —  Episcopat  de 
Hugues  II. 

(3)  Jd. 


-  386  — 

devant  le  bailli  de  Saint-Pierre-le-Moûtier,  prouve 
que  les  Dames  étaient  en  possession  de  faire  publier 
leurs  processions  ordinaires  et  extraordinaires  par  le 
préconiseur  de  la  ville,  et  de  les  conduire  &  Saint- 
Antoine  et  au  Montot  (1). 

U Album  du  Nivernais  rapporte,  àToccasion  des  pro- 
cessions, d'après  une  tradition  orale,  d'une  redevance 
singulière  «  Quand  Madame  TAbbesse,  en  procession, 
passait  devant  une  maison  dont  on  ignore  remplace- 
ment, les  propriétaires  ou  habitants  étaient  tenus  de 
lui  oflErir  un  verre  de  vin  qu'elle  buvait  sur  le  lieu  (2)  ». 

Par  la  suite  du  temps,  il  arrive  inévitablement  que 
des  dérogations  &  la  règle  primitive,  des  abus  s'intro- 
duisent môme  dans  les  communautés  religieuses  ; 
l'abbaye  Notre-Dame,  par  cette  pente  naturelle  au 
rel&chement,  ne  fut  pas  exempte  de  cette  loi  fatale. 
Aussi  labbesse  Jeanne  d'Albret  entreprit  un  commen- 
cement de  réforme  dans  le  monastère  de  Ne  vers, 
qu'elle  unit,  en  1540,  &  la  congrégation  de  Chezal-- 
Benoit. 

Dès  le  milieu  du  xv®  siècle,  d'un  mouvement  quasi 
unanime,  «  de  saintes  filles  se  mirent  &  réformer  les 
monastères  dont  elles  avaient  le  gouvernement  en  y 
faisant  revivre  le  véritable  esprit  de  saint  Benoit  (3)  ». 

L'abbesse  Claude  de  Gamaches  continua  l'œuvre  de 
réforme  commencée  au  couvent  de  Nevers.  Dans  sa 
notice,  nous  avons  signalé  son  zèle  pour  l'observation 
de  la  clôture.  Ses  efforts  se  portèrent  aussi  sur  un 
autre  point  qui  souleva  des  difficultés  ;  il  s'agissait  de 
revenir  au  costume  bénédictin  régulier.  «  La  plupart 
des  Bénédictines  de  France  avaient  pris  l'habit  des 
chanoinesses,  comme  dans  les  monastères  de  Mont- 
Ci)  Parmentibr,  Archives  de  Nevers,  tome  !•%  p.  393. 

(2)  Album  du  Nivernais,  tome  I**",  p.  122. 

(3)  MiQNE,  Ordres  religieux,  tome  I*'',  p.  440. 


-  337   - 

martre,  de  la  Trinité  de  Caen,  de  Saintes,  et  de 
plusieurs  autres,  où  elles  portaient  des  robes  blanches 
de  toile  très  fine  et  très  bien  empesée  (1)  ».  La  robe 
de  Fontevrault  était  blanche  également. 

A  Nevers,  tout  porte  à  croire  qu'elle  était  blanche. 

De  1644  à  1646,  on  trouve,  au  registre  des  décès  de 
Tabbaye,  trois  sépultures  de  religieuses  avec  mention 
de  la  couleur  blanche  de  leur  costume.  Ce  détail  serait 
inexplicable  si  cette  couleur  n'eût  pas  été  alors  une 
exception  dans  la  communauté  : 

1°  Dernier  jour  de  septembre  1644,  sœur  Jeanne 
Regnard,  fille  blanche  de  l'abbaye,  âgée  d'environ 
cinquante  ans,  est  enterrée  au  cloître  de  ladite  abbaye 
par  les  Pères. 

2°  Le  2  janvier  1646,  Claudine  Raphatin,  sœur 
blanche,  âgée  de  quatre-vingt-huit  ans,  est  enterrée 
au  cloître,  devant  le  chapitre. 

3**  Le  21  avril  1646,  sœur  Laurence  Maublanct,  reli- 
gieuse blanche,  âgée  d'environ  cinquante  ans,  est 
enterrée  proche  la  porte  qui  sort  de  l'église  pour  aller 
au  cloître. 

Il  ne  faut  pas  croire  que,  pour  réussir  dans  leurs 
entreprises  de  réforme,  les  supérieures  n'avaient  qu'à 
manifester  leur  désir  :  «  Elles  rencontraient  quelque- 
fois de  la  résistance  et  étaient  obligées  de  faire  des 
concessions...  Jeanne  de  Bourbon,  abbesse  de  Jouarre, 
y  abolit  le  bréviaire  de  Fontevrault,  en  1614  ;  la  résis- 
tance des  religieuses  empêcha  cette  princesse  de  leur 
ôter  l'habit  blanc  et  le  rochet  de  Fontevrault,  qu'elles 
quittèrent  enfin  sous  l'abbesse  Jeanne  de  Lorraine  (2)  ». 

En  certains  monastères  bénédictins,  l'habit  blanc 
restait  maintenu  (à  Fontevrault)  ou  môme  introduit 

(1)  MiGNE,  Ordres  religieux,  tome  I***,  p.  440. 

(2)  W. 

T.        3*  série.  2â 


—  338  - 

comme  nouveauté.  Au  monastère  de  Poitiers,  en  1651, 
des  religieuses  se  plaignent  de  leur  abbesse,  M°*»  Diane- 
Françoise  d'Albret,  pourtant,  dit  Thistorien  (1),  un 
modèle  d'humilité  et  de  soumission  à  la  règle  ;  elles 
lui  reprochent,  entre  autres  griefs,  de  ne  pas  porter 
l'habit  de  son  ordre  et  d'avoir  introduit  le  costume 
blanc  de  Fontevrault, 

Le  chapitre  de  Poitiers,  le  siège  épiscopal  étant 
vacant,  rend  une  ordonnance  qui  inflige  un  blâme  aux 
religieuses  plaignantes;  mais  celles-ci  en  appellent 
d'abus  au  Parlement. 

La  question  de  costume  était  depuis  longtemps  un 
brandon  de  discorde,  quand,  le  19  février  1672,  inter- 
vient un  arrêt  du  Grand  Conseil;  le  diflEérend  fut 
ainsi  tranché  :  permission  est  accordée  aux  religieuses 
qui  portent  l'habit  blanc  de  le  conserver  si  bon  leur 
semble  ;  celles  qui  feront  désormais  profession  auront 
à  prendre  le  vêtement  noir,  prescrit  par  la  règle  béné- 
dictine (2). 

De  ces  faits,  pris  dans  diflEérents  monastères  béné- 
dictins à  la  même  époque,  au  sujet  de  la  réformation 
et  du  retour  au  costume  régulier,  je  conclus  que  le 
vêtement  blanc,  après  avoir  été  longtemps  en  usage  & 
l'abbaye  Notre-Dame,  fut  changé,  mais  que  certaines 
sœurs  persistèrent  à  conserver  leur  ancien  costume, 
qui  devenait  une  singularité.  Toutefois,  cette  excep- 
tion tolérée  s'explique,  soit  par  une  concession  de 
l'abbesse,  soit  par  une  sentence,  comme  il  en  fut  rendu 
une  à  Poitiers,  en  faveur  des  religieuses  s'obstinant  à 
conserver  leur  vêtement,  consacré  par  l'usage  d'une 
longue  tradition. 

En  1629,   à  l'abbaye  des  chanoines  réguliers   de 

(1)  Âbbé  Briand,  Vie  de  sainte  Radegonde,  Poitiers,  p.  381. 

(2)  D'après  M.  Tabbé  Briand,  Vie  de  sainte  Radegonde,  Poitiers,  p.  381. 


-  339  - 

Saint-Martin  de  Nevers,  la  réforme  du  costume  eut 
lieu  en  sens  inverse  :  il  leur  fut  proposé  de  changer 
leur  vêtement  noir  pour  le  vêtement  blanc.  Plusieurs 
religieux  demandèrent  à  conserver  le  costume  noir 
dans  lequel  ils  avaient  fait  profession,  disant  que,  pour 
le  reste  des  statuts,  ils  s'engageaient  à  les  observer 
fidèlement,  et  que,  s'il  n'était  pas  fait  droit  à  leur 
requête,  ils  quitteraient  l'abbaye  pour  les  bénéfices 
dont  ils  étaient  titulaires  et  vivraient  néanmoins  selon 
leur  règle.  On  ne  voulut  pas  faire  de  concession  et  ils 
se  retirèrent  (1). 

Pour  en  revenir  aux  Bénédictines,  le  vêtement  régu- 
lier, qui  fut  de  nouveau  adopté  au  couvent  Notre-Dame 
et  qui  bientôt  ne  souffrit  plus  d'exceptions,  consiste 
en  une  robe  et  scapulaire  noirs,  guimpe  blanche  et 
voile  noir  par-dessus  ;  pour  le  chœur,  les  religieuses  y 
ajoutent  le  vêtement  de  couleur  noire,  appelé  coule, 
avec  larges  manches  (2). 

Nous  avons  constaté  plusieurs  points  de  la  règle 
rétablie.  Il  faut  bien  admettre  que  la  réforme  fut 
complète  et  les  observances  reprises  dans  leur  inté- 
grité; mais  j'avoue  que  les  documents  font  défaut 
pour  appuyer  ma  proposition  et  retracer  le  détail  de 
la  vie  monastique  de  l'abbaye  Notre-Dame.  Notre 
curiosité  se  froisse  de  cette  lacune  ;  toutefois,  nous 
essaierons  d'y  suppléer  dans  la  mesure  du  possible. 

N'est-il  pas  un  vieux  proverbe  qui  dit  :  «  Quand  on 
n'a  pas  de  feu  chez  soi,  on  va  en  quérir  chez  le 
voisin  ».  Je  suivrai  ce  bon  conseil. 

A  ime  distance  de  quelques  lieues  de  l'abbaye  béné- 
dictine de  Nevers,  existait,  à  La  Ferté-sur-Ixeure  ou 
La  Ferté-aux-Nonnains,  un  prieuré  de  la  même  famille 

(1)  Minutes  du  notaire  Taillandier ,  9  juillet  1629, 

(2)  MiGME,  Ordres  religieux,  tome  I«^  p.  1033. 


-  340  - 

bénédictine,  comptant  à  peu  près  un  nombre  égal  de 
religieuses,  ayant  également  la  direction  d'un  pen- 
sionnat. 

J'irai  donc  frapper  à  cette  porte,  pour  répondre  à  des 
desiderata  de  la  vie  intérieure  de  l'abbaye  de  Ne  vers, 
au  moins  pour  l'époque  du  xvii«  siècle.  M.  Victor 
Queneau,  auteur  de  l'intéressante  Notice  sur  le  Prieuré 
de  La  Ferté,  reproduit  en  appendice  la  série  des 
procès- verbaux  des  visites  faites  à  ce  prieuré  par  les 
grands-prieurs  de  Tabbaye  de  Saint-Martin  d'Autun. 

J'essaierai  d'en  tirer  profit  pour  donner  un  aperçu  de 
plusieurs  points  de  la  règle  en  usage  dans  les  deux 
monastères  réformés  de  Nevers  et  de  La  Ferté. 

Et  d'abord  nous  y  trouvons  l'emploi  détaillé  de  la 
journée  : 

a  Les  religieuses  commenceront  matines  &  quatre 
heures  du  matin.  Après  matines,  lecture  d'une  demi- 
heure. 

))  Les  primes  commenceront  à  sept  heures  et  demie 
précises  ;  après  primes,  lecture  du  martyrologe  par  les 
plus  jeunes  ;  puis  après,  chacune  des  religieuses  dira 
sa  coulpe,  étant  prosternée  devant  la  prieure  ou  la  plus 
ancienne  en  son  absence,  afin  qu'elle  puisse  être 
connue  de  toutes  et  qu'elle  ait  crainte  d'y  retomber. 

»  Les  tierces  à  neuf  heures  précises,  si  mieux  elles 
n'aiment  à  travailler  aux  œuvres  manuelles. 

»  La  grand'messe  se  dira  à  l'issue  desdites  tierces  ; 
puis  elles  diront  sextes  et  iront  dîner,  pendant  lequel 
dîner  sera  fait  lecture  de  la  Vte  des  Saints  ou  de 
quelques  livres  sacrés  traduits  en  français  ;  ensuite 
elles  rendront  grâces  à  Dieu  en  l'église  ;  après  quoi 
elles  diront  nones. 

»  Elles  se  reposeront  une  demi-heure  et  non  plus, 
et,  jusqu'à  vespres,  elles  étudieront,  enseigneront  ou 
se  livreront  &  des  œuvres  manuelles. 


—  341  - 

»  Les  vespres  commenceront  à  trois  heures;  les- 
quelles dites,  les  religieuses  pourront  se  promener, 
ensemble  ou  séparément,  dans  Tenclos  du  prieuré. 

»  Le  souper  sera  à  six  heures  ;  après,  elles  iront  à 
Féglise,  diront  complies,  pourront  ensuite  se  récréer 
une  demi-heure  et  non  plus,  réciteront  les  litanies  de 
Notre-Dame,  feront  leur  examen  de  conscience  et  se 
coucheront  à  huit  heures  (1)  ». 

Plusieurs  procès-verbaux  rappellent  l'observation 
du  silence  : 

«  Les  prieure  et  sous-prieure  seront  tenues  de  visiter 
les  chambres  après  le  coucher,  et  de  prendre  garde  d© 
ne  laisser  aucune  religieuse  parler  à  qui  que  ce  soit, 
ce  temps  passé,  notamment  aux  grilles,  que  nous 
voulons  leur  être  interdites  du  tout  à  huit  heures  du 
soir...  Le  silence  s'observera  conformément  à  notre 
règle,  sans  qu'il  soit  permis  d'entrer  es  chambres  les 
unes  des  autres,  sans  permission  (2). 

»  Les  religieuses  qui  auront  besoin  de  parler  dans 
leurs  cellules  ne  fermeront  point  la  porte  sur  elles  et 
éviteront  toutes  les  partialités  et  factions  secrètes  qui 
pourraient  causer,  dans  le  monastère,  la  désunion  des 
esprits  et  la  ruine  totale  de  la  charité  (3)  ». 

Le  vœu  de  pauvreté  y  est  aussi  rappelé  : 

«  N'auront  aucune  chose  de  péculier  ou  particulier 
à  elles,  mettront  tout  en  commun  (4). 

»  Nous  deflendons  étroitement  à  aucime  religieuse 
de  donner  ou  recevoir  quoi  que  ce  puisse  être  sans  une 
permission  écrite  de  leur  supérieure. 

»  Les  religieuses  ne  pourront,  sans  blesser  le  vœu 
de  pauvreté,  garder  de  l'argent  ou  en  dépenser  pour 

(1)  Viaite  du  15  septembre  1640. 

(2)  Id. 

(3)  Visite  da  2  jaiUet  1671. 

(4)  Visite  dn  5  juin  1615. 


—  342  — 

elles-mêmes  à  leurs  volontés,  pour  leurs  nécessités 
personnelles  ;  nous  ordonnons  que  tout  ce  qu'elles 
recevront  sera  mis  entre  les  mains  de  la  supé- 
rieure (1)  ». 

L'ordre  des  dignitaires  de  l'abbaye  est  ainsi  établi  : 

Madame  labbesse,    la    grande-prieure,    la   sœur 

chantre,  la  sous-prieure,  la  sous-chantre,  la  secreste 

(sacristine),  d'après  l'acte  de  fondation  de  la  chapelle 

de  Notre-Dame  de  Pitié,  en  1517  (2). 

La  liste  complète  des  Bénédictines  de  Notre-Dame 
serait  du  plus  haut  intérêt  ;  nombre  de  familles  niver- 
naises  seraient  heureuses  d'y  voir  figurer  leur  nom, 
comme  un  titre  d'honneur.  Quelle  tâche  laborieuse  et 
diflBcile  !  Aussi  mes  recherches  seront-elles  circons- 
crites dans  les  limites  du  commencement  du  xvii*  siècle 
jusqu'au  commencement  du  xviii®. 


Liste  des  Bénédictines  du  XVII«  siècle. 

Le  8  janvier  1601,  faisaient  profession  Marie  et 
Louise  de  La  Rivière,  qui  avaient  pris  l'habit  en 
1594  (3).  Leur  mère,  femme  d'Hubert  de  La  Rivière, 
s'engage,  le  10  juillet  suivant,  à  payer,  pour  chacune, 
20  livres  de  pension  annuelle  (4). 

Le  14  janvier,  Françoise  Roy  prononçait  ses  vœux 
en  présence  de  dix-neuf  religieuses  professes.  L'acte 
notarié^  où  nous  lirons  leur  nom,  retrace  le  détail  de 
cette  cérémonie  religieuse  d'une  manière  si  vivante  et 
si  pleine  d'intérêt  que  sa  reproduction  intégrale  trou- 

(1)  Visite  du  20  juin  1686. 

(2)  Voir  à  Tannée  1517,  Notice  de  Fabbe^se  Jeanne  de  Bourgoing, 

(3)  Archives  de  la  Nièvre.  Pièces  provenant  du  château  de  Chassy  en 
Morvan. 

(4)  Inventaire  de  Marottes^  page  760. 


—  343  — 

vera   grâce  et  môme   gratitude  de  la  part  de  tout 
lecteur  : 

«  Le  dimanche,  14«  jour  de  janvier  1601,  environ 
Ilieure  de  dix  heures  du  matin,  dans  Téglise  abatiaile 
de  Nostre-Dame  de  Nevers,  ordre  de  Sainct  Benoist, 
au  cœur  d'icelle  église  où  les  religieuses  ont  accous- 
tumé  chanter  et  se  tenir  durant  le  divin  office,  par 
devant  Révérente  Dame  Madame  Françoise  de  Fon- 
tenay,  abesse,  assistée  de  dames 
Anthoinette    de    Serre,    Claude  de  Gamaches  (1), 

prieure,  Gabrielle  Damas, 

Françoise  AflEouard,  Henriette  Andréas, 

Marguerite  de  Mussy,  Françoise  Moquot, 
Anthoinette  Destrapes,  Gabrielle  Desjours, 
Gabrielle  du  Chastel,  Guillemette  Gascoing, 

Ozanne  de  Boni,  Françoise  de  Babute, 

Roberte  de  Charry^  Marie  de  La  Rivière, 

Jehanne  de  Lucenay,  Louise  de  La  Rivière , 

Gilberte  Aulbouer, 
toutes  religieuses  professes,  s'est  présentée  sœur  Fran- 
çoise Roy,  novice  de  lad.  abaye,  qui,  très  humblement, 
suplye  madicte  dame,  avecq  le  gré  de  toute  la  congré- 
gation, la  recepvoir  à  profession  et  vœux,  et  à  laquelle 
madicte  dame  a  faict  plusieurs  exhortations,  affin 
qu'elle  eust  à  bien  adviser  ad  ce  qu'elle  avoit  à  faire, 
et  elle  recommander  à  Dieu.  Lad.  Dame  a  faict  les 
prières  accoustumées  et  lad.  Françoise  Rqy  a  persisté 
à  suplyer  et  très  instamment  requis  lad.  Dame  d'icelle 
abaye  recepvoir  à  lad.  profession;  sur  quoy,  lad. 
Dame  a  requis  ses  dites  religieuses  sy  elles  ont  congneu, 
par  la  conversation  que  lad.  Françoise  Roy  affecte 

(i)  On  s'étonnera  qne  Claude  de  Gamaches,  coadjutrice  de  Tabbeise 
Françoise  de  Fontenay,  ne  soit  pas  nommée  immédiatement  après 
Fabbesse;  cette  religieuse,  citée  comme  «  un  modèle  d*unerare  humilité  », 
ne  vient,  dans  cette  pièce,  qu'à  son  rang  d'ancienneté  de  profession. 


-  344  — 

avec  elles,  drez  et  depuis  six  ans,  et  plus  mesme, 
qu'elle  a  esté  receue  et  pris  l'habit  de  novice  et  demeuré 
avecq   elles,    que   icelle  Françoise  Roy    aye  bonne 
volonté  et  affection  à  ladicte  religion,  et  sy  elle  est 
propre  pour  porter  le  faix  d'icelle  religion  ...  (1)  les- 
dictes  sœurs  ont  unanimement   raporté  ...honneste 
femme  Jehanne  de  Corbigny,  femme  de  honorable 
homme  Martin  Roy,  licenciées  lois,  advocat  fiscal  au 
bailliage  et  pairie  de  Nivernois,  père  et  mère  de  lad. 
Françoise  Roy,  et . . .  honorable  homme  Pierre  Magnien, 
demeurant  à  ...  nobles  hommes  M"*  Gilles  Duplessis, 
conseiller . . .  Hugues  et  Laurent  Thonnelier,  marchands 
à  Nevers  ;  honorable  homme  Guillaume  Bernard,  apo- 
ticaire,  demeurant  à  Nevers,  tous  parents,   alliés  et 
amis  de  lad.  Françoise  Roy  ;  tous  lesquels  dessusdicts, 
mesme  lad.  Jehanne  de  Corbigny,  mère  de  lad.  Fran- 
çoise Roy,  en  vertu  de  procuration  spécialle  dud. 
M"  Martin  Roy,  son  mary,  cy  après  incérée,  après 
serment  qu'ils  ont  preste,  ont  juré  et  affirmé  que  lad. 
Françoise  Roy  a  17  ans  passés  et  accomplis,  et  le 
scavent  lesd.  Martin  Roy,  comparant  par  lad.  dame 
Jehanne  de  Corbigny,  de  son  chef,  parce  que  lad. 
Françoise  Roy  est  leur  fille,  et  quant  aux  aultres,  ont 
dict  le  scavoir  par  la  fréquentation  qu'ils  ont  eue  en  la 
maison  dud.  Martin  Roy,  comme  ses  bons  parents  et 
amis  ;  et  les  choses  ainsy  raportées,  après  que  lad. 
Françoise  Roy  a  renoncé  à  tous  droitz  paternels  et 
maternels  et  tous  aultres  droitz,  quy  luy  pourroient 
échoir  par  successions,  et  que  lad.  Jehanne  de  Cor- 
bigny, en  vertu  de  sa  procuration,  a  promis  continuer 
le  payement  des  pensionts,  par  led.  Roy,  son  mary,  et 
elle,  promises  &  lad.  Françoise  Roy,  par  contract  du 


(i)  Les  intervalles  marqués  par  des  points  indiquent  des  lacunes  dans 
le  manuscrit  rongé  par  Thumidité. 


-  345- 

24  décembre  1595;  lequel  contract,  en  tant  que 
besoing  seroit,  ils  ont  rattifyé  et  rattifyent  par  ces 
présentes.  Lad.  Dame  (abbesse)  a  ordonné  que  lad. 
Françoise  Roy  seroit  receue  et  icelle  a  receu  lad.  pro- 
fession ;  et  ce  faisant,  lad.  sœur  Françoise  Roy  a  promis 
et  faict  es  mains  de  Mad.  Dame  les  vœux  de  chasteté, 
pauvreté  et  obédience  à  la  manière  accoustumée,  et 
estant  debout,  a  leu  à  haulte  et  intelligible  voix  les 
motz  de  sa  profession,  dont  la  teneur  s'ensuict  :  «  In 
»  nomine  Domini  Jesu  ChristL  Amen.  Moi,  sœur 
»  Françoise  Roy,  promets  la  stabilité  et  conversion 
»  de  mes  mœurs  et  obédience  selon  la  règle  de  Mon- 
»  sieur  sainct  Benoist,  devant  Dieu  et  ses  saincts,  en 
»  l'abbaye  de  Nostre-Dame  de  Ne  vers,  faicte  et  fondée 
31  en  l'honneur  de  la  glorieuse  Vierge  Marie,  en  pré- 
))  sence  de  très  révérente  Dame  Abesse,  Madame 
»  Françoise  de  Fontenay.  En  foy  de  quoy,  je  signe  de 
»  ma  main  les  jour  et  an  susdicts  (1)  ».  Ce  faict^  a 
esté  chanté  Vent  Creator,  et  a  icelle  Françoise  Roy, 
en  signe  d'amitié  et  fraternité  en  Jésus-Christ,  esté 
baizée  par  lad.  Révérente  Dame  et  par  toutes  les 
religieuses  de  lad.  abaye  ;  et  a  esté  faict  tout  ce  que 
dessus,  en  présence  et  du  consentement  de  lad.  dame 
Jehanne  de  Corbigny,  mère  de  lad.  Françoise  Roy  ; 
mesme  lad.  Françoise  Roy  a  l'authorité  qui  pour  ce 
faire  luy  a  esté  baillée  par  lad.  dame  Jehanne  de 
Corbigny  et  laquelle,  en  vertu  de  la  procuration  de 
son  mary  et  encore  de  son  chef,  l'a  authorisée  et  l'au- 

(i)  Dans  d'autres  monastères  de  Bénédictines,  notamment  à  Fontevrault, 
les  vosuz  se  prononçaient  en  latin  :  Ego^  soror  AN,  promitto  stabUUct- 
teni  meam  et  conversionem  morum  meorum  et  obedientiam  secundum 
regulam  Sancti  Bénédictin  coram  Deo  et  sanctis  ejus,  in  hoc  loco 
constructo  in  honore  salvatoris  mundi  sanctœque  Genitricis  Marm  et  in 
prœsentia  lU.  cLbboHssœ. 

Cette  formule  la  professe  la  lisait,  la  signait,  puis  la  déposait  sur  rautel. 
{VoyageM  liturgique»  en  France,  par  le  sieur  Mdéon,  page  113). 


-^  346  - 

thorise,  comme  aussy  en  la  présence  de  noble  homme 
Henri  Bolacre,  licencié  es  lois^  lieutenant-général  au 
bailliage  et  pairie  de  Nivernois,  bailli  des  terres  et 
juridiction  temporelle  desd.  dames,  honorable  homme 
et  sage  maistre  Jacques  Moquot,  aussy  licencié  es  lois, 
advocat  aud.  bailliage  et  pairie,  procureur  fiscal  desd. 
dames  en  leurs  dictes  terres,  justice  et  seigneurie, 
noble  homme  M'*  François  Dubrocq,  seigneur  du 
Nozet,  commissaire  ordinaire  des  guerres,  noble  Oli- 
vier, seigneur  d'Arraux,  noble  seigneur  Paul  de 
Guillemin,  escuyer,  seigneur  de  Molle,  Estienne  Le 
Villain,  marchand  à  Nevers,  noble  Guillaume  Rapine, 
assesseur  au  bailliage  et  pairie  de  Nivernois,  noble 
Gui  Rapine,  seigneur  de  Boisvert,  recepveur  des  aydes 
et  tailles  en  Télection  de  Nivernois,  demeurant  à 
Nevers,  et  plusieurs  aultres  en  grande  multitude,  de 
Tautre  cousté  du  treillis  de  fert,  lequel  a  esté  à  ceste 
fin  tenu  ouvert  pendant  lesd.  cérémonies  et  la  courtine 
retirée  de  devant  iceluy  ». 

Ont  signé  :  F.  de  Fontenay,  Jeh.  de  Corbigny, 
P.  DE  Guillemin,  seigneur  de  Molle  ;  s' Fran- 
çoise Roy,  L.  Thonnelier,  Rapine,  Bernard, 
H.  Thonnelier,  Le  Villain,  Magnien,  Moquot, 
G.  Berthelot,  Simonin,  Rapine,  Bolacre  (1). 

Des  signatures  sont  illisibles  et  d  autres  ont  disparu 
dans  la  partie  du  manuscrit  rongé  par  l'humidité. 

Le  récit  détaillé  de  cette  profession  est  pour  notre 
sujet  du  plus  haut  intérêt  :  il  nous  semble  assister  à  la 
cérémonie,  voir  Madame  TAbbesse,  la  crosse  à  la 
main,  interroger  et  exhorter  la  novice;  celle-ci  joyeuse 
prononcer  la  formule  des  vœux  ;  sa  mère  en  larmes, 
ses  parents  et  amis  tout  émus  ;  enfin  la  nouvelle  reli- 

(i)  Minutes  PeUé,  14  janvier  16(M. 


—  347  - 

gieuse  recevoir  le  baiser  fraternel  de  Madame  l' Abbesse 
et  de  toute  la  communauté. 

Nous  désirions  particulièrement  connaître  les  noms 
et  le  nombre  des  religieuses  à  cette  époque,  aussi  bien 
que  la  cérémonie  religieuse  de  la  profession  ;  nous 
voilà  pleinement  satisfaits  sur  ces  différents  points  ; 
elles  étaient  donc  alors  vingt  professes,  novices  et 
converses  non  comprises. 

La  plupart  des  vœux  sont  conservés  aux  Archives 
de  la  préfecture  ;  à  laide  de  quelques  autres  docu- 
ments, j'espère  que  la  liste  des  religieuses  sera 
complète,  ou  à  un  très  petit  nombre  d'omissions  près. 

Jusqu'au  mois  d'août  1607,  il  ne  semble  y  avoir 
qu'une  seule  nouvelle  professe  : 

Marie  du  Rut. 

C'est  r  «  extrait  mortuaire  de  dame  Françoise  de 
Fontenay,  vivante  abbesse  du  couvent  et  monastère 
de  Notre-Dame  »,  qui  nous  fournit  son  nom  : 

«  Le  mardy,  21®  jour  du  mois  d'aoust  1607,  sur  les 
huict  heures  du  matin...  Dame  Madame  Claude  de 
Gamaches,  abbesse...  convoque  la  commimauté  au  son 
de  la  cloche  dans  le  chapitre.  Furent  présentes  reli- 
gieuses Dames,  Sœurs  Anthoinette  de  Serre,  Françoise 
Affouard,  Marguerite  de  Mussy  dicte  du  Miage, 
Anthoinette  Destrappes,  Gabrielle  du  Chastel,  Ozanne 
de  Bonny,  Françoise  Moquot,  Henriette  Andréas, 
Guiîlemette  Gascoing,  Gabrielle  Desjours,  Françoise 
de  Babutte^  Marie  de  La  Rivière,  Françoise  Roy  et 
Marie  du  Rut,  toutes  religieuses  dudict  couvent... 
Madame  l'Abbesse  leur  annonce  que  ledict  jour,  sur 
l'heure  de  minuict,  il  avoit  pieu  à  Nostre  Seigneur 
appeler  à  sa  part  de  retraict  de  ce  monde  défunte 
dame  Madame  Françoise  de  Fontenay,  vivante  abbesse 
dudict  couvent  (1)  »• 

(1)  Archives  de  la  préfecture,  H,  960,  n*  4. 


-  348  - 

Ici^  un  intervalle  assez  notable  de  quatre  années, 
sans  aucune  profession. 

16. . .  Anne  de  Gamaches. 

Elle  était  sœur  de  Tabbesse  Claude  de  Gamaches. 
Georges  de  Gamaches,  né  en  1551,  de  François  de 
Gamaches  et  de  Philippe  du  Puy,  eut  deux  fils  et  trois 
filles  :  Jeanne,  qu'il  maria  ;  Claude,  abbesse  de  Notre- 
Dame,  et  Anne,  religieuse  au  même  lieu  (1). 

1611. 17  juillet.  Vœux  de  Louyse  Damas. 

1613,  38  juillet.  Vœux  de  sœur  Anne  Rapine ,  du 
diocèse  de  Nevers. 

1616,  7  février.  Vœux  de  Jeanne  Desprez,  du  dio- 
cèse de  Nevers. 

16S0,  9  août.  Vœux  de  Jeanne  Del&ge,  de  la  paroisse 
de  Saint-Côme  de  Paris. 

1622,  22  mai.  Vœux  de  sœur  Anne  Olivier,  de  la 
paroisse  de  Saint-Pierre-le-Rond,  du  diocèse  de  Sens. 

1622,  5  juin.  Vœux  de  sœur  Geneviève  de  Brienne, 
de  la  paroisse  de  Saint-Pierre-aux-Bœufs,  du  diocèse 
de  Paris. 

1622,  5  juin.  Vœux  de  sœur  Laurence  Maublanc,  de 
la  paroisse  de  Saint-Laurent  de  Verneuil,  du  diocèse 
de  Nevers. 

1622,  22  juin.  Vœux  de  sœur  Marguerite  DoUet,  du 
diocèse  de  Nevers. 

1631,  18  mai.  Vœux  de  sœur  Gabrielle  Andrault, 
de  la  paroisse  de  Saint-Pierre  de  Langeron,  du  diocèse 
de  Nevers. 

1635. 18  novembre.  Vœux  de  sœur  Claude  Sirot,  de 
la  paroisse  de  Saint-Laurent  de  Nevers. 


(1)  Mémoire»  de  la  Société  des  Antiquaires  du  Centre  (annéas  1886-87), 
généalogie  des  Gamaches. 


-  340  - 

1638,  t  (1)  Anna  Sallonnier  est  décédée  le  22  sep- 
tembre (2). 

1640,  29  avril.  Vœux  de  sœur  Marie  Duplès,  native 
de  la  paroisse  Saint-Martin  de  Nevers. 

1644.  f  Claude  de  Paris  est  décédée  le  21  novem- 
bre (3). 

1646.  t  Claudine  Raphatin  est  décédée  le  27  jan- 
vier (4). 

1646, 4  février.  Vœux  de  sœur  Léonarde  des  Gentils, 
native  de  a  Lamna  »,  paroisse  de  Saint- Aignan,  du 
diocèse  d'Autun. 

1647.  t  Sœur  Françoise  de  Pontalier,  dite  de  Chas- 
tillon,  est  décédée  le  17  mai  (5). 

1648.  t  Sœur  Georgette  de  Quoi,  alias  de  Lille,  est 
décédée  le  12  avril  (6). 

1648.  t  Madame  de  Thianges^  religieuse,  est  décédée 
le  14  août  (7). 

1653,  9  février.  Vœux  de  sœur  Marie  Corade,  de  la 
paroisse  de  Saint-Arigle  de  Nevers . 

1653,  28  février.  Vœux  de  sœur  Anne  Bouzitat,  de 
la  paroisse  Saint- Jean  de  Nevers. 

1654.  t  Marie  Bélanger  est  décédée  le  7  janvier  (8). 
1654, 8  février.  Vœux  de  sœur  Jeanne-Françoise  des 

Crots,  du  diocèse  d'Autun. 
1654.  t  Marie  Dubroc  est  décédée  le  12  octobre  (9) . 


(1)  Le  signe  particulier  f  précède  le  nom  des  religieuses  à  la  date  de 
lear  décès,  quand  celle  de  la  profession  fait  défaut. 

(2)  Dernier  obituaire  de  Notre-Dame,  vol.  XIII  du  Bulletin  de  la  Société 
rUvemaite,  p.  191. 

(3)  Archives  paroissiales,  p.  157. 

(4)  Id. 
(5;  Id, 

(6)  Id. 

(7)  Id. 

(8)  Dernier  obituaire  de  Notie-Dame. 

(9)  Id. 


—  350  — 

1657.  t  Marthe  de  Gamaches  est  décédée  le  29  sep- 
tembre (1). 

1659,  22  novembre.  Vœux  de  Anne  Bouzitat. 

Son  acte  de  réception  est  passé  devant  Simon 
Biilaud,  notaire  royal  à  Nevers  ;  elle  y  est  portée 
comme  fille  de  Pierre  Bouzitat,  seigneur  du  Chasnay, 
conseiller  du  roi  et  élu  en  l'élection  de  Nivernois, 
époux  de  Françoise  Gascoing...  Avec  plusieurs  mem- 
bres de  la  famille^  ont  signé  :  Gabrielle  de  Langeron, 
abbesse  ;  sœur  Bolacre,  prieure  ;  sœurs  Blanchefort , 
Anne  Rapine,  J.  d'Armes,  Seigneur,  sœur  Anne 
Bouzitat  (2). 

Sœur  Bolacre,  prieure;  sœur  Blanchefort,  sœur 
J.  d'Armes,  sœur  Seigneur  ont  fait  profession  à  des 
dates  inconnues. 

Sœur  Anne  Rapine  ne  doit  pas  être  celle  qui  a  pro- 
noncé ses  vœux  en  1613. 

1663.  f  Françoise  Duret  est  décédée  le  15  octobre  (3). 

1665,  25  octobre.  Vœux  d'Anne  Gousset,  de  la 
paroisse  de  Saint-Martin  de  Nevers. 

1666,  31  janvier.  Vœux  de  Claude  Duchon,  de 
Neuvy-le-Barrois,  du  diocèse  de  Nevers. 

1681,  26  octobre.  Vœux  de  Claude  Brisson,  de  la 
paroisse  Saint-Laurent  de  Nevers. 

1682,  14  septembre.  Vœux  d'Anne  Pérude,  de 
Nevers. 

1688,  28  novembre.  Vœux  de  Françoise  Brisson,  de 
la  paroisse  Saint-Laurent  de  Nevers  (4). 

Un  acte  important  de  1704  contient  un  nombre 
relativement   considérable  de  religieuses  dont  nous 

(1)  Dernier  obituaire  de  Notre-Dame. 

(2)  Minâtes  BiUaud. 

(3)  Dernier  obituaire  de  Notre-Dame. 

(4)  Archives  de  la  préfectare,  série  H,  n»  350,  liasse  des  professions  de 
{i^otre-Dame. 


—  351  - 

voyons  le  nom  pour  la  première  fois  et  qui,  par  consé- 
quent, ont  fait  leur  profession  à  une  date  indéter- 
minée. —  Cet  acte,  signé  à  Versailles  par  le  Roi,  le 
1®'  novembre  1704,  est  le  brevet  accordé  par  Louis  XIV 
à  Marie-Charlotte  de  Lévy  de  Charlus,  religieuse  pro- 
fesse de  Tabbaye  de  Saint-Menoux ,  de  Tordre  de  saint 
Benoit,  par  lequel  il  lui  fait  don  de  l'abbaye  de  Notre- 
Dame  de  Nevers,  qui  vaque  par  le  décès  de  dame 
Marie-Louise  Andrault  de  Langeron.  La  communauté 
donna  son  consentement  pour  cette  réception;  ont 
signé  : 

Léonardede  Lucenay,  prieure;  Jeanne  Bolacre  (1), 
Etiennette  Brisson,  Claire  Dupleix,  Marie  Corade, 
Jeanne  des  Crots  d'Uchon,  Emée  Gascoing  de  la 
Belouze,  Catherine  Andrault  de  Maulevrier,  Hu- 
guette  Gousset,  Gabrielle  de  Richecourt,  Jeanne 
Moquot,  Claude  des  Crots  d'Uchon,  Marguerite 
Sallonnyer  de  Pouilly,  Marie  Pérude,  Jeanne  Duguet, 
Marie  de  Bèjse,  Françoise  Olivier  du  Monceaux  (2), 
Marie  Vilaine  de  Givry,  Claude  Brisson,  Anne 
Pérude,  Marie-Claude  Popillon  du  Ryau,  Margue- 
rite de  Bèse  de  Vaivre,  Antoinette  Litaut,  Jeanne 
Ruby,  Claude  Bouzitat,  Gabrielle  Brisson,  Fran- 
çoise Gascoing  et  Radegonde  Carpentier  de  Mâ- 
chez (3). 

Ces  sœurs  sont  nommées  par  rang  d'ancienneté  ;  dès 

(1)  Les  noms  en  italique  désignent  les  sœurs  non  encore  nommées  et 
dont  Tacte  de  vœux  est  perdu. 

(2)  16S4,  !•"  février.  Création  de  pension  viagère  de  80  livres  par  an^ 
payable  à  chacun  15*  jour  du  mois  de  mars  par  dame  Marie  Gascoing, 
veuve  de  Guillaume  Olivier,  écuyer,  seigneur  de  Monceaux,  eu  faveur  de 
dame  Françoise  Olivier,  sa  fille,  religieuse  professe  au  couvent  de  Pabbaye 
Notre-Dame  ;  et  après  le  décès  de  lad.  dame  Marie  Gascoing,  sera  lad. 
dot  payée  par  ses  autres  enfants  ou  Iiéritiers^jusqu^au  décès  de  lad.  dame 
Olivier.  (Minutes  Taillandier). 

(3)  Archives  de  la  Nièvre,  H,  360,  n«  5. 


—  352  — 

lors,  Tépoque  approximative  de  leur  profession  se 
trouve  toute  indiquée  par  la  place  qu'elles  occupent 
entre  d'autres  religieuses,  dont  on  connaît  la  date  de 
vœux. 

Le  !•'  novembre  1704,  la  communauté  se  compose 
donc  de  trente-deux  religieuses  professes,  y  compris 
la  Révérende  Mère  Abbesse. 

Peut-être  aurait- on  désiré,  pour  chaque  religieuse, 
un  mot  de  sa  famille  et  ses  armoiries  ?  —  Sauf  quatre 
ou  cinq  exceptions,  V Armoriai  du  Nivernais j  de 
M.  de  Soultrait,  et  V Inventaire  de  l'abbé  de  Marolles 
fournissent  la  matière  de  notes  intéressantes  :  les 
sources  principales  sont  indiquées  au  lecteur  qui 
voudra  se  donner  la  peine  de  faire  des  recherches 
généalogiques. 

Les  quatre  feuilllets  qui  nous  restent  du  «  Dernier 
obituaire  de  l'abbaye  Notre-Dame  de  Nevers  (1)  » 
contiennent  aussi  des  noms  de  religieuses  converses, 
de  novices  et  de  Pères  confesseurs  ;  nous  y  relevons 
seulement  ceux  qui  appartiennent  au  xvu^  siècle  : 

f  Anne  Grimouard,  converse,  décédée  le  12  jan- 
vier 1629. 

f  Marie  CoUin,  converse,  décédée  le  23  décem- 
bre 1631. 

f  Jeanne  Renard,  converse,  décédée  le  29  décem- 
bre 1631. 

f  Jeanne  Niodot,  converse,  décédée  le  22  décem- 
bre 1683. 

f  Marie  Bertier,  converse,  décédée  le  10  octobre  1684. 

f  Madeleine  Bolacre,  non  encore  professe,  décédée 
le  8  octobre  1641. 


(1)   Ûernier   obituaire  de  Tabbaye  Notre-Daise,   p.  191)  3«  Tolume, 
9*  série  du  Bulletin  de  la  Société  nioemaiie. 


--  353  — 

f  Anne  de  Fontenay,  non  encore  consacrée  à  Dieu, 
décédée  le  6  janvier  1654, 

f  Le  3  octobre  1664,  s'est  éteint  dans  le  Seigneur  le 
R.  P.  Coudray,  religieux  profès  bénédictin  de  l'abbaye 
Saint- Vincent,  delà  congrégation  de  Chezal-Benoît, 
qui  fut  pendant  de  longues  années  confesseur  de  ce 
monastère  de  Sainte-Marie  de  Ne  vers. 

f  Le  15  octobre  1673,  est  décédé  Père  Antoine 
Astier,  religieux  de  saint  Benoît,  confesseur  de  ce 
monastère. 

fLe?  janvier  1688,  est  décédé  Jean  Vellard  (?), 
confesseur  de  cette  maison. 


*  • 


Nous  ne  pouvons  passer  sous  silence  les  difficultés 
suscitées  à  la  communauté,  à  l'occasion  d'un  Père 
bénédictin,  confesseur  des  religieuses. 

En  temps  ordinaire,  un  ou  deux  Pères  bénédictins 
étaient  chargés  du  ministère  religieux  à  l'abbaye. 

A  un  certain  moment,  contrairement  aux  anciens 
usages,  les  religieuses  eurent  recours  aux  Pères  Jaco- 
bins, aux  Bénédictins  de  Saint-Etienne,  aux  Carmes 
ou  môme  à  des  prêtres  séculiers,  pour  la  charge  de 
confesseur  de  leur  communauté  ;  ainsi,  le  15  décem- 
bre 1721,  fut  inhumé,  dans  l'église  de  Saint-Sauveur, 
maître  Charles  Guyot^  prêtre,  aumônier  des  dames  de 
l'abbaye...  (1). 

Plusieurs  fois,  il  s'éleva  des  difficultés  entre  les  curés 
de  Saint-Genès  et  les  religieux  desservant  le  monas- 
tère ;  les  curés  prétendaient  que  les  Pères,  dans  des 
questions  mal  définies,  empiétaient  sur  les  droits 
paroissiaux  ;  l'Official  tranchait  le  cas  et  tout  était  dit. 

(1}  Archives  paroissiales,  p.  170. 
T.  IX,  3*  série.  ^ 


—  354  - 

Mais,  en  1643,  une  parole  du  Père  de  Bournon^  Béné- 
dictin, fut  le  point  de  départ  d'une  grosse  querelle 
entre  l'évéque,  messire  Eustache  de  Chéry,  et  Tabbaye  ; 
le  Père  de  Bournon  fut  vivement  malmené. 

Voici  les  faits  ;  c'est  un  baptême  qui  mit  le  feu  aux 
poudres  :  «  Un  artisan  de  la  ville  (Guillaume  Thii- 
loux,  entrepreneur  et  tailleur  de  pierre,  qui  travaillait 
pour  le  couvent),  pria  Madame  l'Abbesse  de  tenir  sur 
les  fonts  le  fils  ou  la  fille  qui  lui  naîtrait.  Il  avait  fait 
auparavant  la  même  prière  à  Monseigneur  TEvôque, 
qui  lui  avait,  dit-il,  accordé  cette  faveur,  &  la  condi- 
tion que  Madame  TAbbesse  serait  marraine.  Cette 
sainte  fille  promet  et  s'engage.  Sur  ces  entrefaites,  le 
Père  arrive  à  la  grille  (au  parloir),  apprend  ce  qui  se 
passe,  et  en  présence  de  cet  artisan  :  «  Peut-être,  dit- 
il,  n'est-ce  pas  un  crime  de  tenir  un  enfant,  mais 
enfin.  Madame,  les  saints  décrets  vous  le  défendent  ». 
Cependant  Madame  l'Abbesse  considéra  qu'en  révo- 
quant sa  parole,  elle  attirerait  sur  le  Père  l'indignation 
de  Monsieur  l'Evêque,  déjà  mal  disposé  à  son  égards 
et  maintint  sa  promesse. 

»  Le  baptême  se  fit  donc  le  lendemain,  à  la  grille 
de  l'église  de  l'abbaye,  portes  ouvertes,  cloches  son- 
nantes. Toute  la  ville  y  accourt,  et  prend  part  à  cette 
réjouissance,  à  ce  spectacle  :  mais  trois  ou  quatre 
religieuses  seulement  furent  présentes;  toutes  les 
autres  firent  conscience  d'assister  à  cette  cérémonie. 
Cela  déplut  à  Monsieur  l'Evêque  qui  sçavait  d'ailleurs 
la  cause  de  ce  scrupule...  et  il  ne  put  voir  sans  dépit 
que  cette  éclipse  malheureuse  eust  comme  troublé 
toute  la  pompe  de  ceste  f este  » . 

La  disgr&ce  du  confesseur  s'en  suivit  et,  sur  des 
prétextes,  il  fut  inquiété  et  mis  dans  la  ftfifion  de 
l'oflScialité,  puis  élargi. 
L'illustre  avocat  Patru,  alors  dans  toute  sa  gloire, 


—  355  - 

plaida  cette  affaire  devant  le  Grand  Conseil,  les  âO  et 
21  juin  1644,  «  pour  les  religieuses,  abbesse  et  cou- 
vent de  Notre-Dame,  et  pour  Dom  Jean  Bournon,  leur 
confesseur  bénédictin,  appelant  comme  d'abus,  contre 
Messire  Eustache  de  Chéry ,  évoque  de  Nevers  et  contre 
Jacques  Laroche  et  consorts  (exécuteurs  de  la  justice 
de  Messire  Eustache  de  Chéry)  ;  appel  est  de  la  visite 
que  Monseigneur  de  Nevers  prétend  faire  dans  l'abbaye 
Notre-Dame,  et  la  procédure  extraordinaire'  par  lui 
faite  contre  le  Père  Jean  de  Bournon...  (1)  ». 

L'abbaye  de  Notre-Dame  de  Nevers,  par  le  fait 
même  qu'elle  dépendait  de  la  congrégation  de  Chezal- 
Benolt,  puis  de  Saint-Maur,  participait  à  leur  exemp- 
tion des  ordinaires  (ou  évoques)  :  «  Toute  excommu- 
nication, lancée,  pour  refus  de  la  visite  épiscopale, 
contre  une  des  maisons  affiliées,  sera  nulle  de  plein 
droit  ». 

Le  maintien  d'exemption,  pour  lequel  plaidait 
l'avocat  Patru,  fut  reconnu  par  arrêt  du  Grand 
Conseil  (2). 

Nous  ne  saurions  dire  quelle  fut  la  sentence  sur  la 
demande  que  a  La  Roche  et  de  Vaux  reçussent  la 
punition  qu'ils  méritaient,  pour  avoir  saisi  et  mis 
indûment  en  prison  le  Père  de  Bournon  » . 

Parmentier,  qui  rédigeait  vers  1770  ses  Archives  de 
la  Ville  de  Nevers,  écrit  que  de  son  temps  les  Béné- 
dictines n'étaient  plus  que  13,  ayant  été  plus  de 
80  professes  à  la  fin  du  xvi®  siècle  (3),  —  Ce  chiffre  de 
80  professes  est  certainement  fort  exagéré.  Qu'on 
veuille  bien  se  reporter  à  la  liste  des  professes  en  1601, 
à  l'occasion  des  vœux  de  Françoise  Roy. 

(1)  Œuwes  diverses  de  M.  Patru,  3*  édition,  Paris  1714,  t.  m,  page  55 
et  suivantes. 

(2)  Archives  de  la  viUe  de  Nevers,  t.  I"*,  p.  304. 

(3)  Id.,  p.  385. 


-  356  -• 

I-A  profession  de  sœur  Françoise  Roy,  reproduite 
tn  extenso,  en  tête  de  la  liste  des  religieuses  bénédic- 
tines au  xvii«  siècle,  est  à  la  date  du  14  janvier  1601, 
au  commencement  de  la  première  année  du  xvii®  siè- 
cle ;  on  vient  donc  de  sortir  du  siècle  précédent.  Il 
est  impossible  d'admettre  qu*à  la  fin  du  X  VP  siècle 
le  monastère  de  Nevers  comptait  plus  de  80  pro- 
fesses, alors  que  19  seulement  signent  à  Tacte  des 
vœux  de  la  religieuse  qui  fait  sa  profession,  le 
14  janvier  1601. 

Dans  le  cours  du  xvii®  siècle,  le  nombre  des  pro- 
fesses varie  entre  15  et  30  ;  19,  pour  la  profession  de 
sœur  Françoise  Roy,  en  1601  :  15,  lors  du  décès  de 
Tabbesse  Françoise  de  Fontenay,  en  1607;  dans  les  der- 
nières années  du  siècle,  elles  atteignent  la  trentaine, 
en  nous  basant  sur  le  chiffre  de  32  qui,  en  1704, 
donnent  leur  consentement  écrit  à  la  nomination  par 
le  roi,  de  labbesse  Marie-Charlotte  de  Lévy  de  Char- 
lus.  Dans  son  plaidoyer,  cité  plus  haut,  l'avocat  Patru 
dit  qu'elles  sont  de  25  à  30  au  plus  :  «  Dira-t-on  que 
rintérôt,  que  la  conduite,  la  direction  d'un  monastère 
de  25  à  30  filles,  presse  plus,  soit  quelque  chose  de 
plus  important  que  la  garde,  que  les  besoins  de  tout 
un  diocèse  qui  embrasse  tant  d'églises,  tant  de  peu- 
ple (1)  ?  )) 

Dans  le  xvni®  siècle,  il  est  certain  que  le  nombre  des 
religieuses  déchut  d'une  manière  notable.  Elles  étaient 
28,  abbesse  non  comprise,  en  1704.  En  1746,  elles  ne 
sont  que  12  professes. 

Un  acte  notarié  de  1746  ne  donne  les  noms  que  de 
12  religieuses  :  «  Le  19  janvier  1746,  par  devant  les 
notaires  du  roy,  résidants  en  la  ville  de  Nevers... 
furent  présentes  dame  Madame  Marguerite  Lemaistre, 

(1)  Œuvres  diverses  de  Af.  Patru^  3«  édition,  1714,  t.  lU,  p.  55. 


-  357  - 

abesse  de  l'abaye  royale  Nostre-Dame  de  Nevers, 
Dames  Claude  Bouzitat  de  Seline,  Magdelaine  de 
Montregnaud,  Claude  de  Bèze  de  Courcelle,  Henriette 
Bonnet  Duvidal,  Magdelaine  de  Bèze  de  Vaivre,  Anne 
Brisson  de  Gigny,  Marie-Lucie  de  Montmorillon^ 
Françoise  Gaulme  de  la  Velle,  Anne  Gaudinot  de 
Saint-Martin,  Marguerite  de  Durât  du  Ludais,  et  Marie 

Fautras,    toutes    religieuses  de  lad.  abaye pour 

raison  de  la  vente  et  alliénatiôn  qu'elles  entendent 
faire  du  terrier,  justice  et  dixme  de  Buy  et  Verrières 
et  généralement  de  tous  les  droits  utils  et  honorifiques  à 
elles  appartenant  à  cause  de  leur  dite  seigneurie  scituée 
en  lad.  paroisse  de  Saint-Babil-lès-Saint-Pierre-le- 
Moustier...  sans  en  rien  réserver,  sinon  le  droit  de 
fief  suivant  la  coutume  de  Nivernois.  Bail  emphitéo ti- 
que au  nom  de  Vyau  de  Baudreuil,  advocat  à  la  cour 
de  Saint-Pierre-le-Moustier,  moyennant  la  rente  an- 
nuelle de  150  livres  (1)  ». 

Nous  passons  brusquement  à  Tannée  1790.  La  guerre 
ouverte  est  déclarée  à  la  religion  ;  on  est  à  la  veille 
d'une  persécution  qui  rappellera  celle  des  premiers 
siècles  de  TEglise  ;  dans  les  monastères,  qui  seront 
bientôt  vendus  ou  détruits,  se  présentent  des  commis- 
saires pour  dresser  la  liste  des  membres  de  la  commu- 
nauté. Pour  l'abbaye  Notre-Dame,  nous  trouvons  aux 
Archives  communales  (2)  «  l'état  nominatif  des  ci- 
devant  abbesse  et  religieuses  de  la  ci-devant  abbaye  : 

))  Les  religieuses  de  choeur  sont  au  nombre  de  douze  - 

))  Marie-Claire  de  Saillans,  abbesse,  née  à  Nevers, 
le  7  août  1737  (3)  ; 

»  Jeanne-Lucie  de  Montmorillon, 

(1)  Minutes  Parmentier,  année  1746. 

(2)  Archives  communales  de  la  ville  de  Nevers,  GG,  135. 

(9)  Nous  avons  vu  ailleurs,  par  son  extrait  mortuaire,  qu'elle  est  née 
à  Verbîgny  (Haute-Marne). 


-  358  -- 

>  Françoise  Gaulme  de  la  Velle, 

j)  Anne-Angélique  Gaudinot, 

»  Marie  Vautras, 

»  Marguerite  Marchand  du  Gué  ; 

»  Marguerite  Portepain,  née  le  30  octobre  1730,  à 
Sauvigny  ; 

»  Françoiae-Erneste  de  Bèze,  née  le  11  août  1740  ; 

»  Louise-Barthélémy  de  Lhopitau, 

D  Marie-Anne-Jacquette  des  Champs  de  Saint- 
Léger,  née  à  Pazy,  le  8  août  1730  ; 

»  Madeleine-Françoise  de  Ruez,  née  le  4  novem- 
bre 1754  ; 

»  Madeleine -Françoise-Marie-Geneviève  de  la  Seine. 

»  De  plus,  il  y  a  5  religieuses  converses  ». 

Revenons  au  chiffre  de  13  religieuses  du  temps  de 
Parmentier  ;  il  semble,  d'après  le  sens  de  son  textes 
qu'elles  étaient  13,  converses  comprises,  tandis  qu'à 
la  fin  du  xvm«  siècle  elles  étaient  plus  de  80  professes. 
Comme  professes,  au  xvii'  siècle,  il  ne  nous  semble  pas 
qu'elles  aient  jamais  dépassé  le  chiffre  de  30. 


§  n.  —   LES  PENSIONNAIRES 

Parmentier,  dans  ses  Archives  de  la  Ville  de 
Nevers,  dit  que  «  les  religieuses  n'avaient  pas  de 
pensionnat  (1)  )»• 

—  C'est  une  erreur  ;  des  faits  précis  donnent  à  cette 
assertion  un  démenti  formel.  Les  Bénédictines  avaient 
des  pensionnaires  et  de  deux  catégories  :  des  jeunes 
filles  à  instruire,  et  des  personnes  d'un  âge  plus 
avancé,  qui  se  retiraient  au  couvent  pour  fuir  le  tracas 
du  monde  et  vaquer  en  paix  au  soin  de  leur  salut.   * 

(1)  Archives  de  la  ViUe  de  Nevers^  Parmentier,  tome  I*%  page  895. 


-  359  — 

D abord,  un  mot  seulement  des  pensionnaires 
retraitées. 

c(  Le  19  novembre  1692  a  été  inhumée,  dans  le  lieu 
de  la  sépulture  des  religieuses,  damoiselle  Claude- 
Françoise  Bouzitat,  vivante  pensionnaire  en  ladite 
abbaye,  ladite  damoiselle  décédée  en  présence  de  sa 
sœur  religieuse  dans  la  môme  abbaye  (1)  ». 

Noble  damoiselle  Reine  des  Crots  de  Neufvy,  pen- 
sionnairey  décéda  au  monastère  le  2  septembre  1739, 
à  l'âge  de  soixante-quinze  ans  (2). 

Sans  nous  arrêter  davantage  au  pensionnat  de 
retraite,  nous  nous  proposons  d'entrer  en  plus  de 
détails  au  sujet  du  pensionnat  d'instruction  et  d'édu- 
cation de  jeunes  filles. 

Ce  pensionnat  existait  au  moins  au  commencement 
du  XVI*  siècle.  Le  premier  nom  d'élève  que  nous  trou- 
vons est  celui  de...  Guy  Coquille,  né  à  Decize,  le 
11  novembre  1523  ;  «  il  apprit  à  lire  chez  les  Béné- 
dictines de  Nevers  (3)  »  (cependant  non  comme  pen- 
sionnaire, mais  externe  encore  en  jupons). 

Vers  1572,  Claudine  de  Gamaches,  Agée  de  sept  ans, 
entrait  au  pensionnat  de  l'abbaye  (4). 

1755.  Marie  de  Vannes,   fille  unique  de  Pierre- 

(4)  Archivée  paroisiialei,  abbé  Boutiluer,  page  165.  —  Oansracte  de 
oofuentement  de  la  communauté  à  la  nomination  de  Tabbease  M.  G.  de 
Lévy  de  Charlus  en  1704,  nous  trouvons  deux  religieuses  du  nom  de 
Bouzitat,  Anne  et  Claude;  Anne  fit  profession  en  1653,  et  Claude  beau* 
coup  plus  tard,  puisqu'elle  est  désignée  comme  une  des  dernières  pro- 
fesses. La  pensionnaire  Claude-Frduiçoise  Bouzitat  (je  n*ai  pu  retrouver  le 
registre  des  sépultures  de  l'abbaye  en  ce  qui  la  concerne)  est  sœur  de  Tune 
de  ces  deux  religieuses,  laquelle  ?  i)ës  lors,  il  est  difficile  de  dilie  si  elle 
était  pensionnaire  retroûtée  ou  étudiante  ;  l'indication  de  son  âge,  qui 
trancherait  la  question,  fait  défaut  ;  mais  elle  appartenait  vraisembla- 
blement à  la  catégorie  des  pensionnaires  de  retraite. 

(2)  Sépultures  de  l'abbaye  Notre-Dame. 

(8)  Album  du  Nivemaiêt  tome  II,  page  227. 

(4)  GaUia  Christiana  :  Catalogue  des  Âbbeoses,  Notice  de  l'abbesse 
C.  de  Gamaches. 


—  360  — 

Jacques  de  Vannes,  seigneur  de  Sermoise,  Saint- 
Parize,  Charnoy  et  Vauclaix,  et  de  Françoise  de  Bèze 
de  La  Belouze,  était  élève  au  pensionnat  de  l*abbaye 
Notre-Dame  ;  son  père  écrivait^  à  son  sujet,  dans  une 
lettre  à  M.  de  Carrelet,  président  de  la  Chambre  des 
comptes  : 

«  Charnoy,  le  27  février. 

«...  Nous  VOUS  chargerons  de  faire  mention  de  nous 
à  cette  demoiselle  de  l'abbaye,,  qui  a  si  mal  passé  son 
carnaval.  J'espère  cet  automne  lui  donner  le  bal  à 
Sermoise  (1)  ». 

Elle  devint  l'épouse  de  Louis-Marie-Gabriel-César 
de  ChoiseuU  qui  fut,  peu  après  son  mariage,  nommé 
ambassadeur  près  le  roi  de  Sar daigne. 

Une  pensionnaire  étudiante  resta  au  couvent  jus- 
qu'au moment  de  son  mariage,  qui  fut  célébré  à 
Tabbaye.  Nous  lisons  dans  les  actes  religieux  de  la 
paroisse  Saint-Genès,  année  1784,  au  17  août,  que 
«  Anne  Petit  de  Saint-Georges,  pensionnaire  au  cou- 
vent de  l'abbaye  Notre-Dame,  fille  mineure  de  mes- 
sire  André-François  de  Nanteau,  conseiller  du  roi,  et 
de  dame  Marie  Barbier...,  contracta  mariage  avec 
messire  Claude-Michel,  baron  de  Nuchèze,  chevalier, 
seigneur  de  Sauvage,  Planche,  Vienne  et  autres  lieux, 
et  de  dame  Elisabeth  Deschamps...,  de  la  paroisse 
Saint-Jean  de  cette  ville,  en  présence  de  messire 
François  de  Damas,  écuyer,  doyen  de  la  cathédrale  de 
Nevers  (2)  ». 

Quel  était  le  nombre  des  élèves,  le  règlement,  le 

(1)  Lettre  citée  par  M.  Roubet  dans  sa  Notice  hUtoricUe  iur  Sermoise^ 
page  328, 11*  volume  du  BuUetin  de  la  Société  nivernaise. 

(2)  Registres  paroissiaux  de  Saint-Genés. 


—  361  — 

ff 

programme   des  études?    Malheureusement,    aucun 
document  local  ne  peut  nous  renseigner  à  cet  égard. 

Force  me  sera  de  recourir  aux  visites  du  prieuré  de 
La  Ferté-sur-Yxeure,  relatives  au  pensionnat  {!),  et 
d'en  faire  l'application  à  celui  de  Nevers,  et  môme  de 
butiner  jusqu'à  Bourges,  au  pensionnat  des  Bénédic- 
tines de  Saint-Laurent  (2),  et  peut-être  plus  loin. 

A  La  Ferté,  il  n'existait  pas  de  costume  uniforme 
pour  les  pensionnaires  (3)  ;  à  cet  égard,  une  recom- 
mandation particulière,  qui  vise  la  simplicité  du  vête- 
ment, donne  à  entendre  que  toute  liberté  était  laissée 
aux  parents  de  les  habiller  comme  bon  leur  semblerait, 
en  évitant  la  recherche  et  la  frivolité  :  «  Madame  la 
Supérieure  ne  souffrira  pas  que  les  élèves  portent  des 
fontanges  et  autres  ornements  trop  mondains  (4)  ». 

Les  élèves  n'étaient  pas  soumises  au  régime  sévère 
des  religieuses  :   «  La  cuisine   sera  maigre  pour  la 

(1)  Prieuré  de  La  Ferté-sur-Yxeure ^  par  M.  Guenot. 

(2)  Les  Bénédictines  de  Saint'Laureni  de  Bourges,  édit.  à  Bourges, 
1891. 

(3)  Plusieurs  pensionnats  de  communautés  religieuses  avaient  pour  leurs 
élèves  un  costume  quasi  monacal  se  rapprochant  du  costume  de  l'ordre. — 
Dans  la  Vie  de  la  Révérende  Mère  Camille  de  JésuSy  Carmélite, 
librairie  Poussielgue,  1897,  nous  trouvons  de  curieux  détails  sur  le  costume 
des  pensionnaires  de  la  Visitation  de  Paris. 

En  1757,  Camille  de  Soyecourt,  la  future  Carmélite,  y  fut  mise  en  pen- 
sion à  rage  de  sept  ans  ;  deux  de  ses  sœurs  plus  âgées  Pavaient  précédée 
dans  cette  maison;  les  pensionnaires  portaient  les  cheveux  courts; 
Camille  les  avaient  fort  beaux.  Ce  furent  ses  deux  sœurs  qui  reçurent  la 
redoutable  mission  de  les  couper...  Les  deux  jeunes  filles  firent  tomber  en 
peu  d'instants  les  boucles  tant  aimées  et  les  remplacèrent  par  le  bonnet 
rond  des  pensionnaires.  L'uniforme  consistait  en  un  petit  bonnet  de 
mousseline  avec  voile  semblable  ;  une  robe  noire  fort  simple  et  une  cor- 
delière en  laine  violette,  ornée  de  deux  glands,  nouée  à  la  ceinture.  Ce  qui 
finissait  de  donner  aux  jeunes  pensionnaires  l'aspect  de  religieuses  en 
miniature  était  la  croix  d*argent  un  peu  plus  petite  que  celle  de  Tordre,  qui 
était  suspendue  à  leur  cou.  (Pages  17  et  18). 

(4)  Prieuré  de  La  Ferté,  visite  du  24  septembre  1689. 


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-  362  - 

oommunauté  ;  mais  elle  sera  grasse  pour  les  pension- 
naires et  les  malades  (1)  ». 

Elles  avaient  dans  le  couvent  leur  quartier  spécial  : 
«  Elles  se  retireront  aux  départements  qu'elles  occu- 
paient les  années  précédentes,  sans  qu'elles  soient 
admises  dans  les  lieux  réguliers  à  la  compagnie  des 
religieuses,  deSendant  i  la  prieure  de  recevoir  aucune 
pensionnaire  à  moins  de  cent  livres  de  pulsion  par 
an  (2)  ». 

«  La  sous-prieure  veillera  à  ce  que  les  pensionnaires 
ne  fassent  aucun  bruit  dans  les  lieux  réguliers,  qu'au- 
cune religieuse  ne  leur  fasse  répéter  leurs  leçons  dans 
leurs  cellules  pour  ne  pas  troubler  et  inquiéter  les  voi- 
sines, que  lesdites  pensionnaires  seront  instruites  et 
nourries  dans  leurs  chambres  communes...  et  que 
toutes  soient  couchées  à  môme  temps  que  les  reli- 
gieuses (3)  ». 

A  Nevers,  le  bâtiment  affecté  au  pensionnat  était 
l'aile  du  midi  du  cloître,  tenant  du  levant  au  réfectoire 
des  religieuses  et  du  couchant  aux  remparts  de  la 
ville  ;  l'entrée  et  la  façade  regardaient  les  «  Grands 
Jardins  »,  joignant  les  b&timents  de  la  communauté  et 
en  même  temps  placé  en  dehors  de  la  partie  spéciale- 
ment réservée  aux  religieuses,  il  répond  absolument 
au  vœu  «  des  ordonnances  »  de  La  Ferté  ;  que  les 
pensionnaires  aient  «  leur  département  »,  qu'elles  ne 
fassent  pas  de  bruit  dans  c  les  lieux  réguliers  »  et 
qu'elles  ne  soient  pas  admises  à  la  compagnie  des 
religieuses.  —  De  ce  fait,  la  cour  de  récréation  était  à 
Topposé  du  cloître,  du  côté  des  jardins. 

Il  est  bien  rare  que  dans  un  récit  qui  embrasse  une 

(1)  Prieuré  de  U  Forte,  visite  da  18  décembre  1689. 

(2)  Prieuré  de  La  Ferté,  visite  du  15  septembre  1640. 

(3)  Prieuré  de  J^  Farté>  visite  du  18  septembre  1666. 


-  363  - 

longue  période,  il  ne  se  rencontre,  à  une  certaine  heure, 
quelque  événement  regrettable. 

Un  fait  de  ce  genre  se  produisit,  qui  contrista 
profondément  les  religieuses  :  une  nuit,  quatre  jeunes 
gens  de  la  ville,  de  bonne  famille,  firent,  en  passant 
par  le  cimetière  Saint-Genès,  escalade  de  la  clôture 
pour  s'introduire  au  pensionnat.  Sans  retard,  Madame 
TAbbesse,  Marie-Louise  Andrault  de  Langeron,  remit 
sa  plainte  au  présidial  de  Saint-Pierre-le-Moûtier,  le 
2  décembre  1698(1). 

Il  faut  dire  qu'à  ce  moment  la  surveillance  des  reli- 
gieuses s'était  relâchée  à  l'occasion  de  la  dernière 
maladie  qui  emporta  l'abbesse  Gabrielle  Andrault  de 
Langeron,  tante  de  celle  qui  lui  succéda. 

Le  tribunal,  appréciant  cette  équipée  de  jeunes  gens, 
ne  lui  reconnut  pas,  vu  les  circonstances,  une  bien 
sérieuse  gravité  ;  deux  de  la  bande  étaient  parents  de 
religieuses  de  la  communauté^  et  les  deux  pension- 
naires complices  avaient  aussi  une  parenté  très  rappro- 
chée avec  les  escaladeurs  «  qui,  en  réalité,  étaient  allés 
pour  jouer  aux  cartes  (2)  ». 

Le  pensionnat  était  relativement  grand  ;  il  compre- 
nait toute  l'aile  du  midi  du  cloître,  avec  rez-de-chaussée 
et  premier  étage.  Comptait-il  vingt,  trente  élèves  ou 
plus? 

Vu  les  noms  cités  de  plusieurs  pensionnaires,  aussi 
bien  que  ceux  des  religieuses,  appartenant  pour  la 
plupart  à  de  grandes  familles,  il  est  facile  de  déduire 
que  le  pensionnat  d'éducation  de  Notre-Dame  était 


(1)  Archives  cioUeSj  par  M.  de  Flamarb,  archiviste  de  la  Nièvre,  1. 1*', 
Bp91. 

(2)  Archives  civiles ^  par  M.  de  Flâmare,  archiviste  de  la  Nièvre,  t.  V\ 
(Décharge  des  accusations  et  décrets  de  Saint-Pierre-le-Moùtier,  17  sep- 
tenbre  1700). 


-  364  - 

destiné  aux  jeunes  filles  de  la  classe  noble  et  distin- 
guée de  la  province  du  Nivernois. 

M'étant  adressé,  pour  divers  renseignements,  à 
Madame  la  Prieure  des  Bénédictines  de  Bourges,  je 
fus  servi  à  souhait  par  une  réponse  précise  et  détaillée, 
au  sujet  des  livres  en  usage  dans  leur  pensionnat 
d'avant  la  Révolution  ;  comme  celles  de  Nevers,  elles 
avaient  les  deux  Œuvres  de  la  Retraite  et  de  l* Edu- 
cation des  Jeunes  Filles,  que  d'ailleurs  les  Sœurs 
actuelles  continuent  avec  le  zèle  et  la  distinction  de 
leurs  pieuses  devancières. 

D'anciens  livres  du  pensionnat  de  l'abbaye  bénédic- 
tine de  Saint-Laurent,  conservés  aux  archives  de  la 
maison^  entraient  dans  le  plan  d'études  adopté  ;  entre 
autres,  nous  pouvons  citer  : 

Les  Etudes  convenables  aux  Demoiselles,  compre- 
nant la  grammaire,  la  chronologie,  la  géographie, 
l'histoire,  la  fable  héroïque,  la  fable  morale,  les  règles 
de  la  bienséance  et  un  court  traité  d'arithmétique... 
1761. 

L^  Conduite  pour  bien  faire  la  première  Commu- 
nion, par  l'abbé  H.  L.  P. 

Les  Instructions  pour  la  première  Communion,  par 
l'abbé  Régnauld,  1778. 

Le  Catéchisme  de  Montpellier. 
—  Sur  un  exemplaire  de  la  Première  Communion, 
par  l'abbé  Régnauld,  une  jeune  pensionnaire  niver- 
naise  (de  La  Charité)  a  laissé  trois  inscriptions  ;  la 
première  comme  un  sceau  de  propriété  :  «  Ce  caté- 
chisme de  la  communion  appartient  à  moi,  Camille 
Butet,  2  mars  1790  »  ; 

La  deuxième,  comme  trait  de  son  caractère  vif  et 
enjoué  :  «  Je  descends  en  droite  ligne  du  grand  Romain 
(Camille)  dont  je  porte  le  nom  >  ; 

La  troisième,  comme  reflet  des  sentiments  de  son 


—  365  — 

&me  :  «  Oh  I  toi,  à  qui  le  hasard  fait  lire  ces  mots,  ne 
m'oublie  pas  et  dis  un  Requiescat  in  pace  pour  moi, 
Camille  Butet,  2  may  1790  ». 

a  Camille  Butet  était  de  La  Charité  ;  elle  y  naquit  le 
22  janvier  1776.  La  devise  des  Butet  était  :  «  La  vertu 
mon  but  est  »,  et  leurs  armes  parlantes  ((  un  artichaut 
butté  (1)  ». 


III 


Les  Constructions. 

Après  un  aperçu  sommaire  sur  l'histoire  de  l'abbaye, 
sur  les  personnes  qui  l'habitaient,  il  nous  reste  à 
essayer  d'en  décrire  le  local  et  les  nombreuses  cons- 
tructions. 

Afin  de  rendre  cette  description  moins  monotone  et 
moins  ardue,  je  supposerai  que  nous  visitons  l'abbaye 
de  compagnie  avec  le  lecteur,  et,  comme  il  faut  que 
l'état  des  lieux  corresponde  à  une  date  fixe,  nous 
admettrons  que  la  visite  a  lieu  en  1789. 

Arrivés  devant  la  grande  grille  de  fer  qui  donne 
entrée  dans  la  «  cour  de  l'Abbaye  »,  nous  embrassons 
d'un  coup  d'œil  cette  vaste  cour  bordée  à  droite  d'une 
maison,  d'un  jardin  à  la  suite,  d  une  construction 
indéterminée  ;  à  gauche,  d'une  chapelle,  puis  en 
retrait  de  l'église  abbatiale  surmontée  d'un  campanile 
élancé,  et  contre  laquelle  s'appuie  une  sorte  de  bas- 
côté  flanqué,  plus  près  de  l'abside,  d'une  construction 
en  avancement  ;  au  fond,  une  ligne  de  constructions 
de  hauteurs  inégales  est  percée,  à  peu  près  en  son 
milieu,  d'im  portail  voûté. 

(1)  HUtoire  des  BénécRctines  de  Bourges,  p.  308;  —  à  Bourges,  1891, 


-  366  - 

En  entrant,  à  gauche,  c'est  la  chapelle  de  saint 
Michel^  dont  Tabside  ronde  déborde  dans  la  rue  Saint* 
Genès;  elle  est  orientée  et  ajourée  d'étroites  baies 
romanes.  Les  modillons,  assez  soignés,  représentent 
un  moine,  un  lion  et  différents  animaux.  En  avant  du 
portail,  il  existe  un  escalier  de  cinq  ou  six  marches. 

Le  portail,  en  saillie,  est  formé  de  deux  archivoltes 
très  simples,  en  retrait,  retombant  sur  des  colonnettes 
à  chapiteaux  de  feuilles  d'eau  et  de  palmettes  peu 
fouillées  (1). 

Le  tympan  est  surmonté  d'une  statue  du  patron  de 
la  chapelle,  saint  Michel  terrassant  le  dragon  ;  les  yeux 
de  l'archange  sont  remplis  de  plomb  (2). 

A  droite,  en  face  la  chapelle,  «  la  maison  du  portier 
se  compose,  dans  le  bas,  d'une  tribale  (3),  d'une  écurie, 
cave  auHlessous,  et  au  premier  étage  de  deux 
chambres  à  feu  et  cabinets  (4)  ». 

Le  portier  jouit  aussi  du  petit  a  jardin  contigu  », 
en  descendant  (5). 

Au  bas  du  petit  jardin,  une  construction  nous  tourne 
le  dos  et  a  sa  face  sur  le  jardin  de  l'abbesse  ;  c'est 
«  l'Orangerie,  mesurant  39  pieds  sur  18  de  large,  avec 
un  cabinet  de  15  pieds  carrés  et  cave  voûtée  par 
dessous  (6)  ». 

A  gauche,  faisant  angle  droit  avec  le  bas  de  l'église 
abbatiale^  est  «  le  grand  parloir,  avec  deux  chambres 
à  feu  et  une  tribale  (7)  ». 

A  droite  du  portail  voûté,  «  les  parloirs  avec  neuf 
petites  pièces,  au  rez-de-chaussée,  mesurant  39  pieds 

(1)  D'après  M.  de  Soultrait.  Guide  archéologique  dans  Nevers. 
C2)  Cette  statue  fait  partie  de  la  collection  de  M.  Massillou  Rouget. 
(8)  Ancien  terme  local  signifiant  bûcher  ou  lieu  de  débarras. 

(4)  Arch.  de  la  préf.  Ventes  nationales  n*  30,  22  prairial  an  IV. 

(5)  Fait  partie  de  la  même  vente. 

(6)  Arch.  de  la  préf.  Ventes  nat.  n*  111,  3  messidor  an  IV. 

(7)  Arch.  de  la  préf.  Ventes  nat  n*  396,  23  messidor  aB  IV. 


—  36:;  - 

superficiels^  non  compris  le  portail  ;  au-dessus,  il  y  a 
quatre  chambres  à  feu  et  deux  cabinets  n  ;  les  parloirs 
communiquent  par  a  un  corridor  avec  les  bâtiments 
clostraux  (1)  ». 

Franchissant  le  portail  voûté,  nous  avons  devant 
nous  des  jardins,  entre  les  b&timents  du  cloître  à 
droite,  et  à  gauche  le  logis  de  Tabbesse. 

Au-dessus  du  portail,  regardant  les  jardins,  nous 
voyons  un  écusson  surmonté  de  la  crosse,  dont  le 
pied  dépasse  en  dessous  de  la  pointe  ;  Técu  est  chargé 
de  trois  barils  qui  sont  les  armes  psu'lantes  de  Tab- 
besse  de  Boutillat,  à  qui  est  due  la  reconstruction 
de  la  plus  grande  partie  du-  couvent,  après  un  terrible 
iacendie  arrivé  en  1478. 

Madame  TAbbesse  a  son  logis  séparé  et  en  dehors 
de  la  communauté.  «  Le  bâtiment  de  Tabbesse  consiste, 
au  rès  de  chaussée,  en  ime  cuisine,  et  un  petit  cabinet 
et  ime  tribale  voûtée  ;  au  premier,  en  trois  chambres, 
compris  la  salle  et  deux  cabinets,  grenier  régnant 
au-dessus  ;  en  un  jardin  (au  nord)  attenant  ledit  bâti- 
ment, de  la  contenance  de  sept  huitièmes  de  boisselée, 
en  un  cabinet  d'aisance  qui  joint  Torangerie,  plus  une 
cour  au  devant  du  bâtiment  (au  midi)  (2)  »• 

L'appartement  désigné  sous  le  nom  de  salle,  je 
l'appellerai  salon,  car  c'est  la  chambre  de  réception 
de  Madame  TAbbesse  qui,  pour  lors,  est  Madame 
Marie-Claire  de  Saillans  ;  lea  deux  modestes  cabinets 
sont  ses  appartements  particuliers. 

Du  côté  du  midi,  un  corridor  donne  entrée  au 
salon  ;  du  côté  du  nord,  qui  regarde  le  jardin,  la  pièce 
est  éclairée  de  deux  fenêtres  et  d'une  porte  vitrée  à 
deux  battants,  au  milieu  ;  â  la  porte  correspond  un 

(1)  Ârch.  de  la  préf.  Ventes  nationales  a*  174,  8  messidor  an  IV. 
(S)  Arch.  de  la  préf,  VenI»  nat.  n*  14i,  5  messidor  an  lY. 


-  368  — 

perron  avec  double  escalier  à  rampe  de  fer  pour 
descendre  au  jardin.  On  remarque  une  belle  cheminée 
en  marbre  du  xvii®  siècle.  Le  parquet  en  chêne 
présente  en  long  et  en  travers  des  bandes  de  carrés 
concentriques.  Aux  murs,  quelques  gravures  de  piété 
et  portraits  d'abbesses,  parmi  lesquels  celui  de 
Madame  TAbbesse  actuelle  (1) .  Sur  un  petit  meuble, 
au  milieu  d'objets  divers  de  curiosité,  un  beau  gobelet 
en  verre  porte  les  armes  de  Madame  TAbbesse,  avec 
l'inscription  «  M.  C.  de  Saillans,  abbesse  de  N.-D.  de 
Nevers  »  ;  c'est  un  produit  de  la  fabrique  de  verrerie 
de  M°»e  de  Borniol  (2). 

Du  salon,  nous  admirons,  à  Tangle  nord-ouest  du 
jardin,  la  Porte-du-Croux,  ce  beau  spécimen  de  portes 
de  défense  du  moyen  &ge  ;  cette  tour  contient  les 
archives  du  couvent. 

Nous  revenons,  en  passant  sous  le  portail  voûté 
attenant  aux  parloirs,  dans  la  cour  de  Tabbaye  et  nous 
remontons  dans  la  direction  de  l'église. 

Un  porche  voûté  d'arête,  du  xm^  siècle,  prolongé  à 
droite  d'une  travée  im  peu  plus  large  et  de  la  môme 
époque,  précède  le  portail  roman,  qui  surprend  par 
son  élégance  et  la  richesse  de  son  ornementation. 

Dans  l'ensemble  de  ce  beau  portail  latéral,  nous 
trouvons  un  style  qui  semble  participer  de  deux 
époques. 

La  reconstruction  complète  du  monastère  par  Fro- 
mond  remonte  à  l'année  1121  (3).  L'église  fut  dédiée 
par  ce  même  évoque  à  une  date  non  précisée  (4). 
Le  xu«  siècle,  près  de  son  berceau,  a  conservé  du  siècle 


(1)  Portrait  appartenant  à  M.  le  docteur  Victor  Robert  Saint-Cyr. 

(2)  M.  Tabbé  Boutillier  l'a  décrit  et  reproduit  en  gravure   dans  sa 
Verrerie  de  Nevers, 

(3)  GiLLET,  Annuaire  de  iSOS, 

(4)  GoTiGNON,  CaJtaXogue  des  évêques  de  Nêvers* 


POUTAlt    it  L'AncUnn»  Abha^e?felrt-J)arrit   rut  St  l^*i!tit. 


—  369  - 

précédent  les  formes  archaïques  et  raides  d'ornements 
étoiles^  à  tableaux,  à  zigzag  et  à  damier  (1),  et  déjà  il 
s'essaye  timidement  à  des  contours  plus  souples  et 
plus  harmonieux,  dans  le  semis  des  feuilles,  qui  garnit 
les  gorges  entre  les  colonnettes,  et  dans  l'ébauche  de 
deux  rangs  de  crochets  des  chapiteaux  ;  la  manière  de 
ces  détails  fait  pressentir  le  xiii®  siècle. 

Le  portail  primitif  était  protégé  par  un  auvent  ;  il 
était  en  avant-corps,  dont  le  glacis  reposait  sur  une 
corniche  étoilée,  soutenue  par  cinq  modillons,  repré- 
sentant en  allant  de  gauche  à  droite  : 

Deux  serpents  dressés  et  enlacés. 

Une  tête  humaine, 
•  Un  oiseau  de  proie  tenant  en  ses  serres  un  petit 
oiseau, 

Une  tête  de  chèvre  ou  de  diable  barbu  et  cornu, 

Une  tête  de  femme  avec  bandeau  sur  le  front. 

L'archivolte,  en  plein  cintre,  se  compose  d'une 
série  de  tores  de  dimensions  différentes,  séparés  les 
uns  des  autres  par  de  petits  bandeaux  ou  des  gorges  ; 
Tébrasement  en  est  très  profond  ;  le  tout  porte  sur 
trois  colonnettes  de  chaque  côté,  surmontées  de  cha- 
piteaux de  feuillage  un  peu  à  crochets.  Les  angles  des 
pilastres  entre  les  colonnettes  sont  creusés  en  gorges 
décorées  de  feuilles  de  chêne.  Les  bases  en  sont  apla- 
ties et  reposent  sur  des  pilastres  assez  élevés.  Le 
portail  est  encadré  par  un  tore  qui  forme  une  archi- 
volte et  descend  le  long  des  pieds-droits  sans  solution  de 
continuité. 

Cette  porte  mesure  1  m.  85  d'ouverture  et  2  m.  10  de 

■ 

(1)  Madame  Moncharmont,  propriétaire  de  remplacement  de  Téglise 
abbatiale,  vient  de  faire  don  au  musée  de  la  Porte-du-Groux  de  deux 
tablettes  de  pierre  qui  semblent  des  entablements  de  l'église;  elles 
mesurent  chacune  environ  40  centimètres  sur  12  centimètres  et  portent 
un  échiqueté  de  trois  rangs  sur  quatre  coupé  de  billettes. 

T.  IX;  3*  série.  24 


-  370  — 

diamètre  d'archivolte.  Les  coloûnettes  ont  0  m.  14  de 
diamètre. 

Le  portail  donne  entrée  dans  une  galerie  adossée  à 
l'église  dans  toute  sa  longueur,  de  la  largueur  d'une 
travée  à  gauche,  et  à  droite,  jusqu'à  l'angle  terminal 
de  la  nef.  La  galerie,  de  4  mètres  de  large,  a  16  m.  45 
de  longueur.  Ici,  nous  trouvons  le  mélange  des  xn«  et 
xnr  siècles.  La  partie  de  la  galerie  à  droite  du  portail, 
a  été  réduite  à  trois  travées,  tandis  que  dans  une 
construction  précédente  du  xir  siècle,  il  existait  quatre 
travées. 

Dans  l'arcade  donnant  entrée  à  l'église  abbatiale, 
on  remarque  une  imposte  décorée  de  tableaux  super- 
posés ;  à  droite,  dans  l'arcade  suivante,  les  deux 
impostes  sont  ornées  d'une  série  de  zigzags  en  relief. 
Dans  le  pilier  de  la  troisième  travée  gothique,  adossé 
à  la  nef,  est  adaptée  une  piscine  du  xvn*  siècle  et,  à 
proximité,  dans  le  mur  de  refend,  existe  une  autre 
piscine  présentant  les  mômes  caractères,  encastrées 
peut-être  sans  but  d'utilité,  mais  plutôt  par  motif  de 
conservation  de  ces  objets 

La  galerie  primitive,  du  xii*  siècle,  formait  une  sorte 
de  bas-côté  de  l'église,  dont  les  arceaux  furent  plus 
tard  fermés  en  maçonnerie,  sauf  celui  correspondant 
au  portail,  muni  d'une  porte  à  deux  battants,  pour 
entrer  à  l'église  abbatiale. 

Cette  galerie,  se  terminant  aux  deux  extrémités  à 
angle  droit,  est  éclairée,  à  l'est  et  à  l'ouest,  par  une 
fenêtre  à  arc  brisé  ;  le  mur  de  la  partie  occidentale  est 
percé  d'une  porte,  communiquant  avec  les  bâtiments 
clostraui. 

De  l'autre  côté  de  cette  porte  de  communication 
de  la  galerie,  à  droite,  est  le  corridor  conduisant  aux 
parloirs. 
Quelques  pas  plus  loin,  à  gauche,  s'ouvre  la  salle 


,  i?^^ 


-  37i  - 

capitulairO;  dans  laquelle  on  descend  par  quatre  ou 
cinq  marches. 

.  Elle  est  rectangulaire, — 8  m.  sur  14m.  50 en  œuvre — 
en  matériaux  de  moyen  appareil,  voûtée  de  six  com- 
partiments sur  croisées  d'ogives  ;  les  branches  ou 
nervures  retombent  au  centre  sur  deux  colonnes  cylin- 
driques de  0  m.  30  de  diamètre,  à  chapiteaux  de  feuillage 
au  droit  des  murs,  les  ogives  et  doubleaux  posent  sur 
des  massifs  adossés,  formés  d'une  colonnette  accostée 
de  deux  autres  plus  petites  ;  aux  quatre  angles  de  la 
salle,  les  ogives  reposent  sur  une  colonnette  simple. 
Dans  cette  construction,  les  arcs  ont  trois  coupes  diffé- 
rentes :  ogives,  doubleaux  et  arcs  de  communication 
avec  le  cloître.  Ces  derniers  sont  en  plein  cintre,  de 
coupe  rectangulaire  ;  un  de  ces  arcs  est  doublé  et  le 
second,  intérieur,  repose  de  chaque  côté  sur  une 
colonnette  à  chapiteaux  de  feuillage  ;  dans  cet  arc,  une 
porte  vitrée,  à  deux  battants,  communique  avec  le 
cloître  intérieur,  les  deux  autres  arcs  sont  garnis  de 
fenêtres. 

L'ogive,  incontestablement  du  xiii*  siècle,  a  un 
profil  très  particulier  :  le  boudin  central  n'a  pas 
d'arête,  et  cependant  les  deux  tores  latéraux  sont 
réduits  à  leur  plus  simple  expression,  se  rapprochant 
des  moulures  du  xv®  siècle. 

Pour  les  doubleaux,  les  tores  latéraux  ont  été 
conservés,  mais  dans  des  proportions  restreintes. 

La  voûte  est  à  environ  6  m.  50  du  sol. 

Au  droit  des  murs,  les  voùteîs  reposent  sur  des  for- 
mer ets  de  coupe  biseautée. 

Tout  le  long  des  murs,  à  l'est,  au  nord  et  à  l'ouest, 
sont  rangées  les  stalles  de  Mesdames  les  religieuses. 

«  Au  milieu  du  chapitre  »  se  dresse  une  croix  de 


--  372   - 

bois  ;  voici,  à  son  sujet,  la  note  que  Messire  Guille- 
meau,  curé  de  Saint-Genës,  a  consignée  (1)  : 

((  L'an  mil  six  cent  septante,  le  deuxième  jour  du 
mois  de  mars,  par  la  dévotion  de  Madame,  Madame 
Gabrielle  de  Langeron,  abbesse,  et  de  sa  communauté, 
a  été  posée  et  bénite  une  croix  de  bois,  au  milieu  du 
chapitre,  de  môme  hauteur,  largeur  et  épaisseur  que 
la  vraie  croix  sur  laquelle  Notre-Seigneur  Jésus-Christ 
a  été  attaché  au  mont  du  Calvaire. 

n  Les  mesures  ont  été  aportées  et  prises  sur  celle 
qui  est  dans  la  Sainte-Chapelle  de  Bourbon.  Elle  est 
en  terre,  de  la  même  hauteur  que  celle  sur  laquelle 
Nostre-Seigneur  Jésus-Christ  fust  eslevé  y  rendant 
son  esprit  à  son  Père. 

))  Dans  ladite  croix,  sous  trois  divers  cristaux,  est 
de  la  vraie  croix  envoiiée  par  des  Dames  Religieuses 
dune  partie  qu'elles  gardent  précieusement,  la  tenantes 
de  personnes  très  assurées .  Il  y  a  encore  de  plusieurs 
autres  reliques  aportées  des  Lieux-Saints,  entre 
lesquelles  sont  celles  de  saint  Pontian,  martyr,  de 
saint  Révérian,  de  saint  Vincent  et  de  plusieurs  autres 
saints.  Fait  à  Nevers,  les  an  et  jour  susdits  en  pré- 
sence de  Madame  TAbbesse  et  de  notre  communauté  ». 

La  porte  vitrée,  à  deux  battants,  et  les  deux 
fenêtres  à  la  suite  donnent  sur  le  cimetière  des  reli- 
gieuses, au  milieu  des  galeries  du  cloître,  formé  de 
trois  corps  de  bâtiments  et,  au  couchant,  du  mur  des 
fortifications. 

Nous  avons  cité,  à  propos  des  sœurs  blanches,  le 
nom  de  la  sœur  Claudine  Raphatin  et  la  désignation 
de  sa  sépulture  €  au  cloître  devant  le  chapitre  ».  Donc 
la  tombe  de  cette  sœur  est  tout  près  du  chapitre,  au 
bord  de  l'allée  qui  longe  le  cloître  de  ce  côté. 

(1)  Sur  les  registres  paroissiaux. 


—  373  — 

L'aile  opposée  à  la  salle  capitulaire  et  au  dortoir 
des  religieuses  est  occupée  par  le  pensionnat  des  jeunes 
filles. 

Par  delà  la  salle  capitulaire,  à  1  ouest,  et  en  pro- 
longement, est  «  une  autre  galerie  d'une  seule  nef  de 
trois  travées,  à  lourdes  nervures  prismatiques  du 
XV*  siècle.  On  y  remarque  une  vaste  cheminée  dont  le 
manteau  porte,  posé  sur  une  crosse  en  pal,  l'écusson 
chargé  de  trois  barils  de  Tabbesse  de  Boutillat  (1),  qui 
fit  reconstruire  la  partie  de  l'abbaye  détruite  dans 
l'incendie  mentionné  parle  Gallia  Christiana  en  1478. 

Tout  le  premier  étage  de  l'aile  du  chapitre  est 
occupé  par  les  cellules  ou  dortoir  ;  l'acte  de  sépulture 
de  sœur  Claude  de  Paris,  décédée  le  21  novembre  1644, 
âgée  d'environ  quatre-vingt-deux  ans,  mentionne 
qu'elle  a  a  été  enterrée  proche  la  marche  qui  descend 
du  dortouée  au  cœur  de  l'église  (2)  ». 

La  belle  salle  capitulaire,  que  nous  venons  de  visiter 
et  d'admirer,  nous  laisse  sous  l'impression  d'un  religieux 
respect.  Règle  générale,  ce  local,  dans  l'ordre  béné- 
dictin^ occupe  une  place  qu'on  s'est  rarement  permis 
de  changer  :  elle  est  le  prolongement  de  l'église,  dans 
la  même  direction,  et  s'ouvre  sur  le  cloître  ;  si  ce  lieu 
revôt  un  caractère  religieux  et  imposant,  c'est  que  là, 
chaque  jour,  se  réunissent  les  membres  de  la  commu- 
nauté pour  de  pieux  exercices  ou  la  discussion  des 
intérêts  du  monastère. 

Au  chapitre  (disons  l'abbesse,  puisque  la  règle  est 
la  môme  pour  les  maisons  d*hommes  ou  de  femmes), 
l'abbesse  donne  à  ses  religieuses  les  obédiences  com- 
munes et  l'enseignement  ;  elles  y  viennent  tous  les 
jours  entendre  l'annonce  des  fêtes  qui  seront  célébrées 


(1)  D'après  M.  de  Soaltrait,  Guide  archéologique  dans  Neven, 

(2)  Actes  reUgîenz. 


—  374  — 

le  lendemain.  Le  martyrologe  était  suivi  de  la  distri- 
bution de  l'ouvrage. 

L'abbesse  lit  ensuite  un  passage  de  la  règle,  qu'elle 
commente,  ou  fait  une  pieuse  exhortation  sur  les  fêtes 
liturgiques. 

Puis,  deux  fois  la  semaine,  le  lundi  et  le  vendredi, 
se  pratique,  à  tour  de  rôle,  l'accusation  publique  des 
fautes  extérieures  qui  ont  échappé  aux  religieuses,  et 
elles  reçoivent  les  avis  et  une  pénitence  convenables. 

Les  sœurs  entendent,  avant  de  se  séparer,  l'annonce 
des  anniversaires  des  religieuses  et  des  bienfaiteurs 
défunts,  et,  après  le  De  Profundis,  elles  se  rendent 
chacune  à  leur  travail.  Un  jour  viendra  où  le  corps 
d'une  des  religieuses  présentes,  privé  de  vie,  porté  sur 
les  épaules  de  ses  compagnes,  franchira  le  seuil  de  cette 
salle  ;  sa  dépouille,  revêtue  de  la  coule  monastique, 
entourée  des  lumières  bénites  et  de  la  récitation  des 
psaumes,  y  attendra  le  moment  de  la  sépulture. 

C'est  encore  au  chapitre  que  les  religieuses  se 
réunissent  pour  délibérer  sur  les  intérêts  du  monas- 
tère. Les  personnes  du  siècle  y  viennent  demander 
leur  admission  dans  la  famille  et  recevoir  l'habit 
monastique. 

En  un  mot,  c'est  le  lieu  de  l'assemblée  de  la  com- 
munauté, quand  elle  doit  agir  en  corps  et  accomplir 
les  principaux  actes  de  son  existence  canonique.  Aussi 
le  considère- t-on  comme  l'un  des  lieux  réguliers.  Le 
silence  qu'on  y  observe  témoigne  du  respect  que  la 
communauté  se  rend  à  elle-même.  Sa  disposition  et 
ses  ornements  contribuent  à  en  faire  ressortir  la 
dignité  (1). 

Nous  nous  rendons  ensuite  à  l'église  abbatiale,  en 


(1)  D'après  dom  Bease,  de  Tordre  de  Saint-Benoit  :  Le  Moine  béné- 
iictin,  édité  à  Ligugé,  1896,  pages  117,  118, 119. 


—  375  - 

remontant  par  la  galerie  que  nous  avons  déjà  tra- 
versée. 

L'église  est  à  une  seule  nef,  avec  abside  à  pans 
coupés  et  du  xii*  siècle,  percée  de  baies  étroites  à  une 
certaine  hauteur,  dont  le  bas  rase  la  toiture  de  la 
galerie  adossée  au  nord  ;  elle  a  8  mètres  de  large  en 
œuvre,  comme  la  salle  capitulaire^  et  de  20  à  31  mètres 
de  longueur  environ. 

L'abside  à  pans  coupés  (1)  semble  étrange  au  pre- 
mier aspect  entre  les  deux  absides  en  hémicycle  de 
deux  monuments  religieux  presque  de  la  même  époque, 
l'église  Saint-Genès  et  la  chapelle  Saint-Michel.  Cette 
forme  d'abside  à  pans  coupés,  aux  xi*  et  xn®  siècles, 
assez  rare,  offre  tout  de  même  des  spécimens  analo- 
gues ;  ainsi  dans  les  églises  de  Garchy  (Nièvre)  et  de 
Quenne,  dans  les  environs  d'Auxerre. 

Dans  l'abside,  aux  côtés  du  maître-autel,  deux  beaux 
reliquaires  se  font  pendant  ;  ((  ils  sont  soutenus  chacun 
sur  deux  potences  de  fer  attachées  en  haut  d'un 
pilier  (2)  ». 

Un  de  ces  reliquaires,  le  plus  ancien,  est  «  une 
petite  boite  en  bois  »  couverte  de  dorures  sombres  et 
ternes,  a  renfermant  la  plupart  du  corps  de  saint 
Révérien  (3)  ». 

L'autre  reliquaire,  plus  récent,  brille  de  reflets  d'or 
qui  suivent  le  contour  de  détails  d'architecture,  de 
rinceaux,  de  pièces  d'armoiries  ;  il  est  en  forme  de 
maison,  avec  ses  murs  et  son  toit  à  double  pente,  et, 
sur  le  sommet,  sont  trois  pinacles  soutenus  par  des 
consoles  renversées.  La  face  antérieure  de  la  toiture 
est  ajourée,  entre  une  bordure  de  rinceaux,  de  deux 
fenestrages  garnis  de  cristal,  pour  permettre  de  voir 

(1)  Plan  de  1759. 

(2)  Note  de  rabbé  Gaillemeau,  caré  de  Saint-Genès, 


-  376  - 

les  nombreuses  reliques  qu'il  contient.  Ce  reliquaire 
est  en  bois  revêtu  d'une  pâte  dans  laquelle  est  façonnée 
la  riche  ornementation  dont  nous  venons  de  parler  (1). 
€  Les  «  aumaises  du  cœur  »  (armoires)  contiennent 
d'autres  précieuses  reliques,  parmi  lesquelles  les  têtes 
de  saint  Révôrien  et  de  saint  Genoul  ;  mais  l'objet  le 
plus  précieux,  c'est  «  une  belle  statue  de  la  sainte 
Vierge,  d'argent  doré  en  relief,  haute  d'environ  deux 
pieds,  enrichie  de  quantité  de  pierreries,  mais  surtout 
d'une  petite  ampoule  de  cristal  pleine  du  sacré  lait  (3) 
de  cette  divine  Mère  de  Dieu  (3)  ». 

(1)  Voir,  pour  plus  de  détails,  Tétude  de  M.  l'abbé  Boutillier  sur  le 
Reliquaire  de  Vabbetse  de  Notre-Dame  de  Nevers,  Madame  AndrauU  de 
Langeron.  —  Bulletin  de  la  Société  nivemaise,  12*  volume,  p.  453. 

(2)  Lait  de  la  scdnte  Vierge.  —  A  peu  de  distance  de  Bethléem,  vers  le 
sud,  est  la  grotte  du  lait.  D'après  une  tradition  locale,  la  sainte  Vierge  y 
serait  venue  plusieurs  fois  pour  allaiter  son  divin  EnCant  ;  une  goutte  de 
son  lait,  en  tombant  sur  la  pierre,  lui  aurait  donné  sa  couleur  blanche  et 
en  même  temps  le  don  d'être  utile  aux  nourrices.  Quoiqu^il  en  soit,  ce 
qui  est  certain,  c'est  que  toutes  les  femmes  des  environs,  juives,  chré- 
tiennes, musulmanes,  ont  une  telle  dévotion  pour  cette  grotte  qu'il  y  en  a 
toujours  qui  viennent  y  faire  leurs  prières.  La  roche  dtns  laquelle  se 
trouve  la  grotte  est  une  craie  extrêmement  blanche  et  friable  ;  on  la  réduit 
facilement  en  poudre  et  on  en  fait  de  petits  pains  qu^on  envoie  dans  tout 
le  pajs  ;  les  étrangers  en  emportent  chez  eux  comme  objet  de  dévotion 
ou  de  curiosité.  C'est  une  coutume  qui  date  de  fort  loin  :  «  Il  ne  faut  pas 
s'émerveiller,  disait  Surius,  que  les  pèlerins  de  ce  temps  distribuent  avec 
grande  révérence  des  pierreftes  et  pièces  de  terre,  qu'ils  apportent  des 
lieux  saints  de  la  Palestine,  veu  que  c'est  une  ancienne  dévotion  des  chré- 
tiens, comme  témoignent  saint  Augustin  et  saint  Grégoire,  évêque  de  Tours, 
disant  qu'en  mêlant  ces  pierrettes  ou  terres  avec  de  l'eau  on  en  souloit  faire 
des  tablettes  qu'on  portoit  et  envoyoit  par  tout  le  monde,  pour  la  guérison 
des  malades  ».  Ici,  les  nourrices,  qui  ont  perdu  leur  lait,  en  prennent  dans 
les  aliments  ;  j'ignore  Teffet  d'un  tel  remède,  mais  on  y  a  recours  si  fré- 
quemment que  la  grotte,  qui  était  petite  dans  son  origine,  est  déjà  fort 
grande  et  s'agrandit  encore  chaque  jour.  On  a  recueilli  aussi  quelquefois 
une  substance  liquide,  qui  suintait  des  rochers  par  les  temps  humides,  et 
à  laquelle  on  a  donné  le  nom  de  lait  de  Marie^  au  lieu  du  lait  de  la  grotte 
de  Marie  ou  lait  de  montagne.  R  est  probable  que  la  plupart  des  fioles^ 
sinon  toutes^  que  Von  montre  comme  renfermant  du  lait  de  la  sainte 
Vierge^  ne  contiennent  en  réalité  que  du  lait  de  cette  grotte»  Qit*  MisuN, 
Les  Lieux  Saints  y  t.  UI,  pages  31,  32,  33). 

(3)  Note  de  Tabbé  Guillemeaa,  curé  de  Saint-Genês. 


—  377  - 

Dans  «  la  Relation  de  ce  qui  s'est  passé  de  plus 
considérable  en  la  ville  de  Nevers  pour  la  canonisation 
de  saint  François  de  Sales,  imprimée  à  Nevers  par 
Pierre  Harly,  imprimeur  du  Roy,  en  1668  »,  —  dont 
un  exemplaire  existe  au  monastère  de  la  Visitation  de 
Nevers,  —  les  religieuses  Visitandines  adressent  leurs 
remerciements  à  Madame  de  Langer  on,  très  digne 
abbesse  de  Notre-Dame,  de  leur  avoir  donné  plusieurs 
ornements  de  prix  et  de  leur  avoir  confié,  pour  porter 
en  procession,  cette  image  de  la  Vierge,  «  pièce  qui  lui 
est  aussi  chère  qu'elle  est  en  soy  considérable  » . 

Dans  la  chapelle  de  saint  Jean-Baptiste,  se  trouve 
le  tombeau  de  Tévêque  Hériman,  dont  nous  avons 
parlé  dans  le  premier  chapitre. 

Il  y  a  aussi  les  autels  de  sainte  Madeleine,  de 
sainte  Barbe,  de  saint  Pierre,  de  saint  Luc  (1). 

A  côté  de  la  porte,  par  où  nous  sommes  entrés,  «  une 
pierre  carrée  est  celle  sur  laquelle  saint  Révérien  eut, 
dit-on,  la  tête  tranchée  (2)  ». 

De  l'autre  côté,  en  face,  est  dressée  le  long  du  mur 
et  «  haute  de  six  pieds  »  la  représentation  de  saint 
Révérien,  martyr;  elle  est  décrite  au  chapitre  premier. 

Presque  toutes  les  dalles  sont  couvertes  d'inscrip- 
tions, dont  plusieurs  sont  devenues  illisibles. 

En  dedans  du  chœur  et  devant  la  grille  du  côté 
droit,  c'est  l'épitaphe  de  i'abbesse  Claude  de  Ga- 
maches  (3). 

Proche  la  porte  du  chœur,  du  côté  qui  va  au  cloître, 
celle  de  sœur  Françoise  de  Pontalier,  dite  de  Chas- 
tillon,  décédée  le  18  mai  1647  (4). 

Dans  le  chœur  celle  de  «  Madame  Marie-Louise  de 

(1)  Abbé  BouTiLLiER,  Archives  paroimales, 

(2)  Parmemtier,  Archives  de  la  ViUe  de  Nevers, 

(?)  Abbé  BounLUEB,  Archives  paroissiales,  p.  156, 157. 
•  (4)  W. 


-  378  - 

Langeron  :  Cy  gist  illustre  dame  Madame  Marie-Louise 
Andrault  de  Langeron,  qui  fut  abbesse  trente-trois  ans. 
Elle  mourut  le  14  août  1704,  âgée  de  cinquante-sept 
ans  (1)  ». 

Elle  était  la  deuxième  abbesse  de  cette  grande 
famille  nivernaise.  Aussi,  ne  nous  étonnons  pas  de 
rencontrer  plusieurs  pierres  tumulaires  portant  fré- 
quemment le  nom  et  les  armes  des  Langeron. 

Ici,  c'est  Pierre  Andrault  de  Langeron,  mort  en 
1614; 

Là^  Jean  Andrault  de  Langeron,  mort  en  1617  ; 

Plus  loin,  Claude  Faye  d'Epoisses,  veuve  de  Phi- 
lippe Andrault  de  Langeron  (3). 

Dans  les  actes  j^eligieux  de  la  paroisse  de  Saint- 
Genès  on  trouve  la  mention  d'un  certain  nombre  de 
sépultures  de  personnes  attachées  à  la  maison  : 

Maître  Jean  Durand,  &gé  d'environ  soixante  ans, 
ci-devant  receveur  de  Madame  TAbbesse,  décédé  au 
logis  des  receveurs,  le  3  août  1640,  a  été  inhumé  dans 
l'église  des  Dames  ; 

De  même  Philibert  Godeau,  portier  de  Madame 
l'Abbesse,  décédé  le  15  avril  1649  ; 

André  Desforges,  portier  de  Madame  l'Abbesse, 
décédé  le  15  avril  1653  ; 

Jean  Millin,  ci-devant  receveur  de  Madame  TAbbesse, 
décédé  le  4  décembre  1681. 

Nous  ne  pouvons  voir  que  les  deux  tiers  de  l'église 
environ.  La  partie  du  bas,  réservée  aux  religieuses,  est 
séparée  par  une  grande  grille  ((  de  fert  »  garnie  d'une 
«  courtine  »  (3)   d'étoffe   noire.  Nous  ne  pouvons 


(1)  GdOia  ChrisHana. 

(3)  Uvr  Crosmier,  CongrégtUiont  religieuses  de  femmes^  p.  25. 

(9)  Minutes  Pelle.  Acte  de  profession  de  Françoise  Roy,  14  janvier  lfl01< 


—  379  — 

apercevoir  que  le  sommet  des  tuyaux  du  buffet  d'or- 
gue (1). 

Nous  savons  que  l'église  des  Dames  est  de  temps  en 
temps  témoin  de  belles  fôtes  et  de  magnifiques  céré- 
monies. Entre  autres,  les  processions  de  Saint-Cyr  se 
rendent  à  l'église  de  l'abbaye  le  mardi  de  Pâques,  pour 
la  fête  de  saint  Marc^  le  mardi  de  la  Pentecôte  et  le 
jour  des  Rameaux  (2).  Le  15  juillet,  le  chapitre  vient 
aussi  en  procession  à  l'église  Sainte-Marie  de  l'abbaye 
et  une  messe  basse  est  dite  par  un  des  chanoines  de 
Saint-Gildard,  «  pour  le  Révérendissime  Hériman, 
évêque  de  Nevers,  et  insigne  bienfaiteur  du  monas- 
tère, qui  mourut  au  mois  de  juillet  860  (3)  ». 

«  Le  24  août,  fête  de  saint  Barthélémy,  la  proces- 
sion allait  à  travers  l'église  et  le  cloître  des  Bénédic- 
tines, et  les  chanoines  se  rendaient  au  réfectoire  où 
étaient  servis  treize  gâteaux  chauds  et  du  bon  vin  (4)  ». 
Tout  le  clergé,  y  compris  les  chantres  et  les  enfants 
de  chœur,  prenaient  part  à  la  collation;  comme 
remerciement,  avant  de  quitter  la  table,  les  enfants 
de  choeur  chantaient  aux  bonnes  sœurs  leur  plus  beau 
Benedicamus  Domino,  «  Dictis  monialibus,  post, 
dicant  pueri  :  Benedicamus  Domino  (5)  ». 

Il  s'est  fait  aussi  dans  l'église  abbatiale  des  baptê- 
mes et  des  mariages,  par  un  effet  de  la  bonté  et  de  la 
condescendance  de  Madame  TAbbesse  et  de  Mesdames 
les  religieuses  pour  leur  famille,  leurs  amis  et  les 
serviteurs  de  la  maison. 

(1)  8  prairial  an  IV.  Considérant  qu'il  existait  un  buflet  d'orgue  dans 
la  ci-devant  église  Saint-Martin,  qu'il  en  existait  également  un  autre  dans 
la  ci-devant  église  abbatiale  des  Bénédictines,  que  tous  deux  ont  été 
vendus  au  profit  de  la  République...  mais  qu'il  en  existe  un  dans  la  ci- 
devant  église  Saint-Cyr...  (Registre  des  délibérations  de  la  commune). 

(2)  Archives  paroissiales,  Boutiluer,  p.  145, 146. 

(3)  Cérémonial  de  Véglise  de  Nevers, 

(4)  Album  du  Niverrwis,  t.  I«s  p.  110. 

(5)  Notes  manuscrites  de  Vabbé  Trouflaut,    ^ 


—  380  — 

13  juillôt  1633.  Baptême  de  Marie  de  Gramaches  — 
parrain  et  marraine  Illustrissime  et  Révérendissime 
seigneur  Eustache  du  Lys  et  Révérende  Dame  Claude 
de  Gamaches,  abbesse. 

1719.  Messire  François  Rapine  de  «Sainte-Marie, 
grand  archidiacre  et  vicaire  général,  le  siège  vacant, 
a  suppléé  les  cérémonies  du  baptême  à  Henri-François 
Blaudin  devant  et  auprès  de  la  grille  de  Tabbaye 
Notre-Dame.  Marraine  dame  Madame  Henriette  de 
Lévy-Charlus  et  parrain  Messire  Jacques-François 
Rapine,  seigneur  de  Sainte-Marie,  lieutenant  général 
au  bailliage  et  pairie  de  Nevers. 

En  1722,  un  mariage  fut  bénit  &  l'église  de  l'abbaye 
en  des  circonstances  exceptionnelles  :  Jeanne  Moreau, 
servante  à  l'abbaye,  se  mariait  en  secondes  noces  avec 
Pierre  Coulon,  et  il  n'existait  pas  d'acte  authentique 
du  décès  de  son  premier  mari,  François  L'Eguillon  ; 
plusieurs  personnes  affirmèrent,  sur  la  foi  du  serment, 
qu'il  était  mort  à  l'Hôtel-Dieu,  pendant  la  famine  de 
1709  (1). 

La  même  année  (15  juin),  l'un  des  conjoints  d'un 
mariage,  célébré  à  l'abbaye,  devait  avoir  à  ce  pri- 
vilège un  titre  que  nous  ignorons  :  Jean  Charité,  de  la 
paroisse  de  Saint-Genès,  fils  de  feu  Michel  Charité  et 
de  défunte  dame  Françoise  Poisson,  a  été  uni  par 
sacrement  de  mariage  avec  Marguerite  Bigourat.  Ont 
signé  :  Jean  Charité,  Nicolas  Charme,  Frère  Cluzel, 
prieur  des  Jacobins;  Lenduranti,  soeur  Olivier, 
prieure  de  l'abaye,  sœur  de  Maulevrier,  sœur  de 
Chauvigny,  sœur  Deselines,  sacristine  (2). 

Le  12  juin  1730,  Marie-Madeleine  Saugy,  Agée 
d'environ  vingt  ans,  native  de  Genève...  a  abjuré  le 


(1)  Actes  reUgieyx  de  Im  poroùM  SaûU^GeHè», 
«M. 


-  381  - 

calvinisme  par  mon  ministère. . .  j'ai  reçu  l'abjuration 
de  ladite  Saugy  et  lui  ai  donné  l'absolution  qu'elle 
avait  encourue  par  l'hérésie.  Le  tout  passé  dans 
l'église  abbatiale  des  religieuses  Bénédictines  de  Notre* 
Dame  de  Nevers  et  inséré  dans  le  registre  paroissial 
de  Saint-Genès,  dont  je  suis  titulaire.  Ont  signé  : 
Philippe  Motret  et  Jérôme  Vignault,  clercs  tonsurés  ; 
Louis  Thonnelier  de  Montbort,  marchand  fayancier  ; 
René-Denis  d'Outremont,  peintre  en  fayance  ;  sœur 
Dauphine  Rabuteau,  supérieure  des  sœurs  de  l'Hôtel- 
Dieu;  de  Paris,  curé  de  Saint-Genès  et  officiai  de 
Nevers  (1). 

En  sortant  de  l'église  par  la  porte  opposée  à  celle 
par  laquelle  nous  sommes  entrés,  nous  nous  trouvons 
dans  l'allée  qui  conduit  à  l'église  Saint-Genès. 

A  droite  de  la  porte,  et  attenante  à  l'église,  la  cons- 
truction «  qui  avance  sur  le  reste  de  l'aile,  comprend,  au 
rez-de-chaussée,  quatre  pièces,  dont  une  avec  grande 
cheminée,  servant  de  buanderie,  et  au  premier  étage 
onze  pièces,  dont  deux  avec  cheminée  (2)  ». 

L'aile  ensuite  rentre  de  5  ou  6  mètres,  et  nous  ren- 
controns d'abord  «  la  cuisine  avec  chambre  au-dessus, 
petite  cour  de  l'autre  côté  et  puits  au  milieu  (3)  ».  La 
petite  cour  était  anciennement  de  niveau  beaucoup 
plus  bas  ;  ce  qui  est  nettement  indiqué  par  une  porte  à 
moulures  prismatiques,  aux  trois  quarts  enfouie  en 
terre  ;  cette  porte  est  celle  du  réfectoire  rebâti  après 
l'incendie  de  1478  ;  ses  détails  d'architecture  concordent 
bien  avec  cette  époque.  Françoise  d'Albret  avait  pris 
à  sa  charge  la  dépense  de  la  boiserie  qui  en  garnissait 


(1)  Actei  religieux  de  la  paroisse  SairU-Genàs» 
(9)  Archives  de  la  préfecture.  Ventes  nationales,  n*  564, 12  thermidor 
an  IV. 
(3)  Id,,  n«  506, 6  thermidor  an  IV. 


-  382  - 

le  pourtour,  ainsi  que  des  vitres  des  fenêtres  où  étaient 
représentées  ses  armoiries  (1). 

Après  la  cuisine,  «  une  grande  pièce  »  est  le  «  réfec- 
toire »  ;  puis  il  y  a  ((  une  antichambre,  un  réchauffoir 
à  la  suite  et  deux  petits  cabinets  (2)  » . 

Un  réfectoire  bénédictin  mérite  d'être  décrit. 

Les  anciens  réfectoires  bénédictins,  par  leur  gran- 
deur et  leur  ornementation,  présentaient,  en  général, 
un  aspect  qui  semblait  excessif  pour  une  simple  salle 
à  manger  ;  le  repas  des  moines,  quel  repas  I  contrastait 
avec  la  grandeur  et  la  beauté  du  local.  Mais  cet  exer- 
cice, tout  matériel  qu'il  soit,  se  relève  et  s'ennoblit  de 
la  dignité  des  actes  conventuels.  Les  religieux  y 
observent  le  môme  ordre  qu'au  chœur  et  au  chapitre 
et  se  tiennent  chacun  à  la  place  que  lui  assigne  son 
entrée  en  religion.  Or,  une  communauté,  toutes  les 
fois  qu'elle  se  trouve  ainsi  réunie,  se  doit  à  elle-même 
un  profond  respect,  et  ce  sentiment  a  besoin  de  se 
manifester  au  dehors  p^r  la  gravité  de  la  tenue  exté- 
rieure et  surtout  par  la  forme  et  les  proportions  du 
local  où  elle  est  assemblée. 

Les  religieux  se  distribuent  donc  avec  ordre  devant 
les  tables  de  chêne.  L'abbé  occupe  une  table  séparée  ; 
le  prieur  et  le  sous-prieur  ont  chacun  la  leur,  à  sa 
droite  et  à  sa  gauche. 

La  Règle  a  fixé  la  a  pitance  »  suffisante  et  néces- 
saire :  devant  chaque  religieux,  un  petit  pain,  une 
mesure  de  vin,  deux  plats,  un  dessert,  et  c'est  tout  ; 
jamais  de  viande,  sauf  pour  les  infirmes.  La  plus 
grande  partie  de  l'année,  il  n'y  a  qu'un  seul  repas,  à 
midi,  à  trois  heures  ou  après  vêpres,  suivant  la  saison 


(1)  Parmentier,  Archives  de  la  Ville  de  Nevers,  t.  !•',  page  393. 

(2)  Archives  de  la  préfecture.  Ventes  nationales,  n*  505,  6  thermidor 
an  IV. 


—  383  - 

liturgique.  Durant  le  temps  pascal  et  les  dimanches, 
il  est  fait  un  premier  repas  à  midi  et  un  second  le  soir, 
mais  sans  augmenter  néanmoins  la  ration  journalière. 

Avant  de  se  mettre  à  table,  les  religieux,  debout 
comme  au  chœur,  dans  cette  salle  qui  ressemble  à  une 
église,  présidés  par  l'abbé,  sous  les  yeux.du  crucifix  et 
des  saints  dont  les  images  ornent  les  murailles,  se  pré- 
parent, par  la  prière  et  le  chant,  à  prendre  leur  nour- 
riture corporelle. 

Puis,  pendant  le  repas,  un  religieux,  assis  dans  une 
chaire  adhérente  aux  murs  de  la  salle,  fait  la  lecture 
de  la  Vie  des  Saints. 

Le  repas  se  termine,  comme  il  a  commencé,  par  la 
prière  liturgique  (1). 

Au  réfectoire  rebâti  par  l'abbesse  Catherine  de 
Boutillat,  et  dont  il  ne  reste  que  la  porte  gothique 
ornementée  de  riches  moulures  et  de  choux  frisés, 
revêtu  de  boiseries  et  éclairé  de  fenêtres  à  panneaux 
historiés  des  armes  de  Marie  d'Albret,  a  succédé  une 
vaste  salle  très  simple. 

Nous  sommes  loin  des  boiseries  gothiques  et  des 
fenêtres  à  panneaux  historiés  des  armes  de  Françoise 
d'Albret.  Dans  la  salle,  assez  récente,  plus  longue  que 
large,  enduite  de  plâtre,  des  tables  forment  deux 
rangées  avec  des  bancs  de  chaque  cêté  ;  une  chaise 
est  adossée  au  mur  ;  au-dessus,  on  voit  un  crucifix 
entre  deux  gravures,  représentant  lune  saint  Benoit, 
l'autre  sainte  Scholastique.  Le  réfectoire  de  La  Fer  té 
se  trouvait  dépourvu  de  ces  derniers  objets  ;  aussi 
deux  procès-verbaux  de  visite  contiennent  une  ordon- 
nance à  ce  sujet  : 

((  La  prieure  garnira  son  réfectoire  d'une  honnête 


(1)  D'après  Le  Moine  bén^ictin,  de  dom  Besse,  Ligugé,  1898,  et  la 
Règle  de  saint  Benoit  :  La  N^mrriture, 


-  384  - 

chaire  pour  la  lectrice  et  d'un  crucifix  avec  tableaux 
de  saint  Benoît  et  de  sainte  Scholastique  (1)  ». 

«  Garnir  le  réfectoire  d'une  haute  chaise  pour  la 
lecture  et  d'un  crucifix  avec  les  tableaux  de  saint 
Benoit  et  de  sainte  Scholastique  (2)  » . 

Devant  le  réfectoire,  au  levant,  est  tracé  un  petit  par- 
terre qu'un  mur  sépare  de  l'allée  conduisant  à  l'église 
Saint-Genès  (3);  entre  l'église  abbatiale  et  l'église  Saint- 
Genès,  c'est  «  le  petit  jardin  »  (4),  par  antithèse  aux 
«  grands  jardins  »,  situés  entre  le  cimetière  paroissial 
de  Saint-Genès,  le  réfectoire,  l'aile  du  pensionnat  et 
les  remparts  de  la  ville  (5). 


Procession  du 'mardi  de  Pâques  1789  à  Tégllse 
de  Tabbaye  Notre^^Dame  de  Ne  vers. 

Le  14  avril,  mardi  de  Pâques  de  Tan  de  grâce  1789, 
le  marteau  de  l'horloge  de  Saint-Cyr  venait  de  frapper 
neuf  heures  du  matin  ;  presque  aussitôt  se  fait  entendre 
le  grave  carillon  des  quatre  cloches  de  la  cathédrale  ; 
et  comme  si  elles  eussent  attendu  ce  signal,  les  trois 
cloches  dq  l'église  Saint-Genès  et  celle  de  l'abbaye 
Notre-Dame  lancent  dans  les  airs  leurs  joyeuses  volées  : 
elles  annonçaient  le  départ  de  la  procession  tradition- 
nelle du  mardi  de  Pâques  à  l'église  des  Bénédictines. 

Tout  le  détail  en  était  fixé  par  le  Cérémonial  de 
V Insigne  église  de  Nevers  (6),  et  par  le  Diurnal  de 


(1)  Visite  da  22  jain  i638. 
0i)  Id.,  18  septembre  1642. 

(3)  Plan  de  1759. 

(4)  Archives  de  la  préfecture.  Ventes  nationales,  n*  93|  an  IV. 

(5)  Plan  de  1759. 

(6)  Cœremoniàle  Itmgnis  ecclesUe  Nivemensis, 


il 


—  385  - 

1789  (1)  qui,  en  conformité  avec  les  anciens  usages, 
rappelle  ce  qui  doit  être  observé  pour  l'office,  à  la  date 
du  mardi  de  Pâques.  Par  ce  dernier  livret,  nous  avons, 
en  plus,  l'avantage  de  connaître  les  noms  des  cha- 
noines, des  chantres,  des  enfants  de  chœur  et  môme 
du  suisse  qui  faisaient  partie  du  cortège  de  la  pro- 
cession. 

«  Mardi  de  Pâques,  â  huit  heiures  et  demie,  chant 
de  primes  et  de  tierces  (â  la  cathédrale)  ;  puis  station 
à  la  Basilique  de  Sainte-Marie  de  l'abbaye  (2). 

»  Les  chanoines  portent  la  soutane  rouge  (3). 

»  Le  doyen  du  chapitre  est  célébrant  d'office  (4)  ». 

L'itinéraire  consacré  est,  pour  l'aller,  la  rue  de 
Loire,  le  quai  de  Loire  et  la  rue  Saint-Genès. 

Du  pont  et  du  quai  de  Loire,  on  peut  jouir  dans  son 
ensemble  du  spectacle  de  la  procession  : 

En  tôte,  le  suisse,  le  grave  père  Pidoux,  ouvre  fière- 
ment la  marche  (5)  ; 

Groupe  des  enfants  de  chœur,  à  la  suite  delà  croix  ; 

Entre  les  deux  rangs  des  fidèles,  les  riches  ban- 
nières ondulant  au  souffle  de  la  brise  ; 

Députations  des  communautés  de  la  ville  ; 

Le  chœur  des  chantres  au  nombre  de  neuf  ; 

Enfin,  une  trentaine  de  chanoines,  c'est-à-dire  le 
vénérable  chapitre,  presque  au  complet,  termine  le 
cortège. 

Dès  l'entrée  de  la  rue  Saint-Genès,  chacun  admire 
la  gracieuse  tour  octogone    du  clocher  qui  domine 


(i)  DiufTicde  et  obituatium  ecclesis  Nivemensis  pro  cuino  Domini 
MDCCLXXXIX. 

(2)  JHumcUe  fêria  tertia  pro  Poucha. 

(3)  DiumaUe,  a  Cum  ntbeis  vestibus  ». 

(4)  Cœremoniaie, 

(5)  Cmtos  helveticus^  Protcuius  Pidaux,  Lauzaninuis,  95jumi  illO; 
il  était  suisse  de  la  cathédrale  depuis  dix-neuCans, 

T.  IX,  S*  série,  25 


I  ■ 


-  386  — 

superbement  les  toits;  «  sa  flèche  est  couverte  de 
tuiles  émaillées,  blanches  et  bleues  »,  dont  l'habile 
mélange  forme  des  dessins  variés  ;  c'est  ici  en  plein  le 
quartier  des  faïenciers  qui  ont  voulu,  par  un  produit 
de  leur  art,  décorer  leur  église  paroissiale  ;  ce  la  croix 
elle-même  et  le  coq  »  sont  deux  belles  pièces  de 
faïence  (1). 

La  procession  doit  faire  une  halte  à  l'église  Saint- 
Genès.  Messire  Merle,  revêtu  du  surplis  et  de  l'étole, 
avec  la  croix  et  les  enfants  de  chœur,  l'attendait  sur 
le  seuil  de  la  grande  porte,  dont  le  tympan  si  remar- 
quable représente  Notre-Seigneur  au  milieu  des 
apôtres. 

En  entrant  dans  l'église,  les  chantres  entonnent 
l'antienne  du  patron  de  l'antique  sanctuaire  :  Qui  nos 
separabit  a  caritate  Christi... 

Après  le  chant  de  l'antienne,  du  verset  et  de  l'orai- 
son, la  procession  se  remet  en  marche,  traverse  le 
cimetière  de  Saint-Genès  et  une  allée,  qui  aboutit  à 
une  porte  latérale  de  l'église  des  Religieuses. 

En  y  entrant,  les  chantres  entonnent  l'antienne 
de  circonstance  :  «  Ingressus  Angélus  ad  Mariam 
dixit,,,  0 

L'abbatiale  est  parée  de  ses  plus  beaux  ornements. 
L'autel  resplendit  de  fleurs,  étincelle  de  lumières  ;  sur 
les  gradins,  de  chaque  côté,  un  reliquaire  contient  le 
chef  de  saint  Révérien  et  celui  de  saint  Genoul. 

Deux  belles  châsses  dorées  sont  suspendues  au  fond 
de  l'abside. 

Sur  une  crédence  chargée  de  nombreuses  reliques 
((  une  statue  de  la  sainte  Vierge,  en  argent  doré, 
haute  d'environ  deux  pieds  »,  scintille  de  pierreries  et 
ce  porte  une  petite  ampoule  de  cristal  pleine  du  sacré  lait 
de  cette  divine  Mère  de  Dieu  ». 

(1)  Archives  paroiiiiales^  Abbé  Boutillier,  p.  171. 


—  387  — 

La  «  courtine  »  de  la  grille  a  été  tirée  et  on  aperçoit 
les  religieuses  dans  leurs  stalles.  Madame  TAÛbesse, 
Madame  Marie^-CIaire  de  Saillans,  sur  un  petit  trdne, 
tient  à  la  main  sa  crosse  d'argent. 

Dans  cette  partie  de  la  clôture,  devant  les  stalles 
adossées  à  la  muraille,  se  pressent  de  nombreuses 
jeunes  filles  et  dames,  pensionnaires,  parentes  ou 
amies  des  religieuses,  car  la  nef  ouverte  au  public  est 
comble  et  même  a  le  porche  »  et  «  la  galerie  »  qui 
conduit  à  la  salle  capitulaire. 

Le  pied  foule,  à  chaque  pas,  des  pierres  tumulaires 
avec  inscriptions  modernes^  ou  gothiques  anciennes  ; 
les  croix  sont  gravées  au  trait,  ainsi  que  d'autres 
ornements  çà  et  là  :  tètes  de  mort  avec  tibias  en  sau- 
toir, armoiries  surmontées  de  haumes,  de  couronnes, 
de  la  crosse  abbatiale  en  pal. 

Dans  le  chœur  ont  pris  place  les  chanoines,  chantres 
et  enfants  de  chœur  de  Saint-Cyr,  auxquels  se  sont 
joints  ceux  de  Saint-Genès  et  de  l'abbaye. 

Messire  de  Damas,  en  qualité  de  doyen  du  chapitre, 
chante  la  grand'messe. 

Une  religieuse,  habile  musicienne,  tient  «  le  jeu 
d'orgue  »  qui  alterne  avec  les  chantres. 

Debout  près  de  l'autel,  se  tient  un  religieux  béné- 
dictin avec  sa  coule  noire  aux  larges  manches  ;  c'est 
un  Père  de  Cluny  chargé  de  la  desserte  du  couvent. 
Il  vient  de  faire  signe  à  un  des  enfants  de  chœur  et, 
après  lui  avoir  donné  un  ordre,  il  ajoute  :  «  Va,  mon 
petit  Cassiat  (1)  ». 


(1)  M.  Tabbé  Cassiat,  longtemps  prêtre  habitué  de  la  paroisse  Saint- 
Etienne,  mort  à  un  âge  avancé,  aimait  à  rappeler  ses  souvenirs  (Venfant 
de  chœur  de  Vabbaye^  les  gâteries  de  M^^*  rÂ.bbesse  et  d'autres  détails  du 
monastère  ;  en  1789,  il  entrait  dans  sa  treizième  année,  c  Guillaume 
Cassiat,  né  â  Nevers,  est  décédé  à  l'hospice  de  Nevers,  le  13  juillet  1868, 
à  rage  de  quatre-vingt-douze  ans  »•  (Actes  publics  de  la  mairie  de  Nevers). 


—  388  - 

La  collation  d'après  la  messe,  offerte  jadis  au  clergé 
dans  le  réfectoire  des  religieuses  est  abolie  depuis  un 
certain  temps  (1). 

L'office  terminé,  la  procession  sort  aussitôt  par  la 
porte  latérale,  opposée  à  celle  par  laquelle  elle  était 
entrée,  et,  franchissant  la  porte  de  la  grande  grille  en 
fer,  elle  reprend  le  chemin  de  la  cathédrale^  par  la  rue 
de  la  Tartre,  du  Doyenné;  pendant  ce  temps,  on  chante 
«  les  litanies  majeures  >  (2)  ou  des  saints. 

Abbé  A.  SERY, 

Chanoine, 


(1)  Le  Diumal  de  i189,  n*en  parle  pas,  tandis  qu'il  mentionne  des 
collations  encore  en  usage  :  après  la  messe  du  5  janvier,  à  la  chapelle 
Saint-Sébastien,  une  collation  de  gâteaux  offerte  au  clergé;  une  autre 
collation,  le  38  juin,  au  retour  de  la  procession  de  Saint-Pierre,  offerte 
par  le  curé  de  cette  paroisse,  consiste  en  pain,  vin  et  cerises  ;  le  28  juillet, 
la  procession  de  Saint-Gyr  se  rend  i  l'église  Saint-Victor  pour  les  vêpres, 
et  après  l'office,  le  prieur,  en  son  logis,  sert  aux  chanoines  du  pain,  du  vin 
et  des  cerises. 

(2)  Cérémonial  de  Vlntigne  égliie  de  Neven,  mardi  de  Pâques. 


ERRATA: 

Page  253,  ligne  15«.  -~  Chaque  jour,  ajoutez  dans  le  bois  de 
Faye. 

Page  327,  ligne  l'e.  —  Prieurés  de  Bénédictins,  lisez  de  Béné- 
dictines. 

Page  332,  ligne  9».  —  Sur  les  portraits,  d'autres  abbesses  lisez 
sur  les  portraits  d'autres  abbesses^ 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Préambule.  ^  Délimitation  topographique  de  TAbbaye  N.-D.    .    .  246 
Intérêt  de  Tétude  sur  TÂbbaye  N.-D.  au  point  de  vue  de  Thistoire  du 

Nivernais  et  de  l'initiation  à  la  vie  religieuse  du  Monastère.    .    .  246 

Chapitre  premier.  -  Fondation  du  Monastère  en  624 247 

Choix  de  sen  emplaœment  sur  le  lieu  du  martyre  de  saint  Révérien  248 

Tradition  nivernaise  relative  au  martyre  de  samt  Révérien..  .    *    .  248 

Le  Monastère,  détruit  au  vin*  siècle,  est  relevé  par  l'Évéque  Hériman  250 

Comment  saint  Geitoul  donna  aux  Bénédictines  la  terre  de  SardoUes  252 

Résumé  de  quelques  chartes  de  888  à  1229 252 

Liste  des  premières  abbesses  jusqu'en  1233 254 

Notice  de  chaque  abbesse  de  12^  jusqu'à  la  Révolution 255 

§  I  Prieurés  de  Bénédictines  et  bénéfices  ecclésiastiques  dépendant 

derabbaye 327 

§  II  Temporel  de  TÂbbaye 329 

§  III  Importance  du  rôle  et  de  l'influence  de  l'Abbesse 330 

§  lY  Du  choix  de  TAbbesse  et  des  insignes  de  sa  dignité 381 

Chapitre  ii.  —  Le  personnel  de  l'Abbaye 333 

§  I  Les  religieuses  non  cloîtrées  à  l'origine 334 

Réformation  du  Monastèie 336 

Horaire  des  exercices  et  détails  sur  plusieurs  points  de  la  Règle..    .  340 

Liste  des  Bénédictines  du  xvii*  siècle 342 

Le  célèbre  Patru  plaide  pour  un  Père  confesseur  des  Religieuses..    .  353 

g  II  Les  pensionnaires  retraitées  et  étudiantes.   ...*....  358 

Chapitre  ui.  —  Les  constructions  ;  chapelle  Saint-Michel,  365  ;  par- 
loirs, 366  ;  logis  de  TAbbesse,  367  ;  portail  de  l'église  abbatiale, 
368  ;  salle  capitulaire,  370  ;  église  abbatiale,  374  ;  processions  et 
cérémonies  extraordinaires,  379;  suite  des  appartements,  cuisine, 

381  ;  réfectoire 382 

Conclusion  récapitulative  :  procession  du  mardi  de  Pâques  1789  à 

Téglise  abbatiale 384 

Errata • 388 


•^ 


—  390  — 


DOCUMENTS  NIVERNAIS 


de  la 


COLLECTION    DUCHESNE 

A  la  Bibliothèque  nationale 

Pap   RENÉ   DE  LESPINASSE 


André  Duchesne  est  un  type  d'historien  comme  il  y 
en  eut  plusieurs  en  France  au  xvir  siècle.  Né  en  1584, 
il  mourut  en  1640,  à  Tâge  de  cinquante-six  ans,  écrasé 
par  une  charrette,  en  allant  de  Paris  à  sa  maison  de 
campagne  de  Verrière.  Il  était  de  la  Touraine.  Le 
cardinal  de  Richelieu  l'appelait  son  bon  voisin  et  lui 
témoignait  beaucoup  d'estime. 

De  ses  nombreux  ouvrages,  retenons  seulement 
ceux  qui  peuvent  intéresser  notre  province  :  «Histoire 
des  ducs  de  Bourgogne,  —  de  la  maison  de  Châtillon- 
sur-Marne,  —  de  Montmorency  et  Laval,  —  de  la 
maison  de  Vergy,  —  des  comtes  d'Albon  et  Dauphins 
de  Viennois,  —  des  maisons  de  Guines,  d'Ardres,  de 
Gand  et  de  Coucy  » . 

On  l'appelait  «  le  père  de  l'histoire  de  France  », 
titre  mérité  non  seulement  par  ses  publications,  mais 
encore  plus  par  les  immenses  recueils  qu'il  avait 
formés  et  presque  tous  écrits  de  sa  main  (1). 

Ces  recueils,  renfermant   des  chartes,   des   chro- 

(1)  Delisle,  Cabinet  des  Manuêcrits,  1, 333. 


—  891  — 

niques,  des  vies  de  saints,  des  généalogies,  des  lettres 
de  savants  et  autres  documents,  formaient  une  véri- 
table bibliothèque  de  l'histoire  de  France  depuis  les 
origines  jusqu'au  xvr  siècle. 

Nous  verrons  ce  qu'il  a  emprunté  au  Nivernais,  bien 
qu'il  n'ait  rien  écrit  sur  notre  province. 

Ses  papiers  n'ont  pas  été  conservés  dans  leur  inté- 
grité. Des  portions  considérables  furent  données  à 
Colbert  ;  d'autres  passèrent  chez  Baluze,  à  Saint- 
Germain-des-Prés  et  ailleurs.  Le  meilleur  lot  passa  à 
son  fils,  François  Duchesne,  puis  à  son  gendre,  Jean 
Haudiquer,  entre  les  mains  duquel,  à  la  suite  d'une 
condamnation,  les  papiers  furent  saisis  et  attribués  à 
la  bibliothèque  du  Roi  en  1708.  Il  y  avait  cinquante- 
neuf  volumes  et  vingt  registres.  L'administration  a 
fait  à  Duchesne  l'honneur  de  conserver  sa  collection 
comme  fonds  spécial. 

Les  deux  plus  longues  copies  de  Duchesne  qui  nous 
concernent  sont  le  «  Cartulaire  de  Saint-Cyr  ï>,  vingt- 
quatre  feuillets  doubles,  et  1'  «  Inventaire  des  Titres  de 
Nevers  et  Chambre  des  Comptes  »,  deux  cents  feuillets, 
d'une  écritiu-e  fine  et  serrée.  C'était  un  copiste  persé- 
vérant et  infatigable,  à  l'égal  de  son  ami,  notre  abbé 
de  MaroUes,  sauf  que  celui-ci  n'y  joignait  pas  Tordre 
et  le  talent  de  l'écrivain  d'histoire. 

Le  Cartulaire  de  Saint-Cyr  de  Nevers,  dont  l'ori- 
ginal n'existe  plus  depuis  longtemps,  est  représenté 
actuellement  :  1^  par  une  sorte  d'inventaire  du 
xvr  siècle,  manuscrit  latin  de  la  Bibliothèque  natio- 
nale, n"  9207,  où  se  trouvent  des  cotes  de  pièces  plus 
ou  moins  étendues,  des  extraits  et  des  copies  in  extenso 
de  beaucoup  de  pièces  ;  2^  par  des  extraits  pris  sur  le 
Cartulaire  par  Baluze  et  insérés  dans  le  fonds  de  ce 
savant  sous  le  nom  bien  connu  d'  a  Armoires  de 
Baluze  i^,n^  74  ;  3^  par  quelques  extraits  ajoutés  à  la 


—  392  - 

suite  d'un  manuscrit  appartenant  à  la  bibliothèque  de 
Lyon. 

Il  y  a  environ  vingt-cinq  ans,  lorsque  je  m'occupais 
du Cartulaire  de  Saint-Cyr,  je  lai  presque  exactement 
rétabli  d'après  les  copies  de  ces  trois  manuscrits  et 
les  indications  qu'ils  portaient.  Il  y  a  lieu  d'ajouter 
à  mes  recherches  les  nombreuses  copies  de  Duchesne, 
dont  je  n'avais  pas  connaissance.  Ce  sera  un  élément 
de  plus  pour  assurer  la  reconstitution  définitive  du 
Cartulaire. 

La  copie  de  Duchesne  se  compose  de  quatre-vingt- 
neuf  chartes  du  ix*  au  xm*  siècle,  soit  en  texte 
in  extenso,  soit  simplement  indiquées  par  une  cote 
plus  ou  moins  étendue  ;  le  tout  conforme  à  l'exem- 
plaire du  fonds  latin  n®  9207,  ce  qui  nous  permet  de 
supposer  que  Duchesne  a  fait  ses  copies  non  sur 
l'original  du  Cartulaire,  mais  sur  l'exemplaire  du 
xvp  siècle. 

Néanmoins  le  texte  de  Duchesne  viendra  encore 
ajouter  son  appoint  de  preuves  aux  textes  eux-mêmes 
et  aux  indications  extérieures  de  numérotage  et  autres 
qu'il  a  portées. 

Un  autre  document  ancien  est  la  chronique  latine 
intitulée  : 

Origo  et  historia  brevis  comitum  Nivernensium, 
coll.  Duchesne,  n»  56,  fol .  132,  copie  en  quatre  feuillets  ; 
ce  texte  a  été  imprimé  dans  le  Père  Labbe  (Bibliotheca 
manuscriptorum^  1. 1,  p.  399),  puis  d'après  cet  ouvrage 
dans  Dom  Bouquet  {Historiens  de  France,  t.  X,  p.  258). 
L'auteur  de  la  chronique  est,  dit-on,  Hugues  de 
Poitiers,  moine  de  Vézelay  vers  1160,  ou  selon  d'au- 
tres un  anonyme  vivant  sous  Louis  VII. 

Les  ouvrages  ci-dessus  n'indiquent  pas  de  sources, 
et  nous  ignorons  l'importance  que  peut  avoir  la  copie 
de  Duchesne  dans  la  publication  de  ce  te^te, 


-303- 

En  quelques  mots  il  décrit  le  ch&teau  de  Nevers 
dépendant  de  la  Bourgogne  ;  la  querelle  entre  Ratier 
et  Alicher  ;  le  siège  du  fameux  ch&teau  de  Maers  ou 
Metz-le-Comte,  repaire  de  brigands  qui  fut  pris  par 
Richart  le  Justicier,  régent  du  royaume.  L'évêque 
d'Autun,  Hildegaire,  et  son  neveu  Landry,  principaux 
héros  de  ce  siège.  Landry,  en  reconnaissance  de  ses 
services,  obtint  la  seigneurie  de  ce  château.  Marié  à 
une  princesse  d'Anjou,  il  eut  un  fils  appelé  Bodon 
de  Monts,  qui  bâtit  un  château  â  Monceaux  et  eut  un 
fils  également  appelé  Landry  qui  devint  célèbre  â  son 
époque. 

A  la  suite  d'une  nombreuse  réunion  de  seigneurs 
â  Nevers,  les  comtes  d'Anjou  et  de  Bourgogne  cher- 
chaient â  attirer  Landry  auprès  d'eux,  mais  il  refusa  â 
Tun  comme  â  l'autre,  désirant  être  comte  de  Nevers,  ce 
&  quoi  le  comte  de  Bourgogne  consentit  en  lui  attri- 
buant ce  comté  â  lui  et  â  ses  descendants,  â  la  seule 
condition  de  l'hommage. 

Landry  est  considéré  comme  le  premier  comte  ;  son 
fils  Renaud,  marié  â  la  sœur  du  roi  Robert,  y  joignit 
le  comté  d'Auxerre  et  fut  tué  dans  une  guerre  contre 
le  duc  de  Bourgogne,  laissant  sa  succession  à  son  fils. 

Tels  sont  les  faits  racontés  dans  le  style  imagé  des 
chroniques  du  xii*  siècle,  avec  observations  et  citations 
qui  donnent  de  l'intérêt  à  ces  récits  anciens. 

La  confirmation  de  Philippe  II,  en  1186,  du  monas- 
tère de  Saint-Etienne,  n'a  pas  d'intérêt  comme  texte. 
C'est  un  imprimé  extrait  par  Duchesne  d'un  ancien 
ouvrage  quelconque  et  inséré  au  milieu  de  ses  compi- 
lations manuscrites. 

On  se  rappelle  les  conditions  de  cet  acte  :  â  la 
demande  de  Hugues,  abbé  de  Cluny,  le  comte  Guil- 
laume avait  déclaré  le  bourg  Saint-Etienne  libre  de 
tout  impôt,  les  habitants  ne  devant  rien  au  comte  ni 


-384- 

k  ses  successeurs  et  restant  soumis  aux  moines  de 
Saint-Etienne.  Ensuite  le  comte  Pierre  et  Agnès  son 
épouse  prirent  avec  les  moines  une  nouvelle  convention 
au  sujet  du  tribut  de  trois  mille  sols,  dû  selon  les  lois 
féodales  ;  il  abandonnait,  à  titre  d'indemnité,  le  cas 
de  sa  rançon  de  prisonnier  ;  quant  aux  deux  autres  cas 
où  il  avait  droit  de  percevoir  le  tribut,  son  départ 
pour  la  croisade  ou  le  mariage  de  sa  fille,  il  s'enga- 
geait à  s'en  rapporter  à  la  justice  du  prieur. 

Le  Roi  intervient  pour  assurer  l'engagement  du 
comte  de  Nevers  envers  l'abbaye  de  Cluny. 

Un  acte  de  1194  contient  l'accord  entre  le  comte 
Pierre  de  Courtenay  et  les  habitants  du  bourg  Saint- 
Etienne,  d'après  lequel  il  ne  pourra  réclamer  le  tribut 
de  3.000  sols  pour  le  mariage  de  sa  fille,  tant  qu'il 
n'aura  pas  acquitté  une  obligation  de  160  livres  de 
Gènes  {octo  viginti  libras)  qu'il  avait  garantie  sur  le 
tribut  ci-dessus. 

Pierre  de  Courtenay  et  son  sénéchal  Geoffroy  de 
Pougues  avaient  contracté  cet  emprunt  pour  la  croisade, 
et  les  Génois,  prudents,  avaient  exigé  cette  garantie  (1). 

Quelques  textes  anciens  concernent  le  prieuré  de 
La  Charité,  tous  connus  d'ailleurs,  c'est  la  bulle  du 
pape  Pascal  II,  du  16  mars  1107,  relative  à  la  consécra- 
tion de  l'église  et  à  la  confirmation  des  possessions  du 
prieuré  en  France  et  en  Angleterre. 

Puis  la  charte  du  comte  de  Nevers,  Guillaume  II, 
celui  qui  entra  à  la  Chartreuse  en  1147,  lequel,  assisté 
de  ses  deux  fils,  Guillaume  et  Renaud,  confirme,  en 
1143,  les  divers  droits  et  possessions  du  prieuré  en 
Nivernais,  entre  autres  à  Bulcy,  Pouilly,  Charent, 
Vôvre,  Magny,  Satinges  et  Rochefort.  II. y  annonce 

(1)  Coll.  Duchesne,  n»  ^,  fol.  146, 


—  385  — 

son  intention  de  quitter  le  monde  et  de  faire  pénitence 
à  la  Chartreuse. 

L'autre  charte^  datée  de  1164,  est  l'autorisation  par 
le  comte  de  Sancerre  aux  religieux  de  La  Charité 
d'établir  à  leur  gré  des  fortifications  autour  de  la 
ville. 

Ces  trois  chartes  sont  imprimées  dans  mon  Cartu- 
laire  de  La  Charité  ;  la  première,  inédite  d'après  le 
fonds  de  Cluni  (n^  176,  p.  1)  ;  la  deuxième,  déjà 
imprimée  au  Gallia  Christiana  (t.  XII,  col.  114  ins- 
trumenta); la  troisième,  imprimée  dans  Marténe, 
Thésaurus  anecdotorum,  (t.  !•',  p.  464).  Les  copies  de 
la  collection  Duchesne  n'avaient  pas  encore  été  men- 
tionnées. 

La  comtesse  Mahaut,  qui  a  administré  le  Nivernais 
pendant  près  d'un  demi-siècle,  de  1200  à  1841,  est 
représentée  par  trois  chartes . 

L'une,  datée  d'octobre  1223,  pendant  son  veuvage, 
est  l'autorisation  par  Mahaut  à  son  fidèle  chevalier, 
Erard  de  Brêne,  pour  les  fortifications  de  Banyaux 
(Bagneux). 

Les  conditions  stipulées  sont  les  règlements  féodaux 
ordinaires.  Le  ch&teau  est  tenu  en  fief  de  la  comtesse  ; 
il  doit,  sur  réquisition,  le  livrer  pour  résister  aux 
petites  ou  grandes  guerres  ;  il  en  prête  serment  pour 
lui  et  ses  héritiers.  A  l'expiration  de  quarante  jours, 
la  comtesse  est  tenue  de  le  rendre  dans  le  môme  état, 
sauf  la  consommation  de  foin  et  fourrages. 

La  copie  de  Duchesne  (n*^  21,  fol.  77)  est,  croyons- 
nous,  le  seul  texte  de  cette  charte. 

Une  autre,  postérieure  de  quelques  années,  est  de 
juin  1228. 

Guy,  comte  de  Nevers  et  Forez,  et  Mahaut,  son 
épouse,  font  avec  G.,  évoque  de  Langres,  l'échange  de 
la  ville  de  Mussy  contre  la  chapelle  de  Juilly .  En  outre. 


—  39i  — 

l'évéque  concède  la  ch&tellenie  de  Griselles  {Grisolia- 
rum)  et  une  rente  de  cent  sols  à  Tonnerre,  don  du 
comte  de  Ne  vers  Pierre  et  Agnès.  Il  abandonne  le 
droit  de  gîte;  les  gens  de  Mussy  pourront  s'en 
décharger  pour  une  redevance  de  cent  sols.  Quant  à  la 
collation  des  prébendes  de  la  chapelle  de  Tonnerre, 
pour  lesquelles  ils  étaient  en  contestation  avec  l'évoque 
de  Chalon,  ils  y  renoncent  à  la  condition  qu'ils  pren- 
dront en  jSef  le  château  de  Griselles.  Ces  choses  étaient 
l'héritage  de  la  comtesse  Mahaut  (1). 

Ces  chartes  ne  nous  intéressent  qu'en  raison  des 
comtes  de  Nevers,  car  les  localités  citées  font  partie  du 
comté  de  Tonnerre. 

Banyaux  est  aujourd'hui  Bagneux  (Aube),  canton 
des  Riceys,  sur  les  confins  du  département  de  l'Yonne, 
qui  a  possédé  la  forteresse  dont  il  est  question. 

Quant  à  l'autre  charte  de  l'évéque  de  Chalon,  il 
s'agit  de  Mussy-l'Evôque,  Juilly  et  surtout  Griselles^ 
autrefois  poste  très  important,  composé  d'un  château* 
fort  et  d'im  couvent  ;  ces  localités  sont  situées  dans  la 
Côte-d'Or,  arrondissement  de  Châtillon-sur-Seine, 
canton  de  Laignes,  sur  lequel  s'étendait  le  comté  de 
Tonnerre  ;  elles  avaient  été  l'objet  d'une  donation  à 
l'évéque  de  Chalon  par  la  comtesse  de  Tonnerre,  en 
1018,  relative  à  d'anciens  souvenirs  rappelant  le  par- 
cours de  saint  Vincent,  auquel  faisait  allusion  la 
constitution  de  ces  diocèses. 

Hugues  Renaud,  comte  de  Tonnerre,  était  devenu 
évéque  de  Langres  en  1065  ;  il  démissionna  ensuite  en 
faveur  de  Guillaume  I*',  comte  de  Nevers,  tout  en 


(1)  Bibliothèque  nationale,  copie  du  texte  de  cette  charte,  collection 
Duchesne,  n»  20,  folio  963. 

La  troisième  charte  est  le  texte  bien  connu  des  franchises  municipales 
de  Nevers  accordées  par  Pierre  de  Courtenay  et  reconnues  en  août  1991 
par  Mahaut  à  la  suite  de  son  mariage  avec  Guy  de  Forez. 


—  397  - 

se  faisant  quelques  réserves.  Les  faits  cités  par  cette 
charte  sont  la  confirmation  de  ces  événements  anté- 
rieurs (i). 

La  copie  la  plus  étendue  est  celle  des  Titres  et  de  la 
Chambre  des  Comptes  de  Nevers  qui  occupe  deux  cents 
feuillets  entiers.  (Coll.  Duchesne,  n®  54,  fol.  103  à  302). 
L'abbé  Michel  de  MaroUes  avait  confié  son  manuscrit 
à  Duchesne,  qui  s'était  empressé  de  le  copier.  Avait-il 
l'intention  de  se  servir  de  cet  inventaire  dans  ses 
ouvrages  sur  les  provinces,  ou  voulait-il  faire  une 
histoire  sur  le  Nivernais  ?  En  tout  cas,  une  copie  de 
pareille  longueur  nous  montre  la  persévérance  et  le 
courage  de  ces  pionniers  de  l'histoire. 

Je  n'ai  pas  encore  comparé  cette  copie  au  texte  de 
MaroUes  faisant  partie  des  cinq  cents  Colbert  ;  il  sera 
bon  de  s'assurer  si  elle  est  contenue  dans  l'imprimé  de 
M.  de  Soûl  trait. 

Il  y  a  plusieurs  séries  de  notes  généalogiques  sur 
les  familles  de  Prye,  Cotignon,  etc.,  notes  confuses 
où  il  ne  doit  y  avoir  rien  à  prendre. 

L'épitaphe  de  la  comtesse  Marie  d'Âlbret,  dans  le 
style  ampoulé  de  l'époque,  est  copié  au  n©  56, 
folio  387  : 

Illustrissimœ  princtpi*<  Mariœ  Ab  Albret  Nivep' 
niœ  ducis,  Retholorum,  Druydum,  Belfortensiumque 
comitis  epithaphium. 

Cinquante  vers  latins,  commençant  par  ceux-ci  : 

lUa  ego  egregium  cunetis  mortalibus  olim 
Exemplar  vitm  jure  futura  $um* 

Aux  n°«  64  et  65,  il  y  a  quelques  mentions  d'évôques 
extraites  du  Bréviaire  nivernais,  un  abrégé  en  six 
feuillets  de  la  Chronique  des  Evêques  et  des  Comtes, 

(1)  An  de  vérifier  le$  dcUês^  U,  p.  560. 


-  998  - 

par  Henri  Le  Tort,  que  j'ai  publiée  dans  notre  Bulle- 
tin (1),  et  des  extraits  des  Commentaires,  de  Guy- 
Coquille,  sur  la  Coutume,  sans  intérêt. 

La  collection  Duchesne  contient  encore  des  textes 
plus  récents  du  xvi®  siècle,  les  contrats  de  mariage 
d'Engilbert  et  de  François  de  Clèves,  textes  évidem- 
ments  reproduits  dans  d'autres  recueils,  mais  qu'il 
est  bon  de  signaler  ici  pour  les  variantes  et  pour  la 
conjiaissance  complète  des  sources. 

Le  contrat  de  mariage  entre  Engilbert  de  Clèves  et 
Charlotte  de  Bourbon  fut  passé  le  23  février  1489 
(vieux  style)  devant  Abraham  Marnac,  garde  du  scel 
aux  contrats  à  Cusset.  En  voici  les  principales  dispo- 
sitions : 

«  Le  chancelier  de  France,  Guillaume  de  Roche- 
fort,  s'était  entendu  quelques  jours  auparavant  avec 
M0'  le  duc  de  Bourbon  et  les  autres  parents  de  la 
future,  s'engageant  au  nom  du  Roi  à  donner  en  dot 
la  somme  de  trente  mille  livres  tournois,  pour  une 
fois,  assignée  sur  le  comté  d'Auxerre,  ville,  châteaux, 
forteresses,  justice  haulte,  moyenne  et  basse,  hom- 
mages, fiefs,  arrière-fiefs,  prés,  vignes,  terres,  bois, 
buissons,  estangs,  rivières,  garennes,  moulins,  cens, 
rentes,  tailles,  bourdelages,  hommes  et  femmes 
serves,  etc.,  sauf  seulement  le  ressort  et  souveraineté, 
pour  en  jouir  à  titre  de  dot  jusqu'à  concurrence  de 
deux  mille  livres  de  rente  et  jusqu'au  paiement  des 
trente  mille  livres  en  deniers  comptans.  Le  Roy  four- 
nirait le  surplus  de  rente  s'il  y  avait  lieu.  Engilbert  et 
Charlotte  avaient  droit  de  placer  tous  baillis,  capi- 
taines, prévôts,  receveurs,  comme  bon  leur  semblera. 
En  cas  de  mort  sans  enfants  la  comté  revenait  au  Roi 

(1)  Tome  VU,  p.  iO. 


—  399  — 

et  les  seigneurs  ne  pouvaient  en  disposer  que  pour  la 
somme  de  trente  mille  livres  » . 

En  outre,  François  de  Bourbon,  frère  de  Charlotte, 
lui  constituait  en  dot  une  somme  de  vingt  mille  livres, 
payable  par  annuités  de  deux  mille. 

Charlotte  avait  promesse  d'un  douaire  de  quatre 
mille  livres,  assis  sur  les  terres  d'Engilbert  par  droit 
successif  du  comte  de  Nevers,  son  aïeul  ;  elle  recevait 
des  joyaux  nuptiaux  selon  son  état,  avec  faculté  d'en 
disposer  à  son  plaisir. 

Les  époux  étaient  «  uns  et  communs  ensemble  en 
tous  leurs  biens^  meubles  et  conquetz  »  ;  Charlotte 
renonçait  à  toute  succession  en  faveur  de  son  frère 
François,  qui  l'avait  dotée. 

Les  témoins  étaient  :  nobles  hommes  Henard  de 
Bellegarde,  écuyer,  chambellan  du  seigneur  Angilbert 
de  Clèves;  Jean  Tabout,  Jean  Troussebois,  Pierre 
Cousins,  maître  d'hôtel  du  comte  d'Epernon  ;  Louis 
de  Hédouville,  François  de  Nery,  et  Jean  Galle,  tous 
écuyers  (1). 

Le  roi  Charles  VIII  abandonnait  ainsi  à  sa  nièce  le 
comté  d'Auxerre.  Mécontents  de  cette  transmission 
de  pouvoir,  les  habitants  envoyèrent  à  la  Cour,  alors  à 
Lyon,  une  députation  ayant  pour  mission  d'obtenir 
une  expédition  de  ces  lettres  et  de  s'informer  si  elles 
étaient  bien  homologuées  au  Parlement.  Le  comté 
d'Auxerre  avait  été  vendu  pour  31.000  livres  d'or  par 
Jean  de  Chalon,  en  1370,  au  Roi  de  France  ;  au  dire 
des  habitants  d'Auxerre,  c'était  en  violation  de  ce 
traité  que  le  Roi  avait  cédé  de  nouveau  à  un  seigneur 
le  comté  qui  devait  toujours  rester  à  la  Couronne. 

L'opposition  de  la  ville  d'Auxerre  fut  adressée  au 
Parlement  le  22  août  1490;  celle  des  autres  villes 

(1)  GoU.  Duchesne,  t.  m,  fol.  237. 


—  400  - 

suivirent.  L'évèque  Jean  Baillet  fut  prié  de  ne  pas 
recevoir  Engilbert  de  Clèves  à  Thommage  du  comté 
d'Auxerre  avant  la  levée  de  cette  opposition. 

Ces  démarches  n'obtinrent  aucun  résultat.  Engilbert 
porta  le  titre  de  comte  d'Auxerre  et  est  qualifié  comme 
tel  dans  les  registres  du  Parlement,  de  1493  à  1499, 
pendant  ses  contestations  avec  Jean  d'Albret,  sire 
d'Orval,  pour  le  comté  de  Nevers  (1). 

Nous  avons  l'original  de  deux  jolis  billets  de  Fran- 
çois !•'  de  Clèves,  duc  de  Nevers  depuis  1521,  un  des 
meilleurs  généraux  du  roi  de  France  Henri  II.  Il  avait 
reçu,  en  1552,  le  commandement  d'une  armée  dirigée 
sur  les  Pays-Bas  par  la  Lorraine.  Il  s'empara  de  plu- 
sieurs places  sur  la  Meuse  fortifiées  par  les  Espagnols, 
défendit  Metz  contre  l'armée  de  Charles-Quint,  qui  fut 
contraint  à  lever  le  siège,  et  combattit  à  Toul  dans 
les  mêmes  conditions,  obligeant  celui-ci  à  abandonner 
définitivement  la  contrée. 

C'est  dans  les  détails  de  cette  campagne  qu'il  faut 
placer  les  deux  écrits  dont  nous  parlons  :  François  de 
Clèves  étant  à  Châlons  le  25  août  1552,  écrit  aux  élus 
de  Troyes  : 

«  Chers  et  bien  amez,  nous  vous  donnons  commis- 
mission  pour  lever  en  vostre  eslection  jusques  au 
nombre  de  deux  cens  chars,  charriots  et  charrettes 
d'artillerye  à  quoy  vous  ne  fauldrez  de  satisfaire 
incontinent  ». 

Cinq  jours  après  il  renouvelle  sa  demande;  il  lui 
faut  ses  voitures  le  5  septembre  pour  le  plus  tard  : 
«  Gardez-vous  bien  d'y  faire  faulte,  ajoute-t-il,  car 
aultrement  le  service  du  Roy  en  pourroyt  estre 
retardé  (2)  ». 

(1)  Art  de  vérifier  les  dcUes,  H,  p.  576. 

(2)  Original  de  ces  deux  lettres.   Bibliothèque   nationale,   collection 
Puchesne,  vol.  97  M«,  fol.  273  et  375. 


On  savait  qu'il  fallait  exécuter  ces  ordres  sous  les 
peines  les  plus  sévères. 

La  copie  de  Duchesne  du  contrat  de  mariage  de 
François  II  de  Clèves  nous  a  donné  l'occasion  d'éclaircir 
un  point  douteux  de  notre  histoire  nivernaise. 

Selon  Y  Art  de  vérifier  les  dates  (1),  François  II  fut 
marié  à  Marie  de  Bourbon  d'Etouteville,  sans  com- 
pléter la  date.  Puis  le  môme  ouvrage  ajoute  en  note  : 

«  Le  P.  Anselme  se  contredit  en  donnant  (t.  III, 
p.  451)  pour  femme  à  François  II  de  Clèves  Anne  de 
Bourbon-Montpensier,  après  lui  avoir  donné  (t.  I«', 
p.  220)  Marie  de  Bourbon,  duchesse  d'Etoute ville  et 
comtesse  de  Saint-Paul  ;  il  est  certain  que  François  IL 
mort  à  vingt-trois  ans,  ne  fut  pas  marié  deux  fois  ». 

Les  actes  de  la  vie  de  ce  prince  sont,  en  effet,  de  fort 
courte  diu*ée,  six  ans  au  plus,  en  admettant  qu'il 
pouvait  jouer  un  rôle  à  partir  de  seize  ans. 

François  II,  né  le  31  juillet  1540,  duc  de  Nevers  à 
la  mort  de  son  père  en  1562,  fut  blessé  le  26  octobre 
au  siège  de  Rouen,  et  reçut  une  seconde  blessure  plus 
grave  deux  mois  après,  le  19  décembre,  à  la  bataille 
de  Dreux,  d'un  coup  de  pistolet  que  l&cha  par  accident 
Imbert  des  Bordes,  gentilhomme  nivernais  des  plus 
distingués,  qui  était  de  sa  suite.  Le  duc  mourut  des 
suites  de  cette  blessure  le  10  janvier  1563,  à  l'âge  de 
vingt-trois  ans,  sans  enfants.  Le  duché  de  Nevers 
passa  à  Jacques,  son  frère,  mort  un  an  après,  en  1564, 
laissant  le  duché  à  sa  sœur  aînée,  Henriette,  devenue, 
le  4  mars  1566,  femme  de  Louis  de  Gonzague. 

Il  y  a  lieu  de  rectifier  ces  mariages,  sur  lesquels  on 
s'est  trompé. 

L'erreur  chez  les  auteurs,  malgré  tout  le  soin  qu'ils 
ont  apporté  dans  l'établissement  de  leurs  filiations,  est 

(i)  T.  n,  p.  579. 
T.  IX,  9*  série,  ^ 


—  402  - 

très  explicable  avec  la  multiplicité  des  mariages,  la 
brièveté  de  la  vie  des  seigneurs  et  la  similitude  des 
noms. 

Laissons  les  ouvrages  imprimés  et  prenons  seulement 
les  actes. 

Nous  avons  un  premier  traité  de  mariage  ratifié  par 
lettres  royales  datées  du  2  octobre  1559,  Saint-Ger- 
main-en-Laye.  La  copie  de  ce  document  existe  dans  la 
Collection  Duchesne  et  en  second  exemplaire  dans  les 
Manuscrits  de  Baluze  (aujourd'hui  ms.  fr.  5121, 
fol.  60  v^),  où  il  porte  la  date  du  2  octobre  1560. 

L'existence  de  ce  traité  ne  saurait  donc  être  mise  en 
doute.  Voici  les  principales  clauses  qu'il  contenait  : 

Marie,  &gée  de  dix-neuf  ans,  était  fille  unique  de 
François  de  Bourbon,  duc  d'Etouteville,  comte  de 
Saint-Paul^  sous  la  tutelle  de  sa  mère. 

Il  fut  convenu  que  les  deux  titres  de  Nevers  et 
d'Etouteville,  ainsi  que  les  armes,  seraient  portés  par 
les  futurs  époux.  «  Ils  seront  ims  et  communs  en  biens, 
meubles  et  conquests  et  immeubles  à  eux  eschoir,  sauf 
ceux  acquis  auparavant,  lesquels  resteront  propres  à 
chacun. 

»  Le  duc  de  Nivernois  assurera  aux  enfants  du  second 
mariage  une  somme  de  vingt  mille  livres  à  établir  sur 
les  terres  de  Beaufort,  Amplepuis,  Thizy  et  autres 
en  Beaujolais,  en  se  réservant  le  droit  de  vendre  les 
bois  de  haute  futaie  et  môme  d'assigner  ailleurs  ladite 
somme  s'il  veut  reprendre  les  terres. 

))  En  cas  de  décès  de  son  mari,  la  future  épouse  recevra 
pour  renoncer  à  la  communauté  cinquante  mille  livres 
de  rentes;  elle  reprendra  tous  ses  meubles,  bagues, 
joyaux,  vestements  et  accoustrements,  ainsi  que  ceux 
qu'elle  aura  de  sa  mère,  vaisselle  d'argent,  autres  ustan* 
cilles  et  ornements  de  maison,  tapisseries.  Cotil- 
lons, etc. 


—  403  — 

»  Elle  aura  en  .douaire  une  rente  de  vingt  mille  livres 
avec  jouissance  d'un  chastel  ou  maison  pour  sa 
demeure^  à  la  désignation  de  son  époux,  et  deux  mille 
écus  pour  le  meubler  (1)  ». 

Marie  de  Bourbon  avait  déjà  été  mariée  à  Jean  de 
Bourbon,  duc  d'Enghien,  tué  en  1557  à  la  bataille  de 
Saint-Quentin.  Elle  était  donc  veuve  depuis  trois  ans 
quand  eut  lieu  ce  projet  d'union. 

Etablissons  d'abord  la  date  au  2  octobre  1560,  un  an 
après  la  mort  de  la  comtesse  Marguerite  de  Bourbon, 
première  femme. 

Cherchons  ensuite  quel  était  le  comte  de  Nevers  qui 
traitait  de  son  mariage. 

Les  deux  copies  de  Duchesne  et  Baluze  portant  les 
dates  1559  et  1560,  cette  dernière  est  la  seule  bonne 
et  acceptable.  Ces  deux  copies  portent  aussi  en  titre, 
François  II  et  François  second,  induisant  en  erreur 
aussi  bien  le  P.  Anselme  que  Y  Art  de  vérifier  les  dates, 

Dans  les  contrats  de  mariage  les  parents  des  futurs 
comparaissent  toujours  pour  assurer  les  conditions 
et  les  apports  de  fortune.  Or,  dans  l'acte  du  2  octobre 
1560,  le  père  du  futur,  qui  était  le  duc  François  I®'  de 
Clèves,  ne  comparait  pas,  le  futur  agit  seul  pour  son 
propre  compte.  Il  ne  saurait  donc  être  question  du 
mariage  de  François  II,  âgé,  en  1560,  de  vingt  ans 
seulement,  mais  d'un  second  mariage  de  François  I«', 
que  les  historiens  ont  passé  sous  silence. 

François  P'  de  Clèves  était  né  le  4  octobre  1516, 
à  Cuffy-sur-Loire  ;  il  avait  épousé  Marguerite  de 
Bourbon,  deuxième  fille  du  duc  de  Vendôme,  le 
19  janvier  1538.  La  vie  de  cette  princesse  est  assez 
connue  et  surtout  sa  mort  à  La  Chapelle-d'Ângillon, 

(1)  GoU.  Duchesne,  n*  3,  fol.  lOQ. 


—  404  - 

le  SO  octobre  1559^  ainsi  que  ses  obsèques  «  en  Teglise 
des  Cordelliers  du  château  de  Nevers  (1)  ». 

Le  duc  François  !•'  se  trouvait  donc  veuf  à  qua- 
rante-trois ans  et  se  maria  en  secondes  noces  à 
Marie  de  Bourbon,  jfiUe  du  duc  d'Etouteville,  le 
2  octobre  1560,  veuve  elle-même  de  Jean  de  Bourbon, 
duc  d'Enghien,  tué  en  1557  à  la  bataille  de  Saint- 
Quentin. 

Le  P.  Anselme  ne  mentionne  pas  ce  deuxième 
mariage,  et  Y  Art  de  vérifier  les  dates  l'attribue  au  fils 
au  lieu  du  père.  Les  faits  se  suivent  désormais  et 
s'accordent  parfaitement. 

Le  !•'  septembre  1561  survient  un  autre  contrat  de 
mariage  où  comparaissent  les  personnages  suivants  : 

1^  Louis  de  Bourbon,  duc  de  Montpensier,  et  Anne 
de  Bourbon,  sa  fille  ; 

2®  François,  duc  de  Nivernois  et  d'Etouteville,  et 
François  de  Clèves,  comte  d'Eu,  etc.,  fils  aîné  dudit 
duc  de  Nivernois. 

Le  contrat  est  passé  en  présence  du  Roi  et  de  la 
reine -mère,  à  Saint  -  Germain  -  en  -  Laye,  devant 
Antoine  du  Prat,  prévôt  de  Paris. 

Le  titre  d'Etouteville  pris  par  le  duc  François  !•' 
prouve  le  contrat  de  l'année  précédente,  où  il  était 
libellé  qu'il  réunirait  les  deux  noms  ;  il  indique  d'une 
façon  indubitable  que  le  mariage  avait  bien  été 
contracté  par  lui  et  non  par  son  fils. 

Le  duc  François  I®'  meurt  le  13  février  suivant, 
1562  (n.  s.),  après  deux  ans  de  mariage,  laissant  veuve 
Marie  de  Bourbon,  qui  se  remaria  à  Léonor  d'Orléans, 
duc  de  Longueville. 

Le  règlement  du  douaire  de  cette  princesse  eut  lieu 
par    acte  du  26  août  1566  et  par   l'entremise    de 

(1)  Manuscrits  françaù  5131,  fol.  59  v*. 


—  405  — 

Lodovico  de  Gonzague  et  Henriette  de  Clèves  (1). 
Il  y  est  dit  que  son  époux  mourut  <(  le  13^  jour  de 
febvrier  mil  cinq  cens  soixante  ung  »  (1562  n.  s.)  ; 
qu'elle  avait  assigné  inutilement  François  et  Jacques 
de  Clèves,  héritiers  du  duché,  et  qu'enfin  les  deux 
parties  se  mettaient  d'accord  en  payant  une  somme  de 
63.125  livres,  plus  un  douaire  annuel  de  7.000  livres 
tournois. 

François  II,  devenu  duc  de  Nivernois  à  la  mort  de 
son  père,  le  13  février  1562,  ne  lui  survécut  qu'une 
année,  étant  mort  lui-môme  de  suites  de  blessure,  le 
10  janvier  1563  (n.  s.). 

Il  y  eut  à  partir  de  ce  moment  deux  douaires  de 
duchesses  de  Nevers  qui  n'étaient  pas  arrêtés,  ces 
choses  étant  toujours  très  longues  à  terminer. 

En  résumé,  nous  rétablissons  la  filiation  embrouillée 
des  ducs  de  Nevers,  ainsi  qu'il  suit  : 

François  I^  de  Clèves,  né  à  Cufify  le  4  octobre  1516, 
marié  :  1^  à  Marguerite  de  Bourbon,  le  19  janvier 
1538,  dont  il  eut  cinq  enfants  ; 

2®  A  Marie  de  Bourbon  d'Etouteville,  le  2  octobre 
1560,  restée  veuve  sans  enfants  le  13  février  1561-62. 

François  II  de  Clèves,  marié  le  1^'  septembre  1561  à 
Anne  de  Bourbon-Montpensier,  restée  veuve  sang 
enfants  le  10  janvier  1563. 

Elle  ne  se  remaria  pas  et  fut  dame  d'honneur  de  la 
reine-mère.  Nous  avons  une  quittance  d'elle,  datée  du 
25  octobre  1567,  dont  le  texte  peut  offrir  de  l'in- 
térêt (2): 

((  Nous,  Anne  de  Bourbon,  duchesse  douairière  de 
Nevers,  dame  en  la  maison  de  la  Royne,  mère  du 
Roy,  confessons  avoir  eu  et  reçeu  comptant  de  Pierre 

(1)  Manuscrits  français  4684,  fol.  169,  où  Facte  est  transcrit  in  extemo. 
(S)  Ms.  fir.  20996,  fol.  49. 


—  406  - 

de  Picquos,  conseiller,  trésorier  et  receveur  gênerai  deg 
finances  et  maison  de  ladite  dame,  la  somme  de  quatre 
cens  livres  trnois  en  testons  et  douzains,  à  nous 
ordonnée  par  la  Majesté  d'icelle  dame  pour  nostre 
estât  de  dame  en  sadite  maison,  d'une  demye  année 
finye  le  dernier  jour  de  décembre  mil  cinq  cens  soixante 
six  dernier  passé  à  raison  de  VIII  cents  livres  par  an, 
de  laquelle  somme  de  IIII<^  livr.  tr.  nous  nous  tenons 
pour  contente  et  bien  payée,  et  en  avons  quicté  et 
quictons  ledit  de  Picques,  trésorier,  dessus  nommé  et 
tous  autres.  En  tesmoing  de  ce  nous  avons  signé  la 
présente  de  nostre  main  et  à  icelle  faict  mectre  le  scel 
de  noz  armes  le  25™«  jour  d'octobre  Fan  mil  cinq  cens 
soixante-sept. 

0  Anne  de  Bourbon  (sceau  sur  papier)  ». 

Jacques  de  Clèves,  duc  à  la  mort  de  son  frère, 
épouse  Diane  de  la  Marck,  et  la  laisse  encore  veuve 
sans  enfants  le  6  septembre  1564. 


—  407  — 


CHRONIQUE  ET  MÉLANGES 


Pour  l'année  1901 


Dans  le  cours  de  cette  année,  les  lectures  faites  à 
nos  séances  n'ont  pas  manqué  d'intérêt.  Elles  ont  été 
principalement  occupées  par  les  études  que  poursuit 
M.  le  chanoine  Sery,  sur  les  abbayes  et  couvents  de  la 
ville  de  Nevers,  et  tout  récemment  par  les  curieuses 
investigations  de  notre  nouveau  confrère,  M.  Boyer, 
sur  la  vie  municipale  à  Dampierre-sous-Bouhy  pendant 
la  Révolution. 
Ces  articles  paraîtront  dans  le  Bulletin, 
Je  vais  passer  rapidement  en  revue  les  diverses 
communications  et  autres  faits  consignés  dans  nos 
procès-verbaux  afin  d'en  conserver  le  souvenir,  men- 
tionner la  mémoire  et  les  mérites  des  sociétaires 
décédés,  et  rappeler  les  noms  de  ceux  que  vous  avez 
admis. 

—  A  la  séance  du  31  janvier,  M.  Jullien  fait  don  à  la  Société 
d'un  vase  trouvé  par  lui  à  roccasion  des  travaux  exécutés 
autour  de  l'église  Saint- Etienne,  en  exprimant  le  regret  de 
s'être  pris  trop  tard  à  surveiller  les  fouilles. 

—  Le  compte  du  trésorier  pour  l'exercice  1900  est  soumis  à 
la  séance  du  28  février  1901.  Le  solde  en  caisse,  le  produit  des 
cotisations,  les  subventions  de  PEtat  et  du  département  se  sont 
élevés  à  la  somme  exceptionnellement  importante  de  3.575  fr. 
Il  a  été  remis  à  M.  Gauthier  les  300  fr.  de  l'Etat  pour  les 
fouilles  gallo-romaiaes  de  Champvert  ;  la  Société  lui  a  alloué 


—  408  — 

100  fr.  ;  il  a  été  fait  une  commande  de  jetons  d'argent  de 
161  fr.  Dans  le  courant  de  1901,  la  Société  a  encore  contracté 
diverses  dépenses  extraordinaires,  mais  comme  vous  le  verrez 
dans  le  prochain  compte,  la  situation  de  ses  finances  est  restée 
assez  satisfaisante. 

—  La  Société  vote  une  somme  de  150  fr.  pour  l'acquisition 
du  rétable  de  Tautel  de  l'église  de  Grenois,  auparavant  à 
l'église  de  Bethléem  de  CSlamecy,  qui  fait  maintenant  partie 
de  notre  musée. 


NOTICE  SUR  L'ABBÉ  BOGROS,  CURÉ  DE  MARZY, 

DÉCÉDÉ  LE  11  FÉVRIER  1901 

M.  Bogros  avait  une  âme  de  poète.  Le  moindre  événement 
était  pour  lui  l'occasion  de  charmantes  poésies,  à  la  fois  pieuses 
et  élégantes  qui,  pour  la  plupart,  sont  restées  manuscrites. 
Par  hasard  j'ai  pu  lire  un  apologue  :  Les  deux  frères^  et  des 
sonnets  à  la  Sainte-Vierge,  où  l'on  remarque  ces  jolis  vers  : 

D  est  de  ces  plears  sur  la  terre 
Versés  dans  l'ombre  et  le  mystère, 
Et  ces  pleurs  là  valent  du  sang. 

Je  citerai  encore  la  Lettre  à  une  jeune  mère,  où  éclate  à 
chaque  instant  la  délicieuse  tendresse  de  son  cœur,  comme 
dans  ces  vers  à  propos  des  jeux  du  bébé  : 

11  te  reviendra  triomphant, 
Un  peu  hâlé,  mais  frais  comme  un  bouton  de  rose. 
Le  visage  parfois  plein  de  ces  pleurs  d'enfant 
Qu*nn  mot,  la  moindre  chose, 
Suffit  pour  apaiser  ; 
Ou  de  sueurs  que  tu  boiras  dans  un  baiser. 

Cette  poésie  a  été  couronnée  par  l'Académie  des  Jeux 
floraux  en  1899,  ainsi  que  son  discours  en  prose  sur  c  La  Part 
de  Tâme  et  celle  du  corps  dans  l'éducation  ». 

n  a  fait  paraître  deux  ouvrages  importants  :  Y  Antéchrist, 


—  409  — 

ia-12  de  382  pages  (Saint-Amand,  Desienay,  1892),  et  la 
GenèsBy  in-8<>  de  340  pages  (Nevers,  Qoix,  1894). 

VAntëchriat  s'adresse  aux  «  âmes  faites  pour  les  hautes 
spéculations  religieuses  ».  L'auteur  dit,  dans  son  préambule, 
que  ((  pas  une  page  dans  l'Evangile  et  dans  les  écrits  des 
apôtres  où  du  commencement  à  la  fin  il  ne  soit  fait  mention 
de  cette  vérité  si  consolante  pour  les  uns  et  si  terrifiante  pour 
les  autres  d'une  seconde  venue  dans  la  gloire  de  notre  divin 
Sauveur  ». 

Cet  avènement  sera  immédiatement  précédé  de  l'apparition 
de  l'Antéchristy  dont  l'auteur  fait  l'historique  en  cinq  cha- 
pitres :  sa  personnalité,  la  préparation  de  sa  venue,  son  règne, 
sa  défaite,  les  conséquences  de  sa  défaite. 

L'auteur,  se  plaçant  dans  son  rôle  strict  d'historien,  ne 
tombe  pas  dans  les  phrases  vagues  et  les  digressions  presque 
inévitables  d'un  pareil  sujet  ;  il  cite  tous  les  textes  anciens, 
invoquant  l'Antéchrist,  y  ajoutant  des  réflexions  aussi  justes 
que  sobres  et  appliquées  aux  temps  modernes.  Cette  succès* 
sion  de  citations  d'auteurs  de  premier  ordre  de  tous  les  temps, 
depuis  l'Ëcriture-Sainte  jusqu*à  Victor  Hugo,  se  rattachant  à 
une  question  aussi  féconde,  offre  une  lecture  vraiment 
instructive  et  attrayante,  ainsi  traitée  avec  esprit,  cœur, 
science  et  simplicité,  qui  sont  les  qualités  maîtresses  de 
M.  Bogros. 

On  ne  saurait  analyser  un  ouvrage  d'une  conception  aussi 
élevée. 

Terminons  par  cette  pensée  consolante  :  Lorsque  l'Antéchrist 
est  défait  et  que  son  rogne  a  disparu,  ce  ne  sera  pas  la  fin 
du  monde  :  «  le  second  avènement  de  Notre-Seigneur  sur  la 
terre  inaugurera  une  ère  de  splendeurs  nouvelles  pour  la 
terre  ». 

Dans  la  Genèse^  M.  Bogros  étudie  l'origine  du  monde  et  de 
l'homme  d'après  les  divers  auteurs  qui  ont  traité  delà  matière, 
les  six  jours  de  la  création,  sur  lesquels  l'Eglise  laisse  la 
liberté  à  toutes  les  opinions  (p.  37).  Il  expose  au  chapitre 
€  Notre  Genèse  »  les  données  de  la  science,  qui  s'accordent 
avec  la  foi,  formulant  sa  conclusion  sur  cette  parole  d'Ampère  : 
€  Ou  Moïse  avait  dans  les  sciences  ^^ç  instruction  aussi 


-410- 

profonde  qae  celle  de  notre  siècle,  ou  il  était  inspiré  (p.  54)  ». 

Au  chapitre  c  Leur  Cîenëse  >>,  il  réfute  les  opinions  positi- 
vistes de  Renan,  Bûchner,  Tyndall,  Hoeckel,  Darwin,  et  il 
ajoute  :  c  Laissons-les  à  leurs  fanges,  laissons-les  à  leurs 
ruines,  ces  prôneurs  d'animalité  et  de  néant  ». 

Le  chapitre  €  Ego  sum  qui  num  »  est  l'apothéose  de  la  nature 
et  de  son  Créateur,  les  beautés  des  montagnes,  des  races 
d'animaux,  des  divers  éléments,  des  races  humaines.  «  Mon 
Dieu,  s'écrie-t-il,  que  vous  êtes  grand,  que  vos  œuvres  sont 
magnifiques,  que  vos  pensées  sont  profondes,  qu'insensé  est 
celui  qui  ne  veut  pas  les  comprendre  (p.  141)  ». 

La  création  de  l'homme  est  traitée  dans  le  chapitre  intitulé 
€  Dons  de  l'amour  »  et  contient  encore  plus  d'enthousiasme* 
l'homme  étant  !a  merveille,  le  complément  de  l'œuvre  divine, 
et  dans  c  Ange  et  démon  >  sont  démontrées  les  influences  sur 
l'homme  des  bons  anges  et  des  esprits  pervers.  Là  encore,  on 
admire  ces  élans  de  l'âme  et  ces  ardents  sentiments  de  foi  qui 
jaillissent  à  chaque  ligne. 

Le  dernier  chapitre,  c  Bonheur  perdu  »,  envisage  les  tristes 
conséquences  de  la  vie  humaine,  c  En  somme,  l'homme  est 
déchu.  Voilà  en  premier  lieu  ce  que  pressent  la  raison  ».  Les 
souffrances,  les  maladies,  la  mort,  seront  la  punition  de  son 
crime,  puis  après  avoir  exposé  les  diverses  dégradations  de 
l'état  primitif  de  l'homme,  c  sUl  ne  fût  devenu  que  sauvage! 
ajoute-t-il,  mais  ses  péchés  actuels  creusant,  de  plus  en  plus, 
l'abîme  de  sa  perversité,  il  devient  de  plus  en  plus  mauvais 
(p.  M7)  ». 

L'abbé  Bogros  se  montre  dans  ses  ouvrages  tel  qu'il  était 
dans  la  vie  privée  :  pieux  et  bon  prêtre,  affectueux  et  sympa- 
thique, d'un  jugement  sûr  et  d'opinions  arrêtées  ;  je  n'ai  qu'un 
regret,  c'est  de  l'avoir  connu  trop  tard,  près  de  sa  belle  église 
romane,  quand  la  longue  maladie  qui  l'a  enlevé  avait  déjà 
affaibli  une  partie  de  ses  brillantes  facultés.   ' 

—  M.  de  Flamare  communique  des  fragments  de  TObituaire 
de  l'abbaye  Notre-Dame  de  Nevers  ayant  été  collés  sur  des 
dossiers  administratifs.  Ces  précieux  restes  de  parchemins 
seront  soigneusement  conservés. 

—  M.  de  Saint-Venant  présente  des  fers  à  cheval  d'un  type 


-411  - 

curieux  qui  lui  semblent  remonter  au  xiiP  siècle  ;  des  brace- 
lets en  bronze  trouvés  à  Cizely  ;  des  moules  à  poterie  samienne 
provenant  de  La  Guerche  et  de  la  collection  de  feu  M.  Roubet  ; 
divers  objets  romains  découverts  par  M.  Mélines,  à  Saint- 
Révérien. 

—  M.  l'abbé  Meunier  expose  Tétymologie  du  nom  de  lieu 
Chaulgnes,  emprunté,  selon  la  coutume  romaine,  au  nom  du 
propriétaire  soumis  à  l'impôt,  villa  Cavanni,  puis  ayant  subi 
diverses  transformations.  La  même  origine,  avec  le  suffixe 
iacum^  se  retrouve  à  Chevigny,  Chaigny,  Chougny  ;  dans  le 
Nord,  Chaulnes  ;  dans  le  Midi,  Chavagnac. 

—  Un  passage  d'une  lettre  de  M.  l'Administrateur  de  la 
fabrique  de  Sèvres  porte  que  «  les  faïenciers  •  de  Nevers 
seraient  des  artistes  d'ordre  inférieur. 

M.  Massillon  Rouvet  proteste  en  donnant  cette  citation 
comme  contraire  à  la  tradition  admise  dans  l'art  de  la  faïence. 
M.  de  Toytot  ajoute  quelques  observations  dans  le  même  sens. 

Cette  opinion  est  purement  personnelle  et  ne  concerne  nul- 
lement l'école  de  la  manufacture  de  Sèvres. 

—  Description  du  rétable  de  Jean  de  Bourgogne,  occupant  un 
des  côtés  de  la  chapelle  Saint-Jean-Baptiste  à  la  cathédrale,  par 
M.  le  chanoine  Sery. 

—  M.  Paul  Meunier  donne  plusieurs  détails  sur  la  curieuse 
vie  de  Jean  (^lasimir,  roi  de  Pologne,  que  plusieurs  ont  fait  à 
tort  abbé  de  Saint-Martin  de  Nevers.  Il  est  mort  à  Nevers  ; 
son  testament  est  daté  de  Nevers,  12  décembre  1632.  La  bulle 
du  Pape  du  9  mars  1669  ne  porte  pas  Saint-Martin  parmi  ses 
bénéfices  ;  aucun  acte  ne  l'indique  comme  abbé  ;  Jacques  de 
Vienne  reste  toujours  en  possession  de  l'abbaye. 

—  A  l'occasion  des  recherches  sur  Casimir,  à  Saint-Germain- 
des-Prés,  M.  de  Lespinasse  recueille  les  mentions  suivantes 
sur  des  Nivernais  : 

Dom  Thomas  de  Sainte-Marie,  alias  Rapine,  décédé  le  mardi 
25  juin  1652,  enterré  dans  la  nef  de  la  grande  chapelle  de 
Notre-Dame,  proche  la  porte  du  chœur. 

De  son  vrai  nom  Guillaume  Rapine,  né  à  Nevers,  et  profès 
de  Corbie  à  vingt-six  ans,  le  9  juin  1619.  Il  fut  prieur  à  Saint- 
Quentin  et  à  Saint-Lomer  de  Blois,  de  1628  à  1631.  En  1635, 


-Ha- 
ll servait  de  secrétaire  au  visiteur  de  la  province  de  France  ;  il 
résida  à  Saint-Germain-des-Prés  au  moins  dès  4645;  il  y 
exerça  assez  longtemps  la  charge  de  sous-prieur;  ses  infirmité 
l'obligeant  à  démissionner,  il  fut  néanmoins  conservé  comme 
senieur.  (Vanel,  p.  43;. 

Dom  Etienne  Perreau,  de  Corbigny,  profès  de  Vendôme,  le 
46  avril  4663,  religieux  de  Sainte-Colombe  de  Sens  ;  venu  à 
Saint-6ermain-des*Prés  pour  se  faire  soigner  d'une  hydropisie, 
y  meurt  le  40  octobre  4680  (4). 

—  Dans  la  séance  du  30  mai  a  lieu  le  renouvellement  triennal 
des  membres  du  bureau,  qui  sont  tous  réélus. 

—  Un  journal  des  Vosges,  cité  par  M.  le  comte  de  Domger- 
main,  annonce  la  découverte,  dans  la  cathédrale  de  Saint- 
Dié,  d'un  tombeau  attribué  au  fondateur  de  la  ville,  décédé  à 
Cambert,  en  679,  inhumé  à  Notre-Dame,  puis  replacé  au 
X*  siècle  dans  la  cathédrale  Saint-Maurice.  Il  s'agit  évidem- 
ment de  Saint-Dié,  évéque  de  Nevers,  dont  le  souvenir  est 
resté  populaire  dans  notre  pays. 

—  H.  de  Lespinasse  présente  une  statuette  en  bois,  de  la  part 
de  M.  Serrés,  inspecteur  des  enfants  assistés.  Travail  du 
xvi«  siècle,  très  fin  pour  la  pose  et  la  chute  des  étoffes.  Elle 
se  trouvait  dans  l'ancienne  chapelle  de  Beauregard,  paroisse 
d'Arleuf,  où  elle  était  vénérée  sous  l'invocation  de  sainte 
Agathe  par  les  nourrices  du  Morvan,  qui  l'appelaient  commu- 
nément sainte  Mamelle. 

La  statuette  ne  saurait  être  attribuée  à  sainte  Agathe,  ordi- 
nairement représentée  avec  un  sein  coupé.  Néanmoins,  le 
pieux  souvenir  des  Morvandelles  mérite  un  respectueux 
intérêt  auquel  s'ajoute  Texécution  artistique  de  l'objet. 

—  A  la  séance  du  27  juin,  la  Compagnie  reçoit  exceptionnel* 
lement  M.  Mégret,  teinturier  à  Nevers,  qui  présente  divers 
fragments  de  poteries  gallo-romaines  trouvées  dans  les  fouilles 
de  son  immeuble  situé  sur  l'emplacement  du  cimetière  de 
l'abbaye  primitive  de  Saint-Martin.  Ces  fouilles  ont  fait  décou- 
vrir une  quantité  importante  de   sarcophages   de  diverses 


(1)  Nécrologê  des  Bénédictins  de  Saint-Maur  décédés  à  Saint^Ger- 
main-deS'Prés  de  i690  à  i79f,  par  Tabbé  Yanei,  1896,  in-4». 


-  413  — 

époques,  dont  les  plus  anciens  peuvent  remonter  aux  viii'  et 
ix*  siècles  ;  forme  évasée,  large  à  la  tète,  rétrécie  aux  pieds, 
pierre  d'une  seule  pièce  creusée  dans  le  bloc,  couvercle  en  dos 
d'âne,  pierre  d'un  grain  fin  assez  dur,  aucun  signe,  sauf  sur 
trois  ou  quatre  des  lignes  en  forme  de  croix. 

Quelques  sarcophages  plus  petits  se  composaient  de  plu- 
sieurs moellons  posés  debout  et  sur  place  avec  des  joints  de 
mortier,  en  prenant  tous  les  contours  du  squelette. 

La  Compagnie  a  assisté  plusieurs  fois  à  des  ouvertures  de 
tombeaux.  Il  a  été  trouvé  peu  d'objets  intéressants  à  côté  des 
ossements  ;  M.  Mégret  les  a  tous  recueillis  avec  soin,  mais  il 
est  regrettable  que  les  sarcophages  et  les  ossements  aient  été 
l'objet  d'une  véritable  mutilation  de  la  part  des  ouvriers  et  des 
passants,  très  nombreux  à  cet  endroit. 

Sur  une  quarantaine  de  sarcophages,  trois  fragments,  por- 
tant des  signes,  ont  été  réservés  au  musée  de  la  Porte  du 
Croux,  un  autre  est  chez  M.  Joseph  Barreau,  au  Pont-Saint* 
Ours,  et  un  sarcophage  complet  avec  son  couvercle  est  chez 
M.  de  Lespinasse,  à  Luanges. 

—  Plusieurs  dons  ont  été  faits  au  musée  de  la  Porte  du  Croux: 
Par  M.  Mégret,  deux  pierres,  en  forme  de  fût  de  colonne, 

qui  paraissent  provenir  du  portail  de  l'ancienne  église  Saint- 
Martin  ; 

Par  M.  Morlon,  carrier  au  Greux,  commune  d'Urzy,  plu- 
sieurs fragments  gallo-romains,  parmi  lesquels  un  débris  de 
statuette  attribué  à  la  déesse  Epona,  dont  il  est  question  dans 
le  BuMetin  ;  il  sera  convenu  que  le  nom  de  notre  confrère 
M.  Edmond  Hugon,  propriétaire  de  la  carrière,  sera  joint  à 
celui  du  donateur  ; 

Enfin,  par  notre  confrère  M.  Joseph  Boigues^  un  grelot  d'ani^ 
mal,  une  petite  monnaie  et  un  lacrymatoire,  de  l'époque  gallo- 
romaine,  trouvés  par  lui  près  d'Autun,  à  l'usine  de  la  porte 
Saint-André. 

La  Société  leur  vote  à  chacun  un  jeton  d'argent,  à  titre  de 
remerciement. 

—  A  l'occasion  des  fouilles  faites  à  l'intérieur  de  la  cathédrale 
pour  la  construction  du  calorifère,  M.  Massillon  Rouvet  expose 
qu'à  une  profondeur  de  trois  mètres  on  a  découvert  des  ves- 


—  414  — 

tiges  dô  constructions,  entre  autres  une  sorte  de  cul-de-four 
présentant  des  traces  de  feu,  mais  sans  aucun  caractère  de 
substructions  d'une  ancienne  église. 

—  M.  Paul  RebouHeau^  ancien  banquier  à  Decize,  décédé  le 
20  novembre  dernier,  était  membre  de  notre  Société  depuis 
deux  ans.  Il  s'intéressait  aux  fouilles  de  Champvert.  A  son 
château  de  iievanges,  il  avait  trouvé  un  vase  gallo-romain  qu'il 
avait  confié  à  M.  Gauthier.  Il  possédait  un  très  curieux  docu- 
ment traitant  d'une  procédure  entre  un  seigneur  de  Beauvoir 
et  un  religieux  Minime  de  Decize. 

—  Echange  de  BuUetins  avec  la  Société  des  sciences  et  arts 
du  Beaujolais  ; 

La  Société  archéologique  de  Montpellier  ; 
La  Société  historique  de  Beaune  (Côte-d'Or)  ; 
La  Société  archéologique  de  la  Charente. 

—  Ouvrages  offerts,  outre  les  nombreuses  publications  des 
Sociétés  savantes  et  des  échanges  internationaux  : 

Diverses  brochures  historiques  et  artistiques  ; 
Documents  historiques  sur  la  maison  de  Galard-Béam. 

*-  Les  nouveaux  sociétaires  admis  dans  le  cours  de  l'année 
sont,  par  ordre  d'élection  : 

MM.  Charles  Tiersonnier,  présenté  par  MM.   de  Toytot 

et  de  Lespinasse  ; 
Fichot  fils,  pharmacien  à  Nevers,  par  MM.  Sery  et 

Massillon  Rouvet  ; 
Paulin  Girard,  chef  de  division  à  la  préfecture,  par 

MM.  de  Fiamare  et  Jullien  ; 
Gabriel  Montagnon,  manufacturier,  par  MM.  de  Saint- 
Venant  et  de  Fiamare  ; 
Auguste  Boyer,  à  Dampierre-sous-Bouhy,  par  MM.  de 

Fiamare  et  de  Lespinasse  ; 
Charles  Hugon,  à  Urzy,  par  MM.  Sery  et  Le  Blanc 

Bellevaux  ; 
Joseph  Andrieu,  à  Nevers,  par  MM.  le  comte  de 

Maumigny  et  Charles  Tiersonnier; 


J 


-415- 

MM.  Paul  Mohler,  juge-suppléant,  par  MM.  de  Flamare  et 
Sery  ; 
André  Philippe,  archiviste  delà  Lozère,  par  MM.  Sery 

et  de  Flamare  ; 
Moutillon  (l'abbé),  curé  de  Saint-Martin-d'HeuilIe, 
par  MM.  Dasse  et  CSachet. 

R.  DE  L. 


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I  I 


t 


ttûff,  Imp.  9.  Yêlllèi%. 


Prieuré  de  Commagny. 

(D'après  un  (Ipsïiti  du  (-ommandant  Barai). 


-417-. 


NOTICE  SUR  COMMAGNY 


Origines. 

La  partie  nivernaise  de  lancien  diocèse  d'Autun  est 
très  considérable.  Deux  archiprêtrés  très  importants, 
celui  de  Luzy  et  de  Corbigny,  en  dépendaient.  Le 
chapitre  de  l'église  cathédrale  d'Autun  avait  des  biens 
et  des  droits  à  Corbigny  et  à  Marigny. 

Les  documents  concernant  ces  archiprêtrés,  les  col- 
légiales de  Cervon,  Ternant,  les  ursulines  de  Corbigny, 
les  chartreux  du  Val-Saint-Georges,  l'hôpital  et  la 
léproserie  de  Luzy  sont  déposés  aux  archives  de 
Mâcon. 

Quant  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  d'Autim,  elle 
avait  des  droits  et  des  biens  à  Beunas,  et  ses  prieurés 
de  Château-Chinon,  Saint-Pierre-le-Moûtier,  Saint- 
Saulge  et  Commagny  (1). 

M.  BuUiot  rapporte,  dans  son  Essai  historique  sur 
V abbaye  de  Saint-^Martin  d'Autun,  de  l'ordre  de  saint 
Benoit  ((  que  Brunehilde  employa  les  années  de  paix 
dont  jouirent  ses  Etats,  à  les  pourvoir  de  nombreux 
établissements  ecclésiastiques  ;  et  qu'elle  ne  donna  à 
aucune  ville  une  organisation  religieuse  aussi  complète 
qu'à  Autun  ». 

(1)  Noos  n'avons  tronvé  dans  De- Vit,  Onomasticon,  ni  ailleurs,  ni  Commâ- 
nius,  Gummanius,  Cummanus,  Colmanus,  Colmanius,  etc.  Dans  l'impossibi- 
lité de  rattacher  ienotn  de  Commagny  à  aucun  gentilice  connu,  nous  nous 
bornons  à  mentionner  ces  anciennes  appellations  :  Prioratus  de  Gomma- 
gniaco,  1161  ;  Ecclesia  de  Colmaniaco,  1164  ;  Commagniacum,  1180  ; 
Comaigni,  1194;  Commoigniacum,  1287;  Comaigny,  1293;  Comeignia- 
cum,  1334  ;  Comigniacum,  1367  ;  Coumagny,  1567. 

T.  IX;  3*  série.  27 


\ 


Dans  le  pays  éduen,  sillonné  de  voies  romaines, 
où  subsistaient  plus  que  partout  ailleurs  des  restes  de  la 
civilisation  romaine,  à  côté  de  souvenirs  druidiques, 
Brunehilde,  riche  de  grandes  possessions  que  les  expro- 
priations de  la  conquête  avaient  fait  passer  entre  les 
mains  des  Barbares,  «  Germaine  représentant  la  dé- 
fense héroïque  de  la  civilisation  romaine  ^  (1),  érigea 
des  monastères  destinés  à  abriter  la  science  et  la 
contemplation  des  disciples  de  saint  Martin  et  de 
saint  Benoit.  Des  colonies  de  moindre  importance  que 
le  monastère  de  Saint-Martin  d'Autun  se  répandi- 
rent, par  les  soins  de  la  reine,  sur  les  points  secon- 
daires du  pays  éduen  (2) . 

Une  de  ces  colonies  fut  rétablissement  religieux  de 
Commagny .  Mais  aussi  bien  que  les  premiers  moments 
de  l'abbaye  d'Autun,  à  laquelle  Brunehilde  avait  voulu 
préparer  un  grand  avenir,  les  premiers  moments  de 
rétablissement  religieux  de  Commagny  sont  demeurés 
couverts  de  ténèbres.  Un  point  certain,  c'est  que  les 
fondations  religieuses  de  Brunehilde  étaient  faites  dans 
des  lieux  consacrés  auparavant  aux  cultes  païen,  latin  ou 
gaulois.  Commagny  devait  être  un  de  ces  lieux. 

«  En  même  temps  que  les  religieux  de  Saint-Martin 
établissaient  les  prieurés  de  Saint-Pierre-le-Moûtier  et 
de  Saint-Saulge,  défrichant  d'un  côté  les  terres  fer- 
tiles de  la  contrée  entre  la  Loire  et  l'Allier,  et  de  l'au- 
tre les  lisières  du  Bazois  et  des  Amognes,  une  autre 
colonie,  s'éloignant  moins  de  la  maison-mère,  venait 
se  fixer  sur  un  des  contre-forts  des  montagnes  du 
Morvan,  du  côté  dont  les  bases  sont  arrosées  par  les 
eaux  réunies  du  Gaza  et  du  Guignon  (3)  »,  c'est-à-dire 

(1)  MONTÉOUT,  Souvenirs  de  Bourgogne^  p.  95. 

(2)  BuLLiOT,  t.  !•%  p.  Lix,  Introduction. 

(3)  Les  CongrégcUUms  religieiues  dans   le  dioeèse  de   Neoers^   par 
ULr  Grosnier,  p.  140. 


-419-. 

au  point  où  sont  Commagny  et  James,  James,  la 
fondation  la  plus  proche  de  [Commagny.  En  effets 
sur  un  plateau  entre  Moulins-Engilbert  et  Commagny 
est  le  village  de  James,  habité  par  des  carriers.  Il  exis- 
tait là  une  chapelle  dédiée  à  Notre-Dame,  ainsi  qu  un 
petit  prieuré  de  bénédictins  réuni  en  dernier  lieu  à 
Commagny.  La  chapelle  était  desservie  par  un  prêtre; 
elle  le  fut  ensuite  par  le  prieur  de  Commagny,  enfin 
par  le  curé  de  la  paroisse  (1). 

Nous  avons  pensé  qu'en  raison  de  l'antiquité  de 
Commagny,  des  souvenirs  qui  rattachent  ce  village  à 
Thistoire  de  Brunehilde  ainsi  qu'à  celle  de  l'abbaye  de 
Saint-Martin  d'Autun,  une  notice  sur  Commagny  pré- 
senterait quelque  intérêt. 

Il  faut  vous  dire  que  Commagny,  au  sud  de  Mou- 
lins-Engilbert, sur  une  hauteur  couverte,  depuis  les 
temps  les  plus  reculés,  de  vignobles  et  d'arbres  frui- 
tiers, s'élève  en  avant  du  Morvan  et  que  le  clocher 
de  sa  vieille  église  est  aperçu  de  différents  points  de 
la  région  où  commence  le  Bazois. 

Commagny  fut  le  siège  d'un  ancien  prieuré,  le  plus 
riche  des  sept  qui  formaient  les  dépendances  du 
monastère  de  Saint-Martin  d'Autun,  et  forma  une 
paroisse  (1). 

Il  est  probable,  suivant  M^  Crosnier,  que  l'on  s'est 
contenté  de  construire  primitivement,  à  Commagny, 
une  cella,  qui  plus  tard  devint  un  prieuré  conventuel 
d'une  certaine  importance,  puisque  le  prieur  fut 
coUateur  des  églises  de  Moulins-Engilbert,  de  James, 
de  Sainte-Marie  près  d'Achun  et  de  Saint-Péreuse. 

Les  plus  anciens  documents  dans  lesquels  il  est 
question  de  Commagny  sont  : 

(1)  Voir  pour  sa  consistance  la  Tisite  reproduite  plus  loin. 

(2)  Le  Mcrvan  ou.  essai  géographique  sur  cette  contrée,  par  l'abbé  BkV' 
DîkVf  t.  I,  p.  539  et  suiv. 


La  confirmation^  en  1161,  par  Bernard  de  Saint- 
Saulge,  évoque  de  Nevers,  à  Tabbaye  de  Saint-Martin 
d'Autun,  de  toutes  les  églises  qu'elle  possédait  dans  le 
diocèse  de  Nevers  :  «  In  prioratu  de  Commagniaco, 
omnes  ecclestas  de  Molendints,  capellam  de  Janua 
(James)  (1)  ». 

Une  bulle  d'avril  1164  du  pape  Alexandre  III  qui 
confirme  toutes  les  donations  faites  à  Saint-Martin  : 
«  Ecclesiam  de  Janua,  ecclesiam  de  Colmaniaco, 
universas  ecclestas  de  Molendints  (2)  ». 

Le  liste  des  fondations  de  Tabbaye  de  Saint-Mar- 
tin (1265)  :  « . . .  Nonas  sept,  pro  Bartholomeo^  priore  de 
Comaigni  XX  sol.  super  mansum  de  Urceyo  —  IV 
idus  decembris  pro  pâtre  et  maire  Bartholomei, 
prioris  de  Commaigniaco  XX  sol.  super  vineam 
quant  émit  dictusprior  a  Pavicto  de  Belna,  et  super 
mansum  situm  rétro  domum  nostram  de  Belna  (3)  ». 

Un  acte  d'échange  entre  les  religieux  de  Bellevaux 
et  ceux  de  Saint-Martin  (1289)  (4). 

Le  règlement  pour  la  liquidation  des  dettes  de 
l'abbaye  de  Saint-Martin.  Guillaume,  prieur  de  Com- 
magny,  est  nommé  l'un  des  administrateurs  :  «  Item 
prior  de  Commagniaco  (de  bonis  suis  ordinare  pote-  ^ 
rit)  usque  ad  summam  triginta  librarum  turonen^ 
sium  (5).  » 

Depuis  cette  époque,  dit  Mît'  Crosnier,  les  chro- 
niques locales  ne  renferment  rien   d'important   sur 


(1)  BuLUOT,  HUtoire  de  Saint-Martin  d'Autun,  t.  U»  p.  39. 
(SI)Ibid.,  II,  p.  42. 
0)  Ibid.,  t.  II,  p.  liO. 

(4)  Ibid.,  t.  II,  p.  138. 

(5)  Le  prieur  de  Ck>mmagny  faif  ait  partie  de  la  commission  avec  le 
prieur  de  Saint-Pierre-le-Moùtier,  d'Anzy  et  du  Teste.  Leur  mission 
devait  durer  six  ans  et  pleins  pouvoirs  d*administration  lenr  étaient 
donnés.  (BuLUOTi  t.  n,  p.  191). 


Commagny.  Dans  le  pouillé  du  diocèse^  dressé  au 
commencement  du  xvi^  siècle,  il  est  fait  mention  du 
prieuré  et  de  ses  dépendances.  L'importance  de  ses 
biens  et  de  ses  droits  est  fixée  par  le  terrier 
qu'en  1452  (27  février)  fit  refaire  Guillaume  de  Courvol, 
prieur  (1). 

Commagny  dut  subir  toutes  les  vicissitudes  de  la 
maison-mère  décrites  par  M.  BuUiot.  Sa  situation 
géographique  l'exposa  à  tous  les  malheurs  des  guerres, 
depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'aux  temps  des 
guerres  des  Bourguignons  et  de  celles  de  religion,  qui 
n'épargnèrent  pas  Saint-Martin  d'Autun  ni  la  plupart 
de  ses  prieurés. 


I 


Le  Prieuré  —  La  Paroisse  —  Les  Seigneuries 

et  Justices 

Le  seigneur  de  Commagny  était  le  duc  de  Nevers, 
à  cause  de  sa  ch&tellenie  de  Moulins-Engilbert.  Com- 
magny appartenait  au  gouvernement  et  à  la  généralité 
de  Moulins  en  Bourbonnais,  élection  de  Nevers  ;  au 
diocèse  de  Nevers,  archipréveré  de  Moulins-Engilbert. 
La  paroisse  comptait  102  feux.  La  taille  des  années 
1683-87  fut  de  1.804, 1.864,  1.720, 1.650, 1.650  livres. 

Le  terroir  est  porté  dans  les  documents  adminis- 
tratifs de  la  généralité  comme  étant  à  seigle  et  vignes. 

La  cure  de  Commagny  jouissait  en  deniers,  novalles 
et  casuel  d'un  revenu  montant  à  365  livres  (en  deniers, 


(1)  M.  Tabbé  Btudiau,  aaqael  il  faat  se  reporter,  donne  cependant  sur 
Commagny  qaelqaes  détails  et  anecdotes. 


-422  -- 

900  1.;   en  novalles   affermées,   45    L;    en  casuel, 
20 1.)  (1). 

Les  seigneurs  décimateurs  de  la  paroisse  étaient  : 
le  prieur  de  Commagny,  le  prieur  de  Saint-Honoré, 
l'hôpital  de  Moulins-Engilbert,  M.  de  Vilaine  (dixme 
inféodée), 

La  justice  appartenait  en  partie  au  prieur,  en  partie 
aux  divers  seigneurs  de  la  châtellenie  ;  la  première 
justice  étant  du  ressort  de  la  justice  royale  du  prési- 
dial  de  Saint-Pierre-le-Moûtier,  les  autres  justices 
étant  du  ressort  du  bailliage  ducal  de  Ne  vers  (2). 

Il  appert  du  terrier  du  prieuré  de  Commagny, 
«  dressé  pour  religieuse  personne  Frère  Guillaume  de 
Cour  vol,  prieur  dudit  lieu,  le  27  février  1452,  par 
Pierre  Bourgeois,  notaire  (3)  »,  que  la  justice  du 
prieur  était  limitée  par  le  pont  Cottions,  le  ruisseau, 
en  remontant  la  vallée,  jusqu'au  bois  du  Tronsoy  ; 
par  le  chemin  réal  de  Mary  à  Commagny,  par  un 
autre  chemin  qui  traversait  les  usages  de  Commagny 
et  de  Moulins-Engilbert,  dits  la  Queue-de-Noury, 
justice  du  comte  de  Nevers  qui  passait  par  le  Cloiseau 
de  Champgossieu,  entre  les  prés  Moreaul  et  de  la 
Vesvre,  et  traversait  le  Guignon  ;  par  le  grand  chemin 
réal  que  fit  faire  feu  de  bonne  mémoire  pour  le  temps 
qu'elle  vivait  la  royne  Burnichède,  jadis  royne  de 
France  et  de  Bourgogne,  lequel  chemin  s'appelle  le 

(1)  Deax  listes  concernant  la  portion  congnie  dans  le  diocèse  de  Nevers 
(1763-1766),  publiées  par  l'abbé  Pierre  Deby,  page  8.  D'après  les  registres 
da  district  de  Moulins,  la  cure  de  Commagny  aurait  rapporté  700  livres. 
Le  prix  du  bail  du  prieuré  (18  octobre  1790)  était  de  5.500  livres,  dont 
1.060  livres  pour  la  portion  congrue  du  curé  et  du  vicaire. 

(2)  Éailliage  royal  et  tiege  présidial  de  Saint-Pien'e'le'Moiitier,  et 
Bailliage  provincial  du  Nivernais,  Dumint  et  P.  Meunier,  p.  39, 
109  et  suiv. 

-  (3)  Arohîves  du  château  de  Vandenesse,  d'après  les  notes  de  M.  de 
Flamare,  archiviste» 


--  428- 

chemyn  de  la  royne  Bumichède  et  est  pavé,  et  divi- 
sant les  bois  du  prieuré  de  Commagny  et  de  la 
baronnie  d'Anizy,  jusqu'aux  usages  du  Grand-Anizy, 
et  enfin  par  un  quatrième  chemin  allant  de  la  Charmée 
à  Limanton,  pour  revenir  au  point  de  départ. 

En  se  reportant  aux  limites  de  cette  justice  et  à 
rénumération  suivante  des  fiefs  de  la  paroisse  de 
Commagny  ;  il  est  possible  de  se  rendre  compte  de  la 
consistance  du  territoire  de  cette  paroisse. 

Des  registres  du  bureau  du  contrôle  de  Moulins- 
Engilbert  (bail  de  Pierre  Louvet  ;  Reynaud,  inspec- 
teur)^ conservés  aux  archives  du  département,  il 
ressort  qu'en  1745  les  principaux  propriétaires  de  la 
paroisse  étaient  : 

Nobles  possédant  des  fiefs  : 

Le  marquis  de  Poyanne,  à  cause  de  la  dame  de 
Leuville,  son  épouse,  possédant  les  fiefs  de  Chambon 
et  de  PonteHes-Brosses,  le  fief  de  Couze,  consistant 
en  redevances  et  directes,  le  bois  de  Chevannes, 
relevant  du  duché  de  Nevers,  châtellenie  de  Moulins. 

Sallonnyer  de  Montbaron,  possédant  la  justice  de 
Mourceau  et  le  fief  de  Saint-Quentin  en  cens,  relevant 
du  duché  de  Nevers  (châtel.  de  Moulins)  (1). 

Jacques  Ducleroy,  possédant  la  terre,  justice,  sei- 
gneurie et  château  de  Marry,  relevant  de  Nevers 
(ch&tel.  de  Moulins)  (2).  Les  domaines  Charpeau  et 
l'Etang. 

Henry-Gabriel  Ducret  de  Villaine,  comme  héritier 
de  son  père  et  aux  droits  de  Cécile  et  de  Charlotte, 
ses  sœurs,  Ursulines  à  Moulins  (déclaration  du  23  oc- 
tobre 1741),  possédant  la  terre,  justice  et  ch&teau  de 

(i)  Dénombrement  reçu  GaiUier,  notaire  à  Moulins,  da  23  juillet  1745, 
(2)  DénombremeBJt  reçu  GuilUer,  notaire,  le  19  août  1730. 


—  424- 

Villaine  et  le  fief  de  Clos-Bourgoing,    relevant    de 
Nevers  (1). 

Jacques  de  Ganay,  possédant  les  fiefs  des  Crots  et 
des  HouUières  en  cens,  relevant  de  Nevers  (2), 

Roturiers  possédant  desjiefs, 

Charlotte  Duruisseau,  veuve  Alloury,  acquéreur  de 
Léonard  Marotte  (3),  possédant  le  pré  de  l'Etang, 
dépendant  du  domaine  de  Mourceau,  relevant  de 
Nevers  (4). 

Claude  Roux,  possédant  le  domaine  de  Mourceau 
en  fief,  relevant  de  Nevers  (5). 

Guillaume  Sallonnyer,  possédant  le  fief  du  Pavillon, 
relevant  de  Nevers  (6) . 

'  Sallonyer  de  Tamnay,  possédant  le  fief  de  la  Motte- 
Plessis  (7). 

Les  enfants  de  Michel  Alloury,  possédant  des 
directes  volantes  sur  le  pré  de  Grand-Fond  (8) . 

Hugues  Arvey,  possédant  des  vignss  à  Commagny. 

Jean  Miné,  possédant  une  oulche  en  fief. 

Pierre  Pougault,  possédant  le  fief  de  la  Corvée. 

Les  Picpus  de  Moulins,  possédant  les  fiefs  de  Metz- 
Girard  et  Champlaur,  relevant  de  Chàteau-Chinon  (9); 
le  domaine  de  Champcourt. 

(1)  Dénombrement  des  14  sept.  1790  et  13  fév.  1724,  reçu  Guillier,  not. 

(2)  Dénomb.  reçu  Guillier,  not.,  le  4  mars  1742. 
(8)  Acte  reçu  Hebreget,  not.,  le  19  mai  1715. 

(4)  Dénomb.  reçu  Dubois,  not.,  du  21  août  1734. 
Ç)  Dénomb.  reçu  Hebreget,  20  avril  1701,  30  avril  1705.    Dubois, 
21  août  1734. 

(6)  Hommage  du  20  août  1730,  reçu  par  Guillier,  not. 

(7)  Dénomb.,    reçu   Pougault,  not.,  2    janv.  1721,    13   fév.    1687, 
1»'  juin  1731. 

(8)  A  partir  du  zvi*  siècle  la  famille  Alloury  a  des  biens  à  Commagny , 
Babize,  etc. 

(9)  Dénomb.  reçu  Guillier,  not.,  du  9juil.  1734. 


-  425  — 

Les  religieuses  Ursulines  de  Moulins,  possédant  le 
domaine  d'Acroux. 

Le  prieuré  de  Commagny . 

L'hôpital  de  Moulins,  possédant  le  domaine  de  la 
Petite-Sauve,  donné  par  Léonard  Save  et  Marie 
Coquille,  sa  femme  (1),  et  le  pré  Adam  acquis  de 
Léonard  Save  (2) . 

Une  copie  de  la  lièvre  de  la  ch&tellenie  de  Moulins- 
Engilbert,  que  possède  M.  Paul  Meunier,  peut  être 
consultée  pour  savoir  les  droits  du  duc  de  Nivernais  à 
Commagny  (années  1673, 1700, 1761). 

Le  bâtiment  du  prieuré  est  adossé,  du  côté  de  l'est, 
à  la  partie  de  l'église  dont  une  porte  close  donnait  sur 
la  chapelle  de  Mary.  Il  est  du  xv«  siècle,  bien  conservé. 
Ses  fenêtres,  à  linteaux  et  meneaux,  ont  subi  peu  de 
détériorations.  La  tour  du  nord  est  d'un  travail  irré- 
prochable. Le  rez-de-chaussée  et  le  premier  sont 
composés  de  vastes  chambres.  Les  caves,  celliers, 
vinées  dénotent  l'importance  des  vignobles  qui  appar- 
tenaient au  prieuré. 

Dans  l'étendue  que  nous  avons  indiquée  plus  haut, 
le  prieur  jouissait  de  tous  les  droits  féodaux  comme  de 
justice,  haute,  moyenne  et  basse  ;  il  pouvait,  d'après 
le  terrier,  instituer  des  officiers  connaissant  de  toutes 
les  causes,  jusqu'à  extinction  de  mort,  tels  que  juge, 
procureur,  greffier,  sergent,  garde-bois,  notaire;  il 
avait  prison  et  pilori  pour  pugnir  les  malfaicteurs 
selon  leurs  démérites  ;  les  condamnés  (3)  à  la  peine 


(1)  Acte  Gaillier,  du  34  déc.  1732. 

(2)  Acte  Gnillier,  19  fév.  1733.  —  Pardevant  Arvey,  notaire  à  Mou- 
lins (8  janvier  1781),  Jeanne  de  la  Croix-Macombre  et  Félicité  Bousquet, 
de  l'hôpital  de  Moulins,  donnent  à  bail  à  François  Isambert,  notaire  i 
Moulins,  la  Petite-Sauve,  paroisse  de  Commagny,  pour  491  ts..  1.150  liv. 
de  cheptel. 

(3)  Le  Morvan,  par  l'abbé  BiUDUUi  1. 1*%  p.  541  et  soît. 


-4M- 

capitale  étaiept  conduits,  la  corde  au  col,  de  la  prison 
du  prieuré  au  pont  Cottions,  où  ils  étaient  livrés  aux 
officiers  de  la  ch&tellenie  de  Moulins,  chargés  de  les 
faire  mourir  aux  frais  de  leur  maître,  tandis  que 
leurs  biens  étaient  confisqués  au  profit  du  prieur. 

Au  moyen  âge,  la  maison  du  prieuré  était  fermée 
de  murailles  crénelées,  avec  portail  fortifié  et  dé/ê/i- 
aable  contre  ceux  qui  auraient  voulu  y  entrer  rigou- 
reusement. 

Le  prieur  avait  le  patronage  de  plusieurs  églises  des 
environs,  notamment  le  patronage  de  l'église  de 
Moulins,  qui  devait  sa  création  à  l'établissement  reli- 
gieux de  Commagny. 

L'église  de  Commagny ,  qui  était  prieuriale  et 
paroissiale,  était  dédiée  à  saint  Hilaire,  le  prieuré  à 
saint  Laurent. 

Pour  se  rendre  compte  de  l'état  du  prieuré  aux 
différentes  époques  de  son  existence,  il  faut  se  reporter 
aux  visites  périodiques  que  les  grands  prieurs  de 
l'abbaye  de  Saint-Martin  faisaient  à  Commagny. 

Nous  devons  à  l'obligeance  de  M.  Lex,  archiviste 
du  département  de  Saône-et-Loire,  la  communication 
des  procès-verbaux  de  ces  visites,  des  1*^'  février  1612, 
17  juin  1619,  20  mai  1633, 19  juin  1638,  11  avril  1676, 

15  octobre  1687,  26  octobre  1701,  16  juillet  1705, 
11  septembre  1711,  18  septembre  1714,  21  avril  1719, 
7  octobre  1722,  22  mars  1725,  30  septembre  1728, 

16  avril  1731,  11  octobre  1736,  18  mai  1744, 
26  août  1746,  19  septembre  1752,  8  mai  1758, 
l' mai  1765. 

Voici  quelques  extraits  de  ces  procès-verbaux  :  . 

J612.  —  La  chapelle  de  Notre-Dame-de-Pitié,  fondée 
par  la  maison  de  Villaine,  a  été  trouvée  en  bon  état  ; 
elle  doit  être  entretenue  par  ceux  de  ladite  maison. 
La  chapelle  4^M«rry  pu  ^e  Saint- Jean  a  été  fondée 


-.427  -^ 

et  doit  être  entretenue  par  les  seigneurs  du  nom,  mais 
doit  être  couverte  aui  frais  du  prieur.  La  chapelle  de 
Saint-Gervais,  l'église  du  prieuré,  le  logis  prioral  et 
celui  du  sacristain  sont  en  mauvais  état . 

Il  est  dit  que  la  chapelle  de  Notre-Dame  de  James 
fut  brûlée  par  les  Huguenots,  en  1570,  qu'ils  ruinèrent 
le  logis  auprès  de  la  chapelle  où  demeurait  le  prêtre 
qui  la  desservait,  et  que  les  ornements  d'icelle  étaient 
entre  les  mains  de  Claude  de  Bar^  paroissien  de  Corn- 
magny. 

1638.  —  La  visite  et  l'ordonnance  qui  suivent  sont 
assez  intéressantes  pour  être  reproduites  en  entier  : 

«  Visite  du  prieuré  de  Commagny  (Ï9  Juin  1638). 

»  Nous,  frère  Anthoine  de  Boucher,  soubsprieur  en 
l'abbaye  Saint-Martin-lez-Autun ,  ordre  de  saint 
Benoit,  dépendant  immédiattement  du  Saint-Siège 
apostolique,  certifions  à  tous  qu'il  appartiendra  que, 
de  l'hauthorité  de  frère  Jacob  Anthouard,  licentié  en 
décret  et  grand  prieur  de  laditte  abbaye,  et  par  pro- 
cure expresse  dudict  sieur  en  datte  du  dix-septiesme 
de  jung  mil  six  cent  trente-huict,  receue  J.  BouUey, 
notaire  royal  à  Autun,  nous  nous  sommes  ce  jourd'huy, 
dix*neufviesme  dudict  mois,  acheminés  de  laditte 
abbaye  en  nostre  prieuré  conventuel  de  Saint*Laurent 
de  Commagny,  membre  dépendant  d'icelle,  assisté  de 
frère  Jean-Baptiste  Saulnier,  chambrier,  nostre  secré- 
taire, et  de  Lazare  Mathieu,  tous  à  cheval,  pour  pro- 
céder à  la  visite  d'icelluy  prieuré  ;  ou  estant  arrivés  à 
cinq  heures  du  soir,  et  y  ayants  trouvé  maistre  Reney 
Simonnet,  accenseur  de  Monsieur  le  Prieur  dudict 
lieu,  après  nous  avoir  receu  dans  ledict  prieuré  et 
nostre  train,  nous  a  conduict  en  l'église  dudict  lieu, 
où  estants  prosternés  devant  le  maistre  hautel  d'icelle 


-428- 

église,  nos  prières  faittes,  et  assisté  de  ceux  que  dessus 
et  encore  de  messire  Dominique  des  Granges,  presbtre, 
curé  du  mesme  lieu,  honneste  filz  André  Potrelot, 
Jean  Fassin,  marguillier,  et  autres  habitans,  ayants 
ouverts  le  tabernacle  où  est  le  saint  ciboire,  dans  lequel 
repose  le  Saint  Sacrement,  l'avons  adoré  en  toute 
révérance,  et  recogneu  ledit  ciboire  suflSsamment  garny 
d'hostie,  le  tout  dans  l'honnesteté  et  bien  scéance,  et 
icelluy  remis  en  son  lieu.  Continuans  la  visite  d'icelle 
église,  avons  recogneu  le  maistre  hautel  fort  honneste- 
ment  paré  tant  d'ornements  que  de  nappes,  d'église, 
forni  des  livres  nécessaires  pour  le  divin  service,  la 
fabrique  du  chœur  tant  au  dehors  qu'au  dedans  en  bon 
estât,  mesme  la  chappelle  qu'ils  appellent  de  Villaine, 
celle  de  Mary  estant  à  costé  de  l'épittre  sens  vittre, 
sens  ornements  et  nullement  blanchie. 

»  De  laditte  église,  assistés  comme  dessus,  nous 
nous  sommes  transportés  en  la  chapelle  des  saints  Ger- 
vais  et  Protais,  dépendante  dudict  prieuré,  où  ayants 
faict  nos  prières  à  Dieu  et  aux  patrons  de  laditte  cha- 
pelle, visitant  icelle,  l'avons  recognue  fort  bien  réparée 
quant  au  couvert,  dénuée  de  carreaux  du  costé  de  la 
porte  d'ambas  à  main  droitte  entrant  en  laditte  cha- 
pelle, laditte  porte  et  l'autre,  qui  regarde  le  cimetière, 
non  fermentes,  à  deffaut  de  porte  de  bois.  Il  n'y  a 
pareillement  auculnes  vittres  en  icelle. 

))  Et  continuans  en  mesme  temps  nostre  ditte  visite, 
avons  veu  et  visité  le  logis  prierai  en  toutes  ces  appar- 
tenances, lequel  avons  trouvé  médiocrement  entretenu, 
couvert  néanlmoints  suffisamment.  Et  avons  remarqué 
audict  logis  l'escurie  tout  proche  la  porte  par  laquelle 
on  entre  de  la  maison  priorale  à  l'église,  d'où  pénètre 
et  passe  quelquefois  une  mauvaise  odeur,  et  lorsqu'il  y 
a  des  chevaux  en  icelle,  dans  laditte  église  ;  et  passans 


outre,  nous  avons  visité  quant  au  dehors  le  logis  de  la 
sacristie,  icelluy  assés  bien  couvert. 

»  Et  advenu  le  vingtiesme  du  présent  mois,  comme 
nous  aurions  célébré  la  sainte  messe  dansladitte  église, 
à  laquelle  auroit  assisté  plusieurs  des  paroissiens,  nous 
nous  sommes  enquis  au  général  d'eux  tous  si  le  service 
divin,  dehu  tant  par  le  sieur  prieur  que  par  le  sacris- 
tain, se  faisoient  bien  et  dehument,  et  s'ils  auroient 
point  veu  de  sacristain  résidant  depuis  fut  frère 
Léonard  Bériard  ;  es  quelles  propositions  a  esté  res- 
pondu  par  commune  voix  que  depuis  quelques  années 
deux  religieux,  premièrement  dom  Sébastien  Le  Maire, 
et  du  depuis  dom  Gracet,  auroient  pris  possession  de 
la  sacristie  dudict  Commagny,  laquelle  est  aujour- 
d'huy  en  litige,  ce  qui  empesche  la  résidance  dudict 
sacristain.  Et  quant  au  divin  service,  que  mondict 
sieur  le  prieur  en  a  convenu  avec  messire  Jaque  Febvre, 
presbtre,  résident  à  MoUins,  lequel  s'en  est  chargé,  et 
néanlmoints  s'en  aquite  très  mal,  célébrant  peu  sou- 
vent Hudict  lieu  la  sainte  messe  et  se  trouvant  rare- 
ment aux  vespres  qui  se  doibvent  dire  les  jours  de 
festes,  dimanches  et  jours  solemnels,  jusque  là  qu'il  se 
passe  bien  quelque  fois  un  mois  entier  sens  qu'on  le 
voye  dans  laditte  église,  au  préjudice  de  la  gloire  de 
Dieu,  édification  du  public  et  satisfaction  des  consien- 
ces. 

»  Et  à  l'instant,  nous  sommes  descendus  à  la  cha- 
pelle ditte  Nostre-Dame  de  James,  sur  le  chemin 
dudict  Commagny  à  MoUins,  dépendante  de  la  sacristie 
cy-dessus,  laquelle  la  génuflection  et  nos  prières  préa- 
lablement faitte  à  Dieu  et  à  la  Vierge,  nous  avons 
visité  et  trouvé  icelle  bien  et  dehument  entretenue,  le 
grand  autel  décemment  paré  et  orné  d'images,  tableaux 
et  autres  embellissements  dignes  de  la  dévotion  du 
peuple. . 


-.430  — 

En  foy  de  quoy  se  sont  soubsignés  en  roriginal  avec 
nous  et  nôstre  secrétaire,  les  an  et  jours  que  dessus, 
messire  Dominique  des  Granges,  curé,  presbtre  dudict 
Commagny;  maistre  Reney  Simonnet^  accenseur 
dudict  sieur  prieur,  et  Lazare  Mathieu,  demeurant 
audict  Saint-Martin. 

»  Signé  en  l'original  :  F.  Anthoine  de  Boucher  de 

Flogny  ,     Dbsgranges  , 
SiMONBT^  L.  Mathieu. 

»  Par  ordonnance  de  mondict  sieur,  J.-B.  Saulnier. 

Ordonnance  du  20  juin  1638 

1»  Le  vingtiesme  du  mois  de  jung  mil  six  cent 
trante  huict,  la  visite  par  nous  faitte  de  nostre 
prieuré  conventuel  de  Saint-Laurent  de  Commagny 
et  dépendances  d'icelluy,  les  deffauts  et  manquements 
y  recogneus,  avons  ordonné  ce  qui  s'ensuit  : 

»  Premièrement,  nous  avons  ordonné  et  ordonnons 
audict  prieur,  en  attendant  la  paissible  possession  et 
résidance  d'un  sacristain  audict  prieuré,  qu'il  tiendra 
la  main  que  le  divin  si  fasse  bien  et  dehument  à  l'hon- 
neur et  gloire  de  Dieu,  décoration  de  l'ordre,  édifica- 
tion du  prochain,  comme  il  se  faisoit  d'ancienneté  à  la 
descharge  de  sa  consience  et  satisfaction  du  public,  en 
telle  sorte  que  les  plaintes  que  nous  en  recepvrions 
cy-après,  faute  d'y  satisfaire,  ne  nous  obligent  d'em- 
ployer les  voyes  de  rigeur  et  bras  séculier  s'il  exhoyt. 
Procurera  que  la  chapelle  ditte  de  Mary  sera  mise  en 
bon  et  suffisant  estât  par  ceux  qui  l'occuppent,  sinon 
qu'il  en  gratifiera  d'autres  qui  en  feront  mieux  leur 
^  debvoir,  si  mieux  il  n'ayme  la  réparer  et  se  la  conser- 
ver. 


»  Fera  réparer  les  carreaux  qui  manquent  dans  la 
chapelle  Saint-Gervais  et  Protais,  et  fermer  la  porte 
du  pignion  d'icelle,  pour  obvier  à  la  profanation  qui 
en  pourroit  arriver  par  ce  manquement. 

»  Fera  transporter  son  escurie  ailleurs,  pour  erapes- 
cher  rincomodité  qu'on  peut  recepvoir  en  l'église,  au 
subjet  de  la  mauvaise  odeur  q'un  tel  lieu  garny  de 
chevaux  peut  envoyer  et  faire  transpirer  au  chœur  de 
laditte  église. 

0  Tiendra  la  main  à  bien  et  dehument  entretenir 
son  logis  prierai,  réparer  les  vittres  y  deffalliantes  et 
en  metttre  de  nouveau  où  elles  manquent. 

»  Prendra  garde  que  la  lampe  d'argent,  calices  et 
autres  meubles  destinés  à  la  chapelle  de  Nostre-Dame- 
de-James,  qui  sont  à  la  garde  de  MM.  Pontus  Simon- 
net  et  Jean  Debart,  le  premier  résidant  à  Commagny, 
l'autre  à  MoUins,  ne  soient  adirés. 

»  Payera  &  l'église  de  Saint-Martin-lez-Autun  la 
chappe  qu'il  y  doibt  à  cause  de  son  nouvel  advène- 
ment  audict  prieuré. 

»  Payera  à  Monsieur  le  révévend  abbé  dudict  Saint- 
Martin  trante  livres  qu'il  luy  doibt  de  pention  aimuelle 
au  mois  de  may  accanse  de  sondict  prieuré. 

»  Payera  à  Messieurs  les  grand  prieur,  religieux  et 
couvent  de  laditte  abbaye  quatre  livres  qu'il  leur 
doibt  par  an  de  patronage  sur  sondict  prieuré,  et  payera 
encore  six  livres  de  cire  au  sacristain  de  laditte  abbaye, 
comme  il  a  toujours  faict  d'ancienneté. 

»  Assistera  ou  fera  assister  au  grand  chapittre  qui 
se  tiendra  en  laditte  abbaye  le  lundy  après  le  diman- 
che de  Misericordia  que  l'on  comptera  mil  six  cent 
quarante,  lesquelles  choses  ci-dessus,  de  l'authorité  de 
Monsieur  le  grand  prieur  de  laditte  abbaye  et  de  la 
nostre,  il  exécutera  et  fera  exécuter  sur  les  peyaes 
portées  par  le  droit  et  toutes  autres. 


-  432  — 

»  Et  en  suitte  denostre  visite^  avons  taxé  pour  le  droit 
d'icelle  et  pris  la  somme  de  dix-huit  livres  tournois, 
que  nous  avons  présentement  receues  par  les  mains 
de  maistre  Remy  Simonnet,  accenseur  dudict  sieur 
prieur,  qui  l'en  ramboursera  sur  le  prix  de  sa  ferme, 
sens  attoucher  aux  fraitz  de  bouche  tant  de  nous  que 
de  nostre  train  supportés  par  ledict  Simonnet  despuis 
le  jour  d'hyer  jusque  aujourd'hui  d'une  après-midy, 
desquels  ledict  sieur  prieur  tiendra  compte  audict  accen- 
seur, auquel  les  présentes  ordonnances  ont  esté  signi- 
fiées, données  et  laissées  audict  Simonnet,  avec  le 
procès-verbal  de  la  visite,  en  l'absence  dudict  sieur 
prieur,  auquel  il  les  délivrera,  faictes  les  an  et  jour 
que  dessus.  En  foy  de  quoy  nous  nous  sommes  soubsi- 
gnés  avec  nostre  secrétaire  et  ledit  sieur  Simonnet, 
accenseur. 

»  Signé  en  l'original  :  F.  Anthoine  de  Boucher  de 

Flogny,  Simonnet. 

]>  Par  ordonnance  de  mondit  sieur:  J.-B.  Saulnier(1)9. 

1676.  Le  logis  prierai  est  en  assez  bon  état.  Le 
grand  autel  et  les  deux  chapelles  du  côté  de  l'Epitre  et 
de  l'Evangile  sont  en  bon  état,  garnis  de  graduel, 
psautier  et  antiphonaire.  La  couverture  de  la  chapelle 
Saint-Gervais  entièrement  ruinée  et  la  voûte  effon- 
drée. La  chapelle  de  Saint-James  est  en  bon  état,  des- 
servie par  le  sieur  Simonnet,  curé  de  Commagny,  aux 
lieu  et  place  du  dernier  sacristain,  titulaire,  sauf  une 
partie  de  la  couverture  enlevée  par  le  vent.  Le  sieur 
curé  de  Commagny  est  chargé  des  ornements. 

1719.   La  chapelle  des  saints  Gervais  et  Protais, 

(1)  Archives  de  Saône-et-Loire.  —  Fonds  de  Pabbaye  de  Saint-Martin 
d*Atttun  ^  fonds  du  prieuré  de  Gomma^y. 


-  433  - 

séparée  du  corps  de  la  grande  église  et  appartenant  i 
l'office  du  sacristain,  est  assez  bien  couverte  et  entre- 
tenue, sauf  la  grande  porte  et  les  vitres.  Sur  le  dor- 
toir, il  pleut.  Le  logis  du  sacristain  sert  de  demeure  au 
titulaire,  Léonard  Berriac. 

1733.  Le  logis  du  sacristain  est  bien  couvert  mw 
inhabité,  parce  que  Léonard  Berriac  étant  mort,  n'a 
pas  été  remplacé.  La  chapelle  des  saints  Gervais  et 
P  rotais,  appartenant  audit  sacristain,  est  trouvée  eans  : 
vitres  et  en  très  mauvais  état  pour  la  couverture. 

1752.  Près  de  la  chapelle  Notre-Dame.de  Saint- 
James,  il  y  a  une  grange  appartenant  au  prieuré  dont 
la  couverture  a  besoin  d'être  réparée. 

1765.  Le  grand  ;  prieur  dom  Charles-François- 
Xavier  Joulet  se  borne  i  déclarer  que  tout  est  en  bon 
état. 

Voici  la  liste  des  prieurs  de  Commagny  dont  cer- 
tains documents  nous  révèlent  les  noms  : 

1320.  Jean  de  Marry  (1). 

1336.    Guillaume,    nommé    l'un   des    administra-  ; 
teurs  de  Saint-Martin  d'Autun .  Nommé  pour  gouver-. 
ner  pendant  six   ans  le  prieuré    dont  l'abbé   avait 
compromis  le  temporel  par  ses  dépenses. 

1439.  Guillaume  de  Courvol,  est  témoin,  d'un  acte 
entre  Gaucher  de  Courvol,  écuyer,  et  Jehan  de  Çour- 

(1)  1390.  Procès -verbal  de  13*20,  où  comparaiiisent  nobles  seigneyrs 
Jean  de  Bazoches  et  Jean  de  Ghapean,  chevaliers  ;  Hugues  et  Creoffroy  de 
la  Toumelle,  frère  de  Pierre,  abbé  de  Saint-Martin,  qui  déclarent  que 
ladite  abbaye  est  sous  la  garde  du  comte  de  Nevers  ;  ce  que  déclare  aussi . 
Jean  de  Mons,  clerc  dudit  abbé. 

Ledit  procès-verbal  porte  que  noble  dame  Âlays  (Eloïse)  de  la  Toumelle 
a  déclaré,  en  présence  de  M**  Guillaume  de  Poiseuz  et  autres,  que  son 
abbaye  est  sous  la  garde  dudit  comte  ;  que  comparurent  ^ussi  Jean  de 
Marry,  prieur  de  Gomegny  ;  Gui  de  Lorme,  religieux  du  monastère  de 
Belleval,  ordre  des  Prémontrés,  chargé  de  procuration  de  ses  confrères, 
avec  Pierre  de  Limanton  et  Hugues  de  Thianges  (Trésor  de  te  Chambre  des 
comptes).  Notei  de  Dom  Caffiavi,  page  244,  aux  Archives  de  la  Nièvre. 
T.  a,  3«  sérier  28 


-  434  - 

vol,  écuyer,  son  fils,  &  Isenay  (1).  Refait  le  terrier, 
1452. 1445,  partage  de  certains  hommes  et  femmes  da 
condition  serve  entre  M.  Jean  Quedat,  licencié  es  lois, 
conseiller  et  procureur  général  des  comtes  de  Nevers, 
en  son  nom  et  religieuse  personne  frère  Guillaume  de 
Courvol,  prieur  de  Commagny ,  au  nom  de  son  prieuré, 
par  devant  Droin  Cotignon  et  Jean  Breton,  notaires  du 
comte  (2).  M.  Baudiau  rapporte,  d'après  M .  BuUiot, 
son  affaire  scandaleuse  avec  le  sacristain  du  prieuré  ; 
condamné  et  excommunié  ;  commet  des  meurtres. 

1470.  François  Boutillat.  Le  9  mai  1477,  honorable 
François  Boutillat,  prieur  de  Oommagny ,  est  témoin  (3) 
en  1481,  13  mai.  Religieuse,  dévote  et  honnête  per- 
sonne, frère  François  Boutillat,  prieur  de  Commagny , 
est  arbitre  d'un  différend  entre  Pierre  Chalopin,  bour- 
geois de  Decize,  et  frère  Charles  Boutillat,  prieur  de 
Montambert  (4). 

1506  (5).  Jean  de  Salazar.  On  trouve  dans  MaroUes 
(p.  193),  «  diverses  pièces  concernant  le  prieuré  do 
Commagny,  duquel  les  fruits  avaient  été  saisis  pour 
le  comte,  depuis  la  mort  de  frère  François  Boutillac, 
dernier  paisible  possesseur  dudit  prieuré,  dont  le  comte 
de  Nevers  a  la  garde  et  l'administration.  Messire  Jean 
de  Salazar,  ayant  été  depuis  pourvu  dudit  prieuré,  a 
reçu  les  comptes  que  Guillaume  Le  Breton  a  rendus 
des  fruits  dont  il  avait  l'administration.  » 

1542  (8  déc.).  Provisions  du  prieuré  pour  Robert 
Hurault,  clerc  du  diocèse  de  Paris,  fils  de  Nicolas 
Hurault,  conseiller  du  roi,  en  remplacement  de  feu 
François  Brinon.  Ces  provisions  sont  aceordées  par 

(1)  Archives  de  Limaaton. 

(2)  MaroUes,  p.  192. 

(3)  Registre  Are  Durand,  not.  i  Decize,  Archives  Nièvre,  fi. 

(4)  Registre  d'Are  Barbier,  not  à  Decize,  Archives  de  la  Nièvre. 
&)  Date  de  la  mort  de  Boatillat 


-435- 

le  vicaire  général  de  Tabbé  de  Saint-Martin.  Hurault 
affranchit  une  pauvre  fille  serve  et  orpheline,  Marie 
Rault^  moyennant  40  sous.  La  charte  d'affranchisse- 
ment fait  observer  que  toute  fille  en  cette  position 
avait  droit  à  cette  faveur  (1;.— Procuration  donnée  par 
Robert  Hurault,  prieur,  à  M"  Robert  Hurault,  abbé, 
son  oncle,  pour  affranchir  de  la  mainmorte  les  biens 
de  certains  habitants  de  Moulins-lès-Engilbert  : 

Antoine  Courtois,  Jean  Courtois,  François  Gousset, 
Guillaume  de  Varennes,  Symon  Desgranges,  Jean  de 
Belloy,  Guillaume  Symonnet,  Jean  Boigard,  Jean 
Choppin  dit  Maison,  Etienne  Hallorry,  Claude  Vaget, 
Guillaume  Pougault,  Jean  Guillier,  Pierre  Martin^ 
Jean  Dorlet,  Jeanne  veuve  de  Jean  Larive,  Jean 
Symonnet  le  jeune  dit  Besgue,  Michel  Letort,  Marie 
Garrault,  François  son  fils,  Pierre  Lardereault,  Pierre 
Chastel,  Philippe  Duchemyn,  Claude  sa  femme,  Jean 
Bernard,  Berthier  Debar,  Jacques  son  fils,  Gilbert 
Symonnet,  Jacques  Vernillac,  André  de  Laubespin, 
Guy  Vernillac,  Jacques  fils  de  François  Debar, 
Antoine  Febvre  et  pour  affranchir  également  de  la 
mainmorte  les  hommes  et  les  biens  de  Commagny 
(11  mars  1544)  (2). 

Autres  provisions  accordées  par  l'abbé  de  Saint- 
Martin  lui-même  à  Philippe  Chevrier,  religieux  de 
l'abbaye  (8  décembre  1542). 

Acte  par  lequel  Jacques  Le  Roy,  étudiant  en  l'Uni- 
versité de  Paris,  déclare  qu'il  ne  prétend  avoir  aucun 
droit  au  prieuré  et  désavoue  la  prétendue  complainte 
formulée  en  son  nom  contre  Robert  Hurault,  aussi 
étudiant  en  ladite  université  pourvu  du  prieuré 
(11  mars  1544). 


(1)  Baudiau,  vol.  !•',  p.  541. 

(2)  Archives  de  Saône-et-Lotre, 


—  436  - 

Jacques  Méry .  Provisions  du  prieuré  pour  Jacqu^, . 
Méo^y,  clerc  du  diocèse  de  Bourges  [2940ût  1559). 

Henry  Le  Maire.  Réquisition  de   Jean   Hurault, 
abbé  ,du  Breuil,  conseiller  au  Parlement  de  Paris, 
pour  être  poixrvu  du  prieuré  vacant  par  suite  du  déqës  . 
de.  Henry  Le  Maire  (12  oct.  1559).  Réponse  de  Tabbé  . 
Robert  Hurault  «  qu^l  avait  fait  ce  que  estait  en  luy  ». , 
—  Déclaration  des  dépens  faits  au  présidial  de  Saint- 
Pierre,  par  les  religieux  de  Saint-Martin^  demandeurs 
contre  Le  Maire,   prieur,  pour   avoir  paiement  de  , 
4  livres  en  argent  et  6  livres  de  cire  dûs  annuellement  . 
à  la  sacristie  de  l'abbaye  (1), 

Balthazard  de  la  Boutière.  1561.  E:i;ploit  pour  le 
duc  de  Nivernais,  marquis  dlsle,  contre  Balthazard  de 
la  Bouttière,  prieur  de  Commagny,  appelant  de  l'oc- 
troi  de  certaine  commission  et  établissement  de  com- 
missaire contre  lui  décerné  par  le  bailli  de  Niver- 
nais (2) . 

Etienne  Tenon,  chanoine  de  Nevers,  prend  posses- 
sion le  9  juiUet  1566. 

André  Paradis,  prend  possession  en  1579 .  Investi- 
ture d'un  bordelage  par  M'«  André  Paradis,  prêtre,' 
prieur  (3).  Sommation  par  André  Paradis,  prêtre, 
prieur  de  Commagny,  à  divers  (3  juillet  1584)  (4). 

Jean  Rémot^  1588. 

Nicolas  de  Grandry,  commendataire  doyen  de 
l'église. 

Nicolas  de  Chandon»  sous  le  grand  prieur  de  Saint- 
Martin -lès-Autun,  seigneur  de  Mpntmorillon.  Prise  de 
possession  par  Jehan  Choppin,  prêtre,  chanoine  de 
Notre-Dame  de  Moulins,  comme  procureur  de  M"  Nico- , 

(1)  Sentence  dn  présidial  du  3S  avril  1557*11  mai  1557. 

(2)  Marolles,  p.  480. 

(3)  Minutes  des  notaires  de  Ifoalins,  Archives  de  la  Nièvre,  E» 
(i)  Minutes  Builer^,  notaire  à  MoulinSf 


•^ 


-  4â7- 

las  de  Chandôn,  prieur  de  Commagny,  en  présence  de 
frère  Claude  de  Marcy,  sacristain  du  prieuré  et  de 
]Vf  Sébastien  Garnier/ prêtre  de  Commagny,  14  sep- 
tembre 1595  (1). 

Jean-Raymond  Ferrier,  abbé  de  Tabbaye  royale  de 
Charrot,  1674,  habitant  Paris.  Quittance  de  la  chape 
qu'il  devait  &  Tabbé  en  qualité  de  nouveau  prieur 
(26  mars  1685)  (2). 

Jean- Antoine  Daguin^  de  la  paroisse  d'Urzy,  cha- 
noine régulier  de  Tordre  des  Prémontrés. 

Armand  ou  Amand  Durant,  1722. 

Audiat.  Lettre  de  M'»  Audiat,  chanoine  du  chapitre 
royal  de  Verneuil,  prieur  de  Commagûy,  demeurant  à 
Saint-Pourçain,  qui  accepte  de  payer  100  liv.  pour 
son  droit  de  chape  (26  avril  1743)  (3).- 

Henri  Limousin,  chanoine  de  Nevers. 

Nous  n'avons  pas  la  liste  complète  des  curés  de  la 
paroisse  de  Commagny;  presque  tous  issus  de  familles 
notables  du  pays.  Ils  furent  nommés  quand  le  prieuré 
eut  perdu  de  son  importance.  Le  presbytère  date 
du  XVIII®  siècle.  Il  est  au-dessus  de  la  fontaine  de 
Saint-Gervais  que  le  peuple  tient  en  vénération  et  à 
laquelle  il  attribue  la  vertu  de  guérir  de  la  colique. 
Dans  les  temps  de  sécheresse,  on  y  plongeait  pour 
obtenir  la  pluie  une  tète  de  saint  qu'on  y  rémarque 
(saint  Zevras). 

Voici  ce  que  nous  avons  recueilli  sur  ces  curés  : 

M.  de  Flamare,  archiviste  de  la  Nièvre,  nous  a 
communiqué  deux  pièces  datées.  Tune  de  1461  :  c'e^t 
un  acte  où  figure  M'*  Guillaume  Gobert,  curé  de 

(1)  Minutes  Bailemy,  not,  collection  de  Soultrait.  —  Bail  à  bordelage 
pour  le  même,  19  nov.  1596.' (Minutes  du  même  notaire.  Archives  de  la 
Nièvre  E). 

(S)  Archives  de  Saône-et-Lôire. 

(3)  Archives  de  Saône-el-Loirt. 


—  438  — 

Commagny,  témoin  (1);  l'autre  de  1463  (22  août), 
contenant  transaction  entre  le  môme  curé  de  Comma- 
gny et  Jean  Michot,  paroissien  de  Cossaye  (2). 
M.  V.  Gueneau  cite  (Moulins-Engilbert,  1890)  Guil- 
laume Lardeau,  curé  de  Commagny,  nommé  chanoine 
de  Moulins,  1558. 

1638.  Dominique  Desgranges,  né  i  Moulins-Engil- 
bert, en  1601. 

Le  service  religieux,  après  1638,  est  irrégulièrement 
fait  par  Jacques  Febvre,  prêtre  de  Moulins. 

1674.  Simonnot. 

1688.  Vigoureux^  né  à  Rodez. 

1699.  Lecomte. 

1713.  Gentil. 

1720.  Souchon. 

1766.  Ravary.  La  prise  de  possession  de  la  cure  de 
Saint-Laurent  par  Léonard  Ravary,  prêtre  du  diocèse 
de  Nevers,  en  conformité  des  provisions  à  lui  accor- 
dées par  M«f'  TEvêque  de  Nevers  du  consentement  du 
prieur  de  Commagny  du  20  avril  1770  (3).  Le  même, 
alors  vicaire  de  la  paroisse  de  Commagny,  avait 
été,  le  10  juin  1667,  nommé  par  M.  de  Pracomptal 
au  canonicat  de  Moulins,  vacant  par  suite  du  décès  de 
Joseph  Besson. 

En  1724,  M.  Henri  Souchon,  curé,  représentait  à 
Tévêque  de  Nevers,  Fontaine  des  Montées,  que  la 
paroisse  était  d'une  grande  étendue  et  difficile  à  des- 
servir à  cause  des  mauvais  chemins  et  des  inondations 
fréquentes  du  Garât  et  du  Guignon.  Il  demandait  la 
nomination  d'un  vicaire  avec  150  fr.  de  portion  congrue 
payable  par  le  prieur  de  Commagny. 

(i)  Archives  de  la  Nièvre,  E.  Registre  de  Jean  Boute(iuarre,  not.   à 
Décize. 

(2)  Pierre,  not.,  à  Decize,  mêmes  archives. 

(3)  Acte  Pougault,  not.,  du  23  avril  1770. 


-•139  - 

Quant  aux  vicaires,  voici  les  noms  que  nous  pos- 
sédons : 

Le  premier  vicaire  fut  Jean  Pougault,  plus  tard  curé 
de  Maux,  et  en  1748  trésorier  du  chapitre  de  Moulins 
et  de  Saint-Michel-des-Antiquailles  de  Lyon  ;  vinrent 
ensuite  le  Père  Casimir,  du  couvent  des  Picpus  de 
Moulins  ;  Valevier,  Quillier,  ensuite  curé  de  Brinay  ; 
Pagoitange,  le  Père  Célestin,  Lemoine,  ensuite  curé 
de  Grandry  ;  Guyochin,  mort  curé  de  Chasnay  ;  Com- 
maille,  ensuite  curé  de  la  CoUancelle  ;  Dony,  ensuite 
curé  de  Montapas;  Duruisseau,  le  Père  Célestin, 
Ohkink  de  Tourny,  le  Père  Célestin  encore  une  fois  ; 
Abraham,  plus  tard  curé  de  Saint-Franchy  ;  le  Père 
Célestin,  encore;  François-Xavier  Faure,  François 
Mercier,  Besson,  le  Père  Augustin  Johannot,  François- 
Jules  Bovin,  François  de  Salle,  J.-B.  Remoillon,  de 
Château-Chinon  ;  le  Père  Théodore,  le  Père  Damase, 
le  Père  Dominique,  le  Père  Ravary,  le  Père  de  la 
Croix,  Isambert,  Sautereau,  enfin  Pierre  Dechaux. 


II 


Notes  générales. 

Commagny ,  à  cause  de  sa  belle  situation  même,  a  subi 
le  passage  de  toutes  les  armées,  de  toutes  les  bandes  qui 
ont  désolé  le  pays,  dans  les  temps  d'invasion  comme 
au  temps  des  guerres  civiles,  pour  n'avoir  plus  dans  le 
xviu*  siècle  qu'à  subir  le  passage  des  régiments  fran- 
çais, qui  constituait  une  charge  dont  les  plaintes  des 
paysans  ont  trouvé  leur  dernier  écho  dans  les  cahiers 
de  doléances. 

Un  fait  de  dévalitation  est  resté  dans  la  mémoire 


—  440  — 

des  habitants  :  Tiocendie  qu'ont  alloméi  en  1570,  les 

protestants  (1). 

Cantonnés  pendant  longtemps  dans  Tespace  compris 
entre  La  Charité,  Elntrains  et  Vézelay,  les  Huguenots 
avaient  principalement  poussé  leurs  incursions  du  côté 
de  la  Bourgogne,  mais,  quand  Coligny  les  appela 
dans  le  Forez,  ils  marchèrent  en  suivant  le  côté  niver- 
nais  des  montagnes  du  Morvan  pour  gagner  le  Cha- 
rolais.  Ils  étaient  commandés  par  Bricquemaut,  Bourri, 
du  Boulay. 

En  môme  temps,  le  maréchal  de  Cossé  arrivait 
d'Orléans  par  Decize  et  Ch&tillon-en-Bazois.  Quand 
vers  Mont-Saint-Jean  et  Arnay-le-Duc  se  fut  engagée 
la  bataille  dite  d' Arnay-le-Duc,  les  protestants,  à 
marches  forcées,  reprirent  le  chemin  de  La  Charité 
par  la  route  d'Autun  ;  c'est  soit  à  l'aller,  soit  au  retour 
qu'ils  brûlèrent  tant  d'églises,  celles  de  Saint-Honoré, 
de  Montaron,  de  Commagny,  le  couvent  de  Belle- 
vaux,  etc. 

La  paroisse  de  Commagny,  en  1789,  avait  pour 
syndic  Grivaud  ;  les  deux  députés  élus  qui  durent 
porter  son  cahier  des  doléances  à  l'assemblée  des  trois 
ordres,  qui  eut  lieu  à  Nevers  pour  l'élection  des  députés 
aux  Etats  généraux,  furent  Philibert  Quillier  du  Tour, 
avocat  en  Parlement,  et  Joseph-Philibert  Dubois, 
notaire  et  procureur.  Le  cahier  de  Commagny,  comme 
la  grande  majorité  des  cahiers  du  Nivernais,  pour  le 
Morvan,  le  Bazois,  les  Amognes,  a  disparu.  Les  bénédic- 
tins de  Saint- Martin  ne  furent  représentés,  à  l'assem- 
blée de  Saint-Pierre-le-Moûtier,  que  par  dom  Repey, 
prieur  claustral  de  la  communauté  de  Saint-Pierre. 
Léonard  Ravary,  «n  qualité  de  curé  de  Commagny, 
fut  convoqué  à  Nevers. 

(1)  Ls  iiège  de  Lormetf  notice  par  P.  Mbunier,  panie  dans  Vlndépen" 
dmnoê  àê  CIcNnacy,  il  eepteoibre  4608  el  osméro»  «aiTftnti. 


La  commune  de  Connnagny,  comme  nous  Tavons 
vu  par  rénumération  de  ses  fiefs,  avait  une  réelle 
importance.  D'après  un  tableau,  dressé  par  les  soins 
du  directoire  du  district  de  Moulins-la-République, 
le  24  pluviôse  an  II,  pour  la  répartition,  par  les  soins 
de  la  Société  populaire  de  ce  cheMieu  de  district,  des 
grains  du  district,  on  voit  que  la  commune  de  Com- 
magny  comptait  892  habitants  (1)  ;  Moulins  n'en 
comptait  que  1.029. 

Mais  Feuché,  alors  commissaire  de  la  Convention, 
en  mission  dans  la  Nièvre^  qui  cumulait  et  exerçait 
tous  les  pouvoirs,  aimait  à  simplifier  les  rouages 
administratif  ;  aussi ,  conformément  aux  vues  de 
Fouché,  le  conventionnel  Lefyot,  qui  fut  après  lui 
envoyé  dans  le  département,  procéda  à  la  remise  des 
communes  de  Saint-Jeangout  et  Poil  à  la  commune 
de  La  Roche,  de  Luzy-forain  à  Luzy-ville,  de  Fléty 
à  Tazilly,  de  Lanty  à  Avrée,  de  Commagny  et  Ser- 
mages  à  Moulins-la-République,  d^Honoré-Ia-Monta- 
gne  à  Préporché^  d'Anizy  à  Limanton,  de  Mingot  à 
Ch&tillon,  de  Sauzay  à  Isenay. 

C'est  par  arrêté  de  Lefyot,  du  27  floréal  an  II,  que  la 
commune  de  Commagny  fut  ainsi  réunie  à  celle  de 
Moulins.  Elle  comprenait  la  banlieue,  Labrosse,  la  rue 
de  James  en  partie,  la  rue  Chaude,  la  ru«  Coulon  dite 
aussi  du  Groseillier  (dans  Moulins  môme),  enfin  toutes 
les  parties  au-delà  des  fortifications  et  des  rivières  du 
Garât  et  du  Guignon,  ainsi  que  l'indiquent  les  actes  de 
Tétat  civil  de  Commagny. 

Les  habitants  ont  souvent  protesté  pour  obtenir  leur 
distraction  d'avec  Moulins  (les  16  juin  1816,  24  no- 
vembre 1824,  13  octobre  1839),  mais  toujours  sans 
succès. 

(1)  Mais  son  contingent  dans  le  bataillon  des  gardes  nationaaz  ne  fbt 
qae  de  5  hdizxmeB,  tandis  4tie  llooli&fl  ^  Ibim^r  l47. 


^442  ^ 

Aujourd'hui,  le  service  religieux  a  lieu  rarement 
dans  Téglise  de  Commagny.  Cependant  le  jour  de 
Saint-Laurent,  dont  la  fôte  donnait  lieu  autrefois  à  un 
grand  concours  de  fidèles,  M.  le  doyen  de  Moulins 
y  célèbre  la  messe. 

Les  enterrements  oât  lieu  encore  dans  le  cimetière 
de  Commagny. 

Les  processions  traditionnelles  y  sont  encore  faites. 

Mais  les  ruines  s'accumulent  chaque  jour.  Le  19  juin 
1898,  un  orage  a  causé  de  grands  dég&ts  au  olocher  et 
à  l'intérieur  de  l'église. 

C'est  la  fabrique  de  Moulins  qui  est  aujourd'hui 
propriétaire,  puisque  la  paroisse  de  Commagny,  lors 
du  rétablissement  du  culte,  a  été  annexée  à  celle  de 
Moulins.  (Décrets  du  30  mai  1806,  17  mars  1809.  — 
Délibération  du  conseil  de  fabrique  de  Moulins  du 
1*'  août  1879,  sur  la  demande  du  conseil  municipal  et 
de  M.  le  Préfet). 

Commagny  ne  fut  pas  moins  exposé  aux  vexations 
révolutionnaires  que  Moulins.  Il  reçut  la  visite  de  la 
légion  révolutionnaire  commandée  par  les  agents  de 
Fouché,  puis  celle  de  Roure,  des  frères  Péchereau,  de 
Pointe  libre,  agents  de  Lefyot  (1).  La  légion  fut  logée, 
nourrie  chez  les  habitants  dont  les  caves  furent  visitées 
avec  soin.  Un  des  Péchereau  se  rendit  à  l'église  au 
moment  de  Toffice  divin.  Après  avoir  invectivé  le  curé 
Ravary,  en  chaire,  à  ce  moment,  il  excita  sa  troupe 
à  se  livrer  au  pillage,  à  l'incendie  et  à  la  destruc- 
tion des  statues  (2). 

Le  culte  fut  supprimé  et,  le  16  floréal  an  III,  la  ci- 
devant  cure  fut  louée  à  Besson  moyennant  515  livres, 

(1)  La  Nièvre  pendant  la  Convention^  par  Paal  Meunier,  t  n,  pages  53 
et  soivantes. 
(3)  Délibérations  da  conseil  général  de  la  commune  de  Movlins. 


-443  - 

puis  vendue,  le  12  thermidor  an  IV,  à  J.-B.  Robert, 
préposé  à  la  recette  des  contributions,  moyennant 
2.498  livres  40. 

James,  sa  chapelle,  les  bâtiments  et  les  chaumes 
(91  toises)  en  dépendant  furent  vendus  le  2  floréal  an  II, 
à  Mouron  pour  486  livres  (1). 

La  moyenne  des  naissances,  en  1600,  est  de  38  ; 
mariages,  10  ;  décès,  24. 

En  1700,  naissances,  35  ;  mariages,  8  ;  décès,  44. 

En  1709,  il  y  eut  191  décès  sur  32  naissances; 
année  de  disette,  gelée,  sans  précédent. 

Les  registres  de  l'état  civil  sont  à  Moulins.  La 
remise  en  fut  faite  par  Danthault,  officier  municipal,  le 
18  novembre  1792.  Ils  furent  arrêtés  Tan  I  de  la 
République,  par  Guillaume  Pougault,  propriétaire  à 
James,  paroisse  de  Commagny,  officier  public  de  la 
paroisse. 

Sur  ces  registres,  on  relève  des  noms  de  grandes 
familles  disparues  du  pays,  notamment  : 

De  Jacquinet,  du  Crest,  des  Prés  de  Roche,  Davout, 
de  Monestay,  de  Chaugy. 

Comme  on  le  voit,  on  a  enlevé  successivement  à 
Commagny  toute  personnalité  soit  comme  paroisse, 
soit  comme  commune  ;  il  ne  lui  reste  que  son  joli  site, 
dans  ime  sorte  d'abandon  mélancolique  des  bâtiments, 
et  son  vignoble  (2).  On  lui  a  même  supprimé  sa  fête 
patronale  qui  se  fait  au  Pont-Cottions,  plus  près  de 
Moulins,  où  l'activité  commerciale  et  les  auberges  se 
sont  transportées. 

Les  fêtes  ou  apports  sont  aujourd'hui  moins  nom- 
Ci)  On  a  découvert  dans  la  traversée  de  la  roate  actaelle  quantité  d'os- 
sements provenant  de  son  cimetière. 

(2)  Le  Monran  n'a  pas  de  vignes.  Restif  de  la  Bretonne,  parlant  des  Mor- 
vandeaux qui  descendent  en  Bourgogne  pour  les  vendanges,  donne  pour 
cause  que  «  le  pays  est  trop  froid  •n 


breiix  t^u'au  temp^  passé.  Autreteis,  cliàqué  village 
avait  sa  fôte  qui'  attirait  les  jeunes  gens  et  souvent 
dégénérait  en  batailles.  Des  rivalités  de  village  se 
perpétuaient.  Les  chroniques  ont  gardé  la  trace  de  ces 
sortes  de  démêlés.  Ainsi,  en  1402/ Une  joyeuse  troupe 
d'hommes  et  de  femmes  étaient  allés,  le  jour  de  la 

•Saint-Pierre,  s'ébattre  à  Marry.  Deux  jeunes  gens, 
Grarnier  et  Favier,  s'étant  disputés^  en  vinrent  aux 
mains.  Garnier  fut  atteint  d'une  pierre  qui  Tétendit 
ioiort.  Favier,  condàmné^  par  défaut  au  bannissem'ent> 
ne  fut  gr&cié  que  sur  lés  instances  de  ses  amis  (1). 

M.  Bogros,  dans  son  livre  A  travers  le  Morvan, 
parle  de  la  facilité  des  anciens  Morvan^leaux  à  faire 

'  dégénérer  les  fôtes  en  rixes  meurtrières. 


III 

Note  arehéologlque. 

((  11  n'est  pas  une  cathédrale,  un  monastère,  une 
chapelle  de  village  qui^  en  se  renouvelant,  n'apporte  sa 
noté  dans  le  concert  universel,  dit  M.  BuUiot  ».  Saint- 
Martin*  apporta  sa  pierre'  &  l'œuvre  de  la  reconstruc- 
tion universelle  qui  suivit  l'àn  mil. 
'  Cômmagny  devait  rester  comme  im  témoin  des  deux 
systèmes  d  architecture  qui  se  partagèrent  alors 
rexpression  de  la  pensée  catholique  dans  le  pays  éduen  : 
lé  style  latin  et  le  style  byzantin  qui  se  combinèrent 
dans  l'architecture  du  diocèse  d'Autun  et  qui  furent 
'exclusivement  adoptés  dans  les' établisiséments  reli- 
gieux de  Saint-Martin.  Cela  s'explique  par  l'existence 
à  Autun  de  monuments  romains  avec  empreinte 
grecque,  par  la  litur^e  gréco-latine,  les  relations  du 

(1)  BuMm  dt  U  Sodélé  myenulik  tôt.  Tût  ai  la'ool.;  ^e  ISS. 


^445  - 

pi^ys  avec  rOrient  et  avec  l'Espagne  &  cause  dç  firu- 
n^ilde. 

Mo'  Crosnier  fait  remarquer  quje  rarçhitç^tu^e  de, 
plusieurs  églises  nivernaises  semble  inspirée  de 
celle  de  l'église  de  Commagny,  nous  citerons  :  Saint- 
Honoré,  Montigny-sur-Canne,  Cercy-la-Tour. 

L'/église  de  Comniagny  a  été  décrite  socguçD^jrement 
par  M.  Tabbé  Baudiau,  ;.  M,  dQ  Soultrait  en  a  Jfait  une  ,, 
description  complète. 

Il  y  a  peu  de  choses  à  ajouter  à  cettç  bonnje^  descrip- 
tion. Il  faut  mentionner  cependant^  dan^  la.  dQi};!^ièm§... 
chapelle  de  gauche,  le  banc  seigneurial,  formé  de 
colonnettes  de  bois  tournées  et  réunies,  par. deç  tra- 
verses :  ensemble  massif  mais  original.  Suar  le  grand 
autel,  on  voit  un  écusson  rond  portant  les  armoiries 
suivantes  :  <(  d'azur  à  quatre  fers  de  lance  d'or,  sommé 
d'une  couronne  de  marquis  entre  une  crosse  abbatiale 
et  une  mitre  ».  Ce  sotnt  sans  doute  les  armes  d'un  des 
abbés  de  Saint-Martin  d'Autun. 

Dans  le  dallage  de  l'église,  en  remarque  plu- 
sieurs pierres  tombales  entières  ou  en  fragments  : 
Outre  celle  d'Henri  Souchon,  curé,  publiée  par 
M.  de  Soultrait,  celle  d'Hugues,  seigneur  de  Monestay, 
et  celle  de  Marie,  femme  de  Pierre  .Panthault,  on 
y  remarque,  dans  le  milieu  du  chœur^  une  pierre 
incomplète,  portant  gravée  au  trait  l'effigie  d'un 
moine  ;  de  l'épitaphe,  on  ne  distingue  plus  que  les 
lettres  suivantes  : 


•  •  • 


PRIOR  DE  COMMAGNY  QUI  TRESPASSA  EN  LAN 
DE  GRACE  MIL  GGGXXVII  LE  JOUR  DE  LA  SAINT 
MARTIN  DESTE. 

Il  esjt  f&cheux  que  le  |iom  de  ce  prieur,  déc^édé  le 
4  juillet  13S7>  ait  disparu.  C'est  probablement  Jean  de 
Marry, 


Dans  la  chapelle  de  droite^  deux  fragments  de 
tombes  du  xvp  siècle.  Dans  Tune,  il  manque  le  haut  et 
le  bas.  On  lit  sur  les  côtés  : 

...  HUNC  ;  SINISTRIS  ;  QI  •  I 

MORTE  :  MIGRA  VIT  \  VIT  A  II 


Cette  inscription,  qu'il  aurait  été  si  intéressant 
d'avoir  entière,  semble  annoncer  que  le  défunt  qu'elle 
recouvrait  était  mort  de  mort  violente. 

De  l'autre  pierre,  peut-être  du  xiv«,  il  ne  reste  plus 
que  la  partie  supérieure.  On  y  lit  : 


+  ISTA  i  SUE  :  PETRA  :  PET*  :  EST  :  QV 

È  :  XPS  :  AD  :  ETERA  ;  

Ista  sub  petra  Petrus  est(^)  qu em  Christus  ad 

etera. 

Sur  la  cloche,  autrefois  à  James,  qui  reste  &  Com- 
magny,  on  lit  : 

Parrain  —  Marraine. 

S^  et  dame  darde  de  Gourtenay, 

baronne  de  Boys,  la  Montagne,  Limanton, 

Messire  Jehan  Simonnet  et  de  Bard, 

fabriciens  1679. 

Messire  Povthvs  de  Sibeyran,  chevalier  seigneur. 

Sancta  Maria,  ora  pro  nobis. 

Près  de  la  balustrade,  en  dehors,  on  peut  lire  sur 
une  pierre  étroite  : 

Guillier,  de  Moulins-Engilbert,  1780  (2). 

(1)  Le  même  jea  de  mots  se  trouve  sur  une  pierre  tumulaire,  également 
du  zvi*  s.,  à  la  cathédrale  d'Auxerre. 

(2)  I^  registres  des  actes  de  l'état  civil  font  mention  des  inhumations  : 
1*  dans  l'église  des  Pères^  paroisse  de  Ck>mmagny,  de  Charles  du  Glerroy, 
17  mai  1668;  2*  de  Magdeleine  du  Crest,  femme  de  J.-B.  du  Qeroy^ 
3  avril  1700  ;  8*  de  ce  dernier^  seigneur  de  Villars,  Mary,  Niault,  Este- 
vault  et  La  Ghassagne,  3  mars  1703. 


Que  sont  devenues  les  cloches  de  Commagûy  ?  Le 
24  germinal  an  II,  le  directoire  du  district  prenait  une 
délibération,  a  Considérant  qu'au  moment  où  les  tyrans 
ou  leurs  satellites  sont  occupés  à  troubler  notre  terri- 
toire par  leur  présence^  il  est  de  la  sollicitude  de  l'ad- 
ministration de  prendre  toutes  les  mesures  qui  sont 
en  son  pouvoir  pour  parvenir  à  les  expulser  du  sol  de 
la  liberté...  »  le  directoire  décidait  que  les  cloches  des 
églises  et  chapelles,  «  maintenant  temples  de  la  philo- 
sophie et  de  la  raison  »^  seraient  conduites  à  Nevers 
«  pour  y  être  converties  en  canons  » . 

Les  cloches  furent  enlevées  le  27  floréal  suivant. 
D'après  une  note  qui  se  trouve  sur  un  livre  de  plain- 
chant  venant  d'Ougny,  le  clocher  de  Moulins  possé- 
derait une  des  cloches  de  Commagny  (1732)  (1). 

En  1807,  des  discussions  eurent  lieu  au  sujet  d'une 
des  cloches  non  envoyée  aux  arsenaux.  Un  arrêté  du 
sous-préfet  maintint  la  cloche  en  la  possession  de  la 
fabrique  de  Moulins.  L'administration  des  domaines 
ne  put  la  vendre,  mais,  malgré  des  réclamations,  elle 
ne  fut  pas  restituée  à  Commagny  (2).  La  seule  cloche 
qui  subsiste  à  Commagny  provient  de  la  chapelle  de 
James. 

Le  prieuré  fut  vendu  comme  bien  national  à  Jac- 
ques Massin,  fermier  à  Marry,  et  revendu  par  lui  à 
Hugues  Besson,  propriétaire  à  Commagny,  moyennant 
la  somme  de  six  mille  francs  (3).  Les  prés  et  terres 
en  dépendant  et  que  possédait  Potrelot  de  Grillon, 
émigré,  furent  séquestrés. 


(i)  Cette  note  dit  :  «  A  toute  la  paroisse  de  se  présenter  pour  aToir  la 
cloche  de  2.180  livres  qui  est  à  Moulins'-Engilbert  ». 

(S)  Délibérations  du  conseil  municipal  de  Moulins  des  20  août  et  4  sep* 
tembre  1807. 

(3)  Acte  reçu  Dubois,  not.»  le  33  mai  1793. 


-448- 

Telleestla  notice  que. nous  consacrons. à  Cômma- 

gny. 
A  la   suite  de  la  tempête  du  19  juin  1898,  les 

dég&ts  intérieurs  furent  réparés  au  moyen  d'une  sous- 
cription, ceux  extérieurs  Tont  été  aux  frais  de  la, 
fabrique  de  Moulins. 

Il  est  bon,  au  point  de  vue  de  Tart,  que  cet  édifice 
soit  respecté.  Commi^ny  conservera  son,  air  de  gran- 
deur qui  s 'harmonise  si  bien  avec  le  site^  comme 
l'expression  d'une  belle  pensée  inachevée.  Tout  le 
monde  pensera  avec  nous  qi^e  ce  monastère  avait  été 
placé  là  pour  avoir  ime  histoire  pleine  d'enseignements 
plus  élevés  que  celle  que  nous  venons  de  raconter. 
En  raison  môme  de  l'idée  qui  a  présidé  à  sa  création, 
il  méritait  d'être:  respecté. 

Rappelons  qu'aussitôt  après  l'achèvement  des  répa- 
tiens  nécessitées  par  l'ouragan  de  1898,  M.  Imbert, 
curé-doyen  de  Moulins,  s  est  empressé  d'y  célébrer 
une  messe  solennelle,  assisté  d'un  missionnaire. 

.  L'assistance  était  nombreuse  et  recueillie  en  écou- 
tant les  paroles  éloquentes  de, ces  zélés  défenseurs  de 
la  foi  ;  heureuse  enfin  de  se  retrouver  en  ce  lieu  pour 
prier  et  remercier  les  bienfaiteurs  toujours  disposés  à 
conçoui-ir  aux  boimes  œuvres  et  à  seconder  un  géné- 
reux élan  pour  la  restauration  plus  complète  qui 
s'impose  d'un  vieil  édifice  digne  d'être  conservé  au 
culte,  au  respect  et  à  l'admiration  des  générations  (1). 

Victor  Moreau 

(1)  A  l'occasion  de  la  nomination  qai  eut  lieu,  il  y  a  quelques  années, 
du  général  Thibaudin,  comme  ministre  de  la  guerre,  le  nom  de  Gomma- 
gny  fàt  lu  dans  tous  les  journaux,  M.  le  général  Thibaudin  se  souvenant 
qu'il  était  originaire  du  pays  de  Moulins  et  ne  pouvant  servir  sous  son 
vrai  nom,  avait  pris  un  instant  pendant  la  guenre  de  1870  le  nom  de 
Commagny. 


LES  BAINS 


DE  L4 


VILLA  GALLO-ROMAINE 


DE  CHAMPVERT  (Nièvre) 


Des  fouilles  intéressantes,  entreprises  sous  les  aus- 
pices de  la  Société  nivernaise,  furent  exécutées  de 
1896  à  1901  sur  un  coteau  qui  avoisine,  à  l'ouest,  le 
bourg  de  Champvert. 

Au  cours  de  ces  travaux,  on  découvrit  de  nombreuses 
substructions,  restes  évidents  d'une  importante  villa 
gallo-romaine  qui,  à  en  juger  par  les  derniers  son- 
dages exécutés,  recouvrait  une  étendue  d'environ  deux 
hectares. 

Mais^  faute  de  fonds,  l'exploration  du  sol  en  cet 
endroit  est  restée  inachevée  ;  de  plus  l'incertitude  et 
l'intermittence  des  allocations  consacrées  à  ces  fouilles 
n'ayant  point  permis  d'arrêter  à  l'avance  un  plan, 
chacime  de  ces  subventions  fut  employée  sur  les 
points  qui  paraissaient  fournir  les  résultats  les  plus 
certains. 

Un  travail  méthodique  et  exécuté  de  proche  eu 
proche  eût  été  certainement  préférable  ;  néanmoins,  on 

T.  n,  3*  série.  90 


—  450  — 

ne  pouvait  laisser  disparaître,  sans  les  signaler,  des 
vestiges  aussi  intéressants  pour  Thistoire  de  la  période 
gallo-romaine  en  Nivernais. 

Dans  un  précédent  rapport,  on  a  mentionné  les 
premières  recherches  ;  le  présent  compte  rendu  concer- 
nera spécialement  les  bains  annexés  &  la  villa  et  un 
troisième  travail  traitera  du  reste  des  fouilles  déjà 
faites  et  de  celles  qui  pourront  suivre. 

Puissent  cette  répétition  des  mêmes  découvertes  et 
cette  nomenclature  d'objets  semblables,  recueillis 
dans  des  constructions  souvent  uniformes,  n'être  point 
fastidieuses  I 

Elles  nous  ont  d'ailleurs  paru  indispensables.  En 
effet,  sauf  les  bains  conservés  en  majeure  partie  par  les 
soins  de  la  Société  nivernaise,  les  ruines  exhumées  à 
Champvert  ont  été  en  grande  partie  démolies,  et  ce  qui 
a  été  épargné  a  dû  être  enseveli  sous  le  remblai  afin 
de  rendre  aux  propriétaires  un  sol  cultivable. 

Bientôt  donc  ces  vestiges  ne  laisseront  d'autres 
traces  que  les  publications  et  les  plans  qu'ils  auront 
inspirés  (1)  ;  d'où  la  nécessité  de  noter  tous  les  détails 
qui  peuvent  permettre  de  reconstituer  la  physionomie 
et  la  destination  de  chaque  pièce,  et  de  faire,  en  quel- 
que sorte,  revivre  la  station  dans  le  présent. 

Chargé  de  la  direction  de  ces  fouilles,  si  intéres- 
santes dans  leur  ensemble,  j'ai  le  devoir  de  remercier 
non  seulement  la  Société  nivernaise,  à  qui  revient 
l'honneur  de  ces  recherches,  mais  encore  le  Ministère 
de  l'Instruction  publique,  le  Comité  des  travaux  histo- 
riques, le  Conseil  général  de  la  Nièvre,  la  Municipalité 
de  Champvert,  les  souscripteurs  (connus  ou  anonymes). 


(1)  Rapport  fait  en  1898,  lors  du  Congrès  de  Bourges,  i  la  Société 
française  d*archéologie  et  en  1900  an  Ck)ngris  des  Sociétés  savantes  tenu 
à  la  Sorbonne. 


—  451  — 

certains  visiteurs  généreux  ;  en  un  mot|  tou»  ceux  qui 
ont  contribué  au  succès  des  fouilles  entreprises. 

G.  G. 


Le  résiiltat  des  premières  fouilles  exécutées  à 
Champvert  fut  inséré  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
nivernaise  avec  de  judicieuses  remarques  de  M.  de 
Saint-Venant  (1).  Cet  érudit  confrère  ajoutait  alors 
que  les  derniers  sondages  faisaient  pressentir  de  nou- 
velles découvertes  ;  de  mon  côté,  j'espérais  qu'en  pour- 
suivant les  recherches,  on  rencontrerait  des  bains. 

Nos  prévisions  devaient  bientôt  se  réaliser,  car  en 
1898  on  exhumait  au  bas  de  la  colline,  et  en  bon 
état  de  conservation,  les  curieux  vestiges  d'anciens 
thermes  romains  (2).  En  les  comparant  aux  établis- 
sements similaires ,  on  put  déterminer,  à  peu  près 
sûrement,  l'usage  de  plusieurs  pièces  composant  ces 
bains;  mais  l'attribution  des  autres  a  été  faite  de 
manière  absolument  hypothétique  et  sans  prétention, 
certains  détails  étant  restés  jusqu'ici  obscurs  pour 
ceux  de  mes  savants  confrères  de  la  Société  niver- 
naise qui,  comme  moi,  ont  suivi  attentivement  les 
fouilles  (3). 

Voici  la  description  de  ces  ruines ,  telles  qu'elles 
sont  apparues  après  l'enlèvement  des  terres  et  des 
débris  de  toutes  sortes  qui  les  recouvraient  depuis  de 
nombreux  siècles  (4). 

(1)  Tome  XVII,  p.  392  i  424.  —  Le  Bulletin  da  Comité  des  traTattx 
historiques  (année  1897,  p.  313)  contient  an  rapport  sur  ces  fouilles. 

(2)  Voir  le  plan  d'ensemble  annexé  au  présent  rapport. 

(3)  Outre  une  excursion  faite  en  1898,  avec  une  vingtaine  de  membres 
de  cette  Société,  MM.  de  Flamare  et  de  Çaint- Venant  sont  venus  fré- 
quemment visiter  ces  découvertes  et  m'ont  aidé  de  leurs  conseils. 

(4)  En  raison  de  l'intérêt  que  présentaient  les  piscines  et  leurs  dépendances, 
elles  furent  déblayées,  réparées  et  entourées  d'une  ddtore  protectrice. 


—  452  - 

En  entrant  dans  le  champ  fouillé,  on  remarque,  à 
15  mètres  environ  au  nord  de  la  route  de  Decize, 
deux  petites  salles  A  et  B,  symétriquement  dispo- 
sées, mesurant  chacune  3  m.  10  sur  2  m.  30  et 
n'ayant  conservé  aucune  trace  de  pavage.  Leurs  murs, 
rencontrés  à  0  m.  50  au-dessous  du  niveau  actuel  du 
sol,  ont  une  épaisseur  moyenne  de  0  m.  75  (1)  et 
indiquent  une  construction  peu  soignée  ;  aussi  le  mur 
est  de  la  salle  A  fut-il  retrouvé  démoli  en  majeure 
partie  et  ne  mesurant  plus  que  0  m .  35  à  sa  base.  On 
y  voyait  encore  encastrés,  à  inégales  distances,  trois 
tuyaux  en  terre  cuite  t,  mesurant  0  m.  15  de  côté  sur 
0  m.  35  de  long  et  dont  les  orifices  aflOieurent  les  deux 
parois  de  ce  mur  (2)  {Jig.  i  et  2), 

A  signaler  également,  dans  le  mm*  nord  de  la  même 
pièce  A,  uneaire  briquetée/deO  m.  85  de  largeur  ifig^S), 
rappelant,  malgré  la  disparition  de  la  voûte,  l'exis- 
tence en  cet  endroit  d'une  ouverture  de  fourneau 
d'hypocauste  (3). 

Entre  les  deux  petites  salles  décrites  existait  un 
espace  ou  corridor  C  de  2  mètres  de  largeur,  trouvé 
rempli  de  terre  noirâtre  et  de  débris  de  toutes  sortes 
ayant  subi  l'action  du  feu  (4).  Le  pan  de  mur  a  devait 

(1)  Outre  une  saillie  de  0  m.  10  de  largeur  qui  règne  intérieurement 
tout  autour,  on  remarque  aux  angles  de  chacune  de  ces  deux  salles, 
deux  petits  contreforts  c  qui  ne  se  retrouvent  nulle  part  ailleurs  [fig,  i). 

(2)  Ces  tuyaux  sont  à  1  mètre  au-dessous  du  niveau  supérieur  actuel 
des  murs  ;  l'un  occupe  Pangle  sud -est  ;  le  second  est  à  0  m.  60  du 
premier  et  le  troisième,  à  0  m.  70  du  second.  Ont-ils  servi  à  conduire 
la  chaleur  dans  les  salles  voisines  »  ou  furent-ils  utilisés  pour  amener 
l'air  du  dehors  afin  d'activer  le  tirage  du  foyer  placé  en  ^? 

(3)  Les  pierres  du  mur  qui  supportait  ce  foyer  ont  également  subi 
l'action  d'une  forte  chaleur. 

(4)  En  le  déblayant  on  a  retiré  de  ce  couloir  des  moellons  rougis,  des 
mortiers  et  ciments,  des  fragments  de  tuiles  à  rebords  et  de  larges  briques, 
des  marbres  de  nuances  diverses  et  de  nombreux  tessons  de  poterie  de 
formes  et  de  pâtes  très  variées. 


—  453  — 

se  relier  jadis  à  la  faible  amorce  6  pour  former  une 
voûte  et  les  deux  murs  latéraux  du  couloir  se  termi- 
naient au  nord  par  un  cintre  D  fait  de  moellons  bruts 
posés  à  plat  sur  le  terrain  naturel  de  la  colline  (1). 

La  salle  voisine  E,  qui  mesure  8  mètres  sur  6  m.  50, 
avait  un  hypocauste  :  chauffée  ainsi  directement  par 
le  foyer/,  elle  aurait  pu  servir  de  caldariuni.  On  y  a 
retrouvé,  encore  en  place  (et  reposant  sur  les  bourre- 
lets saillants  en  forme  de  grosses  pastilles,  placés  aux 
quatre  angles),  un  certain  nombre  de  briques  {fig,  4),  qui, 
régulièrement  espacées,  servaient  d'appui  à  de  petits 
piliers  {/ig,  5),  constitués  par  des  carreaux  de  0  m.  20 
de  côté  et  entre  lesquels  circulait  la  chaleur  (S). 

Ces  briques  étaient  fixées  dans  ime  couche  de  terre 
à  hourdir  mélangée  de  gros  sable  et  étendue,  comme 
la  base  des  murs,  sur  une  chape  de  béton  rouge  de 
0  m.  06  d'épaisseur,  supportée  par  un  lit  de  grosses 
pierres  sèches,  brutes,  destinées  tout  à  la  fois  à  fournir 
une  assiette  très  stable  et  un  bon  drainage  contre 
l'humidité  (3). 

De  la  pièce  E  la  chaleur  passait  dans  la  salle  F  par 
une  ouverture  ^  de  0  m.  60,  ménagée  dans  le  mur  de 
séparation.  Cette  salle  F  mesure  6  m.  10  sm*  5  m.  60, 
et  pourrait  être  un  tepidarium  ;  elle  a  beaucoup  d'ana^ 
logie  avec  la  précédente  :  béton  semblable  et  au  môme 


(1)  Ce  terrain  arénacé  contraste  étrangement  avec  les  débris  noirs  qui 
le  recouvraient  d'une  couche  supérieure  à  0  m.  75. 

(2)  Les  briques  mesuraient  0  m.  45  de  long,  0  m.  SB  de  large  et  0  m.  02 
d'épaisseur.  Quant  aux  piliers,  on  n'a  pu  en  déterminer  la  hauteur 
exacte,  aucun  d'eux  n'ayant  été  retrouvé  intact  ;  toutefois,  des  amorces  de 
piliers  en  maçonnerie  restées  adhérentes  aux  murs  et  le  niveau  du  béton 
de  la  grande  pièce  voisine  I,  semblent  indiquer  que  le  pavage  des  salles 
E  F  était  à  0  m.  50  au-dessus  de  l'aire  inférieure. 

\3)  En  général  le  béton  des  salles  fouillées  reposait  sur  plusieurs  rangs 
superposés  de  gros  moellons  ;  ce  qui  indique  quel  soin  les  Romaint 
apportaient  dans  leurs  constmctions. 


—  454  — 

niveau,  terre  à  four,  briques  &  bourrelets  et  carreaux 
formant  les  piliers  d'hypocauste  (1). 

A  l'ouest  de  ces  deux  salles  et  en  communication 
avec  la  dernière  décrite,  une  étroite  pièce  F'  de  2  m. 
sur  1  m.,  dont  la  construction  est  peu  soignée  et  la 
destination  inconnue,  délimitait  la  partie  fouillée  de 
ce  côté  (2). 

A  Test  de  la  salle  F  on  remarque  une  pièce  circu- 
laire G,  chauffée  directement  par  le  fourneau  H.  Ce 
dernier  est  solidement  construit,  notamment  à  droite 
où  deux  murs  accolés  sont  soutenus  par  de  solides 
contreforts  (3)  (Jig.  6),  Une  ouverture  h,  de  0  m.  65 
de  large  et  parementée  en  briques,  a  été  percée  dans 
le  mur  sud  (fig  7)  ;  elle  donne  accès,  au  moyen  de  deux 
marches,  également  en  briques,  dans  ce  fourneau  dont 
le  pavage  en  béton  a  été  rencontré  à  1  m.  30  de  pro- 
fondeur (4).  A  0  m.  40  du  niveau  actuel  des  murs, 
existe,  à  droite  comme  à  gauche,  une  saillie  intérieure 
ayant.  Tune  0  m.  15  et  l'autre  0  m.  30  de  largeur  (5)  et 
paraissant  avoir  servi  d'appui  à  la  voûte  du  four- 
neau (6)  {fig.  6). 

(1)  CTest  eatre  ces  piliers  que  circalait  la  chalear  amenée  par  le  foyer 
Toisin  f  dont  Fouverlure  et  les  parois  intérieures  étaient  en  briques,  ainsi 
d'ailleurs  que  toutes  les  parties  susceptibles  de  subir  Faction  du  feu.  En 
outre,  pour  conserver  toute  la  chaleur  concentrée  dans  l'hypocauste,  on 
avait  enduit  la  base  des  murs  d'une  épaisse  couche  de  mortier  rouge 
formé  de  brique  pilée  et  de  chaux.  Les  mêmes  constatations  furent  faites, 
d'ailleurs,  dans  les  salles  chauffées  dont  on  fera  plus  loin  la  description* 

(2)  Une  petite  ouverture  o',  ménagée  au  sud,  donnait  accès  dans  la  vaste 
cour  attenante. 

(3)  Ces  contreforts  sont  deux  murs  distants  de  1  m.  85  et  mesurant, 
Tun  0  m.  60  de  large  et  1  m.  70  de  long  ;  l'autre  0  m.  50  sur  1  m.  75. 

(4)  En  guise  de  briques,  on  a  beaucoup  employé,  dans  la  construction 
de  ce  fourneau,  de  larges  tuiles  dont  on  a  fait  disparaître  les  rebords  sail- 
lants. 

(5)  Le  mur  de  gauche  mesure  0  m.  90  au-dessus  du  béton,  tandis  que 
celui  de  droite  8*élève  à  1  m.  15. 

(6)  Cette  voûte  a  disparu,  mais  son  amorce  est  encore  très  visible  dans 
ki  murs  tst  et  oueii. 


-^  455  — 

Une  petite  communication  i,  voûtée  en  briques  sur 
1  m.  10  de  long  et  mesurant  0  m.  60  de  largeur  à  la 
base  avec  0  m.  85  de  hauteur^  sous  clé  (fig.  8),  avait 
été  ménagée  dans  le  massif  de  maçonnerie  de  Touest, 
pour  conduire  la  chaleur  dans  la  salle  G  contiguô. 

En  déblayant  cette  dernière,  dont  le  diamètre  est  de 
5  m.  50,  on  a  rencontré,  à  1  m.  50  au-dessous  du 
niveau  actuel  des  murs.  Taire  inférieure  qui,  formée 
d'un  solide  béton  rouge&tre,  repose  sur  un  lit  de  gros 
modlons  bruts.  Le  pavage,  surélevé  de  0  m.  70,  a 
complètement  disparu;  et,  dans  le  déblaiement  de 
cette  salle,  on  n'a  rencontré  ni  piliers  d'hy pocauste,  ni 
supports  d'aucune  sorte  ;  rien,  en  un  mot,  qui  puisse 
indiquer  la  nature  de  ce  pavage  et  sur  quoi  il  repo- 
sait* Seul  son  niveau  reste  indiqué  par  une  petite 
rigoley  C/ig.  9  et  iOj,  longue  de  1  m.  20  et  qui,  des- 
tinée jadis  &  Técoulement  de  Feau,  semble  prouver 
que  la  salle  circulaire  G  était  ou  une  piscine  chaude 
ou  une  étuve  humide  (?)  (1). 

La  mur  intérieur  était  enduit^  à  sa  base,  d'un  mor- 
tier roogeâtre  qui  recouvrait,  dans  une  partie  seule- 
ment du  pourtour  de  la  pièce,  plusieurs  rangées  de 
tuyaux  de  chaleur  placés  horizontalement  et  bout  à 
bout  {fig.  12).  Ne  communiquant  pas  directement 
avec  la  voûte  du  foyer  voisin  et  retrouvés  pour  la 
plupart  remplis  de  mortier,  ces  tuyaux  ne  pouvaient, 
dans  leur  état  actuel,  conduire  le  calorique  dans  Tinté- 
rieur  des  murs  (2)  ;  leur  usage  reste  donc  mystérieux, 

(1)  Ce  conduit,  ménagé  dans  la  maçonnerie,  mesure  0  m.  25  de 
largeur  i  chaque  extrémité.  Le  fond,  bétonné,  a  trois  niveaux  différents, 
comme  des  marches,  qui  se  trouvent  respectivement  à  0  m.  25,  0  m.  90 
et  0  m.  9B  du  haut  des  mura  restants.  Une  pierre,  légèrement  concave 
(en  forme  de  gargouille),  se  voit  à  l'extrémité  extérieure  en  j, 

(2)  Même  creux,  le  pouvaient-ils,  étant  donné  que  le  courant  eût  été 
forcément  interrompu  par  un  certain  nombre  de  tuyaux  de  chaleur, 
placés  transversalement  avec  l'orifloe  afOeurant  la  paroi  du  mur  inlérieur 
de  la  piscine. 


—  456  — 

si  on  ne  voit  pas  dans  ce  mortier,  irrégulièrement 
employé,  le  fait  d'un  travail  postérieur. 

D'autres  tuyaux,  semblables  de  forme  et  de  dimen- 
sions>  étaient  jSxés  verticalement  au  même  mur  inté- 
rieur; superposés  en  divers  endroits  et  notamment 
dans  la  partie  nord,  ils  devaient  activer  le  tirage  ou 
servir  au  dégagement  de  la  fumée  (1)  (%.  il  et  12). 

Une  étroite  ouverture  k,  ménagée  dans  le  mur  nord 
de  la  pièce  circulaire  chauffée,  faisait  communiquer 
directement  cette  dernière,  au  moyen  de  deux  mar- 
ches (2),  avec  une  vaste  salle  I,  de  15  m.  sur  10  m.  50, 
qui  dut,  très  vraisemblablement,  constituer  un  atrium. 
Le  pavage  de  cette  salle^  retrouvé  à  0  m.  25  du  niveau 
dWasement  actuel  des  murs,  n'était  point  homogène^ 
puisqu'avec  d'épaisses  dalles  de  marbre  alternaient 
des  parties  en  solide  béton,  bien  uni  et  au  môme 
niveau.  De  larges  plinthes,  également  en  marbre, 
ornaient  toute  la  base  des  murs  (3)  et  les  protégeaient 
d'autant  mieux  qu'elles  étaient  fixées  sur  deux  cou- 
ches de  mortier  rouge  :  l'une  de  0  m.  03  d'épaisseur, 
accolée  au  mur  et  terminée  à  la  base  par  un  bourrelet 
de  0  m.  06  de  largeur  ;  l'autre  de  0  m.  10  d'épaisseur, 
formée  de  3  blocs  superposés  (%.  13). 


(i)  Ces  diverB  tayaux,  horizontaux  et  Terticaux,  oommaniq[aèreiit-ils 
primitivement  entre  eux  ?  On  ne  saorait  Tavancer.  Ce  que  Ton  a  remar» 
que,  c'est  que  les  tuyaux  verticaux,  superposés  généralement  par  trois,  non 
seulement  adhéraient  au  mur  avec  un  solide  mortier,  dans  lequel  est  restée 
leur  empreinte,  mais  ils  étaient,  en  outre,  fixés  par  de  nombreux  cram- 
pons en  forme  de  T,  dont  les  uns  ont  été  retrouvés  intacts  dans  le  déblaie- 
ment, tandis  que  les  autres,  privés  de  leur  tête  (tombée  avec  les  tuyaux), 
ont  laissé  leur  pointe  dans  l'épaisseur  du  mur. 

(2)  Ces  marches  mesurent  0  m.  70  de  long,  0  m.  35  de  large  et  0  m.  20 
d'épaisseur  :  elles  étaient  enduites  d'un  mortier  rouge  revêtu  de  marbre 
blanc  dont  on  a  retrouvé  des  morceaux  encore  en  place. 

(3)  Ces  plinthes  en  marbre  gris^  de  0  m.  02  d'épaisseur,  reposaient 
elles-mêmes  sur  un  dallage  de  même  nature,  établi  tout  autour  de  cette 
vaste  salle. 


—  457  ^ 

Dans  ceux  de  Vest  et  de  Vouest,  on  a  ménagé  deux 
absidioles  /,  m,  de  3  mètres  de  diamètre,  qui  se  font  face 
sans  occuper  le  milieu  de  ces  murs. 

Celle  de  gauche,  encore  dallée  de  marbre,  avait  deux 
ouvertures  dont  le  seuil  est  encore  bien  visible  ;  elle  a 
dû  contenir  un  réservoir  d'eau  (1),  En  effet,  à  l'angle 
gauche  commence  une  rainure  /^,  large  de  0  m.  10  et 
profonde  de  0  m.  05  ;  tracée  dans  le  béton,  elle  oblique 
deux  fois  avant  d'aboutir  au  conduit  o  (2)  (flg.  14), 
qui  communique  avec  le  grand  collecteur  p,  ménagé 
sous  le  pavage  de  la  salle  I. 

Au  centre  de  cette  dernière,  se  voit  une  belle  piscine 
octogonale  mesurant  7  mètres  de  largeur  (soit  34  mètres 
de  pourtour)  et  1  mètre  de  profondeur.  On  y  accédait  au 
nord  et  au  sud  par  deux  escaliers  en  pierre,  formés 
chacun  de  quatre  marches,  jadis  revêtues  de  marbre  (3) 
ainsi  que  le  fond,  les  parois  et  les  bords  de  la  piscine 
qui  portent,  à  leurs  angles,  des  saillies  décoratives  (4). 
Près  de  l'escalier  du  nord  et  au  niveau  du  dallage 
inférieur  commence  le  grand  conduit  p  qui,  contour- 
Ci  >  L*exiâtence  d'une  baignoire  en  cet  endroit  semble  devoir  être 
écartée  en  raison  des  deux  ouvertures  qu*on  y  a  percées.  Il  serait  moins 
téméraire  d'y  placer  une  vasque  avec  fontaine.  L^autre  niche—  auprès  de 
laquelle  n'existe  aucune  trace  de  rigole  —  aurait  pu  alors  abriter  une 
statue. 

(*2j  Ce  conduit  vertical  est  formé  de  trois  tuyaux  de  poterie  rectangu- 
laires, superposés  et  noyés  dans  l'épaisseur  du  pavage  de  la  salle. 

(3)  Ces  marches  ont  1  mètre  de  long,  0  m.  30  de  large  et  0  m.  25  de  hau- 
teur; on  a  retrouvé  en  partie  les  dalles  de  marbre,  soigneusement 
encastrées,  qui  les  recouvraient  jadis. 

(4)  Aux  angles  de  cette  piscine  étaient  des  dalles  de  marbre  paraissant 
avoir  supporté  des  colonnes  de  grès  (autrefois  recouvertes  de  stuc),  ainsi 
qu'en  témoigne  une  base  (avec  fût),  rencontrée  renversée  sur  un  des  coins 
dallés  en  marbre.  —  Ajoutons  que,  de  Tavis  de  plusieurs  géologues  qui  ont 
visité  les  fouilles,  le  marbre  blanc,  veiné  de  jaune,  employé  dans  la  villa 
de  Champvert,  proviendrait  des  environs  d'Arleuf,  en  Morvan,  tandis  que 
le  marbre  gris  aurait  été  extrait  des  importantes  carrières  de  Ghampro- 
bert,  près  Lozy  (Nièvre;. 


—  468  - 

liant  j^usieurs  pièces  des  bains,  emmenait  à  TAron  le 
trop  plein  de  la  piscine  ou  servait  à  la  vider. 

De  cet  atrium  I,  on  avait  accès  dans  la  salle  J  mesu- 
rant 6  m.  50  sur  11  m.  50,  dont  le  béton  est  un  peu 
surélevé  et  qui  dut  jadis  recevoir  une  certaine  décora- 
tion intérieure,  à  en  juger  par  les  peintures  d'un  rouge 
vif  retrouvées  &  la  base  des  murs.  Cette  pièce  a  dû 
être  Vapodyterinm  où  les  baigneurs  se  déshabillaient  ; 
elle  était  en  communication  &  Touest  par  l'ouver- 
ture q  (1),  avec  une  vaste  salle  K,  au  béton  grossier 
dont  Tusage  reste  indéterminé  ;  au  nord,  au  moyen 
d'un  large  escalier  en  grès  (revêtu  jadis  de  stuc)  (2)  ^  avec 
un  long  couloir  L,  la  reliant  aux  dépendances  de  la 
villa  ;  enfin,  &  l'est,  avec  une  petite  salle  M^  soigneu- 
sement bétonnée,  qui  avait  conservé  des  traces  de 
peinture  à  la  base  des  murs  et  eût  pu  servir  d'elaethe- 
sium  ou  salle  des  parfums  (?) 

II  nous  reste  maintenant  à  décrire  les  appartements 
qui  avoisinent  la  cour  de  l'oues